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25/04/2024 | FRANCE | N°23/03756

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 25 avril 2024, 23/03756


ARRET







[Y]

[N]

[G]





C/



[F]













DB/SGS/DPC/VB





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU VINGT CINQ AVRIL

DEUX MILLE VINGT QUATRE





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/03756 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I3P6



Décision déférée à la cour : ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU TROIS JUILLET DEUX MILLE V

INGT TROIS





PARTIES EN CAUSE :



Madame [Z] [Y]

née le 22 Mars 1976 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/002435 du 09/11/2023 accordée par le bureau ...

ARRET

[Y]

[N]

[G]

C/

[F]

DB/SGS/DPC/VB

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU VINGT CINQ AVRIL

DEUX MILLE VINGT QUATRE

Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/03756 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I3P6

Décision déférée à la cour : ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU TROIS JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

PARTIES EN CAUSE :

Madame [Z] [Y]

née le 22 Mars 1976 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/002435 du 09/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS)

Monsieur [T] [N]

né le 19 Janvier 1972 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [O] [G]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentés par Me Samia AGGAR, avocat au barreau d'AMIENS

APPELANTS

ET

Monsieur [C] [F]

né le 22 Octobre 1966

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Sandrine MILHAUD, avocat au barreau d'AMIENS

INTIME

DEBATS :

A l'audience publique du 22 février 2024, l'affaire est venue devant M. Douglas BERTHE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de M. Douglas BERTHE, Président de chambre, Président, Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L'ARRET :

Le 25 avril 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

*

* *

DECISION :

Par contrat du 28 février 2015 prenant effet au 1er mars 2015, M. [C] [F] a donné à bail d'habitation à Mme [Z] [Y] un appartement situé [Adresse 1] pour un loyer mensuel initial de 690 euros outre 30 euros de provisions sur charges.

Par acte de cautionnement du même jour, Mme [O] [G] et M. [T] [N] se sont portés cautions solidaires de Mme [Z] [Y].

Mme [Y] perçoit l'allocation de logement qui lui est servie par la caisse d'allocation familiale à hauteur de 455 euros par mois.

Des loyers étant demeurés impayés, le 25 octobre 2022, M. [F] a fait signifier à sa locataire un commandement de payer pour la somme en principal de 1 540 euros. Ce commandement a été dénoncé à Mme [G] le 2 novembre 2022 et à M. [N] le 9 novembre 2022.

Ce commandement de payer vise expressément la clause de résiliation portée au bail.

Par actes de commissaire de justice des 2 janvier 2023, 5 janvier 2023 et 17 janvier 2023, M. [F] a fait assigner Mme [Y], Mme [G] et M. [N] en référé aux fins notamment de :

- Constater que le bail intervenu entre les parties se trouve résilié de plein droit par le jeu de la clause résolutoire,

En conséquence,

- dire que les lieux devront être libérés par la locataire et à défaut ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef,

- Condamner solidairement la locataire et les cautions solidaires à titre provisionnel au paiement :

- d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer à compter de la résiliation du bail jusqu'au départ effectif des lieux,

- de la somme de 2 690 euros au titre de l'arriéré locatif,

- de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure.

Par ordonnance de référé du 3 juillet 2023 signifiée le 21 juillet 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Amiens, statuant en référé a :

- Au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles en aviseront, mais dès à présent et vu l'urgence :

- Constaté la recevabilité des demandes de M. [C] [F],

- Constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 28 février 2015 entre M. [C] [F] et Mme [Z] [Y] concernant l'appartement à usage d'habitation situé [Adresse 1] sont réunies à la date du 26 décembre 2022 pour non-paiement des loyers et charges, par application de la clause résolutoire contractuelle,

- Dit n'y avoir lieu à accorder à Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] des délais de paiement de nature à suspendre les effets de la clause résolutoire contenue au contrat de bail,

- Ordonné en conséquence à Mme [Z] [Y] de libérer les lieux et de restituer les clés dès la signification de l'ordonnance,

- Dit qu'à défaut pour Mme [Z] [Y] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, M. [C] [F] pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique, et au transport des meubles laissés dans les lieux, dans tout local qu'il lui plaira aux frais et risques des personnes expulsées,

- Condamné solidairement Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à verser à M. [C] [F] à titre provisionnel la somme de 7 930 euros (décompte arrêté au 2 juin 2023), avec les intérêts au taux légal à compter respectivement du 2 janvier 2023, du 5 janvier 2023 et du 17 janvier 2023 pour la somme de 2 690 euros et à compter de l'ordonnance pour le surplus,

- Condamné solidairement Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à payer à M. [C] [F] à titre provisionnel une indemnité mensuelle d'occupation à compter du 26 décembre 2022 et jusqu'à la date de la libération définitive des lieux et la restitution des clés,

- Fixé cette indemnité mensuelle d'occupation au montant du loyer et des charges, calculés tels que si le contrat s'était poursuivi,

- Condamné in solidum Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et de sa dénonciation à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions, le coût de l'assignation en référé et de sa notification à la préfecture,

- Condamné Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à verser chacune à M. [C] [F] une somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté M. [C] [F] de ses autres demandes,

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

- Dit que l'ordonnance sera transmise par les soins du greffe au préfet de la Somme.

Par deux déclarations du 4 août 2023 respectivement à 16h10 et 16h28, Mme [Y], Mme [G] et M. [N] ont interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 9 octobre 2023, la jonction des procédures RG 23.03758 et RG 23.03756 a été ordonnée.

La première présidente, par ordonnance en date du 25 janvier 2024 a déclaré Mme [Y] recevable en sa demande tendant à la suspension de l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé du 3 juillet 2023 et l'a déboutée de cette demande.

Vu les conclusions récapitulatives déposées le 8 novembre 2023, par lesquelles Mme [Y], Mme [G] et M. [N] demandent à la cour de :

- Les dire recevables et est bien fondés en leur appel et y faisant droit,

- Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,

En conséquence, et statuant à nouveau,

- Déclarer irrecevable la demande en première instance engagée par M. [F],

- Débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes,

- Suspendre à titre rétroactif l'effet de la clause résolutoire inscrite au contrat de bail du fait que le logement présente des dégradations notamment de l'humidité tellement importante qu'elle rend l'habitabilité impossible,

Subsidiairement,

- Réduire le paiement des loyers rétroactivement jusqu'à l'exécution des travaux par le bailleur,

- Accorder à Mme [Y] un délai de paiement de sa dette locative pour une durée de deux ans sur le fondement de l'article 1343-5 du Code civil,

- Dire et juger que les effets de la clause résolutoire seront suspendus dans ce délai,

- Condamner M. [F] à payer à Mme [Y] [Z] la somme de 5 000 euros au titre des dommages-intérêts suivant les dispositions de l'article 1240 du code civil,

- Condamner M. [F] à payer à Mme [Y] [Z] la somme de 15 000 euros au titre du préjudice de jouissance lié à l'occupation d'un logement indécent et malsain pendant plus de 8 ans,

En toute état de cause,

- Condamner M. [F] à payer à Mme [Y] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les conclusions récapitulatives déposées le 6 février 2024 par lesquelles M. [F] demande à la cour de :

- Le recevoir en ses conclusions complétives et récapitulatives d'intimé, l'y déclarer bien fondé,

- Déclarer irrecevables les demandes indemnitaires (5 000 euros à titre de dommages-intérêts et 15 000 euros au titre du préjudice de jouissance) formées par Mme [Y],

- Déclarer ainsi l'action entreprise et ses demandes recevables,

- Confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, sauf à actualiser le montant des condamnations en paiement prononcées,

- Condamner solidairement Mme [Y], Mme [G] et M. [N] à lui payer les sommes suivantes :

- 1 324,41 euros outre intérêts au taux légal courant à compter du 25 octobre 2022 (date de délivrance du commandement de payer visant la clause résolutoire) au titre de l'arriéré dû au titre du commandement de payer visant la clause résolutoire,

