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04/05/2023 | FRANCE | N°21/05459

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 04 mai 2023, 21/05459


ARRET

























S.A.S. BIJOUTERIE RAMPAZZO









C/







S.A.S.U. CARMILA FRANCE













CV



COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 04 MAI 2023





N° RG 21/05459 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IIZE





JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE COMPIEGNE EN DATE DU 19 OCTOBRE 2021







P

ARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.A.S. BIJOUTERIE RAMPAZZO, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]





Représentée par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 80

Ayant pour avocat plaidant, Me Gilles HITTING...

ARRET

S.A.S. BIJOUTERIE RAMPAZZO

C/

S.A.S.U. CARMILA FRANCE

CV

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 04 MAI 2023

N° RG 21/05459 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IIZE

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE COMPIEGNE EN DATE DU 19 OCTOBRE 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S. BIJOUTERIE RAMPAZZO, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 80

Ayant pour avocat plaidant, Me Gilles HITTINGER-ROUX, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

S.A.S.U. CARMILA FRANCE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]/France

Représentée par Me Dorothée FAYEIN BOURGOIS de la SCP FAYEIN BOURGOIS-WADIER, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 18

Ayant pour avocat plaidant, Me Antoine PINEAU-BRAUDEL, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l'audience publique du 09 Février 2023 devant :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

PRONONCE :

Le 04 Mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

La Sa Immobilière Carrefour a conclu un bail commercial, par acte sous seing privé en date du 5 août 1991 avec la Sas Bijouterie Rampazzo pour un local situé au sein du centre commercial Carrefour [Localité 5] à [Localité 4] , pour une durée de 12 ans à compter du 1er octobre 1991, prenant fin au 30 septembre 2003 , le preneur devant s'acquitter d'un loyer de base d'un montant de 120 000 francs par an , auquel s'ajoutait un loyer variable correspondant à la différence entre le loyer de base et 3% HT du CA réalisé par le preneur .

La société Bijouterie Rampazzo a saisi le tribunal de Grande Instance de Compiègne le 21 septembre 2004 aux fins de voir juger le renouvellement effectif du bail aux clauses et conditions du bail expiré.

Le 20 janvier 2006, la société Klecar France, venant aux droits de la société Immobiliere Carrefour pour avoir acquis la galerie commerciale dont dépendent les locaux loués et la société Bijouterie Rampazzo ont conclu un accord pour renouveler le bail pour une durée de 12 ans à compter du 1er octobre 2003, soit jusqu'au 30 septembre 2015 , le loyer étant constitué d'un loyer de base, fixé à 32 500 € par an hors taxes et hors charges et d'un loyer variable correspondant à la différence entre le loyer de base et 3, 5 % du Ca HT réalisé par le preneur .

La Sas Carmila France a acquis l'ensemble immobilier en avril 2014 .

Le 28 septembre 2015, la société Carmila France a fait délivrer un congé avec offre de renouvellement au preneur, avec effet au 31 mars 2016, en subordonnant le renouvellement aux conditions suivantes : point de départ du nouveau bail, 1er avril 2016, durée du bail 10 ans, prix du loyer annuel 80 000 € hors taxes et hors charges , les autres conditions du bail demeurant inchangées

Par acte d'huissier en date du 6 juin 2017, la SAS Carmila France a fait assigner la SAS Bijouterie Rampazzo devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Compiègne lui demandant notamment de fixer le loyer de base renouvelé au 1er avril 2016 pour une durée de 10 ans à la somme annuelle hors taxes et hors charges de 80 000 € .

Par jugement avant dire droit du 15 mai 2018 , une expertise a été ordonnée afin de déterminer la valeur locative des locaux à la date de renouvellement du bail. Le loyer provisoire a été fixé à 43 844,80 € par an.

L'expert a déposé son rapport le 22 septembre 2020.

Par jugement en date du 19 octobre 2021, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Compiègne a :

-déclaré irrecevable la demande reconventionnelle introduite par la SAS Bijouterie Rampazzo tendant à déclarer non écrites des clauses du bail litigieux.

-constaté que le bail conclu entre le Sas Bijouterie Rampazzo et la SAS Carmila France s'est renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2016.

-fixé le loyer annuel à la somme de 86 925 € hors taxes et hors charges.

-déclaré irrecevable la demande reconventionnelle et subsidiaire fondée sur les dispositions de l'article L 145-34 alinea 4 du code de commerce.

-déclaré irrecevable la demande en paiement introduite par la SAS Carmila France.

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

-condamné la SAS Bijouterie Rampazzo à verser à la SAS Carmila France une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

-condamné la SAS Bijouterie Rampazzo aux dépens.

-ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration enregistrée le 25 novembre 2021 , la SAS Bijouterie Rampazzo a interjeté appel de la décision .

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 22 juillet 2022 , la société Bijouterie Rampazzo demande à la Cour de :

-infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a constaté que le bail conclu entre la SAS Bijouterie Rampazzo et la société Carmila France s'est renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2016 .

statuant à nouveau ,

à titre principal ,

-déclarer la société Carmila France irrecevable en sa demande de fixation à la hausse de la partie fixe du loyer binaire prévu au bail , à défaut de pouvoir du juge des loyers .

À titre subsidiaire,

-renouveler le bail portant sur le local commercial n°21 exploité par la société Bijouterie Rampazzo dépendant du centre commercial Carrefour [Localité 5] , pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2016, aux clauses et conditions du bail échu, à l'exception du montant du loyer annuel et des clauses réputées non écrites en application de l'article L 145-15 du code de commerce .

-fixer le montant du loyer annuel du bail renouvelé à la valeur locative des locaux loués au 1er avril 2016 soit 37 487, 30 € HT HC pour la partie fixe et, en ce qui concerne la partie variable, à la différence entre cette partie fixe à 3, 5 % HT du chiffre d'affaires réalisé par le preneur.

-juger et retenir que la somme représentant la différence entre le nouveau loyer renouvelé et le loyer provisionnel , au remboursement de laquelle la société Carmila France sera condamnée , portera intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir .

À titre plus subsidiaire ,

-juger que la variation de loyer résultant de la fixation du loyer de renouvellement ne pourra conduire à des augmentations supérieures, pour une année à 10 % du loyer acquitté au cours de l'année précédente par application de l'article L 145-34 du code de commerce.

A titre infiniment subsidiaire,

-accorder à la société Bijouterie Rampazzo 24 mois de délais pour s'acquitter du rattrapage de loyer susceptible de résulter de la fixation rétroactive du loyer au 1er avril 2016, sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil .

En tout état de cause ,

-débouter la société Carmila France de l'ensemble de ses demandes , fins et conclusions qui ne sont pas en accord avec les demandes de la société Bijouterie Rampazzo .

-condamner la société Carmila France au paiement d'une somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Aurélie Guyot .

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 1er février 2023, la société Carmila France demande à la Cour de :

-la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes .

-confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de la SAS Bijouterie Rampazzo tendant à déclarer non écrites les clauses du contrat de bail et en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle et subsidiaire fondée sur les dispositions de l'article L 145-34 alinea 4 du code de commerce , condamné la société Bijouterie Rampazzo à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu' aux dépens , et ordonné l'exécution provisoire .

-infirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté que le bail s'est renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2016, fixé le loyer annuel à la somme de 86 925 € hors taxes et hors charges, déclaré irrecevable la demande en paiement introduite par la société Carmila France et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires .

Statuant à nouveau de ces chefs , et y ajoutant ,

-déclarer la société Rampazzo irrecevable en sa fin de non-recevoir opposée à la demande de fixation à la hausse de la partie fixe du loyer binaire prévu au bail .

-débouter la société Bijouterie Rampazzo de l'ensemble de ses demandes , fins et prétentions contraires ou incompatibles avec les demandes de la société Carmila France .

-fixer le loyer de base du bail renouvelé au 1er avril 2016 pour une durée de 10 ans à la somme annuelle hors taxes et hors charges de 100 000 € , toutes les autres clauses , charges et conditions du bail expiré demeurant inchangées , notamment l'application du loyer variable additionnel et la durée supérieure à 9 ans .

-condamner la société Bijouterie Rampazzo au paiement des intérêts au taux légal sur les loyers arriérés conformément aux dispositions de l'article 1155 du code civil , qui seront capitalisés par application des dispositions de l'article 1154 du même code , pour ceux correspondant à des loyers dus depuis plus d'un an , subsidiairement , la dire tenue audit paiement .

-condamner la société Bijouterie Rampazzo au paiement d'une indemnité de 12 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , au titre des frais irrépétibles de l'instance d'appel .

-condamner la société Bijouterie Rampazzo aux entiers dépens d'appel.

Pour un exposé détaillé des prétentions et moyens des parties , la Cour renvoie à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile .

L'ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 9 février 2023 .

SUR CE

Sur la recevabilité de la demande de fixation du loyer de base et son bien fondé

La société Bijouterie Rampazzo demande à la Cour de déclarer irrecevable la demande du bailleur de fixation à la hausse de la partie fixe du loyer binaire prévu au bail, faisant valoir que le juge des loyers commerciaux par principe , n'a pas le pouvoir de fixer le loyer de base en présence d'un loyer binaire, sauf si le contrat le prévoit expressément, que force est de constater en l'espèce que le contrat de bail ne contient aucune clause permettant au juge des loyers commerciaux ni à toute autre juridiction de fixer le montant du loyer de base, qu'il ne s'agit pas d'une incompétence du juge des loyers mais d'un défaut de pouvoir puisqu'en réalité, aucune juridiction n'est compétente pour statuer sur cette demande, qu'il s'agit d'une fin de non- recevoir qui peut être proposée en tout état de cause, qu'il ne peut être déduit du mémoire du preneur une quelconque acceptation ou renonciation et que le jugement avant dire droit du 15 mai 2018 est dépourvu de toute autorité de chose jugée, que sa position n'a jamais varié puisqu'il s'est opposé depuis l'origine à la fixation de la hausse du loyer de renouvellement .

La société Carmila France réplique que cette demande d'irrecevabilité est elle- même irrecevable en application du régime de l'estoppel en vertu duquel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui, qu'en l'espèce la société Bijouterie Rampazzo n'a jamais contesté la compétence du juge des loyers pour fixer la partie fixe du loyer binaire mais l'a au contraire revendiquée, que dans son mémoire du 6 septembre 2017, elle a sollicité du président à titre principal que le montant du loyer annuel du bail soit fixé à la valeur locative de 37 487, 30 € HT HC pour la partie fixe notamment puis a réitéré sa demande dans un second mémoire le 22 avril 2021.Elle ajoute que le juge des loyers commerciaux a dûment constaté l'accord des parties sur ce point dans son jugement avant dire droit du 15 mai 2018 , que la bijouterie Rampazzo n'a pas relevé appel de cette décision , qu'elle change aujourd'hui de stratégie , que ces changements de demandes incessantes induisent nécessairement le bailleur en erreur sur les intentions de la société locataire et ce alors que la procédure a été initiée il y plus de 6 ans , que la demande est irrecevable et subsidiairement mal fondée .

Le moyen tiré du défaut de pouvoir juridictionnel de la juridiction saisie constitue une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, laquelle peut être proposée en tout état de cause en application des dispositions de l'article 123 du code précité .Le bail en cause comporte une clause afférente au loyer qui prévoit d'une part un loyer de base, et d'autre part un loyer variable additionnel « correspondant éventuellement à la différence entre le loyer de base prévu et 3, 5 % ht du chiffre d'affaires réalisé par le preneur », il s'agit donc d'un loyer binaire .La clause selon laquelle le bail commercial est composé d'un loyer binaire n'interdit pas lorsque le contrat le prévoit de recourir au juge des loyers commerciaux pour fixer le loyer minimal garanti à la valeur locative , le juge doit alors statuer selon les critères de l'article 145 -33 du code de commerce .

S'il est établi que le contrat en cause ne comporte aucune clause permettant au juge des loyers commerciaux de fixer le montant du loyer de base, il convient de constater, que la société Bijouterie Rampazzo , assignée par son bailleur en fixation du loyer n'a pas dans son mémoire en date du 5 décembre 2017 contesté la compétence du juge des loyers commerciaux mais a sollicité que le loyer soit fixé pour la partie fixe à 37 487, 30 HT et HC et en ce qui concerne la partie variable à la différence entre cette partie fixe et 3, 5 % HT du chiffre d'affaires du preneur, à titre subsidiaire , a demandé une expertise ainsi que la fixation du loyer provisionnel pour la durée de l'instance à un montant de 43 844, 80 € .

Le juge saisi de la demande a constaté que le loyer comportait une partie fixe et une partie variable, que le juge des loyers ne pouvait donc statuer sur le montant des loyers qu'en constatant l'accord des parties, que si le contrat ne prévoyait pas de disposition sur ce point, il convenait de constater des demandes, tant du bailleur que du preneur, dans leurs mémoires respectifs , qu'ils sollicitaient du juge des loyers commerciaux de se référer à la valeur locative pour déterminer le loyer de base , qu'il fallait donc en conclure l'existence d'un accord sur ce point, et a ordonné une expertise afin de déterminer la valeur locative des locaux , or la société Rampazzo n'a pas relevé appel de ce jugement. En outre dans son mémoire en réplique, après dépôt du rapport, en date du 22 avril 2021 , la société Bijouterie Rampazzo a sollicité du juge des loyers qu'il fixe le montant du loyer annuel du bail renouvelé pour la partie fixe à 37 487, 30 € , elle est donc mal fondée à faire valoir que le juge des loyers commerciaux n'a pas le pouvoir de fixer la partie fixe du loyer, sa demande doit être rejetée .

