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14/03/2008 | FRANCE | N°21/08

France | France, Cour d'appel d'Angers, Ct0026, 14 mars 2008, 21/08


COUR d'APPEL
d'ANGERS
Chambre Spéciale
des Mineurs
FV / CB
ARRÊT N 21 / 08
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
au NOM du PEUPLE FRANÇAIS

AFFAIRE N : 08 / 00010.
AFFAIRE : X... C / Y..., SAEMO.

Mineur : Dylan Y...

Jugement du Juge des enfants d'ANGERS
du 13 Novembre 2007.
ARRÊT du 14 Mars 2008

APPELANT :

Monsieur Raymond X...
...
...

Comparant, assisté de Maître Samuel HIGOT DE LOGIVIERE, avocat au barreau d'ANGERS.

PARTIE EN CAUSES :

Madame Nathalie Y...
...
...
...

Comparan

te, assistée de Maître Stéphanie GUEDO, avocat au barreau d'ANGERS.
(Aide Juridictionnelle Totale. Décision no 08 / 00658 en date du 29 / 01 / 2008). Dép...

COUR d'APPEL
d'ANGERS
Chambre Spéciale
des Mineurs
FV / CB
ARRÊT N 21 / 08
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
au NOM du PEUPLE FRANÇAIS

AFFAIRE N : 08 / 00010.
AFFAIRE : X... C / Y..., SAEMO.

Mineur : Dylan Y...

Jugement du Juge des enfants d'ANGERS
du 13 Novembre 2007.
ARRÊT du 14 Mars 2008

APPELANT :

Monsieur Raymond X...
...
...

Comparant, assisté de Maître Samuel HIGOT DE LOGIVIERE, avocat au barreau d'ANGERS.

PARTIE EN CAUSES :

Madame Nathalie Y...
...
...
...

Comparante, assistée de Maître Stéphanie GUEDO, avocat au barreau d'ANGERS.
(Aide Juridictionnelle Totale. Décision no 08 / 00658 en date du 29 / 01 / 2008). Dépôt de conclusions visées par le Greffier et le Président.

SERVICE EDUCATIF EN MILIEU OUVERT
9 rue Drouard
49000 ANGERS

Non comparant, ni représenté.

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et lors du délibéré :

Monsieur MARÉCHAL, Président de la Chambre Spéciale des Mineurs et Conseiller chargé de la protection de l'enfance désigné par ordonnance en date du 12 Décembre 2007 de Madame Le Premier Président de la Cour d'Appel,
Mme VERDUN, Conseiller,
M. TURQUET, Conseiller.

MINISTÈRE PUBLIC lors des débats et lors du prononcé : Madame PITEUX

GREFFIER lors des débats et lors du prononcé : C. BLEZ.

DEBATS : en chambre du conseil à l'audience du 01 Février 2008.

La Cour a entendu :

Madame VERDUN, conseiller rapporteur, en son rapport oral,
Madame Y..., Monsieur X... en leurs demandes et explications,
Maîtres HIGOT de LOGIVIERE et GUEDO en leur plaidoirie,
et Madame PITEUX, en ses réquisitions orales,

ARRET : réputé contradictoire, prononcé par Monsieur MARÉCHAL. Il avait été indiqué à l'issue des débats que le prononcé aurait lieu le 15 février 2008. À cette date, le prononcé a été prorogé au 14 Mars 2008.

********

FAITS ET PROCÉDURE

Par jugement en date du 13 novembre 2007, le juge des enfants d'ANGERS a, dans la procédure d'assistance éducative suivie à l'égard du mineur :

- Dylan Y..., né le 9 juillet 2004,

et après une expertise psychiatrique des parents, débouté Raymond X... de sa demande tendant à ce que son fils Dylan lui soit confié, en application de l'article 375-3 du Code civil, subordonné le maintien de l'enfant auprès de sa mère à l'obligation pour celle-ci de suivre des soins psychologiques, et renouvelé la mesure d'assistance éducative en milieu ouvert pour une durée de un an.

Raymond X... a relevé appel de cette décision par déclaration faite, par son avoué, au greffe de cette cour le 26 novembre 2007.

Les parties ont été convoquées par lettres simple et recommandées, pour l'audience du 1er février 2008.

Les appelants, comparants assistés de leurs avocats respectifs, ont été entendus en leurs explications.

Le Ministère Public a présenté ses observations verbales.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Raymond X..., assisté de Maître HIGOT de LOGIVIERE, demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a refusé de lui confier Dylan. Il souligne que la situation de danger de l'enfant transparaîtrait clairement des rapports d'expertise psychiatrique déposés par le Dr C... et qui, révélant des éléments nouveaux depuis que le juge aux affaires familiales s'est prononcé sur la résidence de l'enfant, donnerait compétence au juge des enfants pour confier l'enfant à l'autre parent, dans les termes de l'article 375-3 du Code civil, à tenir ce texte pour applicable en matière de concubinage.

Sur le fond, il indique que la pathologie de Nathalie Y... la conduirait à le harceler en permanence, à l'insulter en présence de l'enfant, sans que le suivi psychologique auquel le juge des enfants l'a contrainte n'ait apaisé le conflit. Il rappelle que l'expert a clairement conclu qu'il présentait toutes les capacités éducatives nécessaires pour assurer l'épanouissement de Dylan, au contraire de la mère, dont la fragilité psychologique insécurise l'enfant, qui se trouve mêlé aux conflits de ses parents. Il sollicite donc que l'enfant lui soit confié, avec maintien de la mesure d'AEMO pour accompagner l'exécution de cette mesure.

Nathalie Y... s'oppose à cette demande, affirmant qu'elle a cessé de harceler et de dévaloriser le père de Dylan, et qu'elle suit désormais une thérapie, conformément à l'injonction du juge des enfants. Son avocat, Maître GUEDO, souligne que le père se serait livré à un véritable harcèlement judiciaire, en saisissant à la fois le juge des enfants et le juge aux affaires familiales à seule fin de régler ses comptes avec la mère, et sans souci du bien-être de son fils.

Le Ministère public conclut à la confirmation du jugement, en ce qu'il a déclaré la requête du père irrecevable, faute d'éléments nouveaux justifiant que l'enfant soit retiré à sa mère depuis que le juge aux affaires familiales a statué.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article 375-3 du Code civil, qui permet au juge des enfants de confier un enfant à l'autre parent si sa protection l'exige, dispose, en son alinéa 2, qu'une telle mesure ne peut être prise, lorsqu'une requête en divorce a été présentée ou un jugement de divorce rendu entre les père et mère, ou lorsqu'une requête en vue de statuer sur la résidence et les droits de visite afférents à un enfant a été présentée ou une décision prise, que si un fait nouveau, de nature à entraîner un danger, s'est révélé postérieurement à la décision statuant sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale.

Cette disposition, destinée à régler les conflits de compétence entre le juge aux affaires familiale et le juge des enfants, n'attribue au second le pouvoir de passer outre les modalités d'exercice de l'autorité parentale réglementées par le premier que si leur application est de nature à entraîner, par suite d'un fait nouveau, un danger pour l'enfant.

C'est sur le fondement de ce texte, qu'une loi du 5 mars 2007 a expressément étendu aux enfants naturels, que le premier juge s'est fondé pour juger qu'il lui était impossible, actuellement, de confier Dylan à son père, dès lors que le rapport d'assistance éducative en milieu ouvert indiquait que la situation n'avait guère évolué, et que le rapport d'expertise psychiatrique des parents de pouvait être considéré comme un « fait nouveau constitutif de danger ».

Il est constant que les dysfonctionnements repérés dans la famille de Dylan résultent d'un conflit parental récurrent, alimenté, depuis l'origine, par la fragilité psychologique de Nathalie Y..., laquelle s'avérant incapable de maîtriser son agressivité et sa rancoeur en présence du père, insécurise profondément l'enfant, témoin de ses débordements. Le juge aux affaires familiales, informé des troubles comportementaux de la mère, a, par un jugement du 2 juillet 2007, débouté Raymond X... de sa demande de transfert de résidence pour des motifs pris, notamment, de ce que l'existence de cette procédure et la révélation de l'homosexualité de Raymond X... étaient de nature à déstabiliser une mère déjà fragile, et qu'il convenait d'attendre les résultats de l'expertise psychiatrique ordonnée par le juge des enfants.

Cette expertise ayant pour objet de rechercher les causes pathologiques du comportement maternel, renferme donc nécessairement des éléments nouveaux qui, s'ils sont « de nature à entraîner un danger » pour Dylan, autorise la juridiction des mineurs à prendre les mesures qu'imposent sa protection.

Or, l'expert psychiatre qui a procédé à l'examen mental de chacun des parents, a indiqué que Nathalie Y... était affectée d'une personnalité pathologique, de type émotionnellement labile, se manifestant par les caractériopathies déjà repérées par le service d'AEMO, et qui l'amènent à réagir sur le mode de l'exaltation passionnelle, de la colère et des variations d'humeur à type de dépression. Il attribue cette réaction à des blessures narcissiques d'échec qui lui font éprouver le besoin, affirmé sans cesse, de vérifier son importance, et la rendent incapable d'établir un contact s'il n'est pas gratifié de l'attention et de l'admiration d'autrui. Dans le cas contraire, elle se réfugie dans des relations persécutrices vis-à-vis de tous ceux qui ne partagent pas son point de vue ou sa manière d'être. Envahie par cette problématique d'estime de soi, elle ne peut trouver un équilibre précaire qu'au travers de protestations plaintives, d'éclats de colère et de l'analyse critique l'amenant aux débordements comportementaux et de langage déplorés par les services éducatifs.

L'expert ajoute, concernant la relation à son fils, que Nathalie Y..., certaine de sa capacité à exercer son rôle de mère puisque l'enfant lui reste confié (rapport page 12), n'a pas le recul nécessaire pour décrisper une situation où Dylan est l'objet de son propre conflit, capté et englobé dans son prolongement narcissique. Il conclut très clairement à la nécessité d'un suivi psychologique, éventuellement complété par un traitement médicamenteux, en soulignant que l'exaltation passionnelle dont souffre la mère altère ses capacités éducatives.

Ces éléments révèlent que le comportement inadapté de Nathalie Y..., invoqué par le service d'AEMO pour demander de placement de Dylan, âgé de seulement 3 ans, plonge ses racines dans une problématique ancienne, imposant un travail thérapeutique réel que seule une mise à distance de l'enfant permettra d'accomplir.

Cette mise à distance n'implique, toutefois, pas le placement dans un milieu neutre de ce petit garçon de trois ans, alors même que l'expert souligne que Raymond X..., qu'il décrit comme un père attentif, chaleureux et désireux d'assurer le confort matériel et les loisirs utiles au plein épanouissement de son fils, représente un référent adulte, solide et pondéré, capable d'apporter à Dylan la quiétude et la sérénité dont il a besoin pour bien grandir.

Il résulte également des rapports d'expertise que Raymond X..., au contraire de Nathalie Y... que sa pathologie isole affectivement, a su chercher, auprès de son ancienne famille d'accueil, une aide matérielle et affective précieuse et qu'il a su anticiper, auprès de son employeur, un aménagement de ses horaires de travail de façon à se rendre disponible pour Dylan. L'expert a, pour conclure, préconisé que l'enfant soit confié à son père, en précisant que la mère pourrait recevoir son enfant dès lors qu'elle aura engagé le suivi psychologique que nécessite son état.

Ces éléments, d'où résulte clairement que la situation de danger à laquelle la pathologie de Nathalie Y... expose Dylan et la capacité du père à assumer pleinement sa prise en charge matérielle et éducative, démontrent le bien fondé de la requête de Raymond X....

La décision du premier juge sera, par conséquent, partiellement infirmée et Dylan confié à son père, à effet immédiat, et ce pour une durée de deux ans.

Eu égard à ce qui précède, les droit de visite et d'hébergement de Madame Y... seront subordonnés à l'engagement et la poursuite du travail thérapeutique.

Il appartiendra à l'intéressée de justifier de la réalité et de l'effectivité du suivi psychologique qui lui est nécessaire, auprès du service restant en charge de la mesure d'accompagnement éducatif et du Juge des Enfants afin de faire fixer ses droits par ce dernier.

PAR CES MOTIFS :

Statuant en chambre du conseil et par arrêt réputé contradictoire,

DÉCLARE l'appel recevable.

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Raymond X... de sa demande tendant à se voir confier Dylan ;

Statuant à nouveau,

CONFIE Dylan à son père, Raymond X..., ce à effet immédiat et pour une durée de 2 ans ;

DIT que le droit d'accueil de Nathalie Y... sera subordonné à l'engagement et la poursuite d'un réel travail thérapeutique ;

CONFIRME le jugement en ses dispositions non contraires au présent arrêt et notamment en ce qu'il a reconduit la mesure d'action éducative en milieu ouvert confiée au SAEMO d'ANGERS ;

Laisse les dépens d'appel à la charge du Trésor Public.

Le Greffier, Le Président,

C. BLEZ. E. MARÉCHAL.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Ct0026
Numéro d'arrêt : 21/08
Date de la décision : 14/03/2008

Références :

ARRET du 17 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 17 mars 2010, 08-21.741, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-03-14;21.08 ?
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