- un mois de loyer et charges (décembre 2022) suivant la délivrance du commandement de payer visant la clause résolutoire, soit 720 euros en deniers ou quittance (suivant le maintien ou la restitution des versements opérés par la caisse d'allocation familiale ), outre intérêts au taux légal courant à compter du 25 décembre 2022, date d'expiration du délai imparti,

- 720 euros par mois à parfaire, avec indexation annuelle, au titre des indemnités d'occupation dues à compter du 25 décembre 2022 et jusqu'à libération effective et complète des lieux, en deniers ou quittance (suivant la conservation ou la restitution des versements opérés par la caisse d'allocation familiale), outre intérêts au taux légal courant à compter de la date mensuelle de l'exigibilité de chaque indemnité d'occupation,

En tout état de cause;

- Débouter Mme [Y], Mme [G] et M. [N] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- Condamner solidairement Mme [Y], Mme [G] et M. [N] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- Condamner solidairement Mme [Y], Mme [G] et M. [N] au entiers dépens incluant les frais de poursuite, selon décompte du 7 décembre 2023.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

La clôture a été prononcée le 8 février 2024 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 22 février 2024.

Par conclusions du 21 février 2024, Mme [Y] sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture du 8 février 2023 aux fins de nouvelles demandes et production aux débats de nouvelles pièces.

Elle expose :

- que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a examiné sa demande concernant la fragilité de sa santé et a, par décision du 17 janvier 2024, reconnu sa situation de handicap,

- qu'elle perçoit désormais des allocations aux adultes handicapés à compter du 1er novembre 2023 jusqu'au 31 octobre 2028,

- qu'une mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial a été instaurée à son égard depuis le 11 octobre 2023 et jusqu'au 31 octobre 2024,

- qu'elle sollicite que la cour ordonne au bailleur de lui fournir un RIB afin d'effectuer les virements des loyers.

Par message RPVA du 21 février 2024, le conseil de M. [F] s'oppose catégoriquement à la demande de rabat de l'ordonnance de clôture. Il indique que les nouvelles pièces adverses sont toutes antérieures à la date de clôture qui était connue des parties depuis la fixation de l'affaire à bref délai.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rabat de l'ordonnance de clôture :

Il résulte de l'article 803 du code de procédure civile que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

En l'espèce, les pièces et les événements que fait valoir Mme [Y] au soutien de sa demande sont tous antérieurs à la clôture et ne sont donc pas de nature à justifier la révocation de l'ordonnance de clôture.

Dès lors, cette demande sera rejetée et les nouvelles conclusions du 21 février 2024 ainsi que les nouvelles pièces n° 25 à 27 seront écartées.

Sur l'irrecevabilité des demandes indemnitaires de Mme [Y], comme étant nouvelles à hauteur d'appel :

Il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, les demandes de condamnation de M. [F] à payer les sommes de 5 000 euros au titre des dommages-intérêts et 15 000 euros au titre du préjudice de jouissance n'ont pas été articulées en première instance. Elle sont donc nouvellement formées à hauteur d'appel et seront donc déclarées irrecevables.

Sur la recevabilité de l'action du bailleur :

Il résulte de l'article 1er du décret n° 2017-923 du 9 mai 2017 que l'assignation visant à voir prononcer ou constater la résiliation d'un contrat de bail d'habitation doit être accompagnée d'un avis informant son destinataire de la possibilité de déposer, avant l'audience, une demande d'aide juridictionnelle.

En l'espèce, les assignations des 2, 5 et 17 janvier 2023, mentionnent que l'avis prévu par le décret suscité a été remis en main propre à Mme [Y] et à Mme [G] ainsi qu'à une personne présente au domicile de M. [N], en son absence.

Par ailleurs, une copie de l'assignation a été notifiée à la préfecture de la Somme par la voie électronique plus de deux mois avant l'audience de première instance et M. [F] a justifié avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation.

Son action est donc recevable et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur l'acquisition des effets de la clause résolutoire et ses conséquences :

L'article 24§ I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 prévoit que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie produit effet deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

Selon l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Aux termes de l'article 9 code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Mme [Y] indique être fondée à opposer au bailleur l'exception d'inexécution dans la mesure où ce dernier ne satisferait pas lui-même à ses obligations d'entretien et de réparation du logement. Elle produit notamment trois rapports de son assureur faisant état de trois dégâts des eaux, notamment liés au débordement des eaux pluviales.

Ces rapports ne sont pas contradictoires et leurs indications s'avèrent extrêmement lapidaires de sorte que les circonstances et les causes de l'apparition de ces dégâts apparaissent incertaines.

En tout état de cause et contrairement à ses allégations, Mme [Y] ne justifie nullement avoir informé son bailleur sur les désordres que comporterait l'immeuble ou ses équipements et encore moins d'avoir mis en demeure ce dernier d'y remédier.

Dès lors, l'exception d'inexécution qu'elle invoque sera écartée et ses demandes à ce titre de suspension à titre rétroactif de l'effet de la clause résolutoire et de réduction des loyers seront rejetées par ajout à la décision entreprise.

En l'espèce, le bail conclu le 28 février 2015 entre Mme [Y] et M. [F] contient une clause aux termes de laquelle le contrat se trouvera de plein droit résilié, en cas de défaut de paiement des loyers et accessoires, deux mois après un commandement de payer resté infructueux ainsi qu'en cas de non justification de la souscription d'une police d'assurance dans un délai d'un mois à compter du commandement d'en justifier.

Un commandement de payer visant cette clause a été signifié à la locataire le 25 octobre 2022, pour la somme en principal de 1 540 euros.

Ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu'il y a lieu de constater que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail étaient réunies à la date du 26 décembre 2022.

Ce commandement a été dénoncé à Mme [G] le 2 novembre 2022 et à M. [N] le 9 novembre 2022.

À l'instar de la juridiction du premier degré, il convient d'en tirer les conséquences et de relever que depuis le 26 décembre 2022 :

- Mme [Y] occupe sans droit ni titre les lieux et qu'il y a donc lieu d'ordonner à celle-ci de libérer les lieux, faute de quoi, il y aura lieu de l'expulser avec l'assistance de la force publique et d'autoriser la séquestration de ses meubles,

- Mme [Y], Mme [G] et M. [N] sont débiteurs envers M. [F] d'une indemnité d'occupation dont le montant doit être fixé à celui du loyer applicable à la date de la résiliation, qu'il y a lieu de les condamner solidairement au paiement, à titre provisionnel, du montant des indemnités d'occupation correspondant à la période entre la date de la résiliation du bail et la date de sortie effective des lieux, cette indemnité d'occupation devant faire l'objet d'une indexation dans les mêmes conditions que celles prévues pour le loyer si le bail s'était poursuivi.

La décision entreprise sera donc confirmée sur ces points.

Sur le montant de l'arriéré locatif :

Il résulte de l'article 1231-6 et 1231-7 du code civil que les dommages-intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

Il s'infère de ces dispositions que les intérêts sont encourus sur l'éventuel différentiel entre l'indemnité d'occupation due et l'indemnité d'occupation effectivement acquittée au fur et à mesure des échéances échues.

Dans la mesure où M. [F] ne justifie pas que la caisse d'allocation familiale lui demande le remboursement des allocations logement qu'il a perçues depuis la constitution de l'impayé, les versements opérés par la caisse seront donc pris en charge dans le calcul de la dette locative.

M. [F] produit un décompte démontrant que Mme [Y], Mme [G] et M. [N] restent lui devoir, après soustraction des frais de poursuite, la somme de 4 613 euros à la date du 7 décembre 2023 sur sa créance de 11 620 euros, eu égard à quatre versements effectués par Mme [Y] (30 euros x 3 + 250 euros) et aux paiements par la caisse d'allocation familiale (6 667 euros), soit 6 977 euros payés au total (11 620 euros - 6 977 euros).

Cette créance actualisée de 4 613 euros résulte du solde impayé des indemnités d'occupations de 720 euros par mois fixées par la juridiction du premier degré, soit un retard de paiement équivalent à presque sept mois.

Ce décompte n'est pas contesté par les appelants.

L'arriéré locatif ayant varié depuis la date de la condamnation en première instance, la décision entreprise sera réformée en sa disposition relative au décompte de la dette locative.

Mme [Y], Mme [G] et M. [N] seront donc solidairement condamnés à verser à titre provisionnel la somme de 4 613 euros à M. [F] (décompte arrêté au 7 décembre 2023) avec intérêts au taux légal sur le différentiel entre l'indemnité d'occupation due et l'indemnité d'occupation effectivement acquittée et au fur et à mesure et à compter de chaque échéance échue.

Sur la demande de délai de paiement et la demande de suspension des effets de la clause résolutoire :

Il résulte de l'article 1343-5 du code civil que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Il ressort de l'article 24 § V et VII de la loi n° 89-462 du 6 juillet la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 à laquelle le contrat est soumis, que le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus par le juge. Cette suspension prend fin dès le premier impayé ou dès lors que le locataire ne se libère pas de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge. Ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.

En l'espèce, Mme [Y] n'apporte pas la démonstration qu'elle a repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience ni se trouver en situation de régler sa dette locative. Il est au contraire constant qu'elle n'a procédé à aucun versement depuis le prononcé de la décision de première instance et que le dernier versement de 30 euros qu'elle a effectué par chèque a été retourné impayé le 24 février 2023.

Cette situation hautement préjudiciable à M. [F], qui est un bailleur particulier, ne permet pas d'accorder des délais de paiement à Mme [Y] ni a fortiori et pour les mêmes motifs de suspendre les effets de la clause résolutoire.

Dès lors, les demandes tendant à accorder à Mme [Y] un délai de paiement de sa dette locative pour une durée de deux ans et de suspension des effets de la clause résolutoire seront rejetées et la décision entreprise sera confirmée sur ces chefs.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Mme [Y] Mme [G] et M. [N] succombant, seront condamnés aux entiers dépens et les dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de la décision entreprise seront confirmées.

Il conviendra de préciser que les dépens incluront les frais de poursuite actualisés à 1 187,39 euros au 7 décembre 2023.

L'équité commande de condamner in solidum Mme [Y] Mme [G] et M. [N] à payer à M. [F] la somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture et en conséquence écarte les nouvelles conclusions des appelants déposées le 21 février 2024 ainsi que leurs nouvelles pièces numérotées 25, 26 et 27,

Déclare irrecevables les demandes de condamnation de M. [C] [F] à payer à Mme [Z] [Y] les sommes de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts et de 15 000 euros au titre du préjudice de jouissance allégué,

Confirme la décision entreprise sauf en ce qu'elle a condamné solidairement Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à verser à M. [C] [F] à titre provisionnel la somme de 7 930 euros (décompte arrêté au 2 juin 2023), avec les intérêts au taux légal à compter respectivement du 2 janvier 2023, du 5 janvier 2023 et du 17 janvier 2023 pour la somme de 2 690 euros et à compter de l'ordonnance pour le surplus,

Statuant à nouveau sur ce chef et y ajoutant,

Condamne à titre provisionnel et solidairement Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à payer à M. [C] [F] en quittances ou par tout versement en numéraire la somme de 4 613 euros (décompte arrêté au 7 décembre 2023), avec les intérêts au taux légal sur le différentiel entre l'indemnité d'occupation due et l'indemnité d'occupation effectivement acquittée, au fur et à mesure et à compter de chaque échéance échue,

Rejette les demandes de suspension à titre rétroactif de l'effet de la clause résolutoire et de réduction des loyers,

Condamne in solidum Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] aux dépens de l'appel, en ce compris les frais de poursuite de 1 187,39 euros, selon décompte actualisés au 7 décembre 2023,

Condamne in solidum Mme [Z] [Y], Mme [O] [G] et M. [T] [N] à payer à M. [C] [F] la somme de 1 500 euros en indemnisation des frais irrépétibles exposés par ce dernier à hauteur d'appel,

Dit que le présent arrêt sera transmis par les soins du greffe au préfet de la Somme,

Rejette les autres demandes.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/03756
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;23.03756 ?
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