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27/06/2024 | FRANCE | N°23/01000

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 27 juin 2024, 23/01000


ARRET

































S.A.S. XPO TANK CLEANING NORD FRANCE









C/







S.A.R.L. BRUNE









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 27 JUIN 2024





N° RG 23/01000 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IWFL

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE COMPIEGNE EN DATE DU 07 FÉVRIER 2023



APRES COM

MUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC



EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL





PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



S.A.S. XPO TANK CLEANING NORD FRANCE agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adre...

ARRET

S.A.S. XPO TANK CLEANING NORD FRANCE

C/

S.A.R.L. BRUNE

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 27 JUIN 2024

N° RG 23/01000 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IWFL

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE COMPIEGNE EN DATE DU 07 FÉVRIER 2023

APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC

EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S. XPO TANK CLEANING NORD FRANCE agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Jérôme LE ROY de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101

Ayant pour avocat plaidant Me Hervé FRASSON-GORRET, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

S.A.R.L. BRUNE agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric BAUBE de la SELARL CABINET BAUBE, avocat au barreau de COMPIEGNE

DEBATS :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Avril 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre et Mme Valérie DUBAELE, Conseillère, qui ont avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

GREFFIER :

Madame Diénéba KONÉ

MINISTERE PUBLIC : M. Wilfrid GACQUER, Avocat Général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Ces magistrats ont rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Valérie DUBAELE, Conseillère,

et Mme Gladys DORSEMAINE, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 27 Juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Malika RABHI, Greffier.

DECISION

La société civile Brune devenue SARL Brune, propriétaire d'un terrain sis à [Adresse 4]' y a fait construire des bâtiments qu'elle a ensuite donné à bail commercial à la société Brune lavage le 1er janvier 1989 afin d'y exploiter une station de lavage de citernes de produits alimentaires et de produits chimiques.

Le bail a été renouvelé et par acte sous seing privé en date du 29 mars 2008 la société civile Brune a consenti un nouveau bail commercial à la société Brune lavage pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2008.

Le bail porte sur un terrain entièrement clôturé sur lequel sont édifiés un premier bâtiment d'une contenance de 720m² à usage de bureaux, vestiaire et magasin pour 150,74m² et le reste à usage d'atelier et d'un second bâtiment accolé d'une contenance de 360 m² à usage de lavage et de grainage de véhicule de transport ainsi qu'un local technique de 37,50 m² et d'un parking bitumé outre des espaces verts.

La société Brune Lavage a été acquise par la société TPG Management ayant poursuivi la même activité et qui le 30 septembre 2011 a revendu ses parts de la société Brune lavage à la société Sonecovi Nord désormais dénommée XPO Tank Cleaning Nord France qui a également poursuivi l'activité.

A la suite du rapport du bureau Véritas ayant conclu au fait que les corrosions affectant la charpente de la station de lavage était préjudiciable à la solidité de l'ouvrage et selon lequel la structure ne devait plus être exploitée, la société Sonecovi Nord a par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 novembre 2013 avisé la bailleresse et sollicité son intervention en urgence pour une mise en sécurité du site.

Par exploit d'huissier en date du 6 décembre 2013 la société Brune a fait assigner la société Sonecovi Nord devant le juge des référés afin que soit ordonnée une expertise sur la localisation et les causes de la corrosion et pour déterminer si elle procède ou non d'un défaut d'entretienet/ou d'une utilisation abusive de la chose.

Par ordonnance de référé en date du 15 janvier 2014 une expertise a été ordonnée et confiée à M. [P] qui a déposé son rapport le 24 juillet 2014 concluant également à une remise en cause de la solidité de la charpente à cause de la très forte corrosion et a préconisé des travaux de mise en sécurité provisoire réalisés par la locataire qui mettra également en oeuvre des travaux de renforcement de la charpente metallique.

Par acte de maître [Y] huissier de justice il a été dénoncé à la société preneuse, le constat réalisé le 14 août 2015 et un commandement visant la clause résolutoire pour manquement aux charges et conditions du bail, la bailleresse alléguant un défaut d'entretien.

Par exploit d'huissier en date du 13 novembre 2015 la société XPO Tank Cleaning Nord France a formé opposition à ce commandement de payer et a sollicité qu'il soit dit nul et de nul effet, a demandé la condamnation de la société Brune à lui rembourser le coût des travaux exécutés en ses lieu et place car relevant de l'article 606 du code civil, à être autorisée à consigner dans l'attente de l'issue du litige, les loyers et charges à titre de garantie de paiement et que soit ordonnée la compensation entre les loyers et charges séquestrés et le montant des sommes dues par la bailleresse.

Par ordonnance du juge de la mise en état en date du 6 juin 2017 une mesure d'expertise a été confiée à M. [I] et la demande de sequestration des loyers a été rejetée.

L'expert a déposé son rapport le 15 décembre 2020.

Par jugement du tribunal judiciaire de Compiègne en date du 7 février 2023 il a été constaté l'acquisition de la clause résolutoire dans le contrat de bail en date du 29 mars 2008, il a été ordonné à la société preneuse de quitter les lieux dans le délai d'un mois suivant la signification de la décision, la société Brune a été déboutée de sa demande de séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux, la société XPO Tank Cleaning Nord France a été condamnée à verser à la société Brune une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi et ce à compter du 17 novembre 2015 jusqu'à la date de libération effective des lieux sa demande indemnitaire formée au titre des travaux de réfection de la charpente a été rejetée ainsi que le surplus de ses demandes indemnitaires et de sa demande de compensation et elle a été condamnée à payer à la société Brune la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens comprenant le coût du commandement de payer.

Par déclaration en date du 16 février 2023 la SAS XPO Tank Cleaning Nord France a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 12 mars 2024, expurgées des demandes ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile et auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens invoqués, la SAS XPO Tank Cleaning Nord France demande à la cour de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de déclarer nul,de nul effet et non avenu le commandement de payer du 16 octobre 2015 visant la clause résolutoire, de dire que l'assignation en date du 13 novembre 2015 vaut mise en demeure à l'égard du bailleur d'avoir à prendre en charge le coût des travaux réparatoires lui incombant, d'entériner les conclusions d'expertise de M. [I] et de condamner la société Brune à mettre en oeuvre et faire réaliser les travaux ci-après dans un délai de deux mois à compter de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à savoir :

Espace constaté entre le bardage et la porte du local technique n°2 ;

Renforcement du poteau de structure pour la cage d'escalier ;

Réfection du dallage béton du local de stockage et local technique chimique ;

Enduit sur maçonnerie brute pignon côté bureaux.

Elle demande encore à la cour de condamner la S.A.R.L Brune à mettre en 'uvre et faire réaliser dans un délai de deux mois à compter de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à l'issue de ce délai en cas de carence, les travaux de désamiantage dans les parties de l'immeuble le nécessitant, de condamner la S.A.R.L Brune à faire réaliser préalablement un audit des travaux à réaliser pour mise en conformité de l'immeuble avec la règlementation applicable.

Elle demande à la cour de condamner la S.A.R.L Brune à lui rembourser les travaux relatifs à la mise en conformité des lignes de vie, conformément à la réglementation applicable, selon facture de la société ALTIUS du 30/06/2021, soit un montant de 49 935 euros HT  et de fixer le montant des travaux effectués aux lieu et place de la S.A.R.L Brune, en l'état et sauf à parfaire à 187 071,21 euros, outre les intérêts à compter du jour de la réalisation, pour les travaux effectués, de condamner en tant que besoin la S.A.R.L Brune à verser ladite somme de 187 071,21 euros à la S.A.S XPO Tank Cleaning Nord France, outre intérêts de droit à compter du jour de leur réalisation, d'ordonner la compensation entre les sommes dues par la S.A.R.L Brune et la S.A.S XPO Tank Cleaning Nord France à concurrence du montant dont celle-ci aura fait l'avance, et à due concurrence du montant des loyers séquestrés, s'il en existe, de condamner en cas d'insuffisance, la S.A.R.L Brune à lui verser la différence pour qu'elle soit intégralement remboursée du montant des travaux dont elle aura fait l'avance, dans ce cas.

Enfin elle demande à la cour, de débouter la S.A.R.L Brune de toutes ses demandes, fins et conclusions, de la condamner à lui verser la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et ce en raison des frais irrépétibles exposées par elle  et de condamner la S.A.R.L Brune en tous les dépens, dont le recouvrement sera effectué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions remises le 24 janvier 2024 la SARL Brune de débouter la société XPO Tank Cleaning Nord France de l'intégralité de ses demandes de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant de condamner la société XPO Tank Cleaning Nord France à lui payer la somme de 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2024.

SUR CE

La société XPO Tank Cleaning Nord France rappelle qu'elle n'est locataire des immeubles en cause que depuis 7 ans alors qu'ils ont 33 ans d'âge.

Elle reproche au premier juge d'avoir fait une lecture inexacte et subjective du constat d'huissier du 14 août 2015 en considérant que certains points retenus par l'expert comme incombant au bailleur constitueraient en fait une obligation du preneur et en ne reprenant que certains points relevant de l'entretien qu'elle n'a au demeurant jamais contestés.

Elle fait valoir que le bail intervenu le 29 mars 2008 à effet au 1er janvier 2008 s'est terminé le 31 décembre 2016 et est tacitement prorogé depuis et qu'il fait seul la loi entre les parties.

Elle soutient que ce bail prévoit que les lieux loués doivent servir exclusivement à l'activité de lavage de tracteurs et citernes et que le bailleur doit au titre de son obligation de délivrance mettre à disposition du preneur des lieux lui permettant leur exploitation conformément à la destination fixée.

Elle soutient que les locaux neufs, au jour de la prise d'effet du bail, ont vieilli et du fait de la vétusté le bailleur doit les remettre en l'état pour respecter son obligation de délivrance étant rappelé qu'en application de l'article 606 du code civil la réfection des éléments porteurs et ceux faisant corps avec la structure même de l'immeuble ainsi que la vétusté ne sont pas à la charge du preneur.

Elle soutient qu'aux termes du bail les obligations effectives des parties sont habituelles et d'usage et ne comportent aucune exception notable et rappelle qu'en application de l'article 1719 du code civil le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée, d'entretenir cette chose en l'état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisblement le preneur pendant la durée du bail .

Elle fait valoir que la clause résolutoire n'était pas acquise dans la mesure où il n'existait et il n'existe à ce jour aucun manquement de nature à justifier un manque d'entretien. Elle indique n'avoir reconnu que des manquements mineurs concernant des attaques de rouille limitées et des reprises de peinture.

Elle soutient qu'elle a effectué des travaux d'entretien et qu'elle en justifie et a pris des engagements de réaliser d'autres réparations d'entretien durant l'expertise de M. [I], travaux qu'elle a réalisés à l'exception de la station d'épuration qui ne fait pas partie des lieux loués et au regard de l'importance de l'investissement et de l'incertitude s'attachant à la poursuite du bail.

Elle indique avoir également fait procéder à des travaux indispensables incombant pourtant au bailleur.

Elle sollicite que soit prononcée la nullité du commandement du 16 octobre 2015 dès lors que celui-ci est fondé sur un constat d'huissier du 14 août 2015 qui ne permet pas d'établir la preuve d'un défaut d'entretien conduisant la bailleresse à solliciter une expertise dans le cadre de l'opposition à commandement et que le rapport d'expertise déposé à la suite ne permet pas davantage d'établir un défaut d'entretien des lieux loués.

Elle relève que le rapport d'expertise permet d'établir que sont à la charge du bailleur la réfection de la porte sectionnelle de la piste de lavage n°2, faisant partie intégrante de la superstructure du bâtiment, la réfection du sol du local technique n°1 dont la solidité est atteinte, l'espace entre le bardage et la porte pour le local technique 2, la reprise du dallage et le renforcement du poteau de structure pour la cage d'escalier qui supporte la structure de l'immeuble et qui est vétuste, le dallage béton du local de stockage et le local technique chimique, l'enduit sur maçonnerie brute du pignon.

Elle soutient que doivent être mis à sa charge les travaux de désamiantage ainsi que le remboursement des frais par elle avancés en lieu et place du bailleur pour un montant de 144989,65 euros TTC. Elle fait valoir que s'y ajoutent l'adaptation des lignes de vie à la règlementation qui a nécessité une structure indépendante la charpente ne pouvant les supporter mais également les travaux de réfection du local technique.

Elle souligne que la charpente métallique et la porte sectionnelle qui assurent le couvert et le clos sont des gros ouvrages relevant de l'article 606 du code de procédure civile et que les pistes de lavage sont un élément indispensable à l'exploitation des lieux et déterminants du fond et que leur réfection au titre de l'obligation de délivrance ne peut être qu'à la charge du bailleur.

Elle fait valoir qu'elle exploite toujours les lieux actuellement et qu'elle a l'intention par rapport à des ouvrages qui lui appartiennent de moderniser le traitement des eaux industrielles selon les directives de la DREAL sous réserve que le bail soit maintenu et poursuivi. Elle conteste néanmoins que la station d'épuration soit obsolète et fait observer qu'en sa qualité d'installation classée il est naturel que la DREAL diligente des contrôles et que suite à une mise en demeure elle a apporté toutes les réponses à ses demandes permettant de lever cette mise en demeure en son intégralité

La société Brune soutient qu'il résulte du constat établi par maître [Y] le 14 août 2015 comme du rapport d'expertise de M. [I] en date du 14 décembre 2020 ou encore d'un précédent rapport d'expertise de M. [P] en date du 24 juillet 2014 qu'il existe de nombreux manquements aux obligations d'entretien des lieux ce que la société preneuse ne conteste pas tout en indiquant qu'il y sera remédié plus tard.

Elle considère qu'elle lui impute à tort des manquements à son obligation liée à l'application de l'article 606 du code civil qu'elle souhaite voir reconnaître absolutoire de ses propres manquements.

S'agissant de la station de lavage elle fait valoir que l'état de la charpente s'est dégradé du fait de l'usage des lieux et de l'absence d'entretien lavage elle fait valoir que le local était neuf lors de la prise d'effet du bail et que le bail conclu en renouvellement prévoit expressément que le preneur prendra les lieux loués dans l'état où ils se trouvent sans pouvoir exiger du propriétaire aucun aménagement ou remise en état.

Elle ajoute qu'il résulte de la première expertise que la couverture a été refaite en 2005, qu'en conséquence la charpente a été vérifiée et que la corrosion posant difficulté a pu se développer principalement sur la période 2005 à 2014 du fait de l'activité exercée dans les locaux.

Elle reproche à la preneuse de ne pas avoir entretenu ce que son exploitation a dégradé et de n'avoir pas averti davantage le propriétaire des dégradations si bien que désormais elles relèvent de l'article 606 du code civil.

Elle sollicite que toute demande relative à la charpente de la station de lavage soit rejetée.

S'agissant des pistes de lavage et de la porte sectionnelle elle rappelle que le bail précise que le bailleur ne peut être tenu d'aucune espèce de réparations à faire aux installations et aménagements effectués par la société preneuse et que les pistes de lavage ont été installées par la société Brune lavage ce qui inclut la dalle et la porte sectionnelle.

Pour le reste des biens immobiliers loués elle fait valoir que la société XPO Tank Cleaning Nord France ne justifie d'aucune des réparations invoquées et qu'elle promet pour demain ce qu'elle a reçu commandement de faire le 16 octobre 2015.

Elle fait observer enfin que la société Brune lavage justifiait de dépenses d'entretien de l'ordre de 20000 euros par an entre 2002 et 2008 alors que la scoiété XPO Tank Cleaning Nord France ne justifie de presque aucune dépense et se refuse à envisager la remise en état de la station d'épuration ne faisant pas partie du bail tant que subsiste une incertitude sur le maintien de celui-ci provoquant une alerte de la Direction de l'environnement.

Le seul contrat de bail liant les parties est celui du 29 mars 2008 à effet au 1er janvier 2008, la société XPO Tank Cleaning Nord France venant aux droits des précédents preneurs à la suite de la vente des parts de la société titulaire du bail.

Aux termes de ce bail il est prévu que le preneur qui connaît les biens, les prend dans l'état où ils se trouvent sans pouvoir exiger du propriétaire aucun aménagement ou remise en état.

Il est précisé que le preneur est chargé pendant le cours du bail des réparations locatives et des réparations d'entretien et qu'il devra effectuer les réparations qui s'imposeront sans attendre la fin du bail et rendre en fin de bail le tout en bon état de réparation.

Pour sa part le bailleur n'est tenu au cours du bail que des grosses réparations définies par l'article 606 du code civil mais il n'est tenu d'aucune espèce de réparation à faire aux installations et aménagement effectués par la société preneuse.

Ce bail comporte également une clause résolutoire selon laquelle à défaut de paiement d'un seul terme de loyer ou d'exécution d'une seule des conditions du bail et un mois après un simple commandement de payer ou d'exécuter resté infructueux ledit bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur.

En l'espèce la société Brune a fait délivrer à la société Sonecovi Nord le 16 octobre 2015 un commandement visant la clause résolutoire lui demandant d'exécuter chacune des réparations locatives et d'entretien s'imposant au vu du constat d'huissier en date du 14 août 2015 dénoncé par le même acte et notamment mais non exclusivement celles nécessaires à l'ensemble des ouvrages métalliques intérieurs affectés par la rouille faute d'entretien en peinture, celles nécessaires à l'ensemble des canalisations affectées de fuites dont l'eau s'écoule à même le sol et y stagne et celles nécessaires aux plafonds et menuiseries intérieures.

La société XPO Tank Cleaning Nord France invoque la nullité de ce commandement au seul motif que le constat d'huissier du 14 août 2015 ne permettait pas d'établir un défaut d'entretien à telle enseigne qu'une expertise a ensuite été ordonnée dans le cadre de la procédure d'opposition à commandement de payer.

Il résultait cependant de ce constat que notamment pour les deux pistes de nettoyage chimique que les parois étaient encrassées que la peinture des poteaux des portiques des façades était comme pour la piste n° 3 éclatée, que le local technique de la piste alimentaire présente un bardage en mauvais état, la peinture des lisses du bas du bardage ayant quasiment disparu et surtout que le sol en béton présentant des flaques d'eau stagnante, que l'escalier métallique est piqué par la rouille qu'une fuite d'eau au niveau d'une vanne s'écoule le long d'une tuyauterie et s'écoule sur le bardage et le sol de la cage d'escalier, que l'espace laveur présente des murs et un sol crasseux, que le local intérieur de stockage présente un panneau sur la paroi cassé et l'absence d'une partie de l'habillage périphérique du plancher une autre partie étant pendante , que dans la chaufferie plusieurs cuves ou tuyaux fuient l'eau formant d'importantes flaques sur le sol, que les bureaux présentent un très mauvais état d'entretien , sol cassé ou tâché peinture crasseuse ou largement tâchée notamment à l'accueil , une fuite du chauffe-eau ou encore que le développement des haies n'est pas maîtrisé.

Ces seuls éléments témoignaient d'un défaut d'entretien certain au cours du bail et que la société preneuse tenue par l'obligation de maintenir en cours de bail les lieux loués en bon état de réparations locatives n'avait pas respecté cette obligation contractuelle.

Elle ne peut d'ailleurs contester ce fait dès lors qu'elle a au cours des années qui ont suivi ce constat pris en charge nombre de réparations locatives dont elle a justifié notamment au cours de l'expertise sans contester qu'elles lui incombaient faute de constituer de gros travaux ou de relever de la vétusté.

Si une expertise a été ordonnée dans le cadre de la procédure d'opposition à commandement c'est parce que le constat et une précédente expertise faisaient état de désordres pouvant dépasser la notion de simples réparations locatives et qu'il était opposé par la société preneuse une exception d'inexécution de ses obligations par le bailleur notamment au regard de la corrosion de la structure métallique de la charpente.

Cette expertise réalisée entre 2017 et 2020 par M. [I] sur la base du constat d'huissier du 14 août 2015 révèle que si différents désordres peuvent relever des gros travaux de l'article 606 du code civil, nombre de désordres relèvent des réparations locatives incombant au preneur.

Elle permet de relever que si la société preneuse a effectué à la suite du commandement des travaux d'entretien dont la nécessité avait été dévoilée par le constat d'huissier l'ayant précédé , ces réparations sont parfois intervenues plus d'une année et même quatre années après le commandement ainsi notamment pour les pistes 1 et 2 la peinture a été refaite en 2016 et en 2017 et 2019 dans le local technique 1, l'eau stagnante due à souci d'évacuation des purges dans le local technique 2 a fait l'objet d'une intervention en 2017, dans la cage d'escalier la peinture de l'escalier était seulement prévue en 2019, le bardage de la piste n° 3 attaqué par la rouille faisait l'objet d'une prévision de remplacement en 2019 tandis que le remplacement de l'équipement en chaufferie présentant des eaux stagnantes était prévu en 2020.

Une précédente expertise diligentée dans le cadre d'une procédure en référé initiée par la société Brune et réalisée en juillet 2014 par M. [P] permettait d'établir que compte tenu de travaux de couverture réalisés en 2005 n'ayant pas mis en évidence de difficulté quant à la charpente la corrosion de celle-ci s'est fortement développée entre 2005 et 2013/12014 et ce en raison de l'agressivité de l'atmosphère due à l'activité exercée dans les locaux.

Elle concluait au fait que si la protection contre la corrosion de la charpente n'était pas adaptée à l'activité développée dans les locaux, l'entretien de la structure métallique a été insuffisant dès lors que la charpente en acier est protégée contre la corrosion par la peinture qui crée une barrière protectrice mais que dès lors qu'il existe une brèche la corrosion progresse rapidement. Il était indiqué que si la charpente avait été repeinte tous les deux ans la charpente serait dans un état satisfaisant.

Or il n'y a eu aucune intervention pour entretenir la peinture depuis au moins 2005 et le bailleur n'a été avisé de la difficulté relative à la solidité de la charpente métallique qu'en 2013.

Les deux expertises relèvent un défaut d'entretien des locaux patent, imputable également à la société XPO Tank Cleaning Nord France qui n'ayant pas rempli ses propres obligations d'entretien et procédé aux réparations locatives lui incombant est mal fondée à opposer une exception d'inexécution de ses obligations au bailleur en ce qu'il n'a pas entendu notamment réaliser ou rembourser les seuls travaux de consolidation de la charpente métallique fragilisée essentiellement par un défaut d'entretien.

Nombre de désordres résultant d'un défaut d'entretien sont en outre sans rapport aucun avec l'inexécution par le bailleur de gros travaux lui incombant.

La société preneuse ne peut établir avoir exécuter les travaux d'entretien sollicités par le bailleur aux termes du commandement et lui incombant aux termes du bail dans le mois de la délivrance du commandement alors que certains travaux sont intervenus près de quatre années après le commandement. Elle a de surcroît indiqué pour certains de ces travaux d'entretien qu'ils interviendraient en fin de bail.

Ainsi la cour ne peut que confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 16 novembre 2015 et condamné la société XPO Tank Cleeaning Nord France au paiement d'une indemnité d'occupation équivalente au montant du loyer prévu par le contrat de bail augmenté des charges , dès lors que la société preneuse ne justifie pas de sa demande tendant à voir fixer cette indemnité à un montant inférieur à celui du loyer , montant qu'elle ne précise pas au demeurant.

Au regard de la présente décision il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société XPO Tank Cleaning Nord France relative à des travaux devant être exécutés à l'avenir par la société Brune.

S'agissant des travaux avancés par la société XPO Tank Cleaning Nord France dont elle sollicite le remboursement au motif que ces travaux incombaient au bailleur il convient de relever que si le preneur a accepté de prendre les lieux en l'état sans pouvoir demander de remise en état du bailleur il n'en demeure pas moins que celui-ci reste tenu des grosses réparations s'avérant nécessaires au cours du bail ou des travaux dus à la vétusté en cours de bail.

En ce qui concerne la charpente il est indéniable que sa réfection a dû être réalisée dès lors que sa solidité même était atteinte et qu'elle fait partie des gros travaux définis à l'article 606 du code civil incombant au bailleur dès lors qu'elle assure le couvert.

Contrairement aux allégations de l'appelante il ne s'agit pas en l'espèce de vétusté ainsi que l'a démontré l'expertise de M. [P].

Celle-ci en effet révèle que la corrosion s'est développée principalement à partir de 2005 et que la peinture protégeant la structure de la charpente métallique n'a pas été entretenue alors qu'elle aurait dû l'être tous les deux ans au moins.

L'expert retient que la protection contre la corrosion de la charpente était peut être insuffisante au regard de l'activité développée au sein des locaux mais qu'en tout état de cause si l'entretien de la structure en acier de la station de lavage avait été exécuté, la corrosion de la charpente ne se serait pas produite et la charpente serait dans un état satisfaisant.

Il était également observé qu'aucune information n'avait été délivrée au bailleur sur l'état visible de la charpente avant l'année 2013.

La facture produite par la société XPO Tank Cleaning Nord France ne fait état que d'un meulage et apports de matières acier sur les portiques présentant de la corrosion perforante et du remplacement d'une croix de Saint-Antoine avant une mise en peinture représentant la part la plus conséquente de la facture et ne s'élève qu'à la somme de 48000 euros.

Il ne s'est pas agi en conséquence de refaire l'ensemble de la charpente mais de sécuriser ou stabiliser les lieux.

Le fait que le défaut d'entretien du preneur ait largement participé à la détérioration de cet élément ne permet pas de mettre à la charge de la société Brune le coût assumé à ce titre par la société XPO Tank Cleaning Nord France.

S'agissant des travaux relatifs aux pistes de lavage il convient de retenir que le bail prévoit que le bailleur ne peut être tenu d'aucune espèce de réparations à faire aux installations et aménagements effectués par la société preneuse.

Or comme l'ont rappelé les premiers juges les pistes de lavage ont été installées par la société preneuse ayant précédé la société appelante, la société Brune Lavage qui en a amorti le coût.

Il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande de la société XPO Tank Cleaning Nord France à ce titre.

La société appelante sollicite également le remboursement par la société Brune du remplacement des lignes de vie de sécurité qui n'étaient plus conformes à la règlementation.

Elle fait valoir que s'agissant de travaux de mise en conformité afin de respecter la règlementation applicable ces travaux nécessaires pour l'exploitation des lieux doivent être supportés par le bailleur afin qu'il respecte son obligation de délivrance.

Les premiers juges lui ont reproché de ne pas justifier de la nécessité et de l'exécution de ces travaux.

Elle produit cependant une facture détaillée du 30 juin 2021 relative à ces travaux qui ont porté sur la mise en conformité des lignes de vie selon la norme EN 1808:2015

Il convient en conséquence s'agissant de travaux imposés par la règlementation incombant au bailleur, de condamner la société Brune à payer à la société appelante la somme de 49935 euros HT soit 59922 euros TTC.

La société XPO Tank Cleaning Nord France sollicite également le remboursement de grosses réparations effectuées pour le compte de la société Brune et relatives à la réfection du local technique 1, à la réfection du dallage et des caniveaux pour la cage d'escalier et le remplacement de la porte sectionnelle.

L'expert a relevé que la porte sectionnelle d'origine qui fait partie de la superstructure du bâtiment et en assure le clos n'a plus fonctionné après 27 ans en raison de la vétusté de son moteur et que le preneur a été contraint d'en faire poser une autre en applique pour assurer la sécurité du bâtiment.

S'agisssant de travaux incombant au bailleur il doit être mis à sa charge le remboursement de la porte installée par le preneur pour un montant de 2516 euros HT.

Pour la cage d'escalier l'expert avait constaté la dégradation des caniveaux incorporés dans la dalle béton comportant diverses fissures et que les désordres étaient imputables à la vétusté de la dalle de béton et à un défaut d'étanchéité au raccordement des caniveaux et qu'ainsi la reprise du dallage et des caniveaux était impérative pour établir un sol correct et un réseau étanche d'évacuation.

Ces travaux touchant à l'étanchéité du sol des locaux et imputable à la vétusté incombent au bailleur qui devra rembourser le coût de leur réfection assuré par la société preneuse soit la somme de 2800 euros HT.

Pour le local technique 1 l'expert préconisait en raison d'une forte dégradation du sol une réfection à très court terme dans la mesure où la solidité même du sol est atteinte et ne permet pas un usage normal des lieux et il est produit la facture de ces travaux pris en charge par la société preneuse pour 10995,50 euros HT.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société XPO Tank Cleaning Nord France de l'ensemble de ses demandes de remboursement et de condamner la société Brune à lui verser une somme de 65 846,50 euros HTau titre des travaux financés en ses lieu et place et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt faite de justification de la date exacte de réalisation des travaux.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à compensation faute de loyers séquestrés et faute d'établir l'existence d'une dette de la société preneuse envers la société bailleresse.

Il convient de dire que les dépens de première instance et d'appel seront partagés par moitié entre les parties et de dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement entrepris excepté du chef de la demande de remboursement de travaux de réfection incombant à la bailleresse et des chefs des dépens et des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SARL Brune à payer à la société XPO Tank Cleaning Nord France la somme de 65 846,50 euros HT au titre des travaux financés en ses lieu et place et ce avec intérêts à compter du présent arrêt ;

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront partagés par moitié entre les parties ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 23/01000
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.01000 ?
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