ARRET
N°
[U]
C/
S.A. D'HLM CLESENCE
GH/SGS/DPC/VB
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU QUATRE JUILLET
DEUX MILLE VINGT QUATRE
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/01436 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IW7L
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SOISSONS DU SIX JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [X] [U]
né le 06 Septembre 1962 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Valentine FORRÉ, avocat au barreau d'AMIENS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/000365 du 16/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS)
APPELANT
ET
S.A. D'HLM CLESENCE, société anonyme au capital de 49 360 256 euros, inscrite au RCS de Saint Quentin sous le numéro 585 980 022, ayant siège social [Adresse 3] [Localité 1], agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, venant aux droits de la SA LOGIVAM, de la SA LA MAISON DU CIL et de la SA PICARDIE HABITAT.
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Bertrand BACHY, avocat au barreau de SOISSONS
INTIMEE
DEBATS :
A l'audience publique du 14 mars 2024, l'affaire est venue devant Mme Graziella HAUDUIN, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière, assistée de Mme Chloé BONAVENTURE, greffière stagiaire et en présence de Mme [S] [P], juriste assistante.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre, Présidente, M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 04 juillet 2024 par sa mise à disposition au greffe.
Le 04 juillet 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
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DECISION :
Par actes du 15 octobre 2020, la SA Clesence a donné à bail à M. [X] [U] un immeuble à usage d'habitation sis [Adresse 2] à [Localité 4] et un emplacement de parking moyennant des loyers respectifs de 437, 63 euros et de 50,83 euros.
Le 2 juin 2022, à la suite de loyers impayés, la bailleresse a fait délivrer à M. [U] un commandement de payer visant la clause résolutoire des deux baux.
Par exploit du 6 septembre 2022 la SA Clesence a fait assigner M. [U] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Soissons aux fins, notamment, de constater la résiliation des baux par acquisition de la clause résolutoire, de condamner M. [U] à quitter les lieux et le condamner au paiement de diverses sommes.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 6 janvier 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Soissons a :
- constaté que les deux baux se trouvent résiliés par l'effet du jeu de la clause résolutoire depuis le 2 août 2022 ;
- dit qu'à défaut par M. [U] d'avoir libéré les lieux de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef, quinze jours après la signification du jugement, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, avec 1'assistance de la force publique si besoin est et au transport des meubles laissés dans les lieux dans tel local qu'il plaira à la bailleresse, aux frais et risques des expulsés ;
- condamné M. [U] à payer à la SA Clesence la somme de 3 690,32 euros au titre des arriérés de loyers et charges arrêtés au 21 novembre 2022 ;
- fixé et en tant que besoin condamné M. [U] à payer à la SA Clesence une indemnité d'occupation de 489 euros par mois, à compter du 1er novembre 2022 ;
- débouté la SA Clesence de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;
- condamné M. [U] à verser à la SA Clesence la somme de 120 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [U] aux dépens.
Par déclaration du 20 mars 2023, M. [U] a interjeté appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 juin 2023, M. [U] demande à la cour de :
- le recevoir en son appel et le dire bien fondé ;
Y faisant droit
- infirmer le jugement prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Soissons le 06 janvier 2023 ;
Statuant de nouveau,
A titre principal,
- constater l'irrégularité du commandement de payer en date du 2 juin 2022 ;
En conséquence,
- déclarer irrégulière la procédure tendant à l'expulsion de M. [U] ;
- rejeter les demandes de la SA Clesence ;
A titre subsidiaire,
- ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire jusqu'à apurement de la dette et accorder à M. [U] un délai de 36 mois pour ce faire ;
En tout état de cause,
- débouter la SA Clesence de l'intégralité de ses demandes plus amples ou contraires ;
- condamner la SA Clesence au versement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la SA Clesence aux entiers dépens.
M. [U] soutient que son assistante sociale a écrit au greffe du tribunal judiciaire pour indiquer son impossibilité de se rendre à l'audience pour raisons de santé. Il déclare avoir eu des difficultés à régler les loyers en raison d'erreurs de règlements de la CAF.
Le locataire fait valoir que le commandement de payer est nul en ce qu'il ne comporte pas de décompte détaillé des sommes dues.
