ARRET
N°
[G]
C/
S.A. ENEDIS
CD/SGS
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU SIX JUILLET
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/04909 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ITCF
Décision déférée à la cour : ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU CINQ OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [P] [G]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me NOUBLANCHE substituant Me Jérôme CREPIN de la SCP CREPIN-FONTAINE, avocat au barreau D'AMIENS
APPELANT
ET
S.A. ENEDIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Amandine HERTAULT de la SCP CREPIN-HERTAULT, avocat au barreau D'AMIENS
Plaidant par Me ITURRA, avocat au barreau de LILLE
INTIMEE
DEBATS :
A l'audience publique du 25 mai 2023, l'affaire est venue devant Mme Christina DIAS DA SILVA, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 06 juillet 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Le 06 juillet 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
*
* *
DECISION :
La société ENEDIS est en charge de la concession du service public du réseau d'exploitation d'électricité sur la commune de [Localité 3].
MM. [H], [G] et [W] occupent des terrains dans cette commune sur lesquels ils ont installé des mobil-homes.
Le 10 mars 2017, à la demande de M. [H], la société ENEDIS a réalisé une installation temporaire d'électricité sur son terrain pour la période entre le 20 mars 2017 et le 28 février 2018, l'acte d'engagement précisant que l'installation temporaire concernait un chantier.
MM. [G] et [W] ont fait les mêmes demandes auprès de la société ENEDIS.
Par courrier des 2 décembre 2019 et 2 décembre 2020 le maire de la commune a enjoint à la société ENEDIS d'interdire les branchements provisoires ou définitifs sur les parcelles des situées en zone non constructibles.
La dépose des branchements provisoires de MM. [G] et [H] a alors été programmée par ENEDIS pour le 24 novembre 2020. Le 23 novembre 2020 le conseil de ces derniers a demandé à ENEDIS de surseoir à la dépose des branchements provisoires en raison de la procédure pendante devant le tribunal administratif visant à annuler la décision implicite de rejet opposée par la commune.
Le 6 mai 2021 la société ENEDIS a informé MM. [H], [G] et [W] que la dépose de leurs raccordements provisoires interviendrait le 10 juin 2021. Elle a tenté vainement de procéder à ladite dépose les 10 juin et 8 juillet 2021 compte tenu de l'opposition des susnommés.
Suivant exploit du 29 mars 2022, la société ENEDIS a fait assigner MM. [H], [G] et [W] aux fins principalement d'être autorisée à procéder à la dépose des installations électriques au visa de l'article 835 du code de procédure civile, avec le concours de la force publique si besoin.
Par ordonnance du 5 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire d'Amiens a :
- autorisé la société ENEDIS a procéder à la dépose du raccordement provisoire au réseau public de distribution électrique de MM. [H], [G] et [W], accompagnée au besoin de la force publique et d'un huissier de justice dès la signification de l'ordonnance,
- condamné MM. [H], [G] et [W], chacun au paiement d'une indemnité de 1 000 euros à l société ENEDIS au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration du 4 novembre 2022, M. [G] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 30 décembre 2022, il demande à la cour de :
- le déclarer bien fondé en son appel,
- infirmer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau,
- débouter la société ENEDIS de toutes ses prétentions,
- ordonner le maintien du branchement provisoire d'électricité sur son terrain,
- condamner la société ENEDIS aux dépens d'appel et à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 janvier 2023, la société ENEDIS demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance entreprise,
- débouter M. [G] de toutes ses demandes,
- condamner M. [G] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel sous le bénéfice de la distraction.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 mai 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 25 mai suivant.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
En l'espèce il résulte des pièces versées aux débats qu'en mars 2019 puis le 23 mai 2020, M. [G] a régularisé auprès de la société ENEDIS un engagement d'alimentation électrique temporaire, celui-ci précisant dans l'acte que sa demande était effectuée pour une installation de chantier et pour une durée expirant le 16 novembre 2020. Le document contenant sa demande stipule en caractères gras que 'ce raccordement de caractère temporaire (...) ne saurait en aucun cas servir à d'autres fins et/ou à l'alimentation d'une installation électrique définitive, par exemple alimenter l'installation intérieure d'une habitation. (...) Je reconnais que le distributeur Enedis pourra donc, san préavis, effectuer la suspension des fournitures d'énergie électrique au point de livraison indiqué en cas de manquement à cette interdiction ainsi que, à l'issue de la période fixée par le présent engagement'. Ce document (pièce 1 de la société ENEDIS) a été signé par M. [G] après l'avoir daté et ajouté la mention 'lu et approuvé'.
Vainement l'appelant conteste la légalité de l'injonction du maire faite à la société ENEDIS de faire cesser le raccordement temporaire dès lors que cette dernière fonde son action sur les dispositions contractuelles conclues entre elle et l'appelant et non sur ladite injonction.
La société ENEDIS justifie avoir informé M. [G] que la convention était arrivée à son terme et qu'elle allait donc procéder à la dépose du branchement provisoire. Elle prouve que le susnommé s'est opposé à cette dépose.
Il s'ensuit que le trouble manifestement illicite invoqué par la société ENEDIS est établi et qu'elle est bien fondée à le faire cesser.
L'action engagée par M. [G] devant le tribunal administratif contre la commune de Pont de Mets visant à obtenir l'annulation de la décision implicite de rejet d'une demande de raccordement électrique de sa parcelle n'a aucune incidence sur la présente action, celui-ci ne remettant nullement en cause la validité de l'acte qu'il a signé avec la société ENEDIS qui stipulait un engagement d'alimentation électrique temporaire jusqu'au 16 novembre 2020 et qui est donc arrivé à son terme.
Par ailleurs ainsi que l'indique à juste titre le premier juge, l'appelant ne peut valablement soutenir que l'action de la société ENEDIS constitue un trouble manifestement illicite en ce que toute suspension de l'alimentation électrique porterait une atteinte aux droits fondamentaux des personnes. En effet le contrat, arrivé à son échéance, concernait l'alimentation électrique d'un chantier et non d'une habitation. De plus la société ENEDIS n'est pas le fournisseur d'électricité mais simplement le distributeur.
Dès lors la décision entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions.
M. [G] qui succombe doit être condamné aux dépens d'appel sous le bénéfice de la distraction et à verser à la société ENEDIS la somme de 2 000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne M. [G] à payer à la société ENEDIS la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [G] aux dépens d'appel recouvrés selon les modalités prévues par l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE