La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2023 | FRANCE | N°22/00243

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 25 avril 2023, 22/00243


ARRET



















S.A. CREATIS





C/



[Y]









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 25 AVRIL 2023





N° RG 22/00243 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKIS



JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE LAON EN DATE DU 27 DECEMBRE 2021





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE







S.A. CREATIS agi

ssant par son représenatant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]





Représentée par Me Margot ROBIT substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65





ET :







INTIMEE







Madame [U] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Assignée à l'ét...

ARRET

S.A. CREATIS

C/

[Y]

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 25 AVRIL 2023

N° RG 22/00243 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKIS

JUGEMENT DU JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE LAON EN DATE DU 27 DECEMBRE 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. CREATIS agissant par son représenatant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Margot ROBIT substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65

ET :

INTIMEE

Madame [U] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Assignée à l'étude le 10 mars 2022

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Février 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 Avril 2023.

GREFFIER : Mme Sophie TRENCART, adjointe administrative faisant fonction.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 25 Avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Sophie TRENCART, faisant fonction de Greffier.

DECISION

Selon offre préalable acceptée le 1er mars 2017 la SA Créatis a consenti à Mme [U] [Y] un prêt de 38400 euros au taux débiteur de 4,95% l'an, remboursable en 144 mensualités de 354,20 euros hors assurance.

Se prévalant du non paiement des échéances, la SA Créatis a adressé à la débitrice par lettre recommandée avec avis de réception en date du 8 juin 2021 une mise en demeure de régler les sommes impayées, sous peine de déchéance du terme.

La SA Créatis a notifié la déchéance du terme à Mme [Y] par lettre recommandée avec avis de réception en date du 22 juin 2021.

Par acte d'huissier en date du 20 septembre 2021 la SA Créatis a fait assigner Mme [Y] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Laon aux fins d'obtenir sa condamnation, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au paiement des sommes dues et de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 27 décembre 2021 du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Laon, la SA Créatis a été déclarée recevable en son action, la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée et Mme [Y] a été condamnée au paiement de la somme de 22989,84 euros au titre du solde du prêt avec intérêts au taux légal non majoré à compter de la décision et au paiement de la somme de 150 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 19 janvier 2022 la SA Créatis a interjeté appel de cette décision des chefs du prononcé de la déchéance du droit aux intérêts et du montant de la condamnation.

Aux termes de ses conclusions remises le 14 avril 2022, expurgées des chefs de demande ne constituant pas des prétentions mais des moyens, la SA Créatis demande à la cour d'infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau de condamner Mme [Y] au paiement d'une somme de 31958,48 euros avec intérêts au taux de 4,95% à compter du 31 juillet 2021 ainsi que d'une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL Delahousse & Associés.

La déclaration d'appel a été signifiée à Mme [Y] par acte d'huissier en date du 10 mars 2022 remis en l'étude et les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées par acte d'huissier en date du 26 avril 2022 remis en l'étude.

Mme [Y] n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 janvier 2023.

SUR CE,

Pour prononcer la déchéance du terme le premier juge a retenu que le prêteur ne justifiait pas de la remise à l'emprunteur de la fiche d'informations précontractuelles ni de l'existence d'un formulaire détachable de rétractation joint à l'exemplaire du contrat de crédit remis à l'emprunteur.

La SA Créatis soutient qu'elle a bien remis à l'emprunteur la fiche d'informations précontractuelles et le document d'information propre au regroupement de crédits.

Elle rappelle que seule l'offre de crédit doit être établie en autant d'exemplaires que de parties et qu'il n'existe aucun formalisme obligatoire de remise de la fiche d'informations précontractuelles ni d'obligation de conservation de la fiche par le prêteur.

Elle fait observer qu'au surplus en l'espèce Mme [Y] a expressément reconnu dans l'offre de crédit avoir pris connaissance de la fiche d'informations précontractuelles et qu'une telle reconnaissance signée suffit à justifier du respect par le prêteur de ses obligations et qu'il appartient ainsi à l'emprunteur de démontrer que l'information délivrée n'était pas conforme, ce que Mme [Y] ne fait pas.

Elle fait valoir que si la fiche d'informations qu'elle produit n'est pas signée par Mme [Y] elle comporte des informations concordantes avec les éléments du crédit souscrit par Mme [Y] notamment le type de crédit, son montant, sa durée et le montant des échéances mensuelles de remboursement, le montant total dû et le taux débiteur prévu.

S'agissant du bordereau de rétractation la SA Créatis soutient que la présence du bordereau détachable de rétractation sur le seul exemplaire de l'emprunteur est suffisante et que le prêteur n'a pas besoin d'en conserver un double, ce qui est confirmé par l'article L 311-12 du code de la consommation en vigueur au 1er mai 2011 qui indique que le formulaire détachable est joint à l'exemplaire de l'emprunteur tout comme le nouvel article L 312-21 du code de la consommation.

Elle indique produire à hauteur d'appel la liasse contractuelle intégrale envoyée le 27 février 2017 à Mme [Y] qui comprend l'exemplaire à renvoyer au prêteur et l'exemplaire destiné à l'emprunteur qui comporte lui un bordereau de rétractation.

Il fait valoir que par ailleurs la reconnaissance de l'emprunteur de la remise d'un exemplaire de l'offre dotée d'un formulaire détachable de rétractation établit l'accomplissement de cette exigence ce qui est le cas en l'espèce.

Elle soutient rapporter ainsi la preuve de l'existence du formulaire détachable de rétractation joint à l'exemplaire du contrat de regroupement de crédits remis à Mme [Y].

Il est admis que si aucune disposition légale n'impose au prêteur de conserver un exemplaire du bordereau joint à l'exemplaire de l'offre communiquée à l'emprunteur, il lui incombe de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et que la signature par l'emprunteur de l'offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu'il incombe à ce dernier de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, comme cela résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne , et appliquée par les juridictions françaises.

En l'espèce, la SA Créatis verse aux débats le dossier de financement de Mme [Y] comportant outre les courriers d'acceptation du prêt, l'exemplaire 'à renvoyer' (au prêteur) de l'offre de regroupement de crédits, lequel ne comporte pas de bordereau de rétractation, mais seulement une déclaration, non signée sur ce double, de l'emprunteur en dernière page, aux termes de laquelle elle reconnait notamment rester en possession d'un exemplaire de ce contrat de crédit doté d'un formulaire détachable de rétractation, cette déclaration étant signée sur l'exemplaire effectivement renvoyé par Mme [Y], ainsi que la copie d'un exemplaire 'à conserver' (emprunteur) du contrat litigieux à conserver par l' emprunteur, lequel est prérempli, mais non-signé, et comprend bien un bordereau de rétractation en dernière page .

L'indice de remise du bordereau de rétractation constitué par la formule déclarative de sa reconnaissance par Mme [Y] dans l'encadré d'acceptation de l'offre figurant en dernière page de la version originale, datée et signée par cette dernière, de l'exemplaire 'à retourner' (prêteur) du regroupement de crédits est suffisamment corroboré par la production de la copie préremplie de l'exemplaire 'à conserver' (emprunteur) du contrat en cause, laquelle comprend un bordereau de rétractation.

La déchéance du droit aux intérêts ne pouvait être prononcée sur ce fondement.

En application de l'article L 312-12 du code de la consommation , préalablement à la conclusion du contrat de crédit , le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur sous forme de fiche d'informations par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur d'appréhender clairement l'étendue de son engagement, cette fiche mentionnant l'ensemble des informations énumérées à l'article R 312-5 du code de la consommation.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et la signature par l'emprunteur de l'offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis la fiche précontractuelle d'information normalisée européenne constitue seulement un indice qu'il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

En l'espèce, la société Créatis verse aux débats une copie de la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées qu'elle prétend avoir remise à Mme [Y] à l'occasion de la souscription du prêt litigieux.

Si l'examen de cette fiche permet de constater qu'elle comporte les informations prévues à l'article R. 312-5 du code de la consommation et renferme des informations qui concordent avec les éléments du crédit souscrit par Mme [Y], la société Créatis échoue à démontrer que cette fiche, qui n'est revêtue ni de la signature ni du paraphe de Mme [Y], aurait été effectivement remise à celle-ci.

Si une clause type figure au contrat de prêt, force est en effet de constater, à l'examen de l'offre de prêt acceptée par Mme [Y], que cette dernière a seulement souscrit à la déclaration selon laquelle elle reconnaît " avoir pris connaissance " de la fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées, contrairement au bordereau de rétractation pour lequel Mme [Y] a reconnu être en possession d'un exemplaire de contrat assorti d'un tel bordereau et pour lequel une copie de l'exemplaire remis avec bordereau est produite aux débats .

S'agissant de la fiche d'informations précontractuelles il est seulement reconnu qu'il en a été donné connaissance et les deux exemplaires produits ne comportent ni paraphe ni signature de l'emprunteur pouvant attester de la remise des informations sur support papier ou autre support.

A défaut en ces conditions pour la société Créatis d'établir qu'elle a satisfait à l'obligation d'informations précontractuelles prévue à l'article L. 312-12 du code de la consommation qui lui imposait de remettre à Mme [Y], par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres leur permettant d'appréhender clairement l'étendue de leur engagement, elle doit être