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21/03/2024 | FRANCE | N°22/04453

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 21 mars 2024, 22/04453


ARRET

























CAISSE DE CONGES INTEMPERIES BTP CAISSE DU NORD OUEST









C/







S.A.R.L. [5]













VD



COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 21 MARS 2024





N° RG 22/04453 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ISGD





ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE AMIENS EN DATE DU 06 SEPTEMBRE 2022


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PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





CAISSE DE CONGES INTEMPERIES BTP CAISSE DU NORD OUEST, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]





Représentée par Me Safia ABDELKRIM, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 25...

ARRET

CAISSE DE CONGES INTEMPERIES BTP CAISSE DU NORD OUEST

C/

S.A.R.L. [5]

VD

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 21 MARS 2024

N° RG 22/04453 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ISGD

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE AMIENS EN DATE DU 06 SEPTEMBRE 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

CAISSE DE CONGES INTEMPERIES BTP CAISSE DU NORD OUEST, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Safia ABDELKRIM, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 25

Ayant pour avocat plaidant, Me Stéphanie BOULLEN, avocat au barreau de ROUEN

ET :

INTIMEE

S.A.R.L. [5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Amandine SIEMBIDA de la SAS VAUBAN, avocat au barreau de COMPIEGNE

DEBATS :

A l'audience publique du 11 Janvier 2024 devant :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Valérie DUBAELE, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 21 Mars 2024.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

PRONONCE :

Le 21 Mars 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par ordonnance de référé du 6 septembre 2022, le président du tribunal de commerce d'Amiens a :

- condamné la SARL [5] (la société) à payer à la Caisse de congés intempéries BTP du Nord Ouest (la caisse) à laquelle elle est affiliée depuis le 1er février 1996 la somme provisionnelle de 25.117,60 euros (à valoir sur les cotisations restant dues de 2021 et du premier trimestre 2022), avec intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance,

- dit qu'elle pourra s'acquitter de cette somme en 24 mensualités égales et consécutives à compter de la signification de l'ordonnance, les paiements s'imputant sur le principal et que faute de s'acquitter d'un des termes le solde deviendra immédiatement exigible,

- l'a condamnée aux entiers dépens liquidés pour frais de greffe à la somme de 40,66 euros dont TVA à 20%,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La caisse a formé appel de cette ordonnance, en toutes ses dispositions sauf l'exécution provisoire.

Par conclusions notifiées le 29 décembre 2023, la caisse demande à la cour de débouter la société de sa demande de délais de paiement, de la condamner à lui verser les provisions suivantes :

- 81.081,68 euros à valoir sur les cotisations dues au titre du 2ème trimestre 2021 au 30 novembre 2023 inclus suivant décompte arrêté au 28 décembre 2023 avec intérêt au taux légal à compter du 21 mars 2022,

- 12.987,03 euros à valoir sur les majorations de retard dues sur la période du 1er trimestre 2020 au 31 mars 2023 inclus suivant décompte arrêté au 28 décembre 2023,

et à lui verser 4000 euros au titre des frais irrépétibles tant de première instance que d'appel,

et à supporter les entiers dépens, ce compris les frais de justice avancés par la caisse pour la somme de 164,16 euros,

- débouter la société [5] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions notifiées le 6 juin 2023, la SARL [5] demande à la cour, au visa notamment des articles L.3141-32 et D.3141-12 et suivants du code du travail, du règlement intérieur de la caisse, de confirmer le jugement entrepris, subsidiairement de réformer le jugement entrepris et de débouter la caisse en la renvoyant à mieux se pourvoir, et en tout état de cause de condamner la caisse à lui verser 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2024.

*

SUR CE,

En application de l'article 873 du code de procédure civile, dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, accorder une provision au créancier.

Sur la demande de provision sur les cotisations et les majorations de retard :

La société ne conteste pas le montant des cotisations restant dû au titre de l'année 2021 et du premier trimestre 2022 dans la limite de 25.117,60 euros arrêtés au 31 août 2022.

