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11/07/2024 | FRANCE | N°21/00608

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 11 juillet 2024, 21/00608


ARRET



















[G]

[O]





C/



S.A. SOCIETE GENERALE









FLR





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 11 JUILLET 2024





N° RG 21/00608 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H7O2



JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SOISSONS EN DATE DU 03 OCTOBRE 2019





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTS





Monsieur

[R] [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]





Madame [D] [O] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]





Représentés par Me Frédéric MALINGUE substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65







ET :





INTIMEE





S.A. SOCIETE GENERALE, ...

ARRET

[G]

[O]

C/

S.A. SOCIETE GENERALE

FLR

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 11 JUILLET 2024

N° RG 21/00608 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H7O2

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SOISSONS EN DATE DU 03 OCTOBRE 2019

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur [R] [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Madame [D] [O] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentés par Me Frédéric MALINGUE substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65

ET :

INTIMEE

S.A. SOCIETE GENERALE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marc ANTONINI de la SCP ANTONINI ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

DEBATS :

A l'audience publique du 06 Février 2024 devant Mme Françoise LEROY-RICHARD, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 16 Avril 2024.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Françoise LEROY-RICHARD en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Valérie DUBAELE, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 11 juillet 2024 et du prononcé de l'arrêt par sa mise à disposition au greffe

Le 11 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Malika RABHI, Greffier.

DECISION

Suivant acte authentique reçu le 3 juin 2010 la SA Société Générale a consenti à M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] deux prêts ayant pour objet de financer la construction de leur résidence principale comme suit :

-un prêt d'un montant de 40 350 € à taux zéro remboursable en mensualités de 292,70 € sur 12 ans

-un prêt d'un montant de 134 194 € à un taux révisable, remboursable en 318 mensualités dont 18 mensualités de différé d'amortissement de 432,66 €, 10 mensualités de 433,76 €, 116 mensualités de 591,26 € et 174 mensualités de 865,32 €.

Par un avenant du 13 décembre 2011 les parties ont convenu que le prêt à taux zéro serait débloqué de façon fractionnée et que l'amortissement du capital prêté serait différé pendant une période de 24 mois.

A la demande de M et Mme [G], la SA Société Générale a accepté au mois de février 2012, de modifier le second prêt et a proposé la prorogation de la période de différé jusqu'au 5 février 2013.

Par courriers recommandés du 2 janvier 2014 la SA Société Générale a demandé à M. [R] [G] d'une part et Mme [D] [G] d'autre part de payer une somme de 2 212,36 € au titre d'échéances impayées sur le prêt 810034612514 et 24,82 € au titre d'échéances impayées sur le prêt 810034612506 et a rappelé que le non-paiement d'une échéance peut entraîner l'exigibilité des prêts.

Par courrier du 10 février 2014 la SA Société Générale a indiqué à M. et Mme [G] que l'état de leur compte ne leur avait pas permis de régler l'échéance du prêt 810034612506 à hauteur de 12,41 €.

Par courrier du 6 mars 2014 la SA Société Générale a indiqué à M. et Mme [G] que l'état de leur compte ne leur avait pas permis de régler l'échéance du prêt 810034612514 à hauteur de 413,70 €.

Dans ces deux courriers elle mentionnait qu'il était important de ramener le compte en position débitrice.

Par courriers recommandés du 13 mars 2014 SA Société Générale demandait à M et Mme [G] d'effectuer des règlements de 2 517,85 € et de 37,36 € et rappelait qu'un seul impayé peut entraîner l'exigibilité du prêt.

Par courriers recommandés du 25 février 2015 la SA Société Générale s'est prévalue de l'exigibilité anticipée des deux prêts et a demandé le paiement sous huit jours à M et Mme [G] de la somme de 149 100,76 € et de la somme de 31 333,27 € sous peine de recouvrement judiciaire.

Par ordonnance de référé du 8 octobre 2015 le président du tribunal d'instance de Paris (neuvième arrondissement) saisi d'une demande de suspension de l'exigibilité de leurs obligations et de paiement des intérêts échus pendant 24 mois par M. et Mme [G] les a déboutés de leurs demandes et a laissé les dépens à leur charge.

Poursuivis sur la base du titre authentique, par la SA Société Générale, dans le cadre d'une procédure de saisie-vente, M.et Mme [G] ont saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Soissons, aux fins de voir prononcer la nullité du procès-verbal de saisie du 2 juillet 2015, dire et juger que la déchéance du terme n'est pas acquise régulièrement, dire que l'indemnité forfaitaire et les intérêts majorés des prêts outre frais d'huissier doivent rester à la charge de la banque et subsidiairement suspendre les effets de la saisie vente pendant 12 mois.

Par jugement du 30 août 2016 le juge l'exécution a débouté M. et Mme [G] de leur demande, débouté la SA Société Générale de sa demande reconventionnelle et a condamné M. et Mme [G] à payer à la Société Générale la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Par arrêt du 11 juillet 2017 statuant sur l'appel du jugement du juge de l'exécution du 30 août 2016 la cour a confirmé le jugement dont appel sauf sur l'étendue des biens saisis.

Entre temps, par acte d' huissier en date du 26 octobre 2015, M. et Mme [G] ont assigné la SA Société Générale devant le tribunal de grande instance de Soissons pour contester la déchéance du terme et afin qu'il en soit tiré les conséquences. Ils ont fait évoluer leurs prétentions et ont demandé que soit prononcée la nullité de la stipulation de la clause d'intérêt et subsidiairement que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts en raison du caractère erroné du Teg et afin qu'il en soit tiré les conséquences au titre du remboursement des prêts.

Par jugement du 3 octobre 2019 le tribunal de grande instance de Soissons a prononcé la déchéance de droits aux intérêts conventionnels de la SA Société Générale sur le solde du prêt d'un montant de 134 194 € consenti à M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] par acte du 3 juin 2010 à compter de l'avenant du 2 février 2012, dit qu'au titre de ce prêt pour la période postérieure à cet avenant, M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] ne sont redevables que de l'intérêt au taux légal en vigueur le 2 février 2012, dit que l'excédent d'intérêt versé à la SA Société Générale augmenté du taux d'intérêt légal à compter de chaque échéance et arrêté à la date du présent jugement sera imputé sur le capital du prêt restant dû à cette date, débouté M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] du surplus de leurs prétentions, débouté la SA Société Générale de toutes ses prétentions, débouté respectivement chacune des parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire, condamné in solidum M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 29 janvier 2021 M. [R] [G] et Mme [D] [O] épouse [G] ont interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt avant dire droit du 12 septembre 2023 la cour d'appel d'Amiens a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 30 janvier 2024 pour permettre aux parties de conclure sur une fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée portant sur la demande tendant à déclarer irrégulière les déchéances du terme et partant l'exigibilité anticipée des prêts, la demande portant sur le caractère erroné du Teg et a sursis à statuer dans l'attente.

Par conclusions remises par voie électronique le 25 janvier 2024 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, les appelants demandent à la cour de dire M et Mme [G] recevables et bien fondés en leur appel, de débouter la Société Générale de son appel incident, d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il les a déboutés du 'surplus de leurs demandes qu'ils ont émises contre la Société Générale ' et tendant à ce que 'soit prononcée la nullité de la résiliation de la convention formalisée par l'établissement financier en vertu des sommes dues au titre de cet avenant par lettre du 25 février 2015" et à ce que la Société Générale soit condamnée sur une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau ils demandent de :

- prononcer la nullité et en tout état de cause de déclarer irrégulière la déchéance du terme formalisée par courrier du 25 février 2015 par la Société Générale au titre du prêt immobilier 'prêt à l'accession sociale au taux révisable' du 3 juin 2010 et de son avenant du 2 février 2012 et du prêt immobilier 'nouveau prêt à 0%' du 3 juin 2010 et de son avenant du 13 décembre 2011 ;

En tout état de cause :

- déclarer prescrites les deux créances de la Société Générale issues du nouveau prêt à 0% d'un montant de 40 350 € et du prêt à l'accession sociale au taux révisable d'un montant de 134 194 €.

A titre subsidiaire de dire que la SA Société Générale a engagé sa responsabilité contractuelle envers M et Mme [G] en prononçant abusivement la déchéance du terme des prêts :

- condamner en conséquence la Société Générale à payer à M et Mme [G] la somme de 165 964,08 € de dommages et intérêts et ordonner la compensation des créances réciproques ;

- condamner la Société Générale à payer à M.et Mme [G] la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et 4 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel et à supporter les dépens.

Par conclusions remises par voie électronique le 29 janvier 2024 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés la SA Société Générale demande à la cour de :

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts.

-déclarer irrecevables les demandes de M et Mme [G] de voir prononcer la nullité des déchéances du terme et de dommages et intérêts.

A défaut :

- déclarer mal fondés M et Mme [G] en leurs demandes et les en débouter ;

- déclarer M et Mme [G] irrecevables et mal fondés en leur demande tendant à déclarer nulle la stipulation d'intérêts et de déchéance du droit aux intérêts ;

A titre reconventionnel :

- condamner solidairement M et Mme [G] à payer à la Société Générale la somme de 149 100,76 € outre les intérêts de retard sur ladite somme au taux de 6,50 % à compter du 25 février 2015 et jusqu'à complet paiement et la somme de 31 333,27 € outre intérêts au taux de 3,49 % à compter du 25 février 2015 et ce jusqu'à complet paiement ;

En tout état de cause :

- condamner in solidum M et Mme [G] à payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure ciivle et à supporter les dépens.

SUR CE :

Sur la déchéance du terme et partant l'exigibilité anticipée des prêts

M et Mme [G] prétendent à la recevabilité de leur demande tendant à voir déclarer nulles et/ou irrégulières les déchéances du terme dont se prévaut la SA Société Générale pour les poursuivre en paiement au motif que si ce débat a déjà eu lieu aboutissant à un jugement du juge de l'exécution et à un arrêt de la cour d 'appel du 11 juillet 2017, l'autorité de la chose jugée ne peut leur être opposée en raison de la survenance d'un élément nouveau qui n'avait pas été produit à l'occasion des débats antérieurs ayant abouti aux précédentes décisions, constitué de deux pièces n°18 et 27 dans lesquelles se trouve un courrier de Mme [X] invitant M et Mme [G] à ne pas tenir compte des nouveaux courriers recommandés et un courriel de Mme [Y] responsable du service des traitements des recouvrements du 19 septembre 2024 confirmant que Mme [X] avait bien suspendu les prêts litigieux.

Ils considèrent qu'en produisant ces nouvelles pièces la cause du litige se trouve modifiée de sorte que les conditions de l'article 1355 du code civil ne sont pas remplies.

La SA Société Générale conclut à l'irrecevabilité de la demande tendant à déclarer nulle et /ou irrégulière la déchéance du terme à deux titres.

Elle considère d'une part que cette demande est nouvelle en cause d'appel et que d'autre part, elle est frappée par l'autorité de la chose jugée.

Elle fait valoir que dans leurs conclusions de première instance M et Mme [G] ont abandonné cette demande pourtant soutenue dans leur assignation, de sorte qu'ils ne sont plus recevables à la soutenir en cause d'appel.

Concluant sur la fin de non recevoir relevée par la cour tirée de l'autorité de la chose jugée elle fait valoir que si un véritable fait nouveau est invoqué après les décisions ayant tranché excluant dans ce cas la possibilité d'opposer la fin de non recevoir, M et Mme [G] ne se trouvent pas dans cette situation car ils produisent dorénavant des pièces reçues en 2014, qu'ils ont été défaillants à produire lors des débats ayant abouti aux décisions antérieures.

Du jugement dont appel il ressort que si dans leurs dernières écritures du 14 novembre 2017, M et Mme [G] ne présentaient plus une prétention tirée de la nullité et/ou régularité de la déchéance du terme, le premier juge a dans sa motivation 'rejeté le moyen de l'absence de déchéance du terme des deux prêts litigieux, qui a été soulevé à tort par les époux [G] contre la SA Société Générale' et au dispositif, débouté M et Mme [G] du surplus de leurs prétentions.

Le tribunal de grande instance de Soissons ayant statué sur une prétention soutenue dans la saisine ayant fait l'objet d'un débat contradictoire entre les parties, M et Mme [G] sont habiles à déférer cette disposition, qui ne peut être considérée comme nouvelle, devant la cour d'appel.

L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 480 du code de procédure civile dispose que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, celui qui statue sur l'exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Selon l'article 1355 du Code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la cause soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles ont la même qualité.

Il a été jugé que dans une instance en déchéance du terme pour prêt, il appartient au défendeur de présenter dès l'instance devant le tribunal de grande instance l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à justifier le rejet total ou partiel de la demande, ce qui entraîne l'irrecevabilité de la demande de nullité formée devant le tribunal d'instance concernant le même prêt.

Dans le même sens il est admis que le caractère nouveau de l'événement permettant d'écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ne peut résulter de ce que la partie qui l'invoque a négligé d'accomplir une diligence en temps utile.

L'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 11 juillet 2017 statuant sur la prétention tirée de l'irrégularité de la déchéance du terme a décidé que la banque était bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme.

Pour confirmer la décision de première instance, la cour d'appel a mentionné que de l'ensemble des correspondances il était établi que dès le 14 mars 2014, il était clair que la banque n'entendait pas faire droit au moratoire sollicité par les époux [G] ou en tous cas de prolonger celui dont ils bénéficiaient de facto depuis octobre 2013, que leur dossier était désormais entre les mains du service de recouvrement à Cergy Pontoise dont la mise en demeure du 13 mars 2014 constituait le préalable nécessaire à la déchéance du terme, peu important que la banque ait encore patienté quelques mois avant de prononcer cette déchéance et renouvelé ses mises en demeure, dès lors que les conditions requises aux contrats de prêt étaient réunies et le formalisme requis respecté, la banque n'ayant pas renoncé dans cet intervalle de manière non équivoque à la déchéance du terme qu'autorisait la mise en demeure dont il n'est pas contesté qu'elle n'a pas été suivie de paiement.

De cette motivation, répondant à la prétention tirée de l'irrégularité de la déchéance du terme, il est établi que la chose demandée est la même, que la demande est fondée sur la même cause et que la cause se trouve entre les mêmes parties ayant la même qualité, les pièces fournies dorénavant produites sous les n° 18 et 27 datées du 27 mars et 19 septembre 2014 ayant déjà été en possession des époux [G] ne peuvent être considérées comme des éléments nouveaux susceptibles d'écarter la fin de non - recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée.

La demande tendant à déclarer nulle comme irrégulière la déchéance du terme est irrecevable.

En tout état de cause, sur leur demande tendant à déclarer nulle comme irrégulière la déchéance du terme et partant à débouter la SA Société Générale de sa demande en paiement, M et Mme [G] prétendent à l'irrecevabilité de la demande en paiement comme prescrite.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande en paiement étant présentée comme consécutive à l'irrégularité de la déchéance du terme, il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen d'irrecevabilité.

Subsidiairement, M et Mme [G] prétendent à l'allocation de dommages et intérêts correspondant au préjudice qu'ils subissent du fait que la banque a prononcé de façon fautive la déchéance du terme.

Cependant la cour d'appel ayant déjà statué sur le fait que la banque était bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme dans le cadre d'une décision définitive, il convient de rejeter comme irrecevable la demande subsidiaire de M et Mme [G].

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La Société Générale se porte appelante incidente de la disposition du jugement ayant prononcé la déchéance de son droit aux intérêts au motif que l'avenant du 2 février 2012 ne serait pas conforme aux dispositions du code de la consommation.

Elle fait valoir que M et Mme [G] étaient irrecevables en cette demande comme frappée de l'autorité de la chose jugée en ce que dans son arrêt du 11 juillet 2017, la cour d'appel a cantonné la créance dans le cadre d'un débat portant sur la régularité de la stipulation de la clause de Teg.

M et Mme [G] contestent la fin de non-recevoir opposée au motif qu'ils ne se sont pas prévalus de l'irrégularité du Teg.

De l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 11 juillet 2017, il ressort que pour soutenir le caractère abusif du prononcé de la déchéance du terme M et Mme [G] ont prétendu à la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels tant du contrat principal que de l'avenant du 2 février 2012 et aboutissant, selon eux, après application de l'intérêt au taux légal à l'existence d'un trop versé.

La cour a rejeté la demande de substitution d'intérêts en raison de la régularité du Teg se trouvant dans l'offre acceptée le 10 mais 2010 mais n'a pas statué sur celle de l'avenant de 2012.

Si M et Mme [G], contrairement à ce qu'ils soutiennent se sont prévalus de l'irrégularité du Teg aussi bien au titre du prêt que de l'avenant, la cour n'a pas statué sur la demande au titre de l'avenant de 2012, de sorte que la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée doit être rejetée à ce titre.

La SA Société Générale conteste l'existence d'un avenant en date du 2 février 2012 et soutient qu'à supposer qu'il existe, elle nie son défaut de conformité à l'article L.312-14-1 du code de la consommation.

La banque qui considère que le point de départ du délai pour agir en cas de demande de nullité de la clause de stipulation de l'intérêt doit être fixé au jour du prélèvement de la nouvelle mensualité du 21 mars 2012 ne peut sérieusement soutenir qu'aucun avenant n'a été négocié.

La banque fait valoir que M. Mme [G] ne peuvent prétendre à la déchéance du droit aux intérêts au taux contractuel dans la mesure où cette sanction ne constitue pas celle applicable à l'absence de Teg mais la nullité de la clause de stipulation d'intérêts et la substitution de l'intérêt au taux légal au taux conventionnel.

Quoiqu'il en soit elle considère également que M et Mme [G] ne peuvent se prévaloir de la nullité de la stipulation se trouvant dans l'avenant dans la mesure où cette demande est irrecevable comme prescrite pour avoir présenté cette demande le 11 mai 2017 pour la première fois soit au delà du délai de 5 ans de la date du 21 mars 2012 qui correspond à la date à laquelle la nouvelle mensualité a été prélevée.

M et Mme [G], rappelant l'avis de la cour de cassation du 10 juin 2020, exposent que l'omission du Teg dans l'écrit ou l'erreur affectant ce denrier justifient que le prêteur puisse être déchu de son droit aux intérêts au taux contractuel dans la proportion fixée par le juge et qu'ils sont recevables en cette demande.

Ils font valoir que le point de départ du délai pour agir n'est pas celui du premier prélèvement et que le délai n'a jamais commencé à courir dans la mesure où elle n'est pas en mesure de rapporter la preuve de la date à laquelle ils ont eu connaissance des nouvelles modalités de remboursement.

M.et Mme [G] produisent en original un courrier du 2 février 2012 auquel est joint un avenant, par lequel la SA Société Générale les informe que leur demande d'aménagement de prêt a été acceptée et qu'ils disposent d'un délai de 10 jours pour réfléchir, mais également qu'à l'expiration de ce délai il pesait sur eux l'obligation de renvoyer l'exemplaire signé.

S'il est établi que M et Mme [G] n'ont pas renvoyé l'exemplaire de l'avenant dans la mesure où ils produisent l'original, il ressort de ce document que l'avenant vise l'article L.312-14-1 du code de la consommation et que l'aménagement concerne la prorogation de la période de différé de prêt immobilier d'un montant de 134 194 € portant la mensualité à une somme différente.

Dans ces conditions M et Mme [G] disposaient au plus tard au jour du prélèvement de la nouvelle échéance d'un délai de 5 ans pour contester au besoin le nouveau Teg applicable dans la mesure où ils pouvaient effectuer une comparaison entre ce document dont ils ont gardé l'original et le prélèvement réalisé sur leur compte.

Il ressort du jugement dont appel que M et Mme [G] ont demandé dans leur assignation du 26 octobre 2015 la déchéance du droit aux intérêts au taux conventionnel et poursuivi cette demande en demandant dans leurs dernières conclusions la nullité de la clause de stipulation d'intérêts de sorte qu'ils ont assigné dans le délai de cinq ans du premier prélèvement du 21 mars 2012 et qu'ils sont recevables.

Comme ils le soulèvent à juste titre ils peuvent en cas d'omission du taux ou d'erreur sur ce dernier prétendre à la déchéance du droit aux intérêts.

Si l'avenant contient un paragraphe relatif au montant des échéances il ne contient pas comme l'exige l'article L.312-14-1 du code de la consommation dans sa version applicable, un nouvel échéancier d'une part et d'autre part le Teg.

C'est donc à juste titre que le tribunal judiciaire de Soissons faisant le constat de l'irrégularité de l'avenant aux dispositions de l'article L.312-14-1 du code de la consommation, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts à compter du 2 février 2012 et en a tiré les conséquences au dispositif du jugement permettant à la SA Société Générale d'effectuer le calcul du montant de sa créance au besoin.

Sur la demande en paiement de la banque

Le jugement ayant prononcé la déchéance du droit aux intérêts au taux contractuel sur le solde du prêt d'un montant de 134 194 € et la SA Société Générale disposant d'un titre pour les deux prêts authentiques, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation au paiement comme l'a décidé le premier juge.

Sur les demandes accessoires

Chaque partie succombant il est fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront partagés à parts égales entre les parties.

Comme l'a décidé le premier juge il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance. Il sera statué à l'identique en appel.

PAR CES MOTIFS :

Déclare recevable la demande de M.et Mme [G], tendant au prononcé de la nullité de la déchéance du terme irrégulière pour les deux prêts, comme non nouvelle ;

Déclare irrecevables M et Mme [G] en leur demande tendant au prononcé de la nullité de la déchéance du terme irrégulière pour les deux prêts comme frappé de l'autorité de la chose jugée et partant leur demande subsidiaire en indemnisation pour avoir prononcé de manière fautive la déchéance du terme desdits prêts ;

Déclare recevable la demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts au taux contractuel du prêt principal à compter du 2 février 2012  ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M et Mme [G] aux dépens ;

Statuant du chef infirmé et y ajoutant :

Fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront partagé à parts égales entre les parties ;

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/00608
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;21.00608 ?
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