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27/06/2024 | FRANCE | N°23/02360

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 27 juin 2024, 23/02360


ARRET







S.E.L.A.R.L. EVOLUTION





C/



Société LES JASMINS













CJ/MC/DPC/VB





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU VINGT SEPT JUIN

DEUX MILLE VINGT QUATRE





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/02360 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IY2H



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU QUINZE NOVEM

BRE DEUX MILLE VINGT DEUX





PARTIES EN CAUSE :



S.E.L.A.R.L. EVOLUTION venant aux droits de la SELARL GRAVE RANDOUX ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société TELECOISE ayant siège [Adresse 5], fonctions a...

ARRET

S.E.L.A.R.L. EVOLUTION

C/

Société LES JASMINS

CJ/MC/DPC/VB

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU VINGT SEPT JUIN

DEUX MILLE VINGT QUATRE

Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/02360 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IY2H

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU QUINZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

PARTIES EN CAUSE :

S.E.L.A.R.L. EVOLUTION venant aux droits de la SELARL GRAVE RANDOUX ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société TELECOISE ayant siège [Adresse 5], fonctions auxquelles elle a été nommée aux termes d'un jugement de liquidation judiciaire rendu par le tribunal de commerce d'Amiens du 01/07/2019 agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Audrey BOUDOUX D'HAUTEFEUILLE, avocat au barreau d'AMIENS

Ayant pour avocat plaidant la SCP BEJIN CAMUS, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

APPELANTE

ET

Société LES JASMINS Société Civile de Construction Vente agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marc BACLET de la SCP MARC BACLET AVOCATS, avocat au barreau de BEAUVAIS

INTIMEE

DEBATS :

A l'audience publique du 11 avril 2024, l'affaire est venue devant Mme Clémence JACQUELINE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Mathilde CRESSENT, greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre, Présidente, M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L'ARRET :

Le 27 juin 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

*

* *

DECISION :

Suivant contrat du 24 juillet 2018, la SCCV Les Jasmins a confié à la société Télécoise des travaux d'installations électriques portant sur la construction de quarante-cinq logements situés [Adresse 6].

Par décisions du 31 janvier 2019 et du 1er juillet 2019, le tribunal de commerce d`Amiens a prononcé le redressement judiciaire puis la liquidation judiciaire de la société Télécoise et désigné la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire.

Par courrier du 15 octobre 2019, le liquidateur judiciaire a sollicité de la SCCV Les Jasmins le paiement de trois situations de travaux pour un montant total de 38 620,52 euros.

Par courrier du 6 novembre 2019, cette dernière s'y est opposée faisant valoir que les travaux objets du contrat n'étaient pas aboutis ou présentaient des désordres ce qui a conduit la SELARL Grave Randoux agissant en qualité de liquidateur judiciaire pour la société Télécoise, par acte d`huissier du 6 mars 2020, à faire assigner la SCCV Les Jasmins devant le tribunal judiciaire de Beauvais afin, notamment, de la voir condamner à payer la somme de 38 620,52 euros au titre des travaux d'électricité effectués dans le cadre de la construction.

Par jugement du 15 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Beauvais a :

- débouté la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande en paiement ;

- ordonné la réouverture des débats afin que les parties présentent leurs observations sur :

* l'éventuelle irrecevabilité de la fin de non recevoir présentée par la SELARL Grave Randoux en réponse à la demande reconventionnelle de la SCCV Les Jasmins ;

* l'éventuelle incompétence du tribunal judiciaire quant à la demande reconventionnelle de la SCCV Les Jasmins portant sur la déclaration et la vérification de créances dans le cadre d'une procédure collective ;

- sursis à statuer sur la demande reconventionnelle formulée par la SCCV Les Jasmins ;

- dit que l'affaire sera de nouveau examinée, sur ces deux points, à l'audience de mise en état du lundi 23 janvier 2023 à 9 heures ;

- débouté la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise à payer à la SCCV Les Jasmins la somme de 2 000 euros en application de l`article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise aux dépens.

Par déclaration du 24 mai 2023, enregistrée le 5 juin 2023, la SELARL Evolution (anciennement Grave Randoux) a interjeté appel de la décision.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 21 septembre 2023, elle demande à la cour de :

- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la SELARL Evolution ès qualités de liquidateur judiciaire de Télécoise ;

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a énoncé :

* déboute la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande en paiement

* déboute la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

* condamne la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise à payer à SCCV Les Jasmins la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

* condamne la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise aux dépens ;

- Statuant de nouveau,

* condamner la SCCV Les Jasmins au paiement de la somme principale de 38 620,52 euros ou, à tout le moins, de la somme principale de 36 505,88 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 6 mars 2020, date de délivrance de l'assignation aux fins de comparution devant le tribunal judiciaire de Beauvais, et jusqu'à parfait règlement ;

* ordonner la capitalisation des intérêts dans les prévisions de l'article 1343-2 du Code Civil ;

* condamner la SCCV Les Jasmins au paiement d'une indemnité de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamner enfin SCCV Les Jasmins aux entiers dépens de première instance et d'appel, et en prononcer distraction au profit de Me Audrey d'Hautefeuille.

Elle expose qu'elle justifie de situations de travaux qui, à la différence de factures, n'ont pas à comporter de précisions sur les travaux concernés. Elle met en avant que la SCCV Les Jasmins a bien reconnu la réalisation des travaux dans plusieurs courriers mais également en indiquant que des désordres pouvaient être constatés. Elle se prévaut d'une attestation de [B] [X], ancien président du tribunal de commerce ce qui démontre selon elle la fiabilité de son témoignage, qui porte sur un fait juridique et serait donc recevable. Elle soutient que cette attestation permet d'établir que les situations de travaux portent sur des travaux effectivement réalisés. Elle ajoute que le décompte général et définitif, désormais intangible, démontre que la SCCV a reconnu l'exécution des travaux.

Elle indique que les travaux ont été finalisés pendant la période d'observation et que, dans l'hypothèse de malfaçons, il revenait à la SCCV de réaliser une déclaration de créance. Elle estime que la SCCV s'est désistée de ses demandes reconventionnelles et qu'il s'agit d'un désistement d'action.

Par ses dernières conclusions signifiées le 18 septembre 2023, la SCCV Les Jasmins demande à la cour de :

- déclarer la SELARL Evolution es-qualités irrecevable et en tous cas mal fondée en ses demandes, l'en débouter ;

- confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté la SELARL Evolution en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande en paiement, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et condamné la SELARL Evolution en qualité de liquidateur de la SA Télécoise à payer à la SCCV Les Jasmins la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,

- condamner la SELARL Evolution es-qualité à payer à la SCCV Les Jasmins la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que la SELARL Evolution demande aujourd'hui le paiement de travaux non réalisés:

- au moyen de factures sur lesquelles il est juste indiqué « montant du marché '' ;

- alors que la SA Télécoise a abandonné le chantier à partir du jour du redressement judiciaire;

- alors que plus de quinze lettres recommandées avec accusé de réception ont été adressées ;

- alors qu'une constatation contradictoire de l'abandon de chantier, et des travaux non réalisés,

a été réalisée, en présence de la SA Télécoise, juste avant sa mise en liquidation judiciaire.

Elle en conclut qu'il ne peut lui être réclamé le paiement de factures établies alors que les travaux sont inachevés et qu'elle détient une importante créance au titre des non façons et détériorations constatées. Elle affirme que les créances sont nées postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

Elle indique avoir demandé au tribunal, face à la mauvaise foi de la SELARL Evolution, le paiement de la retenue de garantie, telle que prévue au CCAP, le paiement du compte prorata (2%) tel que prévu par le CCAP et les pénalités de retard, telles que décrites dans les pièces versées aux débats, celles-ci ayant toujours été précédées de mises en demeure.

Elle expose que le tribunal a ordonné la réouverture des débats sur ce point et qu'avant que la SELARL Evolution ne relève appel de cette décision, elle a manifesté l'intention de se désister de ses demandes car elle ne peut espérer un quelconque dividende. Elle précise que postérieurement à ce désistement, et postérieurement au prononcé de l'ordonnance de clôture devant le tribunal, la SELARL Evolution a relevé appel du jugement du 15 novembre 2022 si bien que la SCCV Les Jasmins a indiqué au tribunal qu'elle n'entendait plus se désister de ses demandes, et sollicité le rabat de l'ordonnance de clôture compte-tenu de cet élément nouveau dès lors que son désistement d'instance n'a pas été accepté, ni constaté par le tribunal.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 6 décembre 2024 et l'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 11 avril 2024.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de préciser que la déclaration d'appel et les conclusions des parties limitent la saisine de la cour au débouté de la SELARL Grave Randoux de ses demandes et aux dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

1. Sur la demande en paiement de la SELARL Evolution ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Télécoise

Aux termes de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Selon l'article 9 du code de procédure civile, chaque partie doit prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En outre, conformément aux dispositions de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d`une obligation doit la prouver.

