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25/04/2023 | FRANCE | N°22/00731

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 25 avril 2023, 22/00731


ARRET



















[H]

[D]

S.C.E.A.DU [Adresse 9]

E.A.R.L. DE [Adresse 7]





C/



S.A. CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 6]









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 25 AVRIL 2023





N° RG 22/00731 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILGM



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE COMPIEGNE EN DATE DU 02 NOVEMBRE 2021





PARTIES EN

CAUSE :





APPELANTS







Monsieur [E] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]





Représenté par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE





Madame [N] [D] épouse [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]





Représentée par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE




...

ARRET

[H]

[D]

S.C.E.A.DU [Adresse 9]

E.A.R.L. DE [Adresse 7]

C/

S.A. CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 6]

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 25 AVRIL 2023

N° RG 22/00731 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILGM

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE COMPIEGNE EN DATE DU 02 NOVEMBRE 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur [E] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE

Madame [N] [D] épouse [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE

S.C.E.A. DU [Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE

E.A.R.L. DE [Adresse 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Gérard FERREIRA, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMEE

S.A. CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE [Localité 6] agissant poursuites et diligences de ses Président et Administrateurs domiciliés en cette qualité audit siège social

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Xavier PERES de la SELARL MAESTRO AVOCATS, avocat au barreau D'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Février 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 Avril 2023.

GREFFIER : Mme Sophie TRENCART, adjointe administrative faisant fonction.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 25 Avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Sophie TRENCART, faisant fonction de Greffier.

DECISION

Par acte sous seing privé en date du 11 février 2012 la caisse de Crédit mutuel de [Localité 6] (CCMC) a consenti à la SCEA du [Adresse 8] un prêt professionnel agricole d'un montant de 35000 euros afin de financer un fonds de roulement remboursable en sept annuités constantes de 5961,31 euros à compter du 5 avril 2013.

Mme [N] [D] épouse [H] et M. [E] [H] se sont portés cautions solidaires de ce prêt à hauteur de la somme de 42000 euros pour une durée de neuf ans.

Se prévalant d'une mensualité impayée la CCMC a, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 31 juillet 2017, mis en demeure la SCEA du [Adresse 8] de s'en acquitter sous un mois à peine de déchéance du terme.

Par deux lettres recommandées avec avis de réception du même jour la CCMC a avisé les cautions de la défaillance de la SCEA du [Adresse 8].

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 octobre 2017 la CCMC a adressé à la SCEA du [Adresse 8] une nouvelle mise en demeure au titre de la mensualité impayée du prêt et au titre du solde débiteur de son compte courant toujours sous peine de prononcé de la déchéance du terme.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 16 novembre 2017 la CCMC a prononcé la déchéance du terme et mis en demeure la SCEA du [Adresse 8] de lui régler la somme de 17912,43 euros .

Par lettres recommandées en date des 16 et 17 novembre 2017 la CCMC a mis en demeure les cautions de lui régler la somme de 17890,78 euros .

Par acte sous seing privé en date du 16 mai 2013 la CCMC a consenti à l'EARL de [Adresse 7] un prêt professionnel agricole d'un montant de 54521 euros afin de financer la reprise d'un prêt bancaire remboursable en cinq annuités de 12212,51 euros hors assurance à compter du 15 avril 2014, prêt dont les époux [H] se sont également portés cautions solidaires à hauteur de la somme de 65425 euros pour une durée de 84 mois.

Par un avenant en date du 13 avril 2016 la durée de ce second prêt a été augmentée de 12 mois avec une échéance d'un montant de 1468 euros au 14 avril 2016 et trois mensualités de 12356 euros, assurance comprise.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 27 mai 2017 la CCMC a mis en demeure l'EARL de [Adresse 7] de lui régler une échéance impayée pour la somme de 12473,94 euros sous peine de déchéance du terme.

Par courrier du même jour les cautions ont été avisées de la défaillance de la débitrice principale.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 8 septembre 2017 l'EARL de [Adresse 7] a de nouveau été mise en demeure de régulariser l'annuité impayée sous peine de prononcé de la déchéance du terme.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 31 octobre 2017, la déchéance du terme a été prononcée et l'EARL de [Adresse 7] a été mise en demeure de régler la somme de 38828,55 euros au titre du prêt consenti le 16 mai 2013.

Par deux lettres recommandées avec avis de réception en date des 31 octobre et 2 novembre 2017 les cautions ont été mises en demeure de régler la somme de 38828,55 euros.

Par exploits d'huissier en date des 6 et 10 avril 2018 la caisse de Crédit mutuel de [Localité 6] a fait assigner la SCEA du [Adresse 8], l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] devant le tribunal de grande instance de Compiègne aux fins de voir condamner solidairement la SCEA du [Adresse 8] et les époux [H] à lui payer la somme de 18113,41 euros avec intérêts contractuels au taux de 4,60% à compter du 27 février 2018 et de voir condamner solidairement l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] au paiement de la somme de 39274,81 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,90% à compter du 27 février 2018.

Par jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Compiègne en date du 22 juin 2020 la demande de l'EARL de [Adresse 7] tendant à voir constater la nullité du commandement au fins de saisie-vente délivré le 17 juillet 2019 et la demande de suspension des procédure d'exécution ont été rejetées.

Par jugement en date du 2 novembre 2021 le tribunal judiciaire de Compiègne a déclaré irrecevable la demande de déchéance du droit aux intérêts produits par le prêt accordé à la SCEA du [Adresse 8] mais recevable la même demande formée pour le prêt consenti à l'EARL de [Adresse 7].

L'EARL de [Adresse 7] et les cautions ont été déboutées de leur demande de déchéance du droit aux intérêts.

La SCEA du [Adresse 8] et les époux [H] ont été condamnés solidairement au paiement de la somme de 18113,41 euros avec intérêts au taux conventionnel de 4,60% à compter du 27 février 2018 et l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] ont été condamnés solidairement au paiement de la somme de 39274,81 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,90% à compter du 27 février 2018.

Les débiteurs ont été déboutés de leur demande de délais de paiement et condamnés au paiement de la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Maestro Avocats.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 17 février 2022 la SCEA du [Adresse 8], l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] ont interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions excepté en ce qu'elle a déclaré recevable la demande de déchéance du droit aux intérêts formée par l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H].

Aux termes de leurs conclusions remises le 27 octobre 2022, la SCEA du [Adresse 8], l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] demandent à la cour d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a fait droit aux prétentions de la CCMC et statuant à nouveau de l'en débouter et de dire que les deux sociétés reprendront le paiement des échéances annuelles des prêts dans le mois de la signification de l'arrêt à intervenir.

Ils demandent que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts du fait de l'erreur dans le calcul du taux effectif global du prêt consenti à l'EARL de [Adresse 7] et que seul le remboursement du capital soit retenu suivant l'échéancier, les sommes perçues au titre des intérêts qui seront productives d'intérêts au jour de leur versement étant imputées sur le capital restant dû.

Ils demandent encore que les engagements de caution des époux [H] soient jugés disproportionnés et que la CCMC soit déboutée de ses demandes à leur encontre.

A titre subsidiaire ils demandent à la cour d'accorder aux deux sociétés deux années de délais de grâce pour s'acquitter des sommes dues avec imputation des paiements à venir par priorité sur le capital restant dû et fixation d'un intérêt à calculer en fonction de l'intérêt au taux légal, les cautionnements des époux [H] étant toujours considérés comme disproportionnés.

En toutes hypothèses ils demandent la condamnation de la CCMC au paiement d'une somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions remises le 25 juillet 2022 la caisse de Crédit mutuel de [Localité 6] demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et de condamner solidairement les appelantes à lui payer la somme de 4000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL Maestro Avocats.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 février 2023.

SUR CE

Sur la déchéance du terme

Les appelants exposent que les céréaliers ont été gravement impactés par des conditions climatiques exceptionnellement défavorables au printemps 2016 auxquelles se sont ajoutés des prix exceptionnellement bas, cette conjonction ayant entraîné des difficultés de trésorerie chez les exploitants telles, que le gouvernement a pris des mesures à leur profit par le biais d'un pacte de consolidation et de refinancement en date du 4 octobre 2016 dont le Crédit mutuel était signataire, le dispositif mis en place prévoyant la prolongation jusqu'en mars 2017 du plan de soutien à l'élevage et aux productions végétales mis en place en 2016.

Ils font valoir que la SCEA et l'EARL ont connu sur 2016 des résultats catastrophiques, le déficit cumulé sur l'année 2016 s'élevant à 101 998 euros.

Ils indiquent qu'ainsi le bénéfice d'une 'année blanche' telle que prévue au pacte a été sollicité mais que la CCMC a refusé d'accorder le report de l'échéance annuelle de chacun des prêts en cause et a prononcé la déchéance du terme.

Ils considèrent que le refus ainsi opposé n'est pas légitime au regard des circonstances.

Ils rappellent que le dispositif de ' l'année blanche'concernait tous les prêts en cours de plus de 24 mois et font valoir que la CCMC reconnaît elle-même l'applicabilité au cas d'espèce de ce dispositif qui impliquait un report d'échéance sur 2017 et donc une renonciation à prononcer une déchéance du terme.

La CCMC fait valoir en premier lieu que s'agissant du prêt contracté par la SCEA du [Adresse 8] l'échéance du mois d'avril 2017 n'a été que partiellement réglée alors qu'elle avait refusé le bénéfice de 'l'année blanche' et que s'agissant du prêt contracté par l'EARL de [Adresse 7] en dépit d'un avenant en avril 2016 réaménageant le prêt, l'échéance du mois d'avril 2017 n'a pas été davantage réglée malgré un délai accordé par la banque qui n'obtenait pas cependant de réponse à son interrogation sur la date prévisible de règlement.

Elle fait observer qu'elle a encore accepté de patienter dès lors que M. [H] entendait refinancer ses encours bancaires avec un investisseur privé.

Elle soutient que malgré la clause de ses prêts lui permettant sans formalité ni mise en demeure préalable de rendre immédiatement exigibles les sommes dues en cas de retard de plus de 30 jours dans le paiement partiel ou total d'une échéance, elle a notifié des mises en demeure de régulariser les impayés et qu'elle a donc valablement prononcé pour les deux prêts la déchéance du terme en l'absence de régularisation des impayés.

Elle rappelle que le pacte de consolidation agricole du 4 octobre 2016 visait à faciliter la restructuration ou l'aménagement des prêts existants pouvant conduire à une année blanche en termes de remboursement et à ne pas avoir à rembourser les prêts éligibles durant 12 mois, le report de l'annuité se faisant en fin de tableau d'amortissement.

Elle fait valoir cependant que le report d'échéance n'était pas automatique et que pour en bénéficier il fallait remplir les conditions légales d'éligibilité pour que la banque puisse procéder dans un second temps à une étude du dossier.

Elle fait valoir qu'il fallait subir une baisse d'EBE supérieure à 20% par rapport à la moyenne des cinq dernières années et que seuls certains prêts étaient éligibles soit ceux contractés pour plus de 24 mois et contractés après 2015 et en étaient exclus les prêts ayant fait l'objet d'une aide publique les frais relatifs aux ouvertures de crédit, besoin de fonds de roulement, prêts de trésorerie et crédit-bail.

Elle soutient que les prêts en cause n'étaient pas éligibles au dispositif et que l'étude de la banque n'a pas abouti favorablement dès lors qu'elle avait déjà consenti une suspension en capital à L'EARL sur l'année 2016 et était dans l'attente de justificatifs toujours manquants et qu'elle n'était pas la banque principale des sociétés débitrices les flux lui étant confiés étant minimes.

Malgré une clause expresse la dispensant d'y recourir la CCMC a fait précéder le prononcé de la déchéance du terme des deux prêts litigieux de mises en demeure et a ainsi procédé au prononcé de la déchéance du terme de manière parfaitement régulière en la forme.

Il lui est cependant reproché d'avoir prononcé la déchéance du terme alors même que la créance résultant des prêts n'était pas exigible en raison de l'obligation de faire bénéficier les débiteurs du dispositif 'année blanche' du pacte de consolidation et de refinancement du 4 octobre 2016.

Cependant les pièces relatives au pacte de consolidation que les appelants versent aux débats sont des informations générales sur celui-ci et sur les mesures qu'il contient et notamment la création d'un fonds de garantie public permettant un accès facilité aux prêts par les agriculteurs et la prolongation du dispositif de 'l'année blanche' mis en place courant 2016 et ce jusqu'au 31 mars 2017 visant à faciliter la restructuration ou l'aménagement de prêts existants partiellement ou en totalité par la prise en charge des frais liés à la restructuration des emprunts.

Il est également produit aux débats par les deux parties une notice d' information sur la prolongation du dispositif de 'l'année blanche' pour le département de l'Oise qui révèle que le dispositif était soumis à différentes conditions et notamment une baisse d'EBE supérieure à 20% de la moyenne des cinq dernières années mais aussi quant à la nature du prêt visé et qu'étaient ainsi écartés les prêts de trésorerie ou les besoins en fonds de roulement.

Par ailleurs ce dispositif d'aide pouvait revêtir différentes formes pouvant aller jusqu'à une année blanche et un report des échéances sans frais mais était soumis à une étude par l'établissement bancaire quant aux conditions d'éligibilité et quant aux mesures pouvant être proposées.

Il n'existait ainsi aucune automaticité de report des échéances pour les prêts en cours mais seulement un dispositif permettant aux agriculteurs d'obtenir sous certaines conditions une restructuration de certains de leurs prêts selon diverses modalités en concertation avec leur établissement bancaire et avec une prise en charge des frais liés à cette restructuration .

En l'espèce la CCMC a refusé le bénéfice de ce dispositif et les appelants ne justifient pas que ce refus soit illégitime et que toutes les conditions pour en bénéficier aient été réunies dès lors qu'ils se contentent de soutenir que ce dispositif était applicable à tous les prêts en cours de plus de 24 mois et ce alors même que la CCMC produit une fiche d'information à destination des agriculteurs indiquant que ne sont concernés que les prêts postérieurs à l'année 2015.

La CCMC a indiqué au demeurant sans être contredite qu'elle n'avait pas eu communication des documents sollicités et notamment un plan prévisionnel de trésorerie du comptable et ce dès décembre 2016 pour envisager une restructuration sur le long terme.

La CCMC indiquait alors ne pas s'engager sur un report sur le long terme faute de réunion des éléments demandés quant à l'avenir et faute également de justification de la position adoptée par la banque principale des sociétés, elle-même n'étant destinataire que de moins d'un tiers des flux.

Il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a dit justifié le prononcé de la déchéance du terme des deux prêts.

Sur le taux effectif global et la déchéance du droit aux intérêts

Les appelants ne maintiennent leur demande tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts en raison d'un taux effectif global erroné que pour le prêt consenti à l'EARL de [Adresse 7].

Ils font valoir que le taux effectif global est fixé suite à l'avenant du 13 avril 2016 à 4,5% alors qu'il est en réalité de 5,38% et que le calcul et la perception d'intérêts sur la base d'un taux erroné a accentué les difficultés financières rencontrées par la société.

Ils ajoutent qu'un rapport d'un expert établit que l'écart à la hausse du TEG recalculé peut atteindre 2,61% par rapport au TEG annoncé.

La CCMC soutient que les appelants ne rapportent pas la preuve d'une erreur dans le calcul du TEG au-delà du seuil prescrit d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné.

Dès avant l'application de l'article L 341-48-1 du code de la consommation issu de l'ordonnance du 17 juillet 2019 selon lequel en cas de défaut ou d'erreur du TEG le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice pour les emprunteurs, la mention d'un TEG erroné était susceptible d'encourir soit la nullité de la stipulation d'intérêt soit la déchéance totale ou partielle du prêteur de son droit aux intérêts.

Il est ainsi admis qu'en cas d'erreur affectant la mention du TEG dans un écrit constatant un contrat de crédit conclu avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance précitée le prêteur peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge au regard notamment du préjudice subi par l'emprunteur.

En l'espèce il n'est pas contesté que l'indication du taux effectif global stipulé sur l'avenant du 13 avril 2016 est fixée à 4,56%.

Or il résulte de l'expertise produite par les appelants que le calcul du TEG n'est erroné dans la seule hypothèse pouvant être examinée selon laquelle les frais d'information annuelle de la caution ne sont pas compris dans le TEG , que s'il est tenu compte d'une actualisation du capital restant dû au 13 avril 2016 date de signature de l'avenant et non pas s'il est tenu compte d'une actualisation du capital restant dû à la date effective de l'avenant soit le 15 avril 2016.

Or l'avenant signé par les parties est parfaitement clair quant au fait que les modalités de remboursement du crédit ne débutent qu'à compter de l'échéance du 15 avril 2016 et que c'est le capital dû à cette date qui est retenu.

De plus même en prenant en compte les frais d'information annuelle de la caution l'écart n'étant que de 0.07% et les appelants n'établissant aucunement que le préjudice subi soit à l'origine de leurs difficultés financières il ne peut être fait droit à leur demande de déchéance du droit aux intérêts et la décision entreprise doit être confirmée.

Sur la demande de délais

Les deux sociétés sollicitent des délais de paiement au motif que leurs activités ont été négativement impactées par les intempéries de 2016 et que leurs difficultés ont été accentuées par le refus du dispositif 'année blanche'.

Elles font valoir que leur résultat en 2016 s'est soldé par des pertes importantes qui se sont élevées en 2017 à 108589 euros et en 2018 à182477 euros.

Elles font valoir que si elles ont déjà bénéficié de délais, l'amélioration de leur situation n'est pas effective et que cela résulte des démarches de la CCMC qui a procédé à des mesures d'exécution pour un autre prêt qui aurait également dû bénéficier du dispositif 'année blanche'.

La CCMC fait valoir que les deux sociétés se sont déjà octroyées les plus larges délais et ont bénéficié de trois années sans avoir réglé la moindre somme, les derniers réglements datant pour la SCEA du [Adresse 8] du 24 juillet 2017 et pour l'EARL de [Adresse 7] du 25 septembre 2017.

Les pièces versées aux débats et relatives aux demandes de sociétés afin de pouvoir bénéficier du pacte de consolidation démontrent qu'elles ont pu bénéficier pour d'autres prêts auprès d'autres établissements bancaires de réaménagement et qu'elles ont pu également bénéficier de report de leurs cotisations sociales.

Elles ont par ailleurs pour les prêts en cause bénéficié de longs délais.

Elles ne justifient pas au demeurant de leur situation financière au-delà de l'année 2018 et donc de la nécessité d'obtenir de nouveaux délais .

Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les deux sociétés de leurs demandes de délais.

Sur l'engagement des cautions

Les époux [H] soutiennent qu'ils ne disposaient pas d'une surface financière suffisante en 2013 pour faire face aux engagements de caution consentis pour un total de 107425 euros au titre des prêts objets de la présente procédure et qu'il ne peuvent davantage le faire aujourd'hui.

Ils indiquent que leurs revenus s'élevaient au total en 2013 à la somme de 47028 euros et qu'ils étaient garants de l'EARL de [Adresse 7] au titre d'un prêt consenti le 19 novembre 2003 comportant la constitution de garanties autonomes pour 410000 euros .

Ils font valoir qu'ils ont également souscrit différents engagements de caution postérieurement auprès de la SA Société générale pour un total de 149500 euros et auprès de la CCMC pour 66000 euros et qu'ils étaient personnellement emprunteurs d'un prêt investissement de 145000 euros contracté le 3 mars 2006 auprès de la SA Société générale et d'un autre prêt habitat souscrit le 27 juin 2009 pour 208000 euros.

Ils ajoutent qu'ils ont négocié avec la SAFER et la société Vert Agri une solution de refinancement pour éviter la déconfiture et qui s'est traduite par la mise en place d'une vente de terres en réméré dont il résulte une reconnaissance de dette de l'EARL envers une société Vert agri par acte authentique du 3 mai 2018 pour 116530,59 euros comportant cautionnement hypothécaire des deux époux et une reconnaissance de dette de la SCEA par acte du même jour pour la somme de 112478,10 euros emportant cautionnement hypothécaire des deux époux .

La CCMC rappelle que la disproportion s'apprécie au jour de la conclusion du contrat , doit être évaluée en fonction de tous les éléments du patrimoine de la caution et pas seulement de ses revenus et qu'il incombe à la caution d'établir son impossibilité manifeste de faire face à son obligation au jour où elle s'engage, tandis que le créancier doit établir que les biens et revenus de la caution sont cependant suffisants au moment où la caution est actionnée pour faire face à son engagement.

Elle soutient que les époux [H] ne rapportent pas la preuve du caractère manifestement disproportionné de leur engagement de caution dès lors que l'avis d'imposition sur les revenus 2012 établit un revenu global pour les époux mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts d'un montant de 47028 euros et des revenus fonciers ou encore des revenus de capitaux.

Elle ajoute qu'ils sont propriétaires de leur résidence principale estimée à 250000 euros et ont acquis en 2009 un immeuble à usage locatif alors qu'ils étaient déjà propriétaires de 9 ha 31a 38 ca de terres acquises pour le prix de 42462 euros mais disposaient également d'un patrimoine mobilier d'un montant de 169272 euros .

Elle fait valoir qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de l'endettement et des engagements souscrits postérieurement aux deux engagements de caution en cause d'un montant respectif de 42000 et 65425 euros.

Elle soutient enfin que lors de leur appel en paiement les époux [H] disposaient toujours d'un patrimoine leur permettant de faire face à leurs engagements étant toujours propriétaires de leur immeuble d'habitation et ayant estimé leur bien locatif entre 190000 et 200000 euros et leurs terres à 198482 euros.

En application de l'article L 341-4 du code de la consommation dans sa version applicable à l'espèce un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution qui oppose au créancier le caractère disproportionné de son engagement d'en apporter la preuve. Il n'appartient pas en revanche au créancier professionnel de faire la preuve que la caution était en mesure de faire face à ses engagements et aucune disposition légale n'impose à l'établissement bancaire créancier l'obligation de faire remplir une fiche de renseignements. En son absence toutefois la preuve de la disproportion de l'engagement peut être apportée par tous moyens.

En 2012 les revenus des époux [H] s'élevaient au total à la somme de 54759 euros comprenant des revenus agricoles, des revenus de capitaux mobiliers et des revenus fonciers.

A cette époque ils s'étaient portés garants de deux prêts consentis le 19 novembre 2003 par la SA Société générale à l'EARL de [Adresse 7] d'un montant de 410000 euros au total remboursables au plus tard le 10 janvier 2017 par une affectation hypothécaire de leur immeuble à usage d'habitation et de 50 ha 19 a 21 ca de terres appartenant à l'époux au titre d'une donation-partage effectuée par ses parents le 18 mars 2000.

Les autres engagements de caution évoqués ont été souscrits postérieurement en août 2013 puis en août 2014 et n'ont pas à être pris en compte à ce stade.

Les époux [H] justifient de l'octroi d'un prêt d'investissement d'un montant de 145000 euros le 3 mars 2006 remboursable en 143 mensualités de 404,79 euros et une mensualité en mars 2018 de 145493,77 euros pour lequel en garantie ils se sont engagés à souscrire un contrat d'assurance avec un dépôt initial de 93000 euros et de l'octroi d'un prêt habitat le 27 juin 2009 d'un montant de 235000 euros destiné à l'acquisition du bien locatif.

Les époux [H] sont en revanche particulièrement taisants sur leur patrimoine et son évaluation.

Ils étaient en 2012 et 2013 propriétaires de leur maison à usage d'habitation dont ils ne produisent aucune évaluation contredisant l'évaluation de la CCMC pour 250000 euros sans qu'il soit établi la charge d'un prêt et cet immeuble était simplement hypothéqué en garantie de prêts consentis à l'EARL de [Adresse 7] dont toutefois le solde restant dû en 2012 et 2013 n'est pas connu faute de production d'un tableau d'amortissement mais pouvant être estimé au regard d'un décaissement au plus tard le 19 décembre 2003,d'un différé de quinze mois et d'une fin de remboursement au 10 janvier 2017 à la somme de 68356,50 euros pour le premier prêt et de 203742,24 euros pour le second prêt en janvier 2012 et de 56963,75 euros pour le premier prêt et de 169785 euros pour le second en janvier 2013 .

Ils étaient également propriétaires de plus de 50 ha de terres également affectées à titre hypothécaire en garantie du remboursement de ces prêts mais dont la valeur n'est aucunement justifiée.

Ils étaient encore propriétaires de l'immeuble à usage locatif acquis en 2009 pour la somme de 208000 euros pour lequel ils remboursait un prêt selon des mensualités de 1786,48 euros mais leur procurant des revenus fonciers et pour lequel le capital restant dû peut être estimé en l'absence du tableau d'amortissement daté à la somme de 208757,14 en février 2012 et à 192603,50 euros en mai 2013.

Ils étaient en outre propriétaires d'autres parcelles de terres acquises entre les années 2004 et 2010 pour 9ha 31a 38 ca et une somme totale de 44262 euros et par eux-mêmes estimées à la somme de 69344 euros en 2019 dans le cadre d'une instance relative à un prêt par eux cautionné le 28 août 2014.

Par ailleurs ils ne contestent aucunement l'épargne que leur attribue la CCMC qui produit un état des comptes auprès de la SA Société générale en 2014 faisant état notamment d'un compte titre d'un montant de 9555,07 euros de deux comptes séquoia d'un montant total de 159718,54 euros. Ils ne contestent pas davantage la souscription par M. [H] d'un contrat Predica en 1997 sur lequel ils ne fournissent aucune explication.

Au regard de l'ensemble de ces éléments et des manquements des époux [H] dans la justification de la valeur des biens de leur patrimoine il convient de considérer qu'ils ne rapportent aucunement la preuve que les engagements de caution à hauteur des sommes de 42000 euros en février 2012 et de 65000 euros en mai 2013 présentaient un caractère manifestement disproportionné.

Il convient de confirmer la décision entreprise sur ce chef également.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner les appelants qui succombent en leur appel aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SELARL Maestro Avocats et de les condamner in solidum à payer à la CCMC la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum la SCEA du [Adresse 8], l'EARL de [Adresse 7] et les époux [H] au paiement des entiers dépens d'appel ;

Les condamne in solidum au paiement de la somme totale de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 22/00731
Date de la décision : 25/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-25;22.00731 ?
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