Il indique par ailleurs que la clause résolutoire n'a pas été invoquée de bonne foi par la bailleresse et qu'il a, à de multiples reprises, sollicité une solution amiable pour régler ses impayés. M. [U] ajoute qu'il a déposé un dossier de surendettement devant la commission de surendettement des particuliers de l'Aisne, que ce dossier a été déclaré recevable et orienté vers une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Enfin, il expose que son expulsion aurait de graves conséquences sur son état de santé et sollicite des délais de paiement pour rembourser les loyers impayés.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 31 juillet 2023, la SA Clesence demande à la cour de :
- la recevoir en ses conclusions, l'y déclarer bien fondée ;
- débouter M. [U] de sa demande de voir constater l'irrégularité du commandement de payer du 2 juin 2022 et par voie de conséquence l'irrégularité de la procédure aux fins d'expulsion et de sa demande subsidiaire de délais ;
- confirmer purement et simplement le jugement du 6 janvier 2023 ;
- débouter M. [U] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la SA Clesence ;
- condamner M. [U] à payer à la SA Clesence la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La SA Clesence fait valoir que M. [U] ne rapporte la preuve de l'existence du courrier adressé au tribunal judiciaire par l'assistante sociale. Elle déclare que M. [U] n'a jamais fait état de ses problèmes de santé et n'en justifie pas devant la cour.
La bailleresse soutient que le commandement de payer est régulier. Elle conteste être de mauvaise foi et précise que M. [U] ne rapporte pas la preuve d'avoir sollicité une solution amiable au règlement de ses impayés.
Enfin, elle s'oppose à l'octroi de délais de paiement en faveur de M. [U] en raison de sa mauvaise foi.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 décembre 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 14 mars 2024.
SUR CE :
L'article 24 de la loi du 6 juillet 1989 dispose notamment que le commandement de payer visant la clause résolutoire contient à peine de nullité :
1° la mention que le locataire dispose d'un délai de deux mois pour payer sa dette,
2° le montant mensuel du loyer et des charges,
3° le décompte de la dette,
4°l'avertissement qu'à défaut de paiement ou d'avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s'expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail,
5° la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l'adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière,
6° la mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demande un délai de grâce sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil.
En l'espèce, le commandement délivré à M. [U] comporte l'ensemble des mentions précitées, y compris le montant de l'arriéré de la dette locative, avec en annexe un décompte des sommes dues extrêmement détaillé et qui révèle les défaillances du locataire, en sorte qu'il a été en mesure de connaître avec précision ce qui lui était réclamé et a pu s'assurer du bien-fondé du commandement.
La demande d'annulation du commandement sera donc rejetée.
Ensuite, aucune déloyauté ou mauvaise foi du bailleur ne peuvent être en l'espèce considérées comme démontrées par le locataire. Il n'est pas justifié par M. [U] qu'il a sollicité à plusieurs reprises le bailleur aux fins de trouver une solution amiable de règlement des impayés, ni qu'il a cherché une solution concertée. Il n'est pas davantage établi que le bailleur a laissé la situation d'impayés empirer pour mettre en oeuvre la clause résolutoire et que le locataire a, vainement, sollicité un logement plus compatible avec son budget et son handicap.
Le caractère abusif de la mise en oeuvre de la clause résolutoire n'est donc pas démontré.
Si l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 prévoit la possibilité pour le juge d'accorder des délais de paiement, il convient de constater que le locataire était totalement défaillant en première instance, sans qu'il soit justifié par lui des raisons de son impossibilité prétendue de comparaître, le compte rendu de l'hôpital de [6] mentionnant une hospitalisation du 6 mars au 19 mai 2023, soit postérieurement à la délivrance du commandement, aux débats devant le tribunal et même au jugement entrepris.
Il convient aussi de constater que la décision de recevabilité de la commission de surendettement de l'Aisne est postérieure au jugement déféré en sorte que la clause résolutoire ne peut être suspendue pour ce motif.
Enfin, la dette n'a cessé d'augmenter.
Il ne sera pas donc pas fait droit à la demande de suspension des effets de la clause résolutoire et de délais de paiement.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
M. [U], appelant qui succombe, sera condamné à supporter les dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle et débouté de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les situations financières respectives des parties commandent toutefois de ne pas faire application en appel des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société intimée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Rejette les demandes de M. [X] [U] ;
Condamne M. [X] [U] aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE