COUR D'APPELD'ANGERS 3ème CHAMBRE YLG/SM ARRET N 580
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AFFAIRE N : 98/00862 AFFAIRE : X... Philippe C/ SA Travaux Publics Pays de Loire TPPL Jugement du C.P.H. SAUMUR du 24 Mars 1998
ARRÊT RENDU LE 03 Octobre 2000
APPELANT : Monsieur Philippe X... xxxxx xxxxxxxxxxxxxxxxxxxx 49700 LES ULMES Convoqué, Représenté par Maître Jean Albert FUHRER, avocat au barreau d'ANGERS, INTIMEE : SA DES TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) Rue Mabileau BP 55 49426 SAUMUR CEDEX Convoquée, Représentée par Maître PEDRON substituant Maître Gérard SULTAN, avocat au barreau d'ANGERS, COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS : Monsieur le Président LE GUILLANTON a tenu seul l'audience, conformément aux articles 786, 910 et 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile. GREFFIER lors des débats et lors du prononcé : Madame Y..., COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Monsieur LE GUILLANTON, Président de Chambre, Monsieur Z... et Monsieur GUILLEMIN, Conseillers, DEBATS : A l'audience publique du 05 Septembre 2000 ARRET : contradictoire Prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 03 Octobre 2000, date indiquée par le Président à l'issue des débats. ******* EXPOSE DU LITIGE
Monsieur X... a été embauché par la SA TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) le 25 mai 1987 en qualité de mécanicien.
Licencié le 10 octobre 1996 pour motif personnel, il a saisi le Conseil de Prud'hommes de SAUMUR afin de voir :
- prononcer l'annulation des avertissements en date des 22 février 1996 et 21 mai 1996,
- déclarer irrecevable la mutation disciplinaire verbale intervenue le 1er octobre 1996,
- dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la SA TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LA LOIRE (TPPL) à lui payer les sommes suivantes :
[* 85.000 Francs au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
*] 8.000 Francs au titre de frais non répétibles,
- ordonner l'exécution provisoire en ce qui concerne les dommages et intérêts,
- condamner la SA TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) aux dépens.
Par jugement du 24 mars 1998, le Conseil de Prud'hommes de SAUMUR a dit que les deux avertissements prononcés à l'encontre de Monsieur X... les 22 février et 21 mai 1996 sont justifiés, dit que le licenciement de Monsieur X... revêt un caractère réel et sérieux, par conséquent, débouté Monsieur X... de toutes ses demandes, débouté la SA TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) de sa demande reconventionnelle et condamné Monsieur X... aux dépens.
Monsieur X... a relevé appel de cette décision.
Monsieur X... sollicite :
- l'infirmation du jugement déféré
- l'annulation des avertissements des 22 février et 21 mai 1996
- l'allocation d'une somme de 10.000 Francs à titre de dommage et intérêts pour préjudice moral en relation avec le mal fondé des avertissements
- la condamnation de la société TPPL au paiement de 85.000 Francs à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ainsi que de 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Il conteste les griefs allégués à l'appui de son licenciement ;
Il prétend que sa mutation du poste d'atelier de pneus à l'équipe d'assainissement des réseaux constitue une modification substantielle
de son contrat de travail, à connotation disciplinaire ;
Il se prévaut de la règle non bis in idem ;
La Société TPPL conclut à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle ; elle sollicite l'octroi d'une somme de 15.000 Francs sur la base de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Elle soutient :
Que les griefs formulés à l'encontre du salarié sont établis ;
Que son changement d'affectation ne constitue nullement une modification essentielle de son contrat, mais rentre dans les pouvoirs de Direction de l'employeur ;
Que les deux avertissements et le licenciement sont parfaitement fondés ;
Pour un plus ample exposé du litige, il est fait référence à la décision attaquée et aux écritures des parties ; MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les avertissements délivrés à Monsieur X... les 22 février 1996 et 21 mai 1996 reposent sur des motifs réels et sérieux ;
Que les faits qui y sont dénoncés (défaut de changement d'un pneumatique usagé- manque de rendement - conduite personnelle laissant à désirer) sont prouvés par les attestations que produit la Société TPPL (en particulier attestation de Monsieur A..., supérieur hiérarchique du salarié qui indique notamment : "j'ai constaté fréquemment des manquements dans les travaux qu'il réalisait (Monsieur X... réalisait) et qui étaient non conformes à mes instructions - attestation de Monsieur B... son successeur, qui fait état de graves problèmes affectant le parc des pneumatiques de l'entreprise) ;
Que les pièces fournies par le salarié ne sont pas de nature à
contrecarrer celles de l'employeur ; que les attestations versées aux débats par Monsieur X... émanent de salariés qui ont quitté l'entreprise en 1991 et 1993 ; que ces attestions sont rédigées en termes généraux et vagues ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu à annulation des deux avertissements litigieux ;
