La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2024 | FRANCE | N°23/01356

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 25 avril 2024, 23/01356


ARRET







Etablissement Public L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT - OPAC DE L'OISE





C/



[D]













DB/SGS/DPC/VB





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU VINGT CINQ AVRIL

DEUX MILLE VINGT QUATRE





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/01356 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IW2R



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEU

X DE LA PROTECTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS





PARTIES EN CAUSE :



Etablissement Public L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT - OPAC DE L'OISE, agissant poursuites et diligences de son rep...

ARRET

Etablissement Public L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT - OPAC DE L'OISE

C/

[D]

DB/SGS/DPC/VB

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU VINGT CINQ AVRIL

DEUX MILLE VINGT QUATRE

Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 23/01356 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IW2R

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

PARTIES EN CAUSE :

Etablissement Public L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT - OPAC DE L'OISE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Renaud DEVILLERS, avocat au barreau de BEAUVAIS

APPELANTE

ET

Monsieur [M] [D]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Assigné à étude le 12/06/2023

INTIME

DEBATS :

A l'audience publique du 22 février 2024, l'affaire est venue devant M. Douglas BERTHE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de M. Douglas BERTHE, Président de chambre, Président, Mme Graziella HAUDUIN, Présidente de chambre et Mme Clémence JACQUELINE, Conseillère, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L'ARRET :

Le 25 avril 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Douglas BERTHE, Président de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.

*

* *

DECISION :

Par contrat du 16 février 2021, l'Office public de l'habitat - Opac de l'Oise (l'Opac de l'Oise) a donné à bail à M. [M] [D] un appartement situé [Adresse 1] à [Localité 2], pour un loyer mensuel initial de 218,77 euros.

Le bailleur, relevant des troubles du voisinage occasionnés par M. [D], a fait assigner ce dernier par acte d'huissier du 13 octobre 2022, en vue d'obtenir la résiliation du bail, son expulsion et sa condamnation au paiement de l'arriéré locatif.

À l'audience de première instance, M. [D], comparant en personne, a reconnu être redevable d'un arriéré locatif et a sollicité des délais de paiement par mensualités de 50 euros.

Le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Beauvais, par jugement du 13 février 2023, a :

- Déclaré irrecevable la demande de l'Opac de l'Oise en résiliation du bail conclu avec M. [M] [D] le 16 février 2021,

- Déclaré irrecevable la demande de l'Opac de l'Oise aux fins d'expulsion de M. [M] [D] et en paiement d'une indemnité d'occupation,

- Condamné M. [M] [D] à verser à l'Opac de l'Oise la somme de 1 198,01 euros selon décompte arrêté au 7 septembre 2022,

- Autorisé M. [M] [D] à s'acquitter de cette somme en 23 mensualités de 50 euros chacune et une 24 e mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts,

- Précisé que le paiement de chaque mensualité devra intervenir avant le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la signification du jugement,

- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- Condamné M. [M] [D] à verser à l'Opac de l'Oise la somme de 150 euros au titre de I'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [M] [D] aux dépens,

- Rappelé que son jugement est de plein droit exécutoire par provision.

Par déclaration du 8 mars 2023, l'Opac de l'Oise a interjeté appel de cette décision.

Vu les conclusions récapitulatives déposées le par lesquelles l'Opac de l'Oise demande à la cour de :

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Déclaré irrecevable sa demande en résiliation du bail conclu avec M. [M] [D] le 16 février 2021,

- Déclaré irrecevable sa demande aux fins d'expulsion de M. [M] [D] et en paiement d'une indemnité d'occupation,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [M] [D] à lui payer la somme de 1 198,01euros pour la dette de loyer et l'indemnité de procédure pour 150 euros,

Statuant à nouveau,

- Juger comme étant recevable sa demande visant à la résiliation judiciaire du bail conclu avec M. [M] [D] ainsi qu`aux fins d'expulsion de M. [M] [D] et ainsi qu'au paiement d'une indemnité d'occupation,

Par conséquent,

- Prononcer la résiliation judiciaire du bail consenti à M. [M] [D] le 16 février 2021 concernant l'appartement sis [Adresse 1], en raison des troubles anormaux de voisinage commis par M. [M] [D],

- Ordonner l'expulsion de M. [M] [D], ainsi que de tout occupant de son chef, des lieux loués au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier,

- Débouter M. [M] [D] de toutes prétentions contraires,

- Supprimer le délai de deux mois prévus à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution pour lui permettre ainsi d'expulser le locataire dès signification du commandement d'avoir à libérer les lieux,

- Condamner M. [M] [D] à lui payer, jusqu'à libération effective des lieux et remise des clés, une indemnité mensuelle d'occupation correspondant au montant du loyer en son dernier état, ainsi que les charges, outre revalorisation légale, le cas échéant,

- Condamner M. [M] [D] au paiement d'une indemnité de procédure de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront le coût exposé pour parvenir à l'expulsion du locataire.

La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été respectivement signifiées à étude et à la personne de M. [M] [D] les 12 juin et 30 mai 2023 et ce dernier n'a pas constitué avocat.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures de l'appelant pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de ses prétentions.

La clôture a été prononcée le 15 novembre 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 22 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de résiliation judiciaire du bail :

Selon les articles 1103, 1227, 1728, 1729 et 1741 du code civil, les contrats légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, le contrat de bail se résout par le défaut des parties de remplir leur engagement, le preneur est tenu d'user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, si le preneur n'use pas de la chose louée raisonnablement, le bailleur peut faire résilier le bail, la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

Le manquement contractuel doit présenter toutefois une gravité suffisante pour justifier de résiliation du bail.

En outre, en matière de bail à usage d'habitation, l'article 24§ IV de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que les § les II et III de cet article imposant la saisine de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives et l'information du représentant de l'État dans le département, sont applicables aux assignations tendant au prononcé de la résiliation du bail lorsqu'elle est motivée par l'existence d'une dette locative du preneur.

Le contrat de bail conclu entre les parties le 16 février 2021 stipule en son l'article 6.1 que le locataire est tenu d'user paisiblement de la chose louée en s'abstenant de troubler, lui et les personnes vivant à son foyer, la tranquillité, la sécurité ou la bonne tenue de l'immeuble, qu'il doit en outre tenir les lieux loués et leur installation ainsi que les parties communes en état de propreté et de fonctionnement.

En l'espèce, il résulte de l'assignation du 13 octobre 2022 que l'Opac de l'Oise a assigné son locataire en résiliation judiciaire du bail à raison des nuisances sonores occasionnés par M. [D] aux autres occupants de l'immeuble et de l'entreposage de ses déchets ménagers dans les parties communes et non dans le local réservé à cet effet.

Le bailleur n'a en outre adressé aucun commandement de payer au locataire visant la clause résolutoire et n'a donc jamais sollicité le constat de l'acquisition de la clause résolutoire.

Ce n'est que par une demande distincte que le bailleur a sollicité la condamnation du locataire au paiement de l'arriéré locatif.

Il ne résulte donc d'aucun élément de la procédure que la demande de résiliation judiciaire du bail formée par l'Opac de l'Oise était motivée par l'existence de la dette locative du preneur.

La demande de résiliation judiciaire est ainsi recevable et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.

Le bailleur produit des fiches de compte-rendu du gardien de l'immeuble desquelles il ressort que :

- les 18 et 26 août 2021, les 10, 18 et 30 septembre 2021, les 2, 6, 12 et 20 octobre 2021, le 15 janvier et le 25 février 2022, les 23 et 27 septembre 2022, M. [D] a émis de la musique fortement et occasionné d'autres nuisances sonores (jeux vidéos et films sur haut-parleur, chants...), ces épisodes s'accompagnant souvent d'insultes et de menaces aux voisins,

- le 21 juillet 2021, M. [D] a menacé par arme à feu un voisin, ce qui a nécessité l'intervention des forces de l'ordre,

- les 23 avril et 4 juin 2022, M. [D] a déposé sur son palier ses déchets ménagers.

Le bailleur produit également :

- quatre mains courantes des 20 et 29 avril 2021 et 19 et 20 juin 2021, desquelles il ressort que M. [D] a émis des nuisances sonores,

- un rapport d'intervention de la police municipale pour tapages occasionnés par M. [D] les 21 avril, 12 et 17 juillet 2021 et nuisance sonores les 29 avril, 19, 26 et 30 juin 2021 ainsi que les 9 et 27 juillet 2021,

- un dépôt de plainte d'un voisin pour agressions sonores réitérées et insultes de mars à juillet 2021,

- une plainte pénale du gardien de l'immeuble pour insultes,

- trois attestations émanant de voisins et une du gardien de l'immeuble faisant état des nuisances sonores récurrentes et du comportement insultant et irrespectueux de M. [D].

À raison de ces faits, l'Opac de l'Oise a adressé à M. [D] :

- une mise en garde le 17 mars 2021,

- un avertissement le 4 juin 2021,

- et cinq mises en demeure de se conformer à ses obligations locatives d'usage paisible de son logement, demeurées vaines.

Il résulte de ces éléments que M. [D] a de façon persistante et récurrente gravement troublé la tranquillité de son voisinage et que cette infraction au bail est d'une gravité suffisante pour justifier de la résiliation judiciaire de celui-ci.

Il y a donc lieu de prononcer la résiliation judiciaire du bail consenti à M. [D] le 16 février 2021 en raison des troubles anormaux de voisinage commis par ce dernier.

Sur les conséquence de la résiliation :

Compte-tenu de la résolution judiciaire du bail, M. [D] occupe sans droit ni titre les lieux.

Cette occupation cause un préjudice au bailleur qui doit être réparé par l'allocation d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer actualisé qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi en tenant compte de sa revalorisation, augmenté des charges à compter de la date du présent arrêt et ce jusqu'à la libération effective des lieux loués par la remise des clefs au bailleur, ou à défaut, un procès-verbal d'expulsion ou de reprise.

En outre, cette occupation des lieux par M. [D] sans droit ni titre nécessite d'ordonner à celui-ci de libérer les lieux, faute de quoi, il y aura lieu de l'expulser au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier.

Par ailleurs, il résulte de l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution que si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement d'avoir à libérer les lieux mais que ce délai ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée.

Il convient de tenir compte de la mauvaise foi persistante dont a fait montre M. [D] depuis son entrée dans les lieux loués en supprimant le délai de deux mois après commandement pour procéder à son expulsion.

Il sera donc ajouté au jugement entrepris de ces chefs.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

M. [D], qui succombe, sera condamné aux dépens de l'appel et la décision entreprise sera confirmée en ses dispositions concernant les dépens et frais irrépétibles.

L'équité commande par ailleurs de condamner M. [D] à payer à l'Opac de l'Oise la somme de 1 000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt de défaut et en dernier ressort, dans les limites de l'appel, mis à disposition au greffe,

Infirme la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de l'Opac de l'Oise en résiliation du bail conclu avec M. [M] [D] le 16 février 2021, déclaré irrecevable la demande de l'Opac de l'Oise aux fins d'expulsion de M. [M] [D] et en paiement d'une indemnité d'occupation,

La confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du bail consenti le 16 février 2021 par l'Office public de l'habitat - Opac de l'Oise à M. [M] [D] et portant sur l'appartement (logement n°56) situé [Adresse 1], à [Localité 2],

Ordonne en conséquence à M. [M] [D] de libérer les lieux et de restituer les clés dès la signification du présent arrêt,

Dit qu'à défaut pour M. [M] [D] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, l'Office public de l'habitat - Opac de l'Oise pourra, sans délai et dès la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

Condamne M. [M] [D] à payer à l'Office public de l'habitat- Opac de l'Oise une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer actualisé qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi en tenant compte de sa revalorisation, augmenté des charges à compter de la date du présent arrêt et ce jusqu'à la libération effective des lieux loués par la remise des clefs au bailleur, ou à défaut, un procès-verbal d'expulsion ou de reprise,

Condamne M. [M] [D] aux dépens de l'appel,

Condamne M. [M] [D] à payer à l'Office public de l'habitat - Opac de l'Oise la somme de 1 000 euros en indemnisation des frais irrépétibles exposés par ce dernier à hauteur d'appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/01356
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;23.01356 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award