ARRET
N°
[S]
[S]-[U]
C/
[G]
[C]
AXA ASSURANCES
AXA ASSURANCES
[T]
CD/SGS
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU ONZE MAI
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/00540 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H7KK
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [Z] [S]
né le 10 Janvier 1960 à [Localité 12] (Portugal)
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 9]
Madame [N] [S]-[U]
née le 10 Mars 1959 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 9]
Représentés par Me Jérôme CREPIN de la SCP CREPIN-FONTAINE, avocat au barreau d'AMIENS
APPELANTS
ET
Monsieur [X] [G]
né le 24 Août 1938 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 9]
Madame [M] [C] épouse [G]
née le 09 Novembre 1942 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentés par Me Laëtitia RICBOURG Avocat au Barreau d'AMIENS de la AARPI HAMEL THUILLIER JANOCKA RICBOURG
Société AXA ASSURANCES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 10]
Représenté par Me CAHITTE de la SCP COTTIGNIES-CAHITTE-DESMET, avocat au barreau d'AMIENS
Ayant pour avocat plaidant Me GRADEL Gilles, avocat au Barreaux de LILLE.
INTIMES
Société AXA ASSURANCES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 10]
Maître [W] [T]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 8]
PARTIES INTERVENANTES
DEBATS :
A l'audience publique du 09 mars 2023, l'affaire est venue devant Mme Christina DIAS DA SILVA, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière, assistée de Mme Annabelle AUDOUX, greffière stagiaire.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L'ARRET :
Le 11 mai 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Vitalienne BALOCCO, greffière.
*
* *
DECISION :
Les époux [G] sont propriétaires d'un immeuble situé [Adresse 6] à [Localité 9] cadastré section AH n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2]. Les époux [S] sont propriétaires de l'immeuble situé au [Adresse 5]. Les deux propriétés sont séparées par un mur mitoyen d'une hauteur de 2 mètres.
Le 3 octobre 2011 les époux [S] ont entrepris des travaux entraînant le rehaussement du mur mitoyen à 3 mètres. Le mur rehaussé s'est effondré dans la nuit du 2 au 3 décembre 2011 et les époux [S] l'ont fait reconstruire fin janvier 2012.
Invoquant l'existence d'un trouble anormal du voisinage, les époux [G] ont saisi le juge des référés d'une demande d'expertise laquelle a été ordonnée par arrêt de cette cour daté du 15 octobre 2015. Les opérations d'expertise ont été étendues à la SARL Chavez Pereira, constructeur du mur puis au liquidateur de cette société.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 8 novembre 2018.
Suivant exploit délivré le 17 décembre 2019 les époux [G] ont fait assigner les époux [S] aux fins de les voir condamner sous astreinte à démolir le rehaussement du mur mitoyen, à le conforter et à réparer son couronnement réclamant l'indemnisation de leur préjudice subi.
Par jugement du 16 décembre 2020, le tribunal judiciaire d'Amiens a :
- déclaré irrecevables les prétentions des époux [S]-[U] dirigées contre le liquidateur de la société Chavez Pereira et contre la société Axa Assurances,
- condamné les époux [S]-[U] à faire supprimer sous le contrôle d'un maître d'oeuvre professionnel l'exhaussement en maçonnerie de parpaings du mur mitoyen séparant leur propriété de celle des époux [G]-[C],
- condamné les mêmes à faire réparer la fissure dans le couronnement du mur mitoyen d'origine en brique figurant sur le procès verbal de constat du 25 avril 2014 pages 7 et 8,
- dit que ces travaux devront être exécutés dans le délai de 3 mois à compter de la signification du jugement, sous peine passé ce délai d'une astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard pendant 3 mois,
- condamné les époux [S]-[U] à réduire à 2 mètres la hauteur de la haie située au sud de leur propriété en limite de la propriété des époux [G] [C] dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement sous peine passé ce délai d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant 3 mois,
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,
- condamné les époux [S]-[U] à payer aux époux [G]-[C] la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts au titre de leur préjudice de jouissance,
- ordonné l'exécution provisoire de ces dispositions,
- rejeté la demande des époux [G]-[C] de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- condamné les époux [S]-[U] aux dépens comprenant le coût de l'expertise judiciaire et à payer aux époux [G]-[C] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 26 janvier 2021, les époux [S] ont interjeté appel de cette décision.
Le président de la première chambre civile de la cour a proposé aux parties une mesure de médiation qu'elles ont refusé.
Par ordonnance du 7 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la mise en cause de la société Axa par les époux [S].
Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 11 octobre 2022, les époux [S] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement sauf en ce qu'il a débouté les époux [G] de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- déclarer recevable les époux [S] en leurs demandes dirigées contre Me [T] ès qualités de liquidateur de la société Chaves Pereira et à l'encontre de la société Axa Assurances en qualité d'assureur décennal de ladite société,
- condamner la société Axa Assurances en sa qualité d'assureur de la société Chaves Pereira à les garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à leur encontre concernant soit la suppression de l'exhaussement en maçonnerie du mur mitoyen, soit les travaux de remise en état dudit mur tes que préconisés par l'expert judiciaire ainsi que la réparation de la fissure,
- condamner la société Axa Assurances à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre quant à l'éventuel trouble de jouissance, préjudice moral et préjudice lié à la dépréciation de la valeur de l'immeuble, et de la condamnation aux dépens et aux frais de procédure,
- débouter les époux [G] de leur demande tendant à la suppression d'exhaussement en maçonnerie du mur mitoyen séparant leurs propriétés, cet exhaussement du mur ne cosntituant nullement un trouble anormal de voisinage,
- ordonner que les travaux préconisés par l'expert soient réalisés par les époux [S]-[U] dans un délai de 6 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir si la cour confirme le jugement quant à l'exhaussement du mur mitoyen,
- fixer à 6 mois le délai de la réparation de la fissure dans le couronnement du mur mitoyen,
- subsidiairement si la cour confirme leur condamnation à faire supprimer l'exhaussement en maçonnerie,
- fixer le délai pour la réalisation des travaux de démolition à 6 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
- déclarer mal fondés les époux [G] de leur appel incident concernant le préjudice moral, le préjudice lié à la perte de jouissance et le préjudice relatif à la diminution de valeur de l'immeuble, et les en débouter
- condamner les époux [G] aux dépens d'appel.
Aux termes de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 18 novembre 2022, les époux [G] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement sauf s'agissant des dispositions relatives à l'indemnisation de leur préjudice de jouissance et moral,
- statuant à nouveau,
- condamner les époux [S] à leur payer la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts au titre de leur préjudice de jouissance et celle de 2 500euros à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral,
- à titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement sur les points ci-avant :
- ordonner à M et Mme [S] d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à présenter une demande préalable des travaux ci-après décrits :
- Rehaussement d'un mur mitoyen de séparation en escaliers en parpaings pour une hauteur totale de 2 m60,
- mise en place de contreforts (fondations et poteaux) côté parcelle de M. et Mme [S] (selon les prescriptions du devis du 21 avril 2016 de la SMCB);
- couronnement sur le mur de rehaussement ;
- couronnement sur le mur d'origine sur le débord ;
- revêtement de finition de la partie du mur en parpaings (enduit et peinture de chaque côté).
- en cas de non opposition de l'administration compétente, ordonner à M. et Mme [S] d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision de non opposition, expresse ou tacite, à faire procéder par un maître d'oeuvre qualifié, aux travaux ci-avant décrits ;
- condamner les époux [S] à leur payer la somme de 2 500 euros à titre de préjudice moral et celle de 2 500 euros à titre de préjudice de jouissance ;
- à titre infiniment subsidiaire :
- ordonner à M. et Mme [S], d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à présenter une demande préalable des travaux ci-après décrits :
- Rehaussement d'un mur mitoyen de séparation en escaliers en parpaings pour une hauteur totale de 6 mètres,
- mise en place de contreforts (fondations et poteaux) côté parcelle de M.et Mme [S] (selon les prescriptions du devis du 21 avril 2016 de la SMCB);
- couronnement sur le mur de rehaussement ;
- couronnement sur le mur d'origine sur le débord ;
- revêtement de finition de la partie du mur en parpaings (enduit et peinture de chaque côté).
- en cas de non opposition de l'administration compétente, ordonner à M. et Mme [S], d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de cette décision de non opposition, ou de la décision tacite, le cas échéant, d'avoir à faire procéder, par un maître d'oeuvre qualifié, aux travaux ci-avant décrits ;
- et par conséquent dans cette hypothèse :
- condamner les époux [S] à leur payer la somme de 2 500 euros à titre de préjudice moral et celle de 10 000 euros à titre de préjudice de jouissance ainsi que celle de 10 000 euros au titre du préjudice lié à la perte de valeur de leur propriété ;
- en cas d'opposition de l'administration compétente, ordonner à M. et Mme [S] d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à faire procéder, par un maître d'oeuvre qualifié, à la démolition du mur en maçonnerie en parpaings édifié en exhaussement du mur mitoyen, situé en limite des propriétés des époux [G] et [S] ;
- et par conséquent, dans cette hypothèse :
- ordonner à M. et Mme [S], d'avoir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à faire procéder, par un maître d'oeuvre qualifié, aux travaux suivants :
- mise en place de contreforts (fondations et poteaux) côté parcelle de M. et Mme [S], selon les prescriptions du devis du 21 avril 2016 de la SMCB ;
- réfaction du couronnement sur le mur d'origine ;
- condamner les époux [S] à leur la somme de 2 500 euros à titre de préjudice moral, celle de 2 500 euros à titre de préjudice de jouissance ;
- en tout état de cause :
- déclarer les époux [S] irrecevables et mal fondés en l'ensemble de leurs demandes et les en débouter ;
- condamner les époux [S] à leur payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, qui comprendront également les frais de l'expertise de M. [A] et du constat du 2 décembre 2019
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
Me [T] ès qualités de liquidateur de la société Chavez Pereira assignée par exploit du 26 avril 2021 remis à domicile n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 février 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 9 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
- sur la recevabilité des demandes des époux [S] dirigées à l'encontre de la société Axa et de Me [T] ès qualités de liquidateur de la société Chavez
Dès lors que par ordonnance du 7 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la mise en cause de la société Axa par les époux [S], ces derniers ne sont pas recevables en leurs demandes dirigées à l'encontre de cette société qui n'est plus dans la cause.
Ainsi que l'indique à juste titre le premier juge l'assignation délivrée le 13 mai 2020 à Me [T] ès qualités n'ayant pas été remise pour enrôlement au service du répertoire général civil du tribunal judiciaire d'Amiens, Me [T] n'est pas partie à l'instance.
Les époux [S] ne justifient pas plus en appel que devant le premier juge avoir enrôlé l'assignation délivrée à Me [T].
Il sera de plus observé que dans leurs conclusions d'incident en réponse notifiées le 15 novembre 2022 les époux [S] reconnaissent ne pas avoir mis l'assignation pour enrôlement au service du répertoire général civil de la juridiction en page 3 de ces conclusions.
Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les prétentions des époux [S] dirigées contre Me [T] ès qualités et la société Axa Assurances.
- sur le trouble anormal de voisinage
En vertu de l'article 544 du code civil la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. Cependant ce droit est limité par l'obligation qu'a le propriétaire de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients anormaux du voisinage.
Les époux [G] invoquent l'existence d'un trouble anormal de voisinage qui leur est causé par les époux [S] à la suite du rehaussement du mur mitoyen séparant les deux propriétés.
Force est de constater qu'ils ne produisent aucun élément permettant d'établir que leurs voisins ont rehaussé le mur mitoyen dans une intention malveillante et la question de l'utilité de cet ouvrage est sans influence sur l'existence d'un trouble anormal de voisinage.
S'agissant de la perte de valeur invoquée consécutive à la réalisation du rehaussement du mur, les époux [G] ne produisent aux débats que la pièce 12 aux termes de laquelle le directeur de l'agence immobilière Guy Hoquet dans un courrier daté du 31 octobre 2019 indique 'après examen de tous les éléments qui caractérisent votre bien, et du fait de la procédure de voisinage, avoir retenu une valeur de 230 000 euros au lieu de 240 000 euros que nous pourrons vous proposer à la fin de votre procédure.' et il précise que le point faible du bien est le 'trouble de jouissance sur l'accès terrain à l'arrière de la maison du fait d'un mur voisin qui risque de s'effondrer( procédure en cours)'. Ainsi ce professionnel de l'immobilier a considéré que le bien avait une valeur moindre en raison de la procédure judiciaire en cours et non en raison de la nouvelle configuration des lieux créée par le rehaussement du mur mitoyen.
Il ressort du procès verbal de constat établi le 25 avril 2014 par Me [K], huissier de justice, que le mur séparant les fonds des parties a été surélevé par des parpaings à l'état brut d'une hauteur de 2 mètres allant jusqu'à plus de 3 mètres au niveau de la maison et de la terrasse des époux [G].
L'expert judiciaire indique dans son rapport déposé le 8 novembre 2018 que le mur mitoyen a une hauteur d'environ 2,12 mètres et que le rehaussement en parpaings bruts s'élève à l'endroit le plus haut à une hauteur de 3,55 mètres. Il précise que la façade sur jardin de l'immeuble de M. et Mme [G] est exposée au sud et que le rehaussement du mur a entraîné pour ces derniers une perte d'ensoleillement le matin depuis la terrasse, le bureau au rez de chaussée et le balcon de l'étage.
L'expert n'a nullement constaté une baisse de la luminosité de la maison.
Il résulte du plan cadastral versé aux débats que la propriété des époux [G] s'étend sur deux parcelles et que la diminution de son ensoleillement par suite du rehaussement du mur mitoyen ne concerne qu'une toute petite partie qui est de surcroît exposée au sud.
Une telle perte d'ensoleillement, partielle puisqu'elle n'a lieu que le matin et qui ne concerne qu'une toute petite partie de la propriété ( la terrasse, une pièce au rez de chaussée et un balcon) ne saurait constituer un trouble anormal de voisinage de sorte que les époux [G] doivent être déboutés de leurs demandes de démolition de l'exhaussement du mur de parpaing édifié par les époux [S]. Le jugement doit donc être infirmé de ce chef.
- sur les travaux de remise en état du mur mitoyen existant
L'article 655 du code civil dispose que la réparation et la reconstruction du mur mitoyen sont à la charge de tous ceux qui y ont droit, et proportionnellement au droit de chacun.
Cependant le propriétaire d'un mur mitoyen doit supporter seul les frais de réparation de ce mur lorsque les réparations sont rendues nécessaires par son seul fait.
L'expert judiciaire indique que la structure du mur mitoyen existant en maçonnerie de briques n'est pas adaptée pour supporter la charge d'une rehausse en parpaings et que le rehaussement n'a pas été réalisé dans les règles de l'art en la matière provoquant l'instabilité de l'ensemble du mur. Il a préconisé la réalisation de contreforts (fondations et poteaux) du coté de la propriété des époux [S] pour renforcer l'ensemble de l'ouvrage.
Les époux [S] justifient avoir respecté les conditions réglementaires en déposant une déclaration préalable avant la réalisation des travaux de rehaussement du mur. Contrairement aux affirmations des époux [G], le règlement local d'urbanisme de la commune de [Localité 9] ne comporte pas de règles de hauteur interdisant l'exhaussement du mur séparatif à la hauteur autorisée par décision d'autorisation des travaux ainsi que l'indique le tribunal administratif d'Amiens dans sa décision du 10 octobre 2013 rendue entre les parties (pièce 13 des appelants).
Les époux [S] ne contestent pas devoir effectuer les travaux de remise en état préconisés par l'expert judiciaire pour renforcer le mur mitoyen afin qu'il n'y ait plus de risque d'effondrement. Il convient donc, infirmant le jugement sur ce point, de condamner les époux [S] à faire réaliser dans les six mois à compter de la signification du présent arrêt, les travaux préconisés par l'expert tels que précisés au dispositif de la décision et de procéder à la réparation de la fissure dans le couronnement du mur mitoyen. Il convient de fixer une astreinte pour s'assurer de la bonne exécution des travaux dans les délais impartis.
- sur la demande relative à la haie
L'article 671 du code civil prévoit :
' Il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus et, à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations.
Les arbres, arbustes et arbrisseaux de toute espèce peuvent être plantés en espaliers, de chaque côté du mur séparatif, sans que l'on soit tenu d'observer aucune distance, mais ils ne pourront dépasser la crête du mur.
Si le mur n'est pas mitoyen, le propriétaire seul a le droit d'y appuyer les espaliers.'
L'article 672 du code civil dispose : 'Le voisin peut exiger que les arbres, arbrisseaux et arbustes, plantés à une distance moindre que la distance légale, soient arrachés ou réduits à la hauteur déterminée dans l'article précédent, à moins qu'il n'y ait titre, destination du père de famille ou prescription trentenaire.
Si les arbres meurent ou s'ils sont coupés ou arrachés, le voisin ne peut les remplacer qu'en observant les distances légales.'
Ainsi que l'indique à jute titre le premier juge il est établi par un procès verbal de constat d'huissier daté du 2 décembre 2019 que les lauriers et thuyas composant une haie située dans la propriété des époux [S] sont plantés à environ 50 cm de la limite de propriété et qu'ils mesurent entre 3 mètres 50 et 4 mètres.
Les époux [S] ne justifient pas avoir élagué leur haie depuis la décision de première instance, le procès verbal de constat qu'ils versent aux débats daté du 15 octobre 2021 (pièce 14) mentionnant que la haie de thuyas a une hauteur qui 'dépasse néanmoins légèrement les deux mètres de hauteur pour une distance de plantation d'environ 1.1 mètres avec la limite de propriété.'
Il est dès lors établi que les époux [S] ne respectent pas les dispositions ci-dessus rappelées de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il les a condamnés à réduire à 2 mètres la hauteur de la haie située au sud de leur propriété en limite de la propriété des époux [G] dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement sous peine passé ce délai d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant 3 mois, et en ce qu'il s'est réservé la liquidation de l'astreinte.
- sur les demandes indemnitaires des époux [G]
Les époux [G] justifient subir un trouble de jouissance dès lors que le mur mitoyen depuis son rehaussement est dangereux en raison de son défaut de verticalité et du risque d'effondrement. L'expert a d'ailleurs précisé que dans l'attente de la réalisation des travaux de renforcement du mur il est nécessaire de mettre en place un périmètre de sécurité de chaque coté du mur.
Cette privation de jouissance d'une partie de leur bien depuis déjà plusieurs années sera réparée par l'allocation de la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts, les époux [S] étant condamnés au paiement de cette somme, le jugement étant infirmé de ce chef.
Par ailleurs les époux [G] sont fondés à soutenir qu'ils vivent dans la crainte d'un nouvel effondrement du mur après que celui-ci se soit effondré en 2011 et que l'expert judiciaire a indiqué dans son rapport que le mur reconstruit conservait un risque d'effondrement. Cette situation leur cause indéniablement un préjudice moral qui sera indemnisé par l'allocation de la somme de 2 500 euros. Les époux [S] doivent donc être condamnés à leur verser cette somme à titre de dommages et intérêts et le jugement est infirmé de ce chef.
S'agissant du préjudice financier invoqué par les époux [G], la lettre qu'ils versent aux débats pour justifier d'un tel préjudice, émanant d'un agent immobilier explique la baisse de valeur de leur immeuble en raison de l'existence, non pas du mur mitoyen rehaussé mais de la présente procédure laquelle a vocation à s'achever. De plus les époux [G] ne soutiennent pas qu'ils souhaitent dès à présent mettre leur bien en vente. Dès lors ils ne subissent aucun préjudice financier et leur demande faite à ce titre doit être rejetée.
- sur les frais de procédure et les dépens
Les époux [S] qui succombent principalement doivent être condamnés aux dépens d'appel et à verser aux époux [G] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile, leur demande faite à ce titre étant nécessairement mal fondée.
Enfin le jugement doit être confirmé s'agissant des dispositions relatives aux frais de procédure et aux dépens de première instance.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement en ce qu'il :
- a déclaré irrecevables les prétentions des époux [S] dirigées contre Me [T] ès qualités et la société Axa Assurances ;
- a condamné les époux [S] à réduire à 2 mètres la hauteur de la haie située au sud de leur propriété en limite de la propriété des époux [G] [C] dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement sous peine passé ce délai d'une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant 3 mois,
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,
- a condamné les époux [S] aux dépens comprenant le coût de l'expertise confiée à M. [A] et à payer aux époux [G] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Infirme le jugement en toutes ses autres dispositions et statuant à nouveau :
Déboute les époux [G] de leur demande relative à un trouble anormal de voisinage ;
Condamne les époux [S] à faire réaliser par un maître d'oeuvre :
- des contreforts (fondations et poteaux) du coté de leur parcelle afin de garantir la stabilité du mur mitoyen ayant subi un rehaussement
- un couronnement et un revêtement de finition sur les deux faces du mur mitoyen
- la réparation de la fissure de l'ancien couronnement du mur ;
Dit que ces travaux devront être exécutés dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la présente décision, sous peine passé ce délai d'une astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard pendant 3 mois ;
Condamne les époux [S] à payer aux époux [G] à titre de dommages et intérêts la somme de 2 500 euros en réparation de leur trouble de jouissance et celle de 2 500 euros en réparation de leur préjudice moral ;
Déboute les époux [G] de leur demande au titre du préjudice lié à la perte de valeur de leur propriété ;
Condamne les époux [S] à payer aux époux [G] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne les époux [S] aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE