ARRET
N°
[W]
C/
[S]
VA/VB
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU VINGT TROIS MAI
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/04617 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IHDK
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL DE PROXIMITE D'ABBEVILLE DU DEUX JUILLET DEUX MILLE VINGT ET UN
PARTIES EN CAUSE :
Madame [E] [W]
née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentée par Me Amandine HERTAULT de la SCP CREPIN-HERTAULT, avocat au barreau d'AMIENS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/008716 du 09/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)
APPELANTE
ET
Monsieur [Y] [S]
né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représenté par Me Ludivine SAINTYVES-RENOUARD, avocat au barreau d'AMIENS
INTIME
DEBATS :
A l'audience publique du 21 mars 2023,l'affaire est venue devant M. Vincent ADRIAN, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 mai 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de M. Pascal BRILLET, Président, M.Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Le 23 mai 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Pascal BRILLET, Président de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
*
* *
DECISION :
Par acte du 20 mars 2015, M.[Y] [S] a donné à bail à Mme [E] [W], une maison d'habitation sise [Adresse 3] pour un loyer de 580 € par mois à compter du 1er avril 2015.
Les parties ont été en litige au sujet du paiement des loyers et de l'état de la maison.
Selon M. [S], le loyer a été payé jusqu'en avril 2019 inclus. Son décompte (pièce 8) part de mai 2019. Ce point n'est pas contesté.
Par jugement exécutoire du 13 décembre 2019, M. [S] a été condamné par le tribunal de proximité d'Abbeville à exécuter les travaux préconisés par l'expert, M. [K] ; à payer à Mme [W] les sommes de 6 370 € au titre d' un préjudice de jouissance (d'avril 2015 à avril 2019 inclus = 49 mois à 450 € de valeur locative au lieu de 580 € de loyer) et de 1 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile (7 570 €).
Par arrêt de cette cour du 16 septembre 2021, cette condamnation a été portée à la somme de 7 500 € outre celle de 1 500 € pour les frais irrépétibles, tandis qu'il était constaté 'l'exécution manifeste des travaux' selon un constat d'huissier de justice du 28 juillet 2021.
Par jugement du 19 avril 2021, confirmé par arrêt du 7 avril 2022 (pièce [S] 4)le même tribunal de proximité d'Abbeville a déclaré Mme [W] déchue du bénéfice du surendettement,motif pris de ce qu'elle n'avait pas repris le paiement de son loyer à partir d'avril 2021 comme le lui avait prescrit l'avis de la Commission de surendettement.
Par commandement de payer visant la clause résolutoire, du 8 octobre 2020, M. [U] a sommé Mme [W] de payer la somme de 1 638 € de loyers en retard sur la période d'avril à septembre 2020, puis, faute de paiement, a assigné Mme [W] en constat de la résiliation du bail devant le tribunal de proximité d'Abbeville.
Par jugement du 2 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection a :
-écarté la demande en annulation du commandement faute de grief, outre que l'erreur du décompte était en faveur de la débitrice,
-retenu une dette de loyer de 12 492 €, y compris 762 € d'APL versé sur février à avril 2021, non compris dans le décompte de M. [U], au 10 juin 2021,
-prononcé la compensation avec la créance de 7 570 € de Mme [W] issue du jugement du 13 décembre 2019,
-condamné Mme [W] à payer à M. [U] la somme de 4 922 € au titre des loyers en retard,
-constaté la résiliation du bail, avec suspension de ses effets,
-accordé à la débitrice 36 mois de délais à hauteur de 120 € par mois en sus du loyer courant,
-débouté M. [U] de sa demande au titre du préjudice moral (1 000 €),
-condamné Mme [W] aux dépens et à payer une somme de 250 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Après avoir obtenu l'aide juridictionnelle, Mme [W] a relevé appel de cette décision.
Le 1er ou le 3 septembre 2021, elle a quitté les lieux, après un préavis d'un mois.
M. [U] comptera les mois d'octobre et de novembre 2021 dans son décompte (pièce 8).
La cour se réfère aux dernières conclusions des parties par visa.
