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22/06/2023 | FRANCE | N°22/04449

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 22 juin 2023, 22/04449


ARRET

























S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE









C/







[I]

S.E.L.A.R.L. EVOLUTION

S.C.I. LANI





PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 22 JUIN 2023





N° RG 22/04449 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ISF3





ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE CO

MMERCE DE SAINT-QUENTIN EN DATE DU 14 AVRIL 2022



APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC



EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE, agissant poursuites et diligences en son représentan...

ARRET

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

C/

[I]

S.E.L.A.R.L. EVOLUTION

S.C.I. LANI

PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 22 JUIN 2023

N° RG 22/04449 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ISF3

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-QUENTIN EN DATE DU 14 AVRIL 2022

APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC

EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilé en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Marc ANTONINI de la SCP ANTONINI ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

ET :

INTIMEES

Madame [C] [I]

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée par Me Audrey BOUDOUX D'HAUTEFEUILLE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 90

Ayant pour avocat plaidant la SCP BEJIN-CAMUS, avocats du Barreau de Saint-Quentin.

S.E.L.A.R.L. EVOLUTION, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI LANI, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilé en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Pierre LOMBARD de l'ASSOCIATION DONNETTE-LOMBARD, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

S.C.I. LANI, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilé en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 10]

Assignée à personne morale, le 02 novembre 2022.

DEBATS :

A l'audience publique du 13 Avril 2023 devant :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

MINISTERE PUBLIC : M. Alain LEROUX, Avocat Général

PRONONCE :

Le 22 Juin 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Suivant un acte notarié du 22 janvier 1996, faisant suite à une offre acceptée le 24 novembre 1995, la Banque La Henin a consenti à la SCI Lani, dont les co-associés sont les époux [I]-[D] et la gérante Mme [S] [I], un prêt à taux révisable d'un montant de 700.000 francs, d'une durée de 180 mois, destiné au paiement du solde du prix d'acquisition d'un immeuble et au remboursement d'un prêt hypothécaire.

Agissant en vertu de la copie exécutoire de cet acte, le Crédit foncier de France, venant aux droits de la Banque La Henin, a fait délivrer le 9 août 2012 à la SCI Lani un commandement de payer la somme totale de 194.259, 09 euros au titre du solde restant dû de ce prêt, valant saisie d'un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 2]), cadastré section AE n°[Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5].

Par acte d'huissier du 4 décembre 2012, le Crédit foncier de France a fait assigner la SCI Lani et la SA Crédit foncier de France, en qualité de créancier inscrit, à l'audience d'orientation du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Quentin.

Suivant jugement contradictoire du 14 novembre 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Quentin a constaté la prescription de l'action engagée par le Crédit foncier de France et déclaré irrecevable cette action.

Sur appel du Crédit foncier de France suivant arrêt du 27 mars 2014, la cour d'appel d'Amiens a infirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris et ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi situé [Adresse 2], cadastré section AE n°[Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et renvoyé les parties devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Quentin, afin que celui-ci détermine les modalités de cette vente.

Suivant jugement du 17 avril 2014, le tribunal de grande instance de Saint-Quentin a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SCI Lani, fixé la date de cessation des paiements au 15 avril 2014, désigné la SELARL Grave-Randoux en qualité de mandataire judiciaire et désigné maître [N] [X] en qualité d'administrateur judiciaire.

Par acte d'huissier du 28 mai 2014, la SA Crédit foncier de France a fait assigner la SCI Lani devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Quentin afin de voir fixer les modalités de la vente forcée de l'immeuble litigieux et proroger les effets du commandement de payer valant saisie délivré le 9 août 2012, pour une nouvelle période de deux ans à compter de la mention du jugement à intervenir.

Suivant jugement du 17 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Saint-Quentin a arrêté un plan de redressement par voie de continuation au profit de la SCI Lani.

Suivant jugement du 17 juin 2019, le tribunal de grande instance de Saint-Quentin, statuant sur requête de l'administrateur judiciaire, a prononcé la résolution du plan de redressement judiciaire, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SCI Lani, fixé la date de cessation des paiements au 15 avril 2014 et désigné la SELARL Grave-Randoux, désormais Evolution, en qualité de mandataire liquidateur.

Dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire, Mme [C] [I], l'une des filles des époux [I]-[D], seuls porteurs de parts de la SCI Lani, a fait part de son intérêt pour l'acquisition de l'immeuble litigieux, afin de permettre à ses parents, âgés et ayant des problèmes de santé, de continuer à y demeurer.

Suivant ordonnance du 14 décembre 2021, le juge-commissaire du tribunal judiciaire de Saint-Quentin chargé de la liquidation judiciaire de la SCI Lani a autorisé la vente de gré à gré de l'immeuble à usage d'habitation, sis [Adresse 2]), cadastré section AE n°[Cadastre 3], n°[Cadastre 4], n°[Cadastre 5], dépendant de l'actif de cette liquidation judiciaire, au profit de Mme [C] [I], demeurant au [Adresse 2], moyennant le prix net vendeur de 150.000 euros, payable entre les mains du liquidateur judiciaire, dit n'y avoir lieu à notifier l'ordonnance aux créanciers et dit que l'ordonnance sera notifiée par LRAR à l'acquéreur, Mme [C] [I], et à la gérante de la SCI Lani, Mme [S] [I], et par lettre simple à la SELARL Evolution, ès qualités de liquidateur judiciaire.

Par acte authentique du 23 juin 2022, reçu en l'étude de maître [T] [M], notaire à [Localité 10], le bien immobilier en cause a été cédé à Mme [C] [I] pour un prix principal de 150.000 euros.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 28 septembre 2022, la SA Crédit foncier de France a interjeté appel de l'ordonnance en date du 14 décembre 2022.

La SA Crédit foncier de France a fait signifier sa déclaration d'appel à la SCI Lani par acte d'huissier du 2 novembre 2022, délivré à personne morale.

La SCI Lani n'a pas constitué avocat.

Selon avis du 22 décembre 2022, le ministère public requiert la confirmation de la décision entreprise et se rapporte à cet égard, aux réquisitions écrites du parquet de Saint-Quentin du 10 avril 2022, lesquelles figurent au dossier.

Aux termes de ses dernières conclusions du 24 mars 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SA Crédit foncier de France demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en ses moyens, fins et prétentions et y faisant droit d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle autorise la vente de gré à gré de l'immeuble à Mme [C] [I] et statuant à nouveau de débouter la SELARL Evolution, ès qualités de liquidateur de la SCI Lani, de sa demande de vente de gré à gré, et ce avec toutes conséquences de droit sur les actes passés ultérieurement, de débouter la SELARL Evolution, ès qualités de liquidateur de la SCI Lani, et Mme [C] [I] de leurs demandes, fins et conclusions et de condamner in solidum la SELARL Evolution, ès qualités de liquidateur de la SCI Lani, et Mme [C] [I] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimée du 31 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, Mme [C] [I] demande à la cour de déclarer irrecevable et en tous les cas non fondé l'appel interjeté, de jugerque l'appel de la SA Crédit foncier de France devra être déclaré caduc à défaut de notification de la déclaration d'appel à l'avocat constitué pour le compte de la concluante, de juger que la communication à la SA Crédit foncier de France de l'ordonnance entreprise a été dispensée à l'époque de l'établissement par maître [M], notaire, de l'acte authentique de vente au profit de la concluante du 23 juin 2022, de déclarer dès lors irrecevable, du fait de sa tardiveté, l'appel interjeté par la SA Crédit foncier de France, de juger que la SA Crédit foncier de France n'a pas intérêt à agir et à interjeter appel de l'ordonnance entreprise, dès lors qu'entre temps, il a été établi l'acte authentique de vente immobilière au profit de la concluante, de donner acte à la SA Crédit foncier de France, qu'elle n'entend pas demander l'annulation de l'acte authentique de vente dressé par maître [M], notaire, le 23 juin 2022;

Au fond, elle demande à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de débouter la SA Crédit foncier de France de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions; et de condamner la SA Crédit foncier de France à lui payer une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de maître Audrey D'Hautefeuille.

Aux termes de ses conclusions d'intimée du 23 décembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SELARL Evolution, ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI Lani, demande à la cour de débouter la SA Crédit foncier de France de ses demandes, de dire qu'il relève du choix discrétionnaire du juge-commissaire d'autoriser la vente de gré à gré et d'en déterminer les conditions et le prix, de confirmer l'ordonnance entreprise ayant autorisé la vente de gré à gré au profit de Mme [C] [I] au prix de 150.000 euros et en tout état de cause, de dire la vente régularisée par acte authentique du 23 juin 2022 définitive.

Elle demande enfin à la cour de condamner la SA Crédit de France à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

L'affaire a été fixée à bref délai pour être plaidée à l'audience du 13 avril 2023.

SUR CE,

Sur la caducité de l'appel

Il sera relevé que si Mme [I] maintient sa demande de caducité de la déclaration d'appel elle reconnaît néanmoins dans ses conclusions que les formalités requises notamment par l'article 905-1 du code de procédure civile ont été respectées et qu'ainsi la déclaration d'appel lui a bien été notifiée dans les dix jours de l'avis de fixation et que l'ordonnance de fixation de l'affaire à bref délai a bien été notifiée dans ce délai à son conseil.

Il sera au demeurant observé que Mme [I] n'a pas saisi le Président de la chambre de sa demande de caducité et qu'en tout état de cause l'obligation faite à l'appelant de notifier la déclaration d'appel à l'avocat que l'intimé a préalablement constitué dans le délai de dix jours à compter de la réception de l'avis de fixation n'est pas prescrite à peine de nullité

Sur la tardiveté de l'appel

Mme [I] fait valoir que si en qualité de créancier hypothécaire la SA Crédit foncier de France est bien habile à interjeter appel de l'ordonnance autorisant la vente de gré à gré, au regard de l'article R 621-21 du code de commerce le délai d'appel est de dix jours à compter de la communication ou de la notification de la décision et qu'il est admis qu'en application de l'article R 642-37-1 du code de commerce, le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l'article L 642-18 du même code est ouvert aux parties dont les droits sont affectés par la décision dansles dix jours de sa communication ou de sa notification.

Elle fait valoir qu'aucune notification n'a été effectuée par le greffe au créancier inscrit mais que celui-ci a nécessairement reçu communication de l'ordonnance par les soins du notaire rédacteur de l'acte authentique de vente de l'immeuble en date du 23 juin 2022.

Elle fait observer que la déclaration d'appel en date des 28 septembre et 13 octobre 2022 est intervenue au-delà du délai de dix jours et est donc tardive.

La SA Crédit foncier de France fait valoir que son appel est recevable, conformément aux articles R642-23 et R642-37-1 du code de commerce, étant précisé que l'ordonnance entreprise n'a pas été notifiée aux créanciers inscrits et qu'ainsi le délai d'appel n'a jamais commencé à courir.

Il soutient que le délai d'appel ne peut courir qu'à compter d'une notification au créancier et non à compter d'une communication informelle par le notaire.

La Selarl Evolution ne conteste pas que le délai d'appel, n'a pu commencer à courir à l'encontre de la SA Crédit foncier de France.

En application de l'article R 642-37-1 du code de commerce le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l'article L 642-18 relatif à la cession des actifs du débiteur sont formés devant la cour d'appel.

Par ailleurs s'agissant de la vente des immeubles en application des articles R 642-36 et R642-23 du code de commerce l'ordonnance par laquelle le juge-commissaire autorise la vente de gré à gré d'un immeuble est notifiée à la diligence du greffier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au débiteur et aux créanciers inscrits dont les noms sont indiqués dans l'ordonnance.

Il n'est nullement prévu dans ce cas comme pour les ventes sur adjudication amiable une notification aux créanciers inscrits par le notaire devant procéder à l'adjudication.

La notification de ces ordonnances peut être effectuée par le greffe mais peut également résulter d'une signification de l'ordonnance par une partie.

Néanmoins pour faire partir le délai d'appel la notification doit contenir une information sur le délai et les modalités du recours.

La seule communication informelle par le notaire chargé de la vente ne peut constituer une notification valable faisant courir le délai d'appel.

Il convient de dire que l'appel de la SA Crédit foncier de France ne peut être déclaré irrecevable comme tardif.

Sur la recevabilité de l'appel

Mme [I] soutient que l'intérêt à agir de l'appelante interroge dès lors qu'est intervenu l'acte authentique de vente le 23 juin 2022 mais que la SA Crédit foncier de France ne demande ni l'annulation ni la révocation de l'acte de vente entraînant transfert de propriété et donc ne demande pas que ce transfert de propriété soit remis en cause.

Elle ajoute que la SA Crédit foncier de France s'interdit de voir remettre en cause l'acte authentique de vente et ne peut justifier d'un intérêt à obtenir l'annulation de l'ordonnance du juge-commissaire, cette seule annulation n'entraînant pas de fait et de droit l'annulation de l'acte dès lors que de surcroît rien de tel n'est demandé.

Elle considère qu'il y a lieu de donner acte à la banque qu'elle ne demande pas l'annulation de l'acte authentique de vente consécutif à l'ordonnance entreprise et qu'il s'agit d'un engagement judiciaire dans le cadre de l'instance et pour l'avenir.

Elle soulève par ailleurs le fait que la SA Crédit foncier de France n'a aucunement publié ses conclusions auprès du service de publicité foncière conformément aux articles 28 et suivants du décret du 4 janvier 1955.

La SA Crédit foncier de France rappelle que le créancier inscrit sur l'immeuble cédé qui n'est pas personnellement partie aux opérations de réalisation des actifs de la procédure est recevable à agir devant la cour d'appel au même titre que les parties et le mandataire.

Il fait par ailleurs valoir, au regard de la publicité foncière, qu'il n'entend pas solliciter l'annulation de l'acte notarié translatif de propriété mais l'annulation de la décision du juge-commissaire autorisant la vente de gré à gré et qu'il n'avait donc pas à publier ses conclusions.

Il rappelle cependant qu'en principe l'acte notarié ne pouvait être régularisé avant l'expiration des délais de recours contre l'ordonnance du juge-commissaire dont l'absence de signification aurait dû alerter.

Il sera relevé qu'au dispositif de ses dernières conclusions la SA Crédit Foncier de France sollicite l'infirmation de l'ordonnance du juge-commissaire et le débouté de la demande de vente de gré à gré avec toutes conséquences sur les actes passés ultérieurement.

Si elle ne précise pas les conséquences qu'elle entend en tirer, elle affirme néanmoins qu'elle n'entend pas solliciter dans le cadre de la présente procédure l'annulation de l'acte notarié portant cession de l'immeuble.

La recevabilité de son appel dans le cadre de la présente instance ne peut donc dépendre d'une publication des conclusions au service de la publicité foncière.

S'agissant de l'intérêt à agir, l'intervention de l'acte authentique de vente de l'immeuble le 22 juin 2022, ne saurait ôter tout intérêt à agir du créancier inscrit à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la cession de gré à gré.

Le créancier inscrit a toujours intérêt à faire juger notamment que cette autorisation n'était pas fondée ou qu'elle a été obtenue de manière irrégulière pour ultérieurement agir à l'encontre de cette vente ne serait-ce qu'en matière de responsabilité des différents acteurs.

Il convient en conséquence de déclarer recevable l'appel formé par la SA Crédit foncier de France.

Sur le bien fondé de l'autorisation accordée

La SA Crédit foncier de France soutient qu'il est dans l'intérêt des créanciers que les biens de la société placée en liquidation judiciaire soient vendus au prix le plus élevé et qu'en l'espèce

l'immeuble litigieux a été évalué à une somme de 200.000 euros par la BPCE, selon une étude du 18 mai 2022 basée sur les ventes intervenues sur le marché immobilier en 2022 pour des biens similaires alors que Mme [C] [I], qui est la fille des dirigeants de la SCI Lani, a proposé un prix d'achat de 150.000 euros.

Elle conteste la décote retenue du fait de l'occupation de l'immeuble sans droit ni titre des époux [I]-[D] qu'elle juge excessive.

Elle fait valoir qu'il ne peut lui être opposé sa proposition de mise à prix du bien à hauteur de 90000 euros lors d'une précédente procédure de 2012 qui n'a aucun rapport avec le prix de vente réel dudit bien.

Par ailleurs elle fait valoir que s'il résulte des pièces produites que le procureur de la République a été informé du projet d'achat de la fille des dirigeants de la SCI, il n'est pas établi qu'il ait pu être dérogé à l'interdiction faite à un descendant de former une offre d'achat par requête du ministère public dès lors que la teneur des réquisitions n'est pas connue.

Mme [I] soutient que le juge-commissaire a autorisé la vente à son profit avec l'accord du procureur de la République pour un prix principal de 150000 euros alors que l'évaluation par la BPCE le 18 mai 2022 a été réalisée sans visite de l'intérieur du bien immobilier en cause et que l'appelante, aux termes d'une assignation du 4 décembre 2012 devant le juge de l'exécution, avait sollicité, en sa qualité de créancier poursuivant, la vente forcée de l'ensemble immobilier de la SCI Lani sur la mise à prix de 90.000 euros, étant rappelé au visa de l'article L322-6.2 du code des procédures civiles d'exécution, que la mise à prix, dans le cadre d'une procédure de saisie immobilière, doit être fixée 'en rapport avec la valeur vénale de l'immeuble et les conditions du marché'.

La SELARL Evolution, ès qualités de mandataire liquidateur de la SCI Lani soutient que la SA Crédit foncier de France n'ignore pas que le prix des immeubles occupés vendus aux enchères n'atteint pas celui du marché, étant rappelé que cette dernière sollicitait une mise à prix de 90.000 euros en 2012 dans le cadre d'une procédure de saisie immobilière dont les suites ne sont pas connues, que l'évaluation par la BPCE du 18 mai 2022 ne reflète pas la réalité, puisqu'elle valorise le bien immobilier d'espèce, sans l'avoir visité à l'intérieur et comme s'il était libre de tout occupant, ce qui n'est pas le cas, étant rappelé qu'elle avait fait réaliser deux estimations, l'une portant sur la valeur de marché en vente de gré à gré, comprise entre 170.000 et 180.000 euros, et l'autre portant sur une vente judiciaire occupé, à hauteur de 120.000 euros.

Elle fait valoir par ailleurs que le juge-commissaire dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation pour choisir entre l'adjudication et la vente de gré à gré.

Elle ajoute que l'offre de Mme [C] [I] d'un montant de 150.000 euros se situe dans la moyenne des deux estimations diligentées par la concluante et que l'âge et la santé des occupants actuels sont des éléments à prendre en considération dans l'évaluation.

Enfin elle fait observer que le ministère public a été informé de l'offre d'achat de Mme [C] [I] et ne s'y est pas opposé et que la vente de gré à gré au profit de Mme [C] [I] a été régularisée par acte authentique du 23 juin 2022, sachant que le créancier ne dispose d'aucun fondement juridique pour prétendre à l'annulation de cette vente.

En application de l'article L 642-3 du code de commerce ni le débiteur au titre de l'un quelconque de ses patrimoines ni les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire ni les parents ou alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement de ces dirigeants ou du débiteur personne physique ne sont admis directement ou par personne interposée à déposer une offre, toutefois le tribunal sur requête du ministère public peut autoriser la cession à l'une des personnes ainsi visées sauf le débiteur lui-même par un jugement spécialement motivé.

En l'espèce il est justifié par le liquidateur de la requête présentée par lui au ministère public le 1er avril 2022 aux fins de voir présenter une demande d'autorisation de vente amiable de l'immeuble sis à [Localité 10] à la fille de la gérante de la SCI Lani moyennant le prix de 150000 euros.

Il est également produit les réquisitions du procureur de la République du tribunal judiciaire de Saint-Quentin sollicitant que cette cession soit autorisée.

Il convient de constater que l'autorisation a été régulièrement recueillie.

La SA Crédit foncier de France s'oppose essentiellement au prix de la cession intervenue pour 150000 euros alors qu'elle produit une expertise réalisée en mai 2022 uniquement basée sur l'aspect extérieur de l'immeuble, avec la référence à un état descriptif de 2012 et sans qu'il soit tenu compte de son occupation par les époux [I].

Il était cependant attesté en novembre 2021 par le notaire chargé de la vente maître [M] , que l'immeuble dont la disposition intérieure était précisée avait une valeur de 120000 euros et ce compte tenu de l'occupation par les époux [I] âgés et malades.

De même le liquidateur judiciaire a fait procéder à une évaluation par une agence immobilière en octobre 2021 faisant état d'une valeur de 170000 à 180000 euros.

Il sera relevé que l'expertise diligentée par la SA crédit foncier de France établit également que la valeur de l'immeuble en cas de vente forcée peut être estimée à 120000 euros et en cas de vente rapide à 180000 euros.

Au regard de l'ensemble de ces éléments la vente de l'immeuble pour la somme de 150000 euros à la fille des époux [I] âgés et malades et restant en conséquence occupants de l'immeuble a été autorisée avec raison par le juge-commissaire dont il convient de confirmer la décision.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner la SA Crédit foncier de France qui succombe en son appel aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de maître D'Hautefeuille et de la condamner à payer à la SELARL Evolution ès qualités la somme de 1500 euros et la même somme de 1500 euros à Mme [C] [I].

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Dit n'y avoir lieu au prononcé de la caducité de la déclaration d'appel ;

Déclare l'appel formé par la SA Crédit foncier de France recevable ;

Confirme la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Condamne la SA Crédit foncier de France aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de maître D'Hautefeuille ;

Condamne la SA Crédit foncier de France à payer à la SELARL Evolution ès qualités la somme de 1500 euros et à Mme [C] [I] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 22/04449
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;22.04449 ?
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