Elle conteste le surplus, estimant que la caisse n'a pas respecté l'ordre d'imputation de ses versements tel qu'il est prévu à l'article 2e) du règlement intérieur, en imputant ses versements en priorité sur les cotisations professionnelles au lieu de suivre l'ordre suivant : cotisations congés, majorations congés et cotisations OPPBTP, ce qui a augmenté artificiellement la dette de majorations.

Elle fait valoir que la caisse affecte ses versements aux majorations plutôt que de les affecter aux cotisations principales en violation de son propre règlement; qu'elle a ainsi donné la priorité au paiement des cotisations professionnelles (FFB 80 nationale et départementale) au détriment des cotisations congés et cotisations OPPBTP; qu'elle ne précise pas la base de calcul de ces majorations.

Elle prend pour exemple qu'entre le 18 mai 2021 et le 22 septembre 2021 elle a versé par chèques plus de 25000 euros à la caisse, qui auraient dus être imputés d'abord sur les cotisations 2020, puis sur les majorations congés de 2020 puis sur les cotisations et les majorations postérieures alors que la caisse a, entre le 31 mars 2020 et le 31 octobre 2022, d'abord imputé les versements sur les cotisations professionnelles au lieu de les imputer sur les cotisations congés, les majorations congés et les cotisations OPPBTP si bien que ces erreurs d'imputations rendent le montant de cette créance sérieusement contestable.

La Caisse actualise ses demandes de provisions à valoir sur les cotisations exigibles restant dues au titre du 2ème trimestre 2021 au 30 novembre 2023 inclus suivant décompte arrêté au 28 décembre 2023 et de 12.987,03 euros à valoir sur les majorations de retard restant dues sur la période du 1er trimestre 2020 au 31 mars 2023 inclus suivant décompte arrêté au 28 décembre 2023,

Elle fait valoir que les retards de paiement remontent à plusieurs années, les relevés de compte faisant apparaître déjà le 3 mai 2016 une dette de 32.769,70 euros au titre des échéances du 3ème trimestre 2014 au 1er trimestre 2016 inclus; qu'aux termes de l'article 6 du règlement intérieur tout défaut de paiement dans les délais prescrits expose le cotisant à une majoration par mois de retard et sans limitation dans le temps, calculée sur la base du montant restant dû par l'entreprise; que la société se contente de faire des règlements partiels sporadiquement et produit un décompte totalement erroné ne tenant pas compte des retards antérieurs, contestant devoir des majorations de retard qui ne sont en réalité que le fruit de ses errements et que finalement ce sont les salariés qui en pâtissent puisqu'ils ne peuvent pas être indemnisés de tous leurs congés payés acquis.

Selon l'article 2 du règlement intérieur de la Caisse agréé par le ministère du travail de l'emploi de la formation professionnelle et du dialogue social le 3 mars 2017 :

'e) Imputation des paiements :

Tout règlement est imputé sur les périodes mensuelles ou trimestrielles les plus anciennes et en priorité sur les cotisations et les majorations de retard selon l'ordre suivant : cotisations congés, majorations congés, cotisations chômage-intempéries, majorations chômages-intempéries, cotisations OPPBTP, organismes des oeuvres sociales, cotisations professionnelles, frais de recouvrement, frais d'exécution forcée.

L'adhérent ne dispose pas de la faculté d'imposer une autre imputation de ses versements, sauf acceptation expresse de la caisse.

Tout crédit porté au compte, tel que remboursement d'indemnités de chômage intempéries, etc., acquitte par priorité les cotisations et majorations échues les plus arriérées de même nature.

L'article 6 a) du règlement intérieur de la caisse agréé par le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social le 3 mars 2017 stipule pour sa part que 'Tout défaut dans le paiement des cotisations congés dans les délais prescrits expose l'adhérent défaillant au paiement d'une majoration par mois de retard et sans limitation dans le temps, calculée sur la base du montant restant dû par l'entreprise'.

