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01/06/2023 | FRANCE | N°21/03466

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 01 juin 2023, 21/03466


ARRET







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CD/SGS





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU PREMIER JUIN

DEUX MILLE VING

T TROIS





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/03466 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IE4N



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SOISSONS DU VINGT NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT ET UN





PARTIES EN CAUSE :



Monsieur [X] [F]

né le 04 Décembre 1955 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Charles HECART, ...

ARRET

[F]

C/

[H]

[L]

CD/SGS

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU PREMIER JUIN

DEUX MILLE VINGT TROIS

Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/03466 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IE4N

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SOISSONS DU VINGT NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT ET UN

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [X] [F]

né le 04 Décembre 1955 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Charles HECART, avocat au barreau de SOISSONS

APPELANT

ET

Madame [E] [H]

née le 06 Décembre 1933 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Monsieur [U] [L]

né le 18 Janvier 1958 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentés par Me Philippe COURT, avocat au barreau de SOISSONS

INTIMES

DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :

L'affaire est venue à l'audience publique du 30 mars 2023 devant la cour composée de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre, Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.

A l'audience, la cour était assistée de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

Sur le rapport de Mme Christina DIAS DA SILVA et à l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 01 juin 2023, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCÉ :

Le 01 juin 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et Madame Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

*

* *

DECISION :

[V] [L] est décédée le 24 avril 2011 à l'âge de 52 ans laissant pour lui succéder son frère M. [U] [L] et ses parents [R] [L] et Mme [E] [L]. M. [U] [L] a renoncé à la succession de sa s'ur au profit de ses parents.

A la date de son décès [V] [L] vivait depuis 12 ans avec M. [X] [F] et le couple demeurait dans la maison dont elle était propriétaire depuis le 13 novembre 2003.

[V] [L] a été inhumée dans le caveau de la famille [L] à [Localité 7].

[R] [L] est décédé le 21 mars 2013 laissant pour lui succéder son épouse Mme [E] [L] et son fils M. [U] [L].

Courant 2014, Mme [E] [L] et M. [U] [L] ont souhaité vendre l'immeuble ayant appartenu à [V] [L], occupé par M. [F]. Ce dernier est demeuré dans la maison jusqu'au 13 décembre 2017, libérant les lieux après qu'une assignation en expulsion et en paiement d'une indemnité d'occupation lui ait été délivrée. Il a été condamné par jugement du tribunal d'instance de Sannois daté du 7 juin 2018 au paiement de la somme de 12 286,45 euros au titre des indemnités d'occupation, et a obtenu paiement de celle de 4 964,25 euros au titre de travaux réalisés dans l'immeuble.

L'immeuble a été vendu le 25 juillet 2018.

Le 25 avril 2016, M. [F] a fait assigner Mme [E] [L] aux fins d'exhumation du corps de [V] [L] et de transfert dans la sépulture qu'il a obtenue dans le même cimetière le 6 décembre 2011, de remboursement des frais d'obsèques et de sommes correspondant à des prêts qu'il avait accordés à [V] [L] ainsi qu'au montant des travaux de rénovation effectués dans l'immeuble.

Le 12 janvier 2018, M. [F] a fait assigner M. [U] [L] en intervention forcée aux mêmes fins. Les deux procédures ont été jointes.

Par jugement du 29 avril 2021, le tribunal judiciaire de Soissons a :

- débouté M. [F] de toutes les prétentions émises contre Mme [E] [L] et M. [U] [L],

- débouté M. [F] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [F] à verser au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [E] [L] et M. [U] [L] la somme de 5000 euros,

- condamné M. [F] aux entiers dépens.

M. [F] a interjeté appel de cette décision le 28 juin 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2022 et l'affaire fixée à l'audience des débats du 27 octobre 2022.

Par arrêt du 5 janvier 2023, cette cour a, avant dire droit :

- ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture,

- renvoyé le dossier à la mise en état et invité :

- Mme [L] et M. [L] à justifier de l'état de la succession de [V] [L] en produisant une attestation notariée compte tenu du décès de [R] [L],

- M. [F] à s'expliquer sur le fondement de sa demande formée uniquement à l'encontre de Mme [E] [L] et à régulariser ses conclusions, le cas échéant, en tenant compte de l'état de la succession.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 février 2023, M. [F] demande à la cour de :

- Vu la Loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles, l'article 1382 (devenu 1240) du code civil,

- Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et en conséquence :

- Constater que les dernières volontés de [V] [L] étaient d'être inhumée près de M. [F],

- Juger que le corps de [V] [L] sera exhumé de la concession n° 3 située au carré n° 3 et transférée dans la concession de M. [F] située dans la concession n° 22 au carré n° 4, du cimetière communal de [Localité 7] (Aisne),

- Condamner solidairement Mme [E] [L] et M. [U] [L] à verser à M. [F] les sommes suivantes :

- la somme de 5 705 euros avancée au titre des frais d'obsèques,

- la somme de 5 200 euros prêtée à [V] [L] le 08 janvier 2011 en prévision de ses obsèques,

- la somme de 6 000 euros prêtée lors de l'acquisition du bien immobilier sis au [Adresse 2] à [Localité 4]

- la somme de 365 euros au titre des impôts fonciers 2011,

- le montant des travaux de rénovation réalisés dans le bien immobiliers : 60.000 euros. - Condamner solidairement Mme [E] [L] et M. [U] [L] à verser à M. [F] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral sur le fondement de l'article 1382 (devenu 1240) du code civil.

- Condamner solidairement Mme [E] [L] et M. [U] [L] à verser à M. [F] la somme de 2 600 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner solidairement Mme [E] [L] et M. [U] [L] aux entiers dépens de première instance et d'appel, sur le fondement de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il invoque à l'appui de ses prétentions des créances qu'il détient sur la succession de [V] [L] au titre des frais d'obsèques qu'il dit avoir avancés, d'une somme prêtée à sa compagne lors de l'acquisition du bien immobilier situé [Adresse 2] à [Localité 4], les impôts fonciers et les travaux de rénovation dudit immeuble. Il indique que [V] [L] ne lui a jamais remboursé ces sommes lesquelles doivent s'imputer sur le prix d'acquisition de l'immeuble.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 22 octobre 2021, Mme [E] [L] et M. [U] [L] demandent à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Soissons, de débouter M. [F] de son appel et de le condamner à leur payer au titre des frais irrépétibles en cause d'appel la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Ils font valoir que [V] [L] ne leur a jamais exprimé le désir d'être enterrée ailleurs que dans le caveau familial à [Localité 7] ; que M. [F] tenait à assumer personnellement les frais d'obsèques de sa compagne et qu'il ne s'agissait pas d'une avance ou d'un prêt d'argent à la succession impliquant une obligation de remboursement.

Ils ajoutent que la demande de remboursement de travaux dans l'immeuble est prescrite et en tous cas non fondée.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 30 mars suivant.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- sur la demande d'exhumation

Les conditions des funérailles sont régies par l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887 qui prévoit que tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sa sépulture.

L'article R 2213-40 du code général des collectivités territoriales dispose que 'Toute demande d'exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte. Celui-ci justifie de son état civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande.'

Le respect de la paix des morts ne devant pas être troublé par les divisions des vivants, pour être autorisé à faire transférer le corps d'un défunt dans un autre caveau il appartient au proche qui le sollicite de rapporter la preuve du caractère provisoire de l'inhumation ou des motifs graves justifiant ce transfert, notamment la preuve du non respect de la volonté du défunt lors des obsèques.

Ainsi que l'indique à juste titre le premier juge il n'existe aucun écrit de [V] [L] exprimant sa volonté s'agissant du lieu de sa sépulture. Son enterrement a eu lieu il y a plus de 12 ans et M. [F] n'a sollicité l'exhumation de son corps que 5 ans après les obsèques.

Les attestations qu'il produit, émanant de personnes étrangères à la famille, ne peuvent prévaloir sur le témoignage des proches parents qui tous indiquent que [V] [L] ne leur a jamais exprimé le souhait d'être enterrée ailleurs que dans le caveau familial.

La demande de M. [F] tendant à l'exhumation du corps de [V] [L] doit donc être rejetée.

- sur les sommes réclamées à la succession de [V] [L]

L'article 2224 du code civil dispose que 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'. L'article 2229 de ce code précise que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli. Enfin le jour pendant lequel se produit un événement d'où court un délai de prescription ne compte pas dans ce délai.

En application des articles 641 et suivants du code de procédure civile, lorsqu'un délai est exprimé en années il expire le jour de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l'acte. Tout délai expire le dernier jour à 24 heures et celui qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

M. [F] soutient être créancier à l'égard de la succession de [V] [L] de diverses sommes. Les intimés lui opposent la prescription de son action.

[V] [L] est décédée le 24 avril 2011. M. [F] a fait délivrer son assignation en paiement le lundi 25 avril 2016 de sorte que son action n'est nullement prescrite.

M. [F] justifie avoir réglé en totalité les frais d'obsèques de [V] [L] s'élevant à la somme de 5 705 euros. Les intimés ne le contestent pas mais soutiennent, pour s'opposer à cette demande en paiement, que M. [F] avait souhaité assumer ces frais. Ils ne rapportent cependant pas la preuve de cette intention libérale de M. [F] qui, de son coté, la conteste.

M. [F] rapporte encore la preuve qu'il a réglé la somme de 365 euros au titre des impôts fonciers de l'année 2011 pour l'immeuble appartenant à [V] [L].

Il convient dès lors de condamner in solidum Mme [E] [L] et M. [U] [L], en leur qualité d'héritiers de [V] [L], à payer à M. [F] la somme de 5 705 euros au titre des frais d'obsèques et celle de 365 euros au titre des impôts fonciers, le jugement étant infirmé de ces chefs.

M. [F] réclame par ailleurs la condamnation des consorts [L] à lui rembourser la somme de 5 200 euros qu'il dit avoir prêtée à [V] [L] le 8 janvier 2011.

Ainsi que l'indique à juste titre le premier juge, M. [F] ne produit pour justifier cette demande que la photocopie du recto d'un chèque dont la cause du paiement n'est pas connue ni justifiée. En appel il ne rapporte pas non plus la preuve d'un tel prêt accordé à sa compagne [V] [L] qui devrait être remboursé par ses héritiers. C'est dès lors à bon droit que le premier juge n'a pas fait droit à ce chef de prétention.

La demande en remboursement de la somme de 6 000 euros que M. [F] dit avoir prêtée à [V] [L] lors de l'acquisition du bien immobilier situé au [Adresse 2] à [Localité 4] le 13 novembre 2003 ne peut pas non plus prospérer faute pour l'appelant de justifier de l'existence de ce prêt.

M. [F] soutient qu'il a effectué d'important travaux de rénovation dans l'immeuble appartenant à [V] [L] et réclame la condamnation des héritiers de cette dernière à lui payer à ce titre la somme de 60 000 euros.

Ainsi que l'indique à juste titre le premier juge, il n'est produit aucune pièce permettant d'établir que les travaux réalisés par M. [F] dans l'immeuble qu'il habitait avec sa compagne impliquaient une contrepartie financière dont cette dernière se serait engagée à payer le coût comme dépassant sa part contributive aux charges de la vie courante de leur couple. Le fait que certaines factures d'achat de matériaux soient à son nom ne permet pas non plus de prouver le caractère onéreux de sa prestation de travail réalisée dans la maison qui constituait le domicile commun du couple.

Par ailleurs s'agissant des travaux réalisés postérieurement au décès de sa compagne, le jugement rendu le 7 juin 2018 par le tribunal d'instance de Sannois a condamné les consorts [L] à lui payer la somme de 4 964,25 euros en remboursement de ceux-ci.

Dès lors c'est à bon droit que le jugement a débouté M. [F] de sa demande en paiement de la somme de 60 000 euros au titre des travaux de rénovation de l'immeuble appartenant à [V] [L].

M. [F] réclame encore la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral au motif que les héritiers de [V] [L] n'ont pas respecté ses dernières volontés.

Il ne justifie cependant pas de l'existence d'une faute commise par les consorts [L] ayant été défaillant à établir que sa compagne ne souhaitait pas être inhumée dans le caveau de sa famille.

Sa demande ne peut donc prospérer et doit être rejetée.

- sur les frais de procédure et les dépens

Le sens du présent arrêt justifie que les dépens de première instance et d'appel soient mis à la charge des consorts [L].

L'équité commande de condamner les consorts [L] à verser à M. [F] la somme de 2 000 euros au titre des frais de procédure exposés tant en première instance qu'en appel.

Le jugement est donc infirmé en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

Condamne in solidum Mme [E] [L] et M. [U] [L], en leur qualité d'héritiers de [V] [L] à payer à M. [F] la somme de 5 705 euros au titre des frais d'obsèques et celle de 365 euros au titre des impôts fonciers ;

Déboute M. [F] de toutes ses autres prétentions ;

Condamne in solidum in solidum Mme [E] [L] et M. [U] [L] à payer à M. [F] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum in solidum Mme [E] [L] et M. [U] [L] aux dépens de première instance et d'appel sous le bénéfice des dispositions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/03466
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;21.03466 ?
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