Sur la demande tendant à déclarer non écrites les clauses du bail litigieux

La société Bijouterie Rampazzo fait valoir que le bail renouvelé au 1er avril 2016 est soumis au statut des baux commerciaux tel que modifié par la loi dite Pinel du 18 juin 2014 , complétée par le décret d'application n°2014 -1317 du 3 novembre 2014 , qu'aux termes de l'article L 145-45 du Code de Commerce , sont réputés non écrits quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit de renouvellement institué par le présent chapitre ou aux dispositions des articles L 145-4, L 145-37 à L 145-41 du premier alinea de l'article L145-42 et des articles L 145-47 à L 145 -54 , que par conséquent les clauses du bail du 20 janvier qui auraient pour effet de faire échec à ces textes et droits doivent être réputées non écrites.

La société Carmila France demande à la Cour de confirmer la décision du premier juge en ce qu'il a déclaré cette demande irrecevable, faisant valoir que depuis 1991 , la Cour de Cassation a posé le principe selon lequel , le renouvellement du bail commercial s'opère aux clauses et conditions du bail venu à expiration, sauf le pouvoir reconnu au juge en matière de fixation du prix, que cette jurisprudence a pour fondement les articles 1134 du code civil dans sa précédente rédaction et l'article R 145-23 du code de Commerce selon lequel la compétence d'attribution du juge des loyers commerciaux est limitée à la seule fixation du loyer en révision ou en renouvellement ,qu'il est donc fait interdiction au juge des loyers commerciaux de modifier les clauses mêmes accessoires du bail initial, lors du renouvellement .

A titre subsidiaire, elle conclut au débouté , rappelle les dispositions de l'article R 145-8 du code de commerce selon lequel les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l'une ou l'autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer, qu'il y a lieu de rétablir l'équilibre économique brisé par la mise à l'écart des stipulations litigieuses en majorant le loyer de base lui même établi en considération de ces clauses contractuelles.

Ainsi que l'a rappelé le premier juge, l'article R 145-23 du code de commerce dispose que les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées quel que soit le montant du loyer, devant le président du tribunal judiciaire , anciennement tribunal de grande instance, ou le juge qui le remplace. Il est statué sur mémoire. Les autres contestations sont portées devant le tribunal judiciaire ( tribunal de grande instance) qui peut, accessoirement, se prononcer sur les demandes mentionnées à l'article précédent .La juridiction compétente est celle du lieu de la situation de l'immeuble .

Dès lors la demande tendant à voir déclarer non écrites des clauses du bail ne relève pas de la compétence du juge des loyers commerciaux, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré cette demande irrecevable .

Sur la durée du bail renouvelé

La société Camila France demande à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le contrat de bail avait été renouvelé pour une durée de 9 ans. Elle fait valoir que le juge ne pouvait statuer sur la durée de renouvellement du bail en application de l'article R 145-23 alinea 2 du code de commerce , qu'en outre les parties tiennent de la loi la possibilité de s'accorder sur une durée du bail renouvelé supérieure à 9 ans .

La société Bijouterie Rampazzo conclut à la confirmation du jugement, faisant valoir que si le bail comporte une clause selon laquelle il a été conclu pour une durée de 12 ans renouvelable pour une durée de 12 ans , l'article L 145-12 prévoit que la durée du bail renouvelé est de 9 ans sauf accord des parties pour une durée plus longue , qu'il s'agit d'une disposition d'ordre public , que l'accord des partie doit être exprès et se formaliser au moment de la demande de renouvellement , qu'elle déclare être opposée à un renouvellement d'une durée de 12 ans , que la Cour doit confirmer le jugement en disant que le bail est renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2016 .

Dans la mesure où la SAS Carmila France a saisi le juge des loyers d'une demande de fixation du loyer annuel de base du bail renouvelé au 1er avril 2016 pour une durée de 10 ans , et que le preneur a lui- même demandé la fixation de ce loyer en faisant valoir cependant que le bail s'était renouvelé pour une durée de 9 ans seulement, en application de l'article L 145-12 faute d'accord des parties pour une durée plus longue , que cette disposition de la loi est d'ordre public , le juge des loyers a pu à juste titre, alors qu'un bail renouvelé est un nouveau bail et qu'il appartient aux parties lors de chaque renouvellement d'exprimer expressément leur volonté de contracter pour une durée différente , faute de quoi le bail est renouvelé pour une durée de 9 ans , constater qu'aucun accord n'était intervenu entre les parties après délivrance du congé avec offre de renouvellement et dire que le contrat de bail avait été renouvelé pour une durée de 9ans , le jugement sera confirmé .

Sur les demandes relatives au montant du loyer

La société Bijouterie Rampazzo fait valoir qu'elle est tenue de verser au bailleur, en sus de la partie fixe du loyer une part variable , qu'il s'agit d'un facteur de diminution de la valeur locative et qu'il y a lieu en conséquence de pratiquer un abattement sur la partie fixe de loyer renouvelé pour rétablir l'équilibre brisé. Elle fait valoir que la valeur locative est déterminée en appliquant les critères retenus par l'article L 145-33 , qu'il s'agit d'un local en bon état d'entretien éloigné de l'entrée principale de la galerie commerciale, qu'une partie non négligeable des locaux est utilisée à des fins pratiques , que la surface contractuelle de 101, 70 m2 est donc à retenir et à titre subsidiaire, une surface pondérée de 108, 02 m2 puisqu'il existe une surface de mezzanine mais également des locaux annexes en rez de chaussée .

Elle souligne que le centre commercial a pâti de l'engorgement des voies routières de 2003 à 2016 de sorte qu'il a été procédé à des travaux en 2017 pour y remédier, qu'à 4km du centre commercial Carrefour [Localité 5] gravitent plusieurs centres commerciaux situés à [Localité 4], captifs de clientèle , la ville de [Localité 4] ayant 40 372 habitants contre 2 804 habitants pour [Localité 5] , que par ailleurs le bailleur a installé trois autres concurrents dans le centre commercial , les enseignes Histoires d'Or en 2010 , Louis Pion en 2011 et Cléor en 2013 toutes appartenant à de grands groupes , Cléor étant installé dans le local adjacent au sien, qu'il existe également un bijouterie à l'intérieur de l'hypermarché Carrefour sous enseigne « Un monde en Or »et que cet environnement très concurrentiel doit être pris en compte, que le prix au m2 de son local est nécessairement inférieur à celui de ses concurrents qui disposent de surfaces plus réduites donc d'une valeur au m2 supérieure .Elle ajoute que le bail ne l'autorise pas à vendre autre chose que des bijoux qu'il existe donc une destination restrictive des lieux .

Elle fait valoir que le bail inclut des charges exorbitantes de droit commun ce qui justifie un abattement , qu'ainsi elle doit s'acquitter selon le bail de toutes taxes locatives , professionnelle et impôts dont le bailleur est responsable, le montant des charges et taxes qui lui ont été refacturées s'élevant à 6 665 € en 2015, qu'elle ne peut céder son droit au bail qu'à l'acquéreur de son fonds de commerce en respectant des conditions strictes, que le bailleur a interdit la sous location totale et la location gérance, que le preneur a en outre la charge des grosses réparations, que l'expert a refusé d'appliquer un abattement en supposant que les baux du centre commercial comprenaient des clauses similaires mais que ceci n'est pas démontré, que le bail a donc transféré au locataire pendant la période de référence la quasi -totalité des charges , taxes, obligations et travaux sans contrepartie et que compte tenu de l'importance des clauses exorbitantes de droit commun,un abattement de 10 % est justifié.

Elle ajoute que les facteurs locaux de commercialité ont évolué en défaveur du locataire compte tenu de l'engorgement des accès routiers et de l'implantation d'un concurrent direct dans une cellule adjacente à la sienne, que par ailleurs le tableau des références versé par le bailleur ne renseigne pas sur les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

La société Bijouterie Rampazzo demande donc que la fixation du prix du bail renouvelé au 1er avril 2016 soit la suivante : 432 € / m2 x 101, 70 m2 GLA = 43 844, 8 € , affecté d'un abattement de 5 % pour rétablir l'équilibre de la clause recettes et un abattement de 10 % pour charges exorbitantes de droit commun , soit un abattement global de 14, 5 % , et donc une partie fixe d'un montant annuel de 37, 487, 30 € HT et HC soumise à indexation , et pour la partie variable un renouvellement à l'identique, soit le résultat de la différence entre la partie fixe du loyer HT HC et 3, 5 % du chiffre d'affaires HT réalisé par le preneur .

A titre plus subsidiaire , elle demande à la Cour de faire application du lissage du déplafonnement prévu à l'article L 145-34 alinea 4 , que si un bail de 9 ans se poursuit au- delà de 12 ans et que le plafonnement est écarté , aucune disposition légale n'écarte le lissage du déplafonnement , qu'en l'espèce , c'est la durée du bail initial qui justifiait d'écarter le plafonnement et non le fait que le bail ait été tacitement prorogé , qu'il n'existe aucune raison d'exclure par principe le mécanisme du plafonnement en matière de loyer binaire .

La société Carmila France réplique que la règle du lissage échappe à la compétence du juge des loyers commerciaux qui doit seulement fixer le loyer et non condamner au paiement , qu'au surplus ce dispositif ne s'applique pas aux baux dont la durée effective est supérieure à 12 ans , que le précédent bail a été renouvelé pour une durée de 12 ans , ce qui exclut la société locataire du bénéfice de cette disposition , que le caractère binaire du loyer justifiant son déplafonnement est exclu du champ d'application de l'article L 145-34 alinea 4 du code de commerce .

Elle souligne que l'expert a retenu une valeur locative de 680 € par m2 GLA annuel et a fixé la valeur de renouvellement du bail à 78 800 € HT et HC par an , à partir de références hétéroclites sans s'expliquer sur les ajustements auxquels il a procédé, que le premier juge a tenu compte des observations du bailleur en partie et a réhaussé la valeur locative à 750 € par m2 soit un loyer annuel d'un montant de 86 925 € hors taxes et hors charges, que la bijouterie Rampazzo revendique un loyer tel qu'il a été fixé il y a 17 ans .

Elle fait valoir que le local est très bien situé , en plein coeur de la galerie marchande et à équidistance de 2 des 3 entrées principales du centre commercial, en face des lignes de caisses de l'hypermarché Carrefour, qu'il s'agit d'un des meilleurs emplacements de la galerie commerciale qui lui permet de concentrer l'ensemble des flux , que les locaux sont en très bon état d'entretien général que l'expert a cru pouvoir appliquer une pondération de surfaces pour aboutir à une surface utile de 115, 9 m2 alors qu'il n'est pas d'usage de procéder à une quelconque pondération sur une surface se situant dans une galerie commerciale , que le calcul de la valeur locative doit donc être établi sur la base d'une surface de 130, 10 m2 GLA .

Elle souligne que le centre commercial offre de nombreux services à la clientèle (parking station -service , kiosque accueil , sanitaires , espaces bébé , wi-fi etc) , une présence sur les réseaux sociaux , bénéficie d'une très bonne desserte par 3 lignes de bus , est implanté dans l'agglomération de [Localité 4] qui compte 70 000 habitants, que la zone de chalandise est estimée à 243 000 habitants, que l'activité de bijouterie dégage de fortes marges commerciales ce qui justifie une majoration de la valeur locative .Elle ajoute que les clauses stipulées au bail ne constituent aucunement des clauses exorbitantes dés lors qu'elles sont d'usage et sont également supportées par les autres locataires du centre commercial , telle la taxe foncière et les grosses réparations que le centre commercial a été rénové en 2015 et qu'en 2020 , les places de parking ont été retracées et agrandies , des travaux de peinture et de carrelage étant prévus en 2021.

Elle fait valoir qu'elle a transmis à l'expert un tableau complet mentionnant l'intégralité des loyers à la signature du bail et à la date de renouvellement du contrat, que l'expert a sous évalué la valeur locative puisque les loyers de base pratiqués dans le centre commercial pour des activités similaires sont comprises entre 903 et 1099 € du m2 annuel , que les magasins de prêt à porter dont les références ont été retenues par l'expert disposent d'une superficie largement supérieure et que ces références sont antérieures à la rénovation de 2015, que l'activité de bijouterie ne nécessite que des espaces réduits permettant de valoriser de façon sensible chaque m2 et que la présence de différentes enseignes dans une même activité permet de constituer un pôle d'attractivité .

Elle ajoute qu'il n'y a pas lieu à abattement pour loyer binaire, que l'expert a pris soin de relever que la quasi totalité des références retenues dans son analyse comprennent une clause de loyer variable, que l'immense majorité des loyers du centre commercial sont binaires , que le pourcentage de loyer variable de 3, 5 % est le plus faible des baux du centre , qu'il appartient à la Cour de retenir une valeur de 863 € le m2 pour une surface même pondérée de 115, 90 m2 soit un loyer annuel de base de 100 021,70 € arrondi à 100 000 € hors taxes et hors charges.

Ainsi que l'a déclaré le premier juge , le dernier alinea de l'article L 145-34 du code de commerce n'instaure dans les cas qu'il détermine, qu'un étalement de la hausse du loyer qui résulte du déplafonnement , sans affecter la fixation de la valeur locative , cette règle doit donc être écartée du calcul de la fixation du loyer des locaux en cause.

L'expert a noté dans son rapport déposé le 4 février 2021 que les locaux dépendaient d'un centre commercial actif situé en périphérie de [Localité 4] , au coeur d'une zone à fort potentiel , centre rénové en 2015 comptant un hypermarché carrefour et 47 boutiques et restaurants , jouissant d'une bonne desserte par les transports en commun et d'un important parking en extérieur .Il a précisé que les locaux étaient d'une superficie totale de 130,1 M2 GLA dont 23, 6 en mezzanine , les locaux comprenant au rez de chaussée une aire de vente , un dégagement et un coffre-fort , en mezzanine un bureau ouvert , une salle de repos et des toilettes , le linéaire de façade du commerce sur le mail étant de 4, 90 .S'il a souligné le très bon état d'entretien général des locaux , il a souligné que la visibilité commerciale de ces locaux n'était pas optimale , les visiteurs pouvant effectuer leurs achats sans passer devant la bijouterie Rampazzo , et surtout la présence de 4 commerces spécialisés en bijouterie et/ horlogerie sur un centre qui comporte 47 boutiques, dont un jouxtant les locaux en cause , ce qui lui a permis de conclure à une concurrence importante .Il a pondéré la surface et a abouti à une surface utile pondérée totale de 115, 94 m2 GLA. Il a sollicité un état locatif du centre commercial , a retenu des références dont les surfaces étaient comprises entre 50 m2 GLA et 150 m2 et pour lesquels la date de signature du bail était postérieure au 1er janvier 2011, en soulignant que la référence la plus basse soit 534 € m2 GLA portait sur un commerce à usage de prêt à porter d'une surface de 144 m2 GLA et que les deux références les plus hautes, soit 1052 €/ m2 GLA et 1099 €/ m2 GLA concernaient des commerces à usage de bijouterie aux superficies inférieures à celle des locaux expertisés, les surfaces de ces derniers étant de 53, 1 m2 et 79, 1 m2 .