C'est à juste titre que la Caisse affirme que selon le règlement intérieur rappelé ci-dessus les paiements effectués par la société doivent être imputés sur les créances les plus anciennes jusqu'à apurement de ces dernières même si la nature de celles-ci est visée à la fin de l'ordre fixé par le règlement intérieur, le critère de l'ancienneté de la dette primant sur sa nature; que la clause est claire et n'a pas besoin d'être interprétée; que la société ne démontre pas le caractère contestable des imputations faites par la Caisse tels qu'elles apparaissent dans l'historique de compte versé par la Caisse en pièce 27 justifiant, après imputation des règlements et remboursements d'indemnités, des cotisations et majorations appelées entre le 31 mars 2015 et le 30 avril 2023; qu'il est établi par ailleurs, au vu des pièces versées aux débats, y compris le tableau récapitulatif que la société produit en pièce 1, mentionnant des majorations de retard depuis 2014, que la société règle ses cotisations en retard depuis de nombreuses années; que les majorations de retard sont donc de son fait et par voie de conséquence l'augmentation exponentielle de la créance.

En revanche, il ressort de ce même historique de compte qu'au 30 avril 2023 la somme restant due était, cotisations et majorations comprises, de 70.323,25 euros; que la Caisse ne produisant pas le complément d'historique de compte pour justifier du montant de sa créance arrêtée à décembre 2023, la provision sera arrêtée à cette somme, la Caisse déboutée du surplus de ses demandes et le jugement réformé de ce chef.

Sur les délais de paiement :

Pour s'opposer à l'octroi de tout délai de paiement, la Caisse fait valoir que le moratoire n'est pas justifié par la santé financière de l'entreprise; qu'elle règle en retard et de façon sporadique ses cotisations; qu'elle-même devient dans l'incapacité de régler des congés payés faute de règlement de ses cotisations par l'entreprise, ce qui est contraire aux intérêts des salariés; que la société n'a nullement commencé à exécuter l'ordonnance.

La société plaide le fait que des délais de paiement peuvent être octroyés même pour le paiement des cotisations sociales, la chambre sociale ayant admis que le caractère impératif relatif au recouvrement des cotisations à la caisse de congés payés du BTP l'article D.732-1 et suivants du code du travail (devenus D.3141-29 et suivants du code du travail) ne fait pas échec au pouvoir de reporter ou échelonnner le paiement des sommes dues que le juge tient de l'article 1244-1 du code civil.

Si l'article 1343-5 code civil permet au juge de reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, c'est à condition que le débiteur soit malheureux et de bonne foi; or force est de constater qu'en l'espèce le débiteur ne justifie pas de difficultés financières et qu'il n'a même pas commencé à régler, en sus des cotisations ayant continué à courir, les 25.117,60 euros qu'il reconnaît pourtant devoir depuis le 31 août 2022 et pour lesquels il a obtenu la possibilité de réglement en 24 mensualités par le premier juge.

Dès lors, il est justifié d'infirmer le jugement de ce chef et de débouter la société de sa demande de délais de paiement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Compte tenu de la solution donnée au litige, il y a lieu de condamner la société, qui succombe partiellement à l'instance, à verser à la caisse 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter l'ensemble des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe et contradictoirement, dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement sauf en ce qui concerne les dépens et, statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant,

Condamne la SARL [5] à payer à la Caisse de congés intempéries BTP Caisse du nord ouest :

- une provision de 70.323,25 euros à valoir sur les cotisations et majorations dues au 30 avril 2023, outre les intérêts moratoires au taux légal à compter du 6 septembre 2022 sur 25.117,60 euros, à compter de la la présente décision sur le surplus,

-2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la Caisse de congés intempéries BTP Caisse du nord ouest du surplus de ses demandes,

Déboute la SARL [5] de sa demande de délais de paiement,

Condamne la SARL [5] aux dépens d'appel.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 22/04453
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;22.04453 ?
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