La SCCV Les Jasmins a en l'espèce conclu un marché avec la société Télécoise qui était tenue de réaliser divers travaux d`électricité moyennant le paiement d'une somme initiale de 320 000 euros, réévaluée à 334 045,33 euros par avenant du 21 septembre 2018.

A l'appui de sa demande en paiement, la SELARL Evolution, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise produit trois 'situations' numérotées de 4 à 6, des 20 mars 2019, 23 avril 2019 et 29 mai 2019 et un décompte général définitif du 28 octobre 2019 adressé par la SCCV Les Jasmins à la société Télécoise.

Selon le liquidateur judiciaire, ces documents démontrent le bien fondé de sa créance en application du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) signé par les parties et du principe d'intangibilité du décompte général définitif.

Il ressort du CCAP que la situation de travaux est le document comptable établi chaque mois par l'entrepreneur en vue du règlement des acomptes sur travaux. Il est précisé que l'entreprise doit joindre à sa situation un décompte établi obligatoirement suivant le modèle annexé avec le détail d'avancement annexé. L'article 10.7 précise que les situations font apparaître les travaux exécutés depuis le début du chantier, les travaux réalisés par des sous-traitants, la retenue de garantie et les paiements effectués directement aux fournisseurs. Les articles suivants décrivent le processus suivant aboutissant au paiement des acomptes : la situation est transmise au maître d'oeuvre d'exécution en lettre recommandée, elle est vérifiée par ce dernier et les situations vérifiées donnent lieu à des propositions de paiement signées par l'entrepreneur et le maître d'oeuvre d'exécution et soumises à l'appréciation en dernier lieu du maître d'ouvrage. L'article 17.04 précise que 'seule la proposition signée par l'entrepreneur est un document comptable valant facture'.

Dans ces conditions, si l'entrepreneur peut obtenir le paiement des acomptes dus sans avoir à justifier de factures mais seulement de situations de travaux, encore faut-il que le formalisme prévu au CCAP soit respecté pour que les situations donnent lieu à des propositions de paiement signées par l'entrepreneur assimilables à un document comptable valant facture.

Or, les trois 'situations' produites par le liquidateur judiciaire pour tenter de justifier du bien fondé de la créance de la société Télécoise ne respectent pas le formalisme prévu au CCAP ( absence d'annexe détaillant l'avancée des travaux alors que la SCCV Les jasmins soutient justement que les travaux n'ont pas été réalisés). Il n'est pas démontré qu'elles ont été transmises au maître d'oeuvre et au maître d'ouvrage puis qu'elles ont donné lieu à une proposition de paiement valant facture.

S'agissant du décompte général définitif, il résulte de l'article 19 du CCAP que l'entreprise doit remettre dans les 60 jours à dater de la réception ou de la résiliation, le mémoire définitif de l'ensemble des sommes qu'il estime lui être dues en application du marché. Le décompte général est établi par le maître d'oeuvre au vu du mémoire définitif et des pièces transmises par l'entrepreneur par remise par le maître d'oeuvre d'exécution au maître d'ouvrage qui le notifie par lettre recommandée à l'entrepreneur. Ce dernier peut alors l'accepter explicitement ou faire valoir ses observations motivées.

En l'espèce, le CCAP n'a pas été exécuté. C'est en réponse à une mise en demeure de payer la somme de 38 620,52 euros adressée par le liquidateur judiciaire (et non à la suite de l'envoi d'un mémoire définitif) que la SCCV Les Jasmins a envoyé à la SELARL Grave Randoux le 6 novembre 2019 un courrier de contestation de la créance. A ce courrier était annexée une 'présentation de DGD reprenant l'ensemble des éléments afférents à l'opération'. La SCCV a également pris soin de transmettre l'ensemble des correspondances adressées durant le chantier à la société Télécoise pour dénoncer les non façons et retards. Il est en outre précisé 'qu'au vu des pénalités de retard et autres retenues appliquées à la société Télécoise, les sommes dues par la SCCV Les Jasmins auprès de cette structure s'élèvent à la somme de zéro euro'.

Le document intitulé 'DGD' signé du maître d'oeuvre et de la SCCV le 6 novembre 2019 et daté du 28 octobre 2019 comporte la mention du coût du marché et un détail des pénalités et retenues que la SCCV entend appliquer.

Il ne s'agit donc pas formellement d'un décompte général définitif transmis conformément au CCAP après transmission d'un mémoire par l'entreprise.

Ce document n'a pas fait par la suite l'objet d'une acceptation explicite ou d'observations motivées par lettre recommandée de la part de la société Télécoise.

La SELARL Evolution ne peut donc s'en prévaloir pour soutenir que la SCCV a définitivement accepté de régler la somme de 35 886,26 euros.

En l'absence de document comptable valant facture et faute de formalisation d'un décompte général définitif dans les conditions fixées par le CCAP, il revient à la SELARL Evolution de rapporter la preuve de l'exécution des travaux par la société Télécoise pour justifier du bien fondé de sa demande en paiement du solde des travaux.

Le document intitulé décompte général définitif adressé par la SCCV à la société Télécoise ne comporte aucune reconnaissance d'une telle créance, faisant uniquement état du montant global prévu pour les travaux sollicités et d'un paiement partiel de ceux-ci sans démontrer que le restant des travaux envisagés a été réalisé. Par ailleurs, M. [X], dans son attestation établie en qualité de 'dirigeant de la société Télécoise' affirme que les 'factures' réclamées par le liquidateur 'correspondent aux travaux exécutés mensuellement par la société' et que 'le détail des factures était systématiquement joint à celle-ci et correspondait au constat d'avancement mensuel établi contradictoirement entre le représentant de l'entreprise et le maître de l'ouvrage et ne saurait en conséquence être contesté'. Il décrit en réalité les conditions d'émission des situations de travaux telles que prévues par le CCAP qui n'ont pas été mises en oeuvre en pratique ainsi qu'il a été précédemment démontré. Il ne témoigne pas de la réalisation de travaux auxquels il aurait assisté.

La SCCV Les Jasmins verse quant à elle aux débats un procès-verbal de constat du 19 juin 2019, réalisé contradictoirement, en présence d'un représentant de la société Télécoise, qui mentionne de multiples non façons et malfaçons concernant le lot électricité au niveau des bâtiments A et B (absence d'éclairage de chantier, fourreaux situés au rez-de-chaussé non incorporés dans les cloisons, absence de rebouchage à hauteur des cueillies, chaudières non reliées aux thermostats, fils pour l'interphone qui ne passent pas dans les logements, présence de certaines gaines abîmées et écrasées, pas de réservation du plancher bas pour le lot VMC, aucune gaine électrique n`est passée au deuxième niveau, absence de réseau VMC, fourreaux non incorporés dans le béton d'autres étant vides, absence d'alimentation électrique au dessus des fenêtres). Les photographies jointes démontrent également que le chantier électrique est resté inachevé.

Si le représentant de la société a émis des réserves concernant certains constats, et notamment l`emplacement des fourreaux, il n'a formulé aucune autre remarque.

La SCCV Les Jasmins communique en outre sept courriers recommandés adressés à la société Télécoise entre le 26 février 2019 et le 11 juin 2019, aux termes desquels il est reproché à cette dernière diverses inexécutions. Elle indique que l'absence de la société conduit à reporter d'autres travaux notamment confiés à d'autres entreprises et qu'elle compte appliquer des pénalités de retard.

Enfin, la SCCV Les Jasmins démontre qu'elle a dû faire intervenir une autre entreprise au niveau du réseau électrique (factures de juin 2019) pour remédier aux non façons relevés dans le constat d'huissier.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la preuve de la réalisation des travaux restant à achever après l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société en janvier n'est pas rapportée et que les situations émises postérieurement à cette date ne sont pas la contrepartie de travaux effectivement réalisés par la société Télécoise.

Le premier juge en a donc conclu à juste titre que les nombreux courriers dénonçant l'inexécution des travaux, corroborés par le procès-verbal de constat, établissent que la société Télécoise a laissé les travaux inachevés et que les difficultés ont été constatées et dénoncées dès le mois de février 2019.

En conséquence, faute de preuve de la réalisation des travaux, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SELARL Grave Randoux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise de sa demande en paiement.

La cour n'est saisie d'aucune prétention concernant la demande reconventionnelle formulée par la SCCV Les Jasmins devant le tribunal si bien qu'il n'y a pas lieu d'examiner les divers moyens concernant la recevabilité de cette demande reconventionnelle et son bien fondé (notamment les enjeux du désistement devant le tribunal suivi d'une demande de rabat de clôture devant le juge de la mise en état).

2. Sur les autres demandes

La SELARL Evolution, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et au paiement d'une indemnité de 2 000 euros à la SCCV Les Jasmins en application de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement sera confirmé s'agissant de ses dispositions concernant les dépens et la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort, dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement entrepris dans ses dispositions soumises la cour,

Y ajoutant,

Condamne la SELARL Evolution aux dépens d'appel dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la SELARL Evolution en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Télécoise au paiement d'une indemnité de 2 000 euros à la SCCV Les Jasmins au titre des frais irépétibles d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/02360
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.02360 ?
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