La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2024 | FRANCE | N°23/04669

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 04 juin 2024, 23/04669


ARRET







S.A.S. EOS FRANCE





C/



[X]

[Y]

























































































MS/VB





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU QUATRE JUIN r>
DEUX MILLE VINGT QUATRE





Numéros d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour :

N° RG 23/04669 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I5MI

N° RG 23/04727 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I5PV



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DE L'EXECUTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS





PARTIES EN CAUSE :



S.A.S. EOS FRANCE, Société par actions simplifiée à associé u...

ARRET

S.A.S. EOS FRANCE

C/

[X]

[Y]

MS/VB

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU QUATRE JUIN

DEUX MILLE VINGT QUATRE

Numéros d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour :

N° RG 23/04669 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I5MI

N° RG 23/04727 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I5PV

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DE L'EXECUTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON DU DIX HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

PARTIES EN CAUSE :

S.A.S. EOS FRANCE, Société par actions simplifiée à associé unique, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 488 825 217, dont le siège social est sis [Adresse 10], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, agissant en vertu d'un contrat de mandat en date du 26 mai 2021 en qualité de représentant-recouvreur du Fonds Commun de Titrisation CREDINVEST, Compartiment CREDINVEST 2, représenté par la Société EUROTITRISATION, Société Anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 352 458 368, dont le siège social est sis [Adresse 3], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, elle-même venant aux droits de la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DU NORD EST, société coopérative à capital variable, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de REIMS sous le numéro 394 157 085, dont le siège social est sis [Adresse 8], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, en vertu d'un contrat de cession de créances en date du 27 décembre 2021

[Adresse 10]

[Localité 11]

Représentée par Me Charlotte CHOCHOY substituant Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocats au barreau d'AMIENS

Plaidant par Me Myriam CALESTROUPAT de la SCP CALESTROUPAT-THOMAS ET ASSOCIES, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS

APPELANTES

ET

Madame [C] [X]

née le [Date naissance 7] 1988 à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 1]

Représentée par Me Florence BROCHARD BEDIER de la SCP BROCHARD-BEDIER ET BEREZIG, avocat au barreau d'AMIENS

Monsieur [K] [Y]

né le [Date naissance 2] 1991 à [Localité 12] (02)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 13]

Assigné à étude d'huissier le 22/12/2023

INTIMES

DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :

L'affaire est venue à l'audience publique du 26 mars 2024 devant la cour composée de Mme Agnès FALLENOT, Présidente de chambre, Présidente, M. Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.

A l'audience, la cour était assistée de Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

Sur le rapport de Mme [O] [I] et à l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 04 juin 2024, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCÉ :

Le 04 juin 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Agnès FALLENOT, Présidente de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

*

* *

DECISION :

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Selon acte notarié du 18 avril 2014, la Caisse régionale de crédit agricole du Nord Est a consenti à M. [Y] et Mme [X] un prêt immobilier pour une somme en principal de 110 643 euros, au taux actuel de 2,61 %.

Alléguant l'existence d'échéances restées impayées, la banque a rendu le prêt exigible suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 11 août 2021.

Par acte d'huissier du 21 octobre 2021, la banque a fait signifier à M. [Y] et Mme [X] un commandement de payer valant saisie immobilière d'un ensemble immobilier situé commune de [Localité 13], [Adresse 6], cadastré section AB n°[Cadastre 4] et n°[Cadastre 5], pour une surface de 23 ares 15 centiares.

Suivant bordereau de cession de créance du 27 décembre 2021, la Caisse régionale de crédit agricole du Nord Est a cédé sa créance au Fonds commun de titrisation Credinvest-Compartiment Credinvest 2.

Par acte du 21 février 2022, la société Eos France, agissant en qualité de recouvreur du Fonds commun de titrisation Credinvest-Compartiment Credinvest 2, représenté par la société Eurotitrisation, a fait assigner M. [Y] et Mme [X] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Laon pour voir fixer sa créance et ordonner la vente forcée de l'immeuble.