Vu les conclusions d'appelant n° 2 notifiées par Mme [W] le 22 juin 2022 visant à l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions sauf, à titre subsidiaire, en ce qu'il lui a accordé 36 mois de délai.
Elle soutient que sa dette locative est de 3 783 €.
Pour sa créance sur M. [U], celle-ci est de 11 260 € (7 500 € de préjudice de jouissance accordé par la cour + 1 200 € de frais irrépétibles en première instance + 1 500 € de frais irrépétibles en appel + 580 € de dépôt de garantie + 480 €), 'sauf à parfaire'.
Pour l'essentiel, il faut retenir un loyer de 450 € par mois sur toute la période concernée de mai 2019 à son départ, et ne pas compter les deux mois de préavis supplémentaires que veut M. [S].
Elle sollicite, après compensation, la condamnation de M. [U] à lui payer la somme de 7 477 €.
Vu les conclusions récapitulatives n° 2 notifiées par M. [S] le 4 octobre 2022, sollicitant la confirmation du jugement sauf à porter sa créance à l somme de 15 464 € « au titre des loyers, indemnités d'occupation et taxes ».
Il estime principalement, que c'est à tort que Mme [W] prétend que les décisions de justice statuant sur le préjudice de jouissance ont admis que le loyer devait être fixé à la somme de 450 €.
Il faut retirer les mensualités de 120 € payées par Mme [W] après le jugement entrepris, soit 1 680 € en tout,.
L'instruction a été clôturée le 5 octobre 2022.
MOTIFS
1. Sur la dette de loyer et sur le compte à faire entre les parties.
Les dispositions du jugement concernant la résiliation et sa suspension n'ont plus d' intérêt au regard de ce que Mme [W] a quitté le logement le 1er ou le 3 septembre 2021.
Au demeurant, elle ne conteste pas ne pas avoir repris le paiement du loyer. Il apparait que Mme [W] n'a jamais repris le paiement du loyer de mai 2019 jusqu'à son départ, seule étant versée l'APL (254 €). La cour en tiendra compte pour statuer sur les dépens et sur les frais irrépétibles.
Le jugement sera confirmé sur ces points.
La discussion porte seulement sur la question de savoir si le loyer dû doit être fixé à 450 € ou à 580 € et si les mois d'octobre et novembre 2021, après son départ, doivent être comptés.
Au regard de ce second point, Mme [W] annonçait dans son congé du 4 août 2021 (pièce [W] 21) puis dans son rappel du 21 août (pièce [U] 2), sans autre explication, un départ au 3 septembre et une future production du justificatif du délai d'un mois, sans donner le motif du délai abrégé. Il est exact qu'elle a reçu un courrier du 17 août 2021 lui annonçant son admission à l'allocation de retour à l'emploi.
M. [U] se plaint de ne pas en avoir eu le justificatif. Mme [W] ne justifie pas le lui avoir remis le 3 septembre ou même plus tard, ni l'avoir joint dans son courrier du 21 août. Elle aurait pu, au moins, en outre, le lui indiquer dans ses deux courriers de congé.
Le préavis devait donc être de 3 mois. Les mois d'octobre et de novembre 2021 seront comptés dans la dette locative comme le demande M. [U].
Selon M. [S], le loyer a été payé jusqu'en avril 2019 inclus. Son décompte (sa pièce 8) part de mai 2019. Ce point n'est pas contesté par Mme [W].
Les sommes versées au titre des APL sont imputées sur le décompte et ne sont pas contestées par Mme [W] non plus.
Il faut en effet y ajouter au crédit du locataire la période de février à avril 2021 régularisée plus tard et non comprise au crédit de la locataire dans le décompte.
Par jugement exécutoire du 13 décembre 2019, M. [S] a été condamné par le tribunal de proximité d'Abbeville à exécuter les travaux préconisés par l'expert judiciaire, M. [K]; à payer à Mme [W] les sommes de 6 370 € au titre d' un préjudice de jouissance (d'avril 2015 à avril 2019 inclus = 49 mois à 450 € de valeur locative au lieu de 580 € de loyer) et de 1 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile (total de 7 570 € seul pris en compte par le premier juge).
Par arrêt de cette cour du 16 septembre 2021, cette condamnation a été portée à la somme de 7 500 € outre celle de 1 500 € pour les frais irrépétibles, tandis qu'il était constaté 'l'exécution manifeste des travaux' selon un constat d'huissier de justice du 28 juillet 2020.
Il en effet inexact de soutenir que ces décisions auraient fixé le loyer à 450 € pour l'avenir. Le juge des contentieux de la protection d'Abbeville a simplement discuté avec la valeur locative préconisée par l'expert (400 € ) pour évaluer le préjudice de jouissance et a décidé de partir d' une valeur locative de 450 €. La cour d'appel a augmenté le préjudice de jouissance à 7 500 € sans fixer non plus de loyer, même pour la période des travaux.
Par contre, il est certain que M. [U], lequel peinait à avancer les travaux prescrits par l'expert et par le jugement, a accepté de ne réclamer qu'un loyer de 450 € par mois tant que durerait le mauvais état du logement (pièces 3, 8, 9 et 14). Il précise, dans son courriel du 27 juin 2020 (pièce 14) que c'est 'le temps des travaux lesquels, je vous (le) rappelle, se terminent'. C'était assurément son intention, honnête. Dont acte.
Les travaux, ainsi que l'a constaté l'arrêt du 16 septembre 2021, ont été terminés en réalité fin juillet 2020. Les manques de finitions à l'extérieur, avérés selon les photographies produites par Mme [W], sont néanmoins insuffisants à modifier la valeur locative du bien. A partir d'août 2020, il faut compter un loyer de 580 € par mois, soit retirer 15 fois la somme de 130 € du décompte. Il faut en retirer aussi 762 € d'APL, mais y ajouter 243 € de taxe sur les ordures ménagères.
La dette de loyer s'élève donc à 9 917 €.
Il faut en déduire les mensualités de 120 € versées par Mme [W] après le jugement jusqu'à son départ, soit 1 680 €.
La créance de Mme [W] sur M. [U] est de 7 500 € pour le préjudice de jouissance accordé par la cour + 1 200 € de frais irrépétibles accordés en première instance + 1 500 € de frais irrépétibles octroyés en appel + 580 € de dépôt de garantie, non restitué. Il n'est pas indiqué par Mme [W] à quoi correspondraient les 480 € comptés en sus.
Il faut donc retenir une somme de 10 780 €.
Mme [W] est donc créancière de 2 543 € (9 917 - 1 680 ' 10 780). M. [U] sera condamné à lui payer cette somme.
2. Sur les délais de paiement.
Cette question est devenue sans objet pour l'avenir puisqu'il s'avère, tous comptes faits, que c'est Mme [W] qui est créancière de M. [U]. Pour le passé le jugement mérite d' être confirmé.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 2 juillet 2021 par le tribunal de proximité d'Abbeville en ce qu'il a :
-écarté la demande en annulation du commandement faute de grief, outre que l'erreur du décompte était en faveur de la débitrice,
-prononcé la compensation avec la créance de Mme [W] issue du jugement du 13 décembre 2019,
-constaté la résiliation du bail, avec suspension de ses effets,
-accordé à la débitrice 36 mois de délais à hauteur de 120 € par mois en sus du loyer courant,
-débouté M. [U] de sa demande au titre du préjudice moral (1 000 €),
-condamné Mme [W] aux dépens et à payer une somme de 250 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
L'infirme en ce qu'il a :
-retenu une dette de loyer de 12 492 €, y compris 762 € d'APL versé sur février à avril 2021, non compris dans le décompte de M. [U], au 10 juin 2021,
-condamné Mme [W] à payer à M. [U] la somme de 4 922 € au titre des loyers en retard,
Vu le départ de la locataire au 1er ou au 3 septembre 2021,
Statuant à nouveau sur les sommes dues entre les parties,
Après compensation, dit que Mme [E] [W] est créancière de M. [Y] [U] à hauteur 2 543 €,
Condamne celui-ci à lui payer cette somme,
Dit que chacune des parties gardera la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT