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25/03/2008 | FRANCE | N°178/08

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 25 mars 2008, 178/08


COUR D' APPEL
D' ANGERS
Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
PB / AT

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 01237.

type de la décision déférée à la Cour,
juridiction d' origine,
date de la décision déférée,
numéro d' inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud' hommes de LAVAL, décision attaquée en date du 25 Mai 2007, enregistrée sous le no 06 / 00115

ARRÊT DU 25 Mars 20

08

APPELANTES :

S. A. FUTURA FINANCES
42 avenue Montaigne
75000 PARIS
Société OSECO PARTICIPATION anciennement dénommée ...

COUR D' APPEL
D' ANGERS
Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
PB / AT

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 01237.

type de la décision déférée à la Cour,
juridiction d' origine,
date de la décision déférée,
numéro d' inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud' hommes de LAVAL, décision attaquée en date du 25 Mai 2007, enregistrée sous le no 06 / 00115

ARRÊT DU 25 Mars 2008

APPELANTES :

S. A. FUTURA FINANCES
42 avenue Montaigne
75000 PARIS
Société OSECO PARTICIPATION anciennement dénommée SECO
5 boulevard de la Foire
L- 1528 LUXEMBOURG

représentées par Maître BREGER, substituant Maître Gervais OUTIN, avocat au barreau de LAVAL,

INTIME :

Monsieur Jean- rené Y...
...
...
29550 ST NIC

représenté par Maître Ruth CARDOSO- ERVAN, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

L' affaire a été débattue le 19 Février 2008, en audience publique, devant la cour, composée de :

Monsieur Philippe BOTHOREL, président de chambre
Madame Hélune RAULINE, conseiller,
Monsieur Gérard TRAVERS, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,

ARRÊT :
du 25 Mars 2008 contradictoire et mis à disposition au greffe,

Signé par Monsieur BOTHOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier présent lors du prononcé.

*******

EXPOSÉ DES FAITS. PROCÉDURE. OBJET DU RECOURS.

Le 11 juin 2007, les sociétés " Futura Finances " et " Oseco Participation " (la société Oseco), venant aux droits de la société " Seco ", ont formé appel d' un jugement rendu le 25 mai précédent par le conseil de prud' hommes de Laval, jugement auquel il est au besoin renvoyé pour un plus ample exposé des données du présent litige et dont les auteurs, après avoir notamment estimé, d' abord, que ces deux sociétés " appart (enaient) au groupe ayant pour enseigne Noz, spécialisé dans la commercialisation de produits invendus " et " présent (aient) une identité d' intérêts, d' activités et de direction avec une mise en commun de moyens matériels et humains avec des permutations de personnel ", (de sorte) que (leur ancien salarié), Jean- René Y..., " était, lors de ses missions contractuelles et professionnelles, sous la subordination juridique (de ces) deux sociétés ", et ensuite, et en substance, que le licenciement de Jean- René Y... ne reposait ni sur une faute grave, ni même sur une cause réelle et sérieuse, les a en conséquence solidairement condamnées à verser à Jean- René Y... les sommes détaillées dans le dispositif de ce jugement, notamment à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et licenciement (précisément) sans cause réelle et sérieuse.

Elles entendent en effet obtenir, outre l' annulation de ce jugement, le rejet de toutes les prétentions de Jean- René Y... et sa condamnation à leur verser la somme globale de 4. 000 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.

Jean- René Y..., qui conclut au contraire à la confirmation de la décision déférée, réclame toutefois aux sociétés Futura Finances et Oseco les sommes accessoires détaillées cette fois- ci dans le dispositif de ses écritures d' appel.

MOYENS PROPOSÉS PAR LES PARTIES

Considérant qu' après avoir à nouveau (et notamment) rappelé quel est leur objet social, puis à compter de quelle date, en quelle qualité et dans quelles conditions la société Seco avait initialement engagé Jean- René Y... (cf en particulier sur ce point les pages 1 à 3 de leurs écritures d' appel communes), les sociétés Futura Finances et Oseco sollicitent tout d' abord, comme il l' a déjà été précisé, l' annulation de la décision déférée, et ce par application des articles 14, 16 et 562 du code de procédure civile et 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l' Homme et des libertés fondamentales ;

Qu' elles contestent par ailleurs l' adéquation en l' espèce de la notion de " co- employeur ", telle qu' en ont fait application les premiers juges, et ce pour les motifs exposés cette fois- ci en pages 5 à 7 de leurs écritures d' appel (pour en déduire, au moins implicitement, que la société Futura Finances n' est pas concernée par le présent litige) et font en tout état de cause valoir, en substance, à l' appui de leur recours (cf là encore les pages 7 et suivantes des mêmes écritures) :

- que Jean- René Y... n' apporte pas le moindre commencement de preuve du prétendu harcèlement moral dont il aurait été victime ;

- que les faits dénoncés comme tels par Jean- René Y... (demandes répétitives de comptes- rendus, multiplication de déplacements, revue " à la baisse " de son véhicule de fonction, prétendue " dépossession " d' une partie de ses fonctions, menaces à l' encontre de son assistante, retards dans le paiement de ses salaires des mois de décembre 2004 et janvier 2005....) ne sont, soit pas démontrés, soit pas constitutifs d' une modification du contrat de travail de l' intéressé, soit pas suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail de Jean- René Y... aux torts de l' une ou l' autre d' entre elles ;

- et qu' elles apportent au contraire bien la preuve de la (des) faute (s) grave (s) que la société Seco reprochait à Jean- René Y... dans la lettre de licenciement de celui- ci, à savoir plus précisément, et là encore en substance :

- des " insultes et menaces à l' encontre d' une dame A..., directrice générale " force achat "' de la société Futura Finances (cf cette fois- ci les pages 14 et suivantes de leurs écritures d' appel) ;

- et un refus persistant de se conformer aux directives de son employeur, quel qu' il soit.

Considérant que Jean- René Y..., qui adopte au contraire pour l' essentiel les motifs de la décision déférée, conteste en tout état de cause, point par point, le bien- fondé des actuelles allégations des sociétés Futura Finances et Oseco ;

MOTIFS DE L' ARRÊT.
I. SUR LA DEMANDE D' ANNULATION DE LA DÉCISION DÉFÉRÉE.

Considérant qu' il est admis en droit positif qu' en application de l' article R 516- 4 (et non R 515- 26) du code du travail, et compte tenu du caractère essentiel de la mission de conciliation attribuée par la loi aux conseils de prud' hommes, les parties doivent comparaître en personne, y compris à l' audience de jugement, sauf à se faire représenter en cas de motif légitime ;

Que les juges de première instance bénéficient nécessairement d' un pouvoir souverain pour apprécier l' existence, ou non, d' un tel " motif légitime " ;

Que c' est donc par de justes motifs qu' après avoir notamment souligné que " l' absence d' un représentant légal (des sociétés Futura Finances et Oseco à l' audience était) une habitude lors des différentes procédures prud' homales (opposant celles- ci à autant de leurs salariés)- ce qui a d' ailleurs pu être également constaté par cette cour elle- même à l' occasion des multiples recours dont elle a été saisie par l' une ou l' autre de ces sociétés-, et qu' il " a (vait) été rappelé à plusieurs reprises au conseil de ces sociétés ", non seulement " l' obligation de la présence de l' employeur lors des différentes procédures prud' homales ", mais encore " (et) en cas de besoin ", que " (le même) employeur pouvait aussi se faire représenter par un membre de l' entreprise ", les premiers juges ont en l' espèce considéré les mêmes sociétés comme " absentes ", ou plus précisément non- comparantes, et ce sans violer les dispositions des articles 14 et 16 du code de procédure civile et / ou 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l' Homme et des libertés fondamentales, dès lors que l' attitude de ces sociétés est à l' évidence une attitude " de principe " aux termes de laquelle elles se dispensent systématiquement de comparaître à l' occasion des multiples litiges qui les opposent à leurs anciens salariés ;

Considérant en tout état de cause que l' article 562, alinéa 2, du code de procédure civile rend à lui seul cette discussion sans intérêt ;

II. SUR LA NOTION DE " CO- EMPLOYEUR ".

Considérant que c' est là encore par de justes motifs qu' en dépit du principe, de droit commercial, dit de l' autonomie des personnes morales, les premiers juges ont estimé que Jean- René Y... avait bien été le salarié " commun " des sociétés Futura Finances et Seco, dès lors qu' il est en particulier démontré, non seulement que ces deux sociétés sont (ou étaient) en réalité dirigées par un unique dirigeant commun, à savoir plus précisément un certain Rémy B..., à la tête de multiples " satellites " de la première de ces sociétés (ce qui ne suffit pas il est vrai à caractériser cette notion de " co- employeur ", puisque l' on ignore tout des " rapports capitalistiques " entre ces diverses sociétés), mais encore que Jean- René Y... " reportait " systématiquement à " Seco / Futura Finances " (cf par exemple les pièces 30 à 36 de l' intéressé), qu' il figurait dans l' organigramme " grands comptes " de la société Futura Finances (cf cette fois- ci sa pièce 102), que sa carte professionnelle était établie au nom de la même société Futura Finances (cf sa pièce 96), qu' il recevait en réalité systématiquement ses directives de la société Futura Finances et que c' est, notamment, toujours la société Futura Finances qui décidait de l' attribution à Jean- René Y...- et donc nécessairement aux autres salariés de la société Seco- de tel ou tel véhicule de fonction (cf la pièce 27b de Jean- René Y...), tous faits qui caractérisent un rapport de subordination, alors qu' aux

termes mêmes de l' article 4, alinéa 7, de la (prétendue) " convention de courtage " en principe conclue le 11 décembre 2002 entre les sociétés Futura Finances et Seco, toujours en principe représentées respectivement par un certain Thierry C... " directeur des opérations dûment habilité à cet effet (par qui ?) " et par Rémy B... (gérant), alors qu' il est constant que c' est bien ce Rémy B... qui est en réalité le seul dirigeant de la société Futura Finances et de ses diverses filiales.... mais non signée par qui que ce soit (cf la pièce no1 des appelantes), il avait été (là encore en principe) expressément convenu que " (la seconde de ces sociétés) dispose (rait), dans le respect des dispositions du contrat, de l' indépendance de sa gestion, exclusive de tout lien de subordination ou représentation sous quelque forme que ce soit, cette indépendance s' appliqu (ant) notamment tant au recrutement et à la rémunération du personnel qu' elle juge adaptés à sa gestion comptable et financière...., la responsabilité de la société Futura Finances ne (pouvant) être recherchée à cet égard ", étant enfin observé :

- d' une part que la totalité des courriers électroniques, tels que produits aux débats (cf en particulier les pièces 15 et suivantes de l' intimé), adressés à Jean- René Y... ou expédiés par celui- ci l' étaient au nom de divers salariés (d' Aboville, Querat, Desaunay....) de " futura finances. com " ou par " Jean- René Y... (marzin @ futura- finances. com) ;

- de l' autre- et ne serait- ce que pour l' anecdote- que c' est bien la société Futura Finances, et non la société Seco, qui a finalement payé à Jean- René Y... la somme (nette) de 76. 617, 86 euros en exécution de la décision déférée (cf la pièce no105 de celui- ci) ;

- et enfin que c' est " dans les locaux de la société Futura Finances ", à Loiron, que s' est tenu l' entretien préalable au licenciement de Jean- René Y... (cf la pièce no81a de celui- ci) ;

Que c' est donc pour l' essentiel à tort que les appelantes contestent leur condamnation " solidaire ", telle que prononcée en première instance, sauf à préciser que, faute de possibilité d' application en l' espèce d' un quelconque principe contractuel ou légal, une telle condamnation ne peut être prononcée " qu' in solidum "
III. AU FOND.

Considérant en droit qu' en matière de faute grave, notion d' ailleurs systématiquement utilisée par la société Futura Finances à l' occasion du licenciement de nombreux salariés, comme cette cour a été là encore amenée à le constater dans autant de litiges toujours portés tout aussi systématiquement en appel, la charge de la preuve incombe à l' employeur ;

Qu' en se prévalant d' une telle faute grave dans la lettre de licenciement de l' un de ses salariés, l' employeur concerné s' interdit de ce seul fait de se prévaloir ultérieurement devant la juridiction prud' homale d' une éventuelle " simple " insuffisance professionnelle de ce salarié ;

Que c' est donc, au moins pour partie, à juste titre que les premiers juges ont fait droit en l' espèce à certaines des prétentions de Jean- René Y... en première instance ;

Considérant en effet, tout d' abord, qu' il est établi que c' est dès le mois d' octobre 2005 que l' employeur avait prévu le licenciement de Jean- René Y...- cf la pièce 104a de celui- ci-, à savoir plus précisément un " cahier " tenu par un certain d' Aboville, apparent supérieur hiérarchique de l' époque de l' intimé, d' ailleurs lui aussi entre- temps licencié par la société Futura Finances, cahier aux termes duquel il était déjà prévu " (d' obtenir) l' attestation d' Andrée (Brebant) assistante commerciale de Jean- René Y... ", de " (dénoncer) l' agressivité de (Jean- René Y...) ", de " (dénoncer là encore) le dénigrement (par Jean- René Y...) de la direction et de l' entreprise ", d' obtenir d' autres témoignages " non identifiés " (N et A ? et " Florence " ?)-, de sorte que les sociétés Futura Finances et Oseco ne peuvent utilement soutenir à l' heure actuelle que le maintien de Jean- René Y... au sein de l' un d' elles était impossible, plusieurs mois plus tard et à défaut d' élément nouveau dûment démontré, même pendant la durée limitée du préavis ;

Considérant en second lieu, et en particulier, que le témoignage de Valérie A..., directrice générale " force achats " de la société Futura Finances et qui prétend avoir été " insultée " par Jean- René Y... le 9 mars 2006 avant de " s' effondrer en larmes " à l' occasion de la réunion de direction suivante, n' est pas crédible lorsque l' on prend connaissance (ou constate) par ailleurs, d' une part, de la teneur et du " ton ", particulièrement agressifs, des divers courriers électroniques adressés par ce prétendu témoin à Jean- René Y..., de sorte que ce même témoin ne peut sérieusement s' offusquer de la prétendue " agressivité " (en retour), d' ailleurs non objectivement démontrée, de Jean- René Y..., et, de l' autre, que c' est ce même " témoin " qui avait " incendié " (sic) l' assistante commerciale de Jean- René Y..., au seul motif que celle- ci mettait l' accent à l' époque sur les bons résultats commerciaux de Jean- René Y... (lui intimant par ailleurs l' ordre de " choisir entre Futura Finances ou Jean- René Y..., sinon vous irez tous les deux pointer au chômage ").... avant de demander à cette assistante commerciale d' établir, sous la contrainte d' un certain Querat, divers témoignages successifs " accablant " en principe Jean- René Y..., étant précisé que le premier de ces témoignages était " trop élogieux à l' égard de ce dernier " (cf les actuels témoignages Kor et Brebant) ;

Considérant en troisième lieu qu' outre le fait qu' il est au moins surprenant que, connaissant par expérience ses " méthodes de gestion ", la société Futura Finances (et / ou la société Seco, mais peu importe) ait pu supporter pendant plus de deux ans la prétendue " agressivité " de Jean- René Y..., puisque le premier " avertissement " adressé à cet égard par la seconde de ces sociétés à son ancien salarié remontait au 26 janvier 2004, date d' un courrier aux termes elle informait Jean- René Y... que, " si de tels incidents se renouvelaient, (elle) pourr (ait) être amené (e) à prendre une sanction plus grave ", il est clair que, dès lors notamment que les résultats commerciaux de Jean- René Y... étaient (au moins) très bons- cf notamment, outre les bulletins de salaire de l' appelant, un autre courrier électronique aux termes duquel une certaine Nadine E... " rapportait " en ces termes à Valérie A..., le 14 mars 2005 " Jean- René : très grande disponibilité, professionnel épris d' excellence, très bon acheteur d' un niveau supérieur (à d' autres).... et ce en dépit d' une moindre disponibilité de sa chef de groupe.... ", que ce n' est qu' à partir du moment où Jean- René Y... a refusé à plusieurs reprises de signer divers avenants- ou plus précisément le même avenant- à son contrat de travail, avenants de nature à modifier de manière substantielle, et en tout cas aléatoire, sa rémunération contractuelle initialement promise- cf en particulier la substitution à une " prime variable " dans un premier temps garantie à hauteur de la somme mensuelle de 3. 634 euros, puis calculée, à l' issue d' une période d' essai là encore systématiquement renouvelée, en fonction de paramètres dont on ignore d' ailleurs l' essentiel, de primes " PT 01 " et " PT 02 ", nouveau calcul de primes d' autant moins admissible par Jean- René Y..., d' abord, que les mêmes primes étaient susceptibles de varier, au gré de l' employeur, au détriment du salarié (voir sur ce point les pages 13 et suivantes des écritures d' appel de Jean- René Y..., dont la teneur est intégralement adoptée), et ensuite que le même employeur " se réservait (en outre) la faculté de réduire le montant définitif de (ces nouvelles) prime (s) en cas de non- respect par l' acheteur des obligations inhérentes à sa fonction (mais encore ?) ", nouvelle stipulation contractuelle tellement imprécise qu' elle aurait été de nature à interdire de fait au salarié de contester objectivement le montant de sa rémunération variable, que la société Futura Finances a commencé à " inonder " Jean- René Y... de rappels au sujet de ses comptes- rendus ;

Qu' en effet, ce n' est qu' à partir des mois de juin 2004 (date de la première " présentation " de l' avenant litigieux), puis décembre 2004 (date d' un premier " rappel électronique " à Jean- René Y... d' avoir à signer cet avenant), puis janvier 2005 (date d' un second " rappel " dans le même sens), que la société Futura Finances (ou la encore la société Seco, mais toujours peu importe- cf supra), " irritées " par le refus persistant de Jean- René Y... de signer l' avenant litigieux à son contrat de travail, et ce en dépit de divers rappels " comminatoires " par autant de courriers électroniques (peu important à cet égard que celui- ci n' ait fait que " réceptionné ", à un moment donné, des nouveaux objectifs qui lui étaient fixés, réception qui ne vaut pas à elle seule approbation) ont commencé à lui reprocher sa prétendue " agressivité ", puis la tout aussi prétendue insuffisance de ses compte- rendus, avant :

- de cesser de régler, au moins provisoirement, et le salaire de Jean- René Y... au titre des mois de décembre 2004 et janvier 2005 et les notes de frais dues à l' intéressé depuis le mois de.... mars 2004, avant de ne régler la somme correspondante, soit tout de même celle, globale, de plus de 11. 345 euros, après intervention de Jean- René Y... et de l' Inspection du Travail, que le 7 février 2005 (cf les pièces 11a à 16 de Jean- René Y...) ;

- d' appliquer d' autorité à Jean- René Y... ces primes " PT 01 " et " PT02 " (cf les bulletins de salaire de celui- ci à compter du mois de septembre 2004) ;

- de refuser un quelconque entretien à Jean- René Y... sur la " décomposition et la régularisation (de ses) derniers salaires qui, de fait, relev (aient) de l' application d' un avenant non applicable car unilatéral " (cf les pièces 30a et 36 de Jean- René Y...), au motif notamment que son dirigeant (et / ou un quelconque membre de sa hiérarchie) " n' était pas disponible " ;

- de remplacer l' ancien véhicule de fonction Peugeot 307 dont bénéficiait jusqu' alors Jean- René Y... par un véhicule Peugeot 206, et ce en dépit des préconisations du médecin du travail compétent, peu important dès lors que les autres grands acheteurs de la société Futura Finances ne bénéficient en principe eux aussi que d' un tel véhicule Peugeot 206 (et sans même parler de la " mesquinerie " consistant à attribuer le même véhicule à de tels acheteurs effectuant plusieurs milliers de kilomètres, voire plusieurs dizaines de kilomètres, par an- cf en particulier la pièce aux termes de laquelle la société Seco demandait à son ancien salarié d' être présent, le même jour, dans trois villes différentes, dont Rennes et Paris) ;

- de transférer certains comptes de Jean- René Y... (ou au moins de préparer le transfert de ceux- ci) à d' autres de ses salariés (cf les pièces 41a et suivantes de l' intimé).... ;

Considérant en quatrième lieu que la lecture des multiples compte- rendus litigieux, tels que produits aux débats, ne permet pas de caractériser, par rapport à ceux expédiés à la société Futura Finances par d' autres salariés, une insuffisance notoire qui aurait interdit à la société Futura Finances de les " exploiter " ;

Considérant en tout état de cause que la société Futura Finances n' apporte pas le moindre commencement de preuve, qui lui incombe, de ce que le caractère " succinct " de tels comptes- rendus, dont Jean- René Y... s' est d' ailleurs toujours défendu aux termes de (l' abondante) correspondance échangée entre les parties à compter du début de l' année 2005, lui aurait fait perdre divers clients ou aurait nui à l' efficacité commerciale de son ancien salarié, aucun fait de ce genre n' étant ne serait- ce qu' allégué dans la lettre de licenciement de Jean- René Y... ;

Que l' insuffisance, à la supposer avérée, de tels compte- rendus- ce qui encore une fois n' est même pas le cas en l' espèce-, et non le refus de dresser et d' adresser ceux- ci n' étant, là encore en tout état de cause, constitutive que d' une éventuelle insuffisance professionnelle, et non d' une faute grave, c' est donc à juste titre que les premiers juges en ont déduit que le licenciement de Jean- René Y... ne reposait même pas sur une cause réelle et sérieuse et en ont tiré les conséquences financières nécessaires, eu égard notamment aux règles légales et conventionnelles applicables en l' espèce en matière d' indemnité de préavis et de licenciement et au préjudice justifié subi par Jean- René Y... du fait de ce licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant par contre que, dès lors que les " méthodes de gestion ", certes " musclées ", de la société Futura Finances s' appliquent en réalité indifféremment à tous ses salariés, et notamment à tous ses " grands acheteurs ", l' on doit admettre que les agissements de cette société, aussi condamnables soient- ils et qui préparaient à l' évidence en l' espèce l' éviction finale de Jean- René Y..., ne peuvent s' analyser comme un " harcèlement moral ", au sens de l' article L 122- 49 du code du travail, harcèlement qui suppose en particulier, pour être constitué, qu' un ou plusieurs salariés soient victimes de la part d' un employeur d' agissements répétés et discriminatoires de nature à entraîner les conséquences prévues par ce texte ;

Qu' abstraction faite de moyens de fait qui restent à l' état de simples allégations, la décision déférée sera donc partiellement infirmée, mais dans ces seules limites ;
Considérant enfin que si les frais d' exécution d' une décision de justice sont de plein droit compris dans les dépens, et ce en application de l' article 695 6. du code de procédure civile, il serait inéquitable de laisser à la charge de Jean- René Y... tout ou partie des nouvelles sommes exposées par lui et non comprises dans ces dépens ;

Qu' il lui sera donc alloué à ce titre celle qu' il réclame ;

DÉCISION

PAR CES MOTIFS, et ceux non contraires ayant déterminé les premiers juges, qu' elle adopte,
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirmant partiellement la décision déférée et statuant à nouveau,

Déboute Jean- René Y... de ses demandes d' annulation de son licenciement et de condamnation des sociétés Futura Finances et Oseco à lui verser la somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, au sens du texte précité,

Confirme la même décision en ses autres dispositions, sauf à préciser que les condamnations prononcées en première instance, ne peuvent être qu' in solidum,

Y ajoutant,

Constate au besoin que Jean- René Y... a dû exposer, au titre des frais d' exécution de cette décision, la somme de 2. 997, 34 euros,

Condamne " in solidum " les sociétés Futura Finances et Oseco à verser à Jean- René Y... la somme supplémentaire de 4. 000 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne " in solidum " les sociétés Futura Finances et Oseco aux dépens d' appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLPhilippe BOTHOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 178/08
Date de la décision : 25/03/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Laval, 25 mai 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-03-25;178.08 ?
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