Qu'au demeurant, l'appelant a été entendu avant que ne soient délivrés les avertissements et qu'il ne les a pas contestés avant son licenciement ;
Attendu que l'affectation de Monsieur X... du service de gestion du parc des pneumatiques au service d'assainissement, chargé de la pose de la modification et du changement des canalisations, représente une modification essentielle de son contrat de travail ;
Qu'il s'agissait, en effet, de deux services totalement différents, et non pas d'un changement de fonctions au sein d'un même service ;
Qu'il y a bien eu en l'espèce mutation de caractère disciplinaire ; que les griefs dont fait expressément état la lettre de licenciement ("une insuffisance générale notoire dans les tâches qui vous était confiées concernant la gestion des pneumatiques et plus précisément :
- un rythme de changement très en dessous de la normale
- un suivi des ordres de réparation non respecté
- un rangement très désordonné), dépassent le cadre d'une simple insuffisance professionnelle ; qu'ils se rapportent à des faits fautifs et ont faits l'objet d'avertissements, mesures de caractère disciplinaire ;
Que l'affectation dans le nouveau service d'assainissement, comportant des tâches plus simples et moins valorisantes pour l'intéressé que le service de gestion du parc automobile, avait un réel caractère disciplinaire ; que ceci ressort expressément des
termes de la lettre de licenciement qui indique :
" Afin de palier vos lacunes, nous avons été contraint de vous muter dans l'équipe GOURDON le 1er octobre 1996. On aurait pu penser que vous vous seriez adapté rapidement aux travaux simples qui vous étaient demandés " ;
Attendu que par conséquent, la première série de griefs énumérée dans la lettre de licenciement et imputée à faute au salarié a été sanctionné par la mutation, mesure de caractère disciplinaire dont il a fait l'objet le 1er octobre 1996 ;
Que ces griefs ne se sauraient faire l'objet d'une double sanction, en vertu de la règle non bis in idem ;
Attendu qu'en revanche, il est reproché à Monsieur X... une insuffisance professionnelle dans son second service, qui, postérieure à la première série de griefs, n'a pas été sanctionnée ; Qu'en indiquant "depuis cette date (le 1er octobre 1996) vous ne donnez aucune satisfaction", la lettre de licenciement vise à l'évidence une insuffisance professionnelle dans le nouveau service et les nouvelles fonctions ;
Que la formulation employée par la lettre de licenciement vise un grief matériellement vérifiable ("vous nous donnez aucune satisfaction"... dans les " travaux simples qui vous étaient demandés"...) ;
Attendu que la réalité de ces griefs est établi par l'attestation circonstanciée et régulière en la forme de Monsieur GOURDON C... de service ;
Que cette attestation est ainsi libellée :
"Etant responsable de chantier j'ai signaler à Messieurs D..., J.P ROINET et PEIN J. les absences répétées de Monsieur X... sur mon chantier pour aller 6 fois par jour minimum à sa voiture pour y
faire quoi je me le demande et ensuite le non respect des consignes de sécurité tel qu'un jour Monsieur X... a failli passer sous les chenilles de la pelle de Monsieur BOUCHENOIRE E... donc j'en ai averti la Direction de cette incident. Je certifie que Monsieur X... était incompétent pour le travail manuel demander sur mon chantier" ;
Que contrairement aux assertions de l'appelant, cette attestation décrit des faits précis (interruption répétée de son travail par Monsieur X... - non respect des consignes de sécurité - incompétence pour le travail demandé sur le chantier) ;
Que l'appelant ne saurait utilement arguer d'un manque de formation et de difficultés d'adaptation à son nouveau service, s'agissant de tâches d'exécution et de travaux simples ne requérant pas de préparation particulière ;
Qu'au surplus, Monsieur X... indique avoir parfaitement réussi dans son service précédent qui était plus difficile ;
Attendu qu'il convient de confirmer par adoption de ses motifs non contraires aux présents, le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de Monsieur X... revêtait un caractère réel et sérieux et de débouter ce dernier de toutes ses demandes ;
Attendu que l'appelant, qui succombe, doit supporter les dépens et être débouté de sa réclamation sur la base de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu qu'en revanche, l'équité commande d'allouer à la Société TPPL une somme de 8.000 Francs en compensation de ses frais non répétibles de procédure (3.000 Francs pour ceux de première instance et 5.000 Francs pour ceux d'appel) ; que le jugement attaqué sera réformé dans ses dispositions relatives à la demande reconventionnelle de la Société TPPL ; PAR CES MOTIFS
Réformant le jugement entrepris ;
Condamne Monsieur X... à payer à la SA TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) une somme de 3.000 Francs au titre des frais non répétibles de première instance ;
Confirme le dit jugement pour le surplus ;
Condamne Monsieur X... à payer à la Société TRAVAUX PUBLICS DES PAYS DE LOIRE (TPPL) une somme de 5.000 Francs au titre des frais non répétibles d'appel, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Le condamne aux dépens exposés devant la juridiction d'appel ;
Rejette toute prétention autre ou contraire. LE GREFFIER, LE PRESIDENT,