Par jugement d'orientation du 18 juillet 2023, le juge de l'exécution a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité à agir de la société Eos France,

- constaté que la cession de créance est inopposable aux débiteurs saisis et en conséquence, que le créancier poursuivant ne justifie pas détenir une créance exigible,

- débouté la société Eos France de sa demande de vente forcée et de ses demandes subséquentes,

- débouté la société Eos France de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Eos France à payer à M. [Y] et Mme [X] la somme de 1 000 euros à chacun à ce titre,

- condamné la société Eos France aux dépens.

Par deux déclarations des 16 novembre et 20 novembre 2023, le Fonds et son représentant, la société Eos France, ont fait appel de tous les chefs du jugement.

Par ordonnance du 28 novembre 2023, suivant sa requête déposée au greffe le 24 novembre précédent, la société Eos France a été autorisée à faire assigner à jour fixe les autres parties à l'audience de la cour du 26 mars 2024.

Elle a ainsi fait assigner M. [Y] (à étude) et Mme [X] par actes du 22 décembre 2023.

L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 26 mars 2024.

EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions du 25 mars 2024, la société Eos France et le Fonds demandent à la cour de :

- infirmer le jugement,

Et statuant à nouveau :

- dire et juger que la société Eos France, agissant en vertu d'un contrat de mandat en date du 26 mai 2021 en qualité de représentant-recouvreur du Fonds, titulaire d'une créance liquide et exigible, agit en vertu d'un titre exécutoire, comme il est dit aux articles L. 311-2 et L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution,

- dire et juger que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l'article L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution,

- déterminer les modalités de poursuite de la procédure,

- fixer la créance de la société Eos France, en principal, frais, intérêts et autres accessoires à la somme de 96 355,83 euros arrêtée au 17 octobre 2023, outre intérêts postérieurs au taux contractuel de 2,61 % l'an dus à compter du 18  octobre 2023 jusqu'à parfait paiement, selon décompte en date du 17 octobre 2023,

- ordonner la vente forcée des biens et droits immobiliers sis sur la commune de [Localité 13], [Adresse 6], cadastrés section AB n° [Cadastre 4] et n° [Cadastre 5] pour une contenance totale de 23a 15ca,

- juger que l'affaire sera rappelée devant le juge de l'exécution pour fixation de la date de l'audience de vente, laquelle interviendra sur la mise à prix de 48 000 euros dans un délai compris entre deux et quatre mois à compter du prononcé de l'arrêt,

- autoriser le poursuivant à faire procéder à la visite des biens et droits immobiliers saisis par la SCP [R]-[U]-[F]-[Z], commissaires de Justice à [Localité 12] dans les jours précédents la vente, avec le concours, si nécessaire, d'un serrurier et de la force publique,

- ordonner que la publicité de la vente se fera conformément aux règles édictées par les articles R. 322-31 et R. 322-32 du code des procédures civiles d'exécution, avec une parution sur les sites internet : Licitor.com et Avoventes.fr,

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente.

Pour le cas où la vente amiable serait autorisée,

- s'assurer qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles des débiteurs,

- fixer le prix plancher à la somme de 110 000 euros, montant du prix en deçà duquel l'immeuble ne pourra être vendu,

- taxer les frais de poursuite à la demande du créancier poursuivant à hauteur de 2 377,32 euros,

- rappeler que les frais de saisie immobilière et les émoluments de vente amiable dus à l'avocat poursuivant (article A. 444-191-V du code de commerce) sont à la charge de l'acquéreur en sus du prix de vente,

- ordonner la consignation du prix de vente entre les mains de la caisse des dépôts et consignations,

- juger que l'affaire sera rappelée devant le juge de l'exécution à une audience aux fins de constatation de la vente amiable, prorogation du délai pour vendre ou orientation en vente forcée, audience qui se tiendra dans un délai qui ne peut excéder quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir,

En tout état de cause,

- juger irrecevable pour défaut de qualité à agir la demande tirée d'une prétendue irrégularité affectant la représentation de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est,

- juger prescrite et donc irrecevable cette demande,

- débouter Mme [X] et M. [Y] de l'ensemble de leurs demandes,

- ordonner la publication du jugement à intervenir en marge du commandement de payer valant saisie au service de la publicité foncière de [Localité 12],

- condamner solidairement M. [Y] et Mme [X] à payer à la société Eos France, ès qualité,s la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. [Y] et Mme [X] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Franck Derbise.

Par conclusions du 21 mars 2024, Mme [X] demande à la cour de :

- débouter la société Eos France de l'ensemble de ses demandes,

- ordonner la jonction des procédures portant les RG n°23/04669 et 23/04727 sous le seul numéro de RG n°23/04727,

- dire et déclarer que la cession de créance ne répond pas aux exigences légales si bien que la société Eos France n'a pas qualité à agir dans la présente procédure,

- dire et déclarer que la société Eos France ne justifie pas d'un titre exécutoire pour poursuivre la procédure de saisie immobilière,

- en conséquence, prononcer la nullité du commandement de payer valant saisie immobilière ainsi que la radiation du commandement auprès du service de publicité foncière,

- à titre subsidiaire, autoriser Mme [X] à procéder à la vente amiable du bien immobilier, fixer le montant de la mise à prix au-delà duquel l'immeuble ne peut être vendu au regard des conditions économiques du marché, ordonner le rappel de l'affaire par devant le juge de l'exécution à une audience aux fins de constatations de vente amiable, prorogation du délai pour vendre par devant le tribunal judiciaire de Laon,

- à titre infiniment subsidiaire, ordonner la vente forcée, rappeler l'affaire par devant le juge de l'exécution et fixer la date de l'audience de vente, moyennant le prix minimum de 100 000 euros,

- en tout état de cause, condamner la société Eos France au paiement d'une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Conformément à l'article 367 du code de procédure civile, il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner la jonction des affaires RG n°23/04669 et 23/04727 sous le seul numéro de RG n°23/04669.

1. Sur la qualité à agir de la société Eos France

Mme [X] soutient que le bordereau de cession de créance du 27 décembre 2021 est insuffisant pour identifier les créances cédées, de sorte que la société Eos France, en qualité de recouvreur du Fonds, est dénué de qualité à agir aux fins de recouvrement de la créance issue du prêt notarié du 18 avril 2014.

La société Eos France réplique que le bordereau de cession répond aux exigences légales.

Sur ce, aux termes de l'article L. 214-169 du code monétaire et financier, l'acquisition ou la cession de créances par un organisme de financement s'effectue par la seule remise d'un bordereau. Si ce bordereau doit comporter, en application du 4° de l'article D. 214-227 du même code, la désignation ou l'individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d'y pourvoir, l'indication de la nature et du montant de ces créances et le nom du débiteur ne constituent pas des mentions devant obligatoirement y figurer et l'identification de ces créances peut intervenir au moyen de références chiffrées (Com., 25 mai 2022, pourvoi n°20-16.042, publié).

Le premier juge a constaté que le bordereau de cession de créances du 27 décembre 2021 contenait des références chiffrées permettant l'identification de la créance cédée, soit le numéro de dossier n°11165794 correspondant au numéro figurant sur les courriers de mise en demeure et de déchéance du terme, ainsi que le numéro du prêt notarié du 18 avril 2014, n°00000346128. Il a pu en déduire que le Fonds avait bien qualité de créancier et que, par conséquent, la société Eos France, agissant en qualité de recouvreur du Fonds, avait qualité à agir aux fins de recouvrement de la créance issue du prêt notarié du 18 avril 2014.

Il convient, par ailleurs, de constater que Mme [X] ne conteste pas que la cession de créance n'avait pas à être notifiée, celle-ci étant opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau en application de l'article L. 241-169, V, du code monétaire et financier.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité à agir de la société Eos France, mais infirmé en ce qu'il a constaté que la cession de créance est inopposable aux débiteurs saisis et, en conséquence, que le créancier poursuivant ne justifie pas détenir une créance exigible.

2. Sur la validité du titre exécutoire fondant les poursuites

Mme [X] soutient que l'acte notarié de prêt n'est ni paraphé, ni signé par la Caisse régionale du crédit agricole mutuel du Nord Est ou son représentant, et que l'acte mentionne que la banque est représentée par Mme [N], en vertu des pouvoirs qui lui ont été donnés par M. [T], agissant en qualité de responsable du prêt en date du 28 mars 2014. L'acte n'est pas signé et la procuration de l'acte n'est pas annexée.

La société Eos France réplique que Mme [X] est irrecevable à se prévaloir des irrégularités affectant la représentation conventionnelle de la banque, qu'elles tiennent en une nullité du mandat, un dépassement ou une absence de pouvoir, puisqu'elles sont sanctionnées par une nullité relative que seule la partie représentée a qualité à demander. Elle ajoute qu'en tout état de cause, en application de l'article 34, alinéa 1, 3 et 4 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971, la copie exécutoire, qui n'a pas à être signée par les parties, ne reproduit pas obligatoirement les paraphes et signatures de la minute, chaque feuille de la copie étant dans ce cas revêtue du paraphe du notaire, ce qui est le cas en l'espèce. Enfin, il résulte de l'article 21 de ce même décret que la copie exécutoire n'a pas à comporter les procurations en annexe.

Sur ce, aux termes de l'article R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution, à l'audience d'orientation, le juge de l'exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies, c'est-à-dire que le créancier est muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et que le bien saisi est de nature immobilière et saisissable, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.

Aux termes de l'article 1318 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, l'acte qui n'est point authentique par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée, s'il a été signé des parties.

Les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d'une partie à un acte notarié, qu'elles tiennent en une nullité du mandat, un dépassement ou une absence de pouvoir, sont sanctionnées par la nullité relative de l'acte accompli pour le compte de la partie représentée, qui seule peut la demander, à moins qu'elle ratifie ce qui a été fait par elle hors ou sans mandat, dans les conditions de l'article 1998, alinéa 2 (1re Civ., 2 juillet 2014, pourvoi n° 13-19.626, publié).

Selon l'article 34, alinéas 1, 3 et 4, du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, les copies exécutoires et les copies authentiques sont établies de façon lisible et indélébile sur un papier d'une qualité offrant toute garantie de conservation, chaque feuille est revêtue du paraphe du notaire à moins que toutes les feuilles ne soient réunies par un procédé empêchant toute substitution ou addition ou qu'elles ne reproduisent les paraphes et signatures de la minute, la signature du notaire et l'empreinte du sceau sont apposées à la dernière page et il est fait mention de la conformité de la copie exécutoire ou de la copie authentique avec l'original.

Il résulte de ces dispositions que la copie exécutoire, qui n'a pas à être signée par les parties, ne reproduit pas obligatoirement les paraphes et signatures de la minute, chaque feuille de la copie étant dans ce cas revêtue du paraphe du notaire (2e Civ., 21 février 2019, pourvoi n° 18-13.355, diffusé).

Par ailleurs, il ressort des dispositions combinées des articles 21 et 34 du décret n°71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, dans leur rédaction issue du décret n°2005-973 du 10 août 2005, et de l'article 1er de la loi n°76-519 du 15 juin 1976, que, si l'acte notarié doit comporter les procurations en annexe, à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte, ces exigences ne visent pas la copie exécutoire qu'en délivre celui-ci (1re Civ., 10 septembre 2015, pourvoi n° 14-13.237, publié).

En l'espèce, Mme [X] prétend que la société Eos France ne justifie pas d'un titre exécutoire pour poursuivre la procédure de saisie immobilière, sans toutefois demander l'annulation de l'acte de prêt. Il s'agit d'un simple moyen de contestation de la régularité de la saisie, ce qui prive de pertinence les prétentions des intimées visant à faire déclarer irrecevable sa 'demande tirée d'une prétendue irrégularité affectant la représentation de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord Est'.

D'une part, Mme [X] n'a pas qualité à soulever d'éventuelles irrégularités affectant la représentation conventionnelle de la banque, partie à l'acte notarié de prêt. D'autre part, la copie exécutoire de l'acte notarié du 18 avril 2014 comporte, à chacune de ses feuilles, le paraphe de M. [S] [L], notaire. Enfin, si cette copie ne comporte pas en annexe les procurations en vertu desquelles la banque a été représentée, cette formalité n'est pas exigée à peine de disqualification du caractère authentique de l'acte. Les moyens opposés au caractère exécutoire du titre sont donc inopérants.

La demande d'annulation du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 21 octobre 2021 sera, par conséquent, rejetée. Le jugement est infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de vente forcée des biens saisis.

3. Sur le montant de la créance

Aux termes de l'article R. 322-18 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires.

Selon le décompte fourni par la société Eos France, la créance du Fonds s'élève, au 17 octobre 2023, à la somme de 96 355,83 euros, se décomposant comme suit :

Capital restant dû au 11/08/2021

79 922,41 euros

Intérêts au taux de 2,61% sur capital du 11/08/2021 au 17/10/2023 4 560,57 euros

Echéances échues impayées au 11/08/2021 4 630,17 euros

Majoration d'intérêts 3% sur les échéances en retard 990,46 euros

Intérêts au taux de 2,61% sur échéancesdu 11/08/2021 au 17/10/2023 264,19 euros

Indemnité contractuelle de 7% 5 988,01 euros

Le montant retenu pour la créance du Fonds sera, par conséquent, fixé à la somme de 96 355,83 euros, avec intérêts au taux contractuel de 2,61 % l'an à compter du 18 octobre 2023 sur la somme de 84 552,58 euros.

4. Sur la vente

A défaut de comparution de M. [Y] et d'accord de sa part pour la vente amiable s'agissant d'un bien immobilier indivis, il convient d'ordonner la vente forcée des biens saisis et de renvoyer au juge de l'exécution de Laon le soin d'en fixer les modalités.

Le jugement est infirmé.

5. Sur les frais du procès

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles seront infirmées.

Il sera dit que les dépens seront compris dans les frais de vente soumis à taxe, la demande de distraction Me Derbise étant rejetée. Mme [X] sera condamnée à payer à la société Eos France la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt par défaut, rendu par mise à disposition au greffe, après débats publics, en dernier ressort,

Ordonne la jonction des affaires RG n°23/04669 et 23/04727 sous le seul numéro de RG n°23/04669,

Infirme le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité à agir de la société Eos France,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Rejette la demande d'annulation du commandement de payer valant saisie-immobilière en date du 21 octobre 2021,

Fixe le montant de la créance retenue pour la somme de 96 355,83 euros, outre intérêts postérieurs au taux contractuel de 2,61 % l'an dus à compter du 18  octobre 2023 jusqu'à parfait paiement,

Ordonne la vente forcée des biens et droits immobiliers sis sur la commune de [Localité 13], [Adresse 6], cadastrés section AB n° [Cadastre 4] et n° [Cadastre 5] pour une contenance totale de 23a 15ca,

Renvoie au juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Laon le soin d'en fixer les modalités,

Dit que les dépens seront compris dans les frais de vente soumis à taxe,

Rejette la demande de distraction de Me Derbise,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [C] [X] à payer à la société Eos France la somme de 2 500 euros,

La déboute de sa demande à ce titre.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/04669
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;23.04669 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award