Il a indiqué que compte tenu de l'étude de marché des valeurs locatives dans le centre commercial Carrefour [Localité 5] et des critères d'appréciation relevés , il y avait lieu de retenir une valeur locative de 680 € / m2 GLA , soit une valeur locative des locaux au 1er avril 2016 de 680 € x 115, 9 m2 GLA = 78 812 € arrondie à 78 800 € par an hors taxes et hors charges .

L'expert a souligné que les références relevées dépendant du même centre commercial , il était supposé dans son analyse que les baux comportaient des clauses identiques , qu'il convenait donc de ne procéder à aucun abattement ou majoration de valeur locative déterminée par la méthode de comparaison , que de même la quasi totalité des références retenues dans son analyse , comprenaient une clause de loyer variable allant de 4 % à 7, 1 % du CA , qu'il n'était donc pas justifié de procéder à un abattement pour clause recettes , le loyer minimum garanti étant déterminé par la méthode de comparaison avec les loyers pratiqués au sein du même centre commercial et étant eux mêmes soumis à des clauses recettes .

En application de l'article L 145-33 du code de commerce , le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative .A défaut d'accord , cette valeur est déterminée d'après

1° les caractéristiques du local considéré ;

2° la destination des lieux .

3° les obligations respectives des parties .

4° les facteurs locaux de commercialité.

5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage .

Selon l'article 145-3 du code de commerce, les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération

1° de sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public .

2° de l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux .

3°de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée.

4°de l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail .

5° de la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire .

L'expert a sollicité du bailleur , qui le lui a communiqué , l'état locatif du centre commercial avec le montant des loyers en début de bail. En présence d'un loyer binaire, le principe d'un abattement n'est pas contesté , cependant il ne peut être appliqué à la valeur locative proposée par l'expert dans la mesure où cette dernière intègre déjà une clause recette dans le contrat de bail , l'expert a clairement mentionné que la quasi totalité des références retenues dans son analyse comprenait une clause de loyer variable allant de 4% à 7, 1 % du CA, le loyer minimum garanti étant déterminé par la méthode de comparaison avec les loyers pratiqués au sein du même centre commercial eux mêmes soumis à des clauses recettes , le jugement sera donc confirmé sur ce point .

S'agissant de l'abattement sollicité pour charges exorbitantes de droit commun , même si d'autres baux n'ont pas été produits, l'expert ne les ayant pas demandés, le preneur n'ayant pas non plus sollicité ces pièces durant les opérations d'expertise , il est admis que les locataires d'un centre commercial supportent des charges identiques, notamment la taxe foncière ou les grosses réparations, de sorte qu'il n' y a pas lieu de procéder à un abattement sur la valeur locative déterminée par comparaison avec les loyers de ce même centre commercial .

La valeur locative a été établie en tenant compte du fait que les locaux dépendaient d'un centre commercial actif rénové en 2015 situé en périphérie de [Localité 4] , au coeur d'une zone à fort potentiel , jouissant d'une bonne desserte par les transports en commun et d'un important parking. Il a été souligné que la visibilité des locaux dans le centre commercial n'était pas optimale ce que le bailleur réfute mais force est de constater qu'il a pu être observé qu'il était possible pour les visiteurs d'effectuer leurs achats sans passer devant la bijouterie Rampazzo et que deux de ses concurrents , Louis Pion et Cléor bénéficiaient d'une plus grande proximité avec Mac Donalds et les sanitaires publics du centre commercial qui représentaient des éléments d'attraction importants Par ailleurs, l'expert a souligné une importante concurrence pour la bijouterie Rampazzo dans la galerie commerciale, due à la présence des enseignes Histoire d'Or, Louis Pion et Cléor , cette dernière étant installée dans le local adjacent du preneur étant observé que la bijouterie Rampazzo a également une activité d'horlogerie. S'agissant des locaux, il a été souligné leur très bon état d'entretien. Contrairement à ce qu'indique le bailleur le fait que les locaux soient situés dans une galerie commerciale n'interdit pas la pondération des surfaces , cette dernière a été effectuée selon les usages pour un local situé en centre commercial, il sera retenu celle de 115, 9 m2 GL ainsi qu'évaluée par l'expert .

S'agissant des valeurs de référence, l'expert a pu à juste titre retenir 10 références puisque ces dernières ont trait à des surfaces comprises entre 50 m2 GLA et 150 m2 GLA et pour lesquelles la date de signature du bail est postérieure au 1er janvier 2011 , ainsi qu'il l'a indiqué , et contrairement à ce que le bailleur soutient dans ses écritures, il ne peut être pris en compte de façon prioritaire ou exclusivement les seules références d'une activité de même nature , soit en l'espèce , la bijouterie horlogerie, il doit être tenu compte de la superficie des locaux et de la date d'effet du bail , l'expert a donc pu prendre ainsi en compte non seulement les références concernant Histoire d'Or , Cléor et Louis Pion mais également celles des enseignes Jules, du Pareil au Même, Jennyfer , Franck Provost, Fiesta, Micromania et Claro Afflelou , leur loyer comportant un loyer minimum garanti et un loyer variable compris le plus souvent entre entre 5 et 7 %.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments , il sera retenu la valeur locative des locaux au 1er avril 2016 de 78 800 € par an HT et HC proposée par l'expert qui souligne que le loyer de base annuel réglé par la bijouterie Rampazzo s'élevait à cette date à 43 844, 80 € hors taxes et hors charges an, le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fixé le loyer annuel hors taxes et hors charges à 86 925 € .

Le dernier alinea de l'article L 145-34 n'instaure dans les cas qu'il détermine qu'un étalement de la hausse du loyer qui résulte du déplafonnement , sans affecter la fixation du loyer à la valeur locative , ce dispositif étant distinct de celui de la fixation du loyer , il n'entre pas dans l'office du juge des loyers commerciaux de statuer sur son application , la demande reconventionnelle du lissage du déplafonnement doit être déclarée irrecevable , le jugement sera confirmé .

Sur la demande de délais de paiement

La société Bijouterie Rampazzo sollicite à titre infiniment subsidiaire deux ans de délais de paiement pour s'acquitter des sommes dues au titre d'un rattrapage de loyers, faisant valoir qu'elle n'est pas responsable de la durée de la procédure, qu'elle est à jour des loyers courants et qu'elle se retrouverait dans une situation délicate, si elle devait assurer en une seule fois le rattrapage des loyers en plus d'une éventuelle augmentation des loyers courants .

La société Carmila France s'oppose à la demande , faisant valoir qu'il s'agit d'une sorte de demande de lissage détournée, qu'en outre la demande de délais est fondée sur les dispositions de l'article 1343-5 du code civil , laquelle ne relève pas de la compétence du juge des loyers commerciaux strictement définie à l'article R 145-23 du code de commerce .Elle ajoute à titre subsidiaire , que l'appelante ne justifie par aucune pièce d'une situation difficile .

Le juge des loyers commerciaux est compétent pour fixer le prix du bail , il ne prononce pas de condamnation au paiement des loyers , de sorte que la demande tendant à l'octroi de délais de paiement est irrecevable devant lui comme devant la Cour .

Sur la demande de condamnation au paiement des intérêts sur les loyers arriérés

Il y a lieu de dire , en application des dispositions de l'article 1155 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 2 octobre 2016 que les intérêts dus sur la différence entre le loyer du bail renouvelé et le loyer payé depuis le renouvellement courent à compter de l'assignation délivrée par Carmila France le 6 juin 2017 et d'ordonner la capitalisation des intérêts , le jugement sera donc infirmé .

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il y a lieu de condamner la société Bijouterie Rampazzo à payer à la société Carmila France la somme de 3 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel .

PAR CES MOTIFS

La Cour , statuant par arrêt contradictoire , en dernier ressort , par mise à disposition au greffe

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception du montant du loyer annuel et sur les intérêts ,

Statuant à nouveau ,

Fixe le loyer de base annuel du bail renouvelé entre les parties au 1er avril 2016 à la somme de 78 800 € par an hors taxes et hors charges.

Dit que les intérêts dus sur la différence entre le loyer du bail renouvelé et le loyer payé depuis le renouvellement courent à compter du 6 juin 2017 .

Ordonne la capitalisation des intérêts .

Déclare irrecevable la demande de délais de paiement .

Condamne la société Bijouterie Rampazzo à payer à la société Carmila France la somme de 3 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

Condamne la société Bijouterie Rampazzo aux entiers dépens de première instance et d'appel .

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/05459
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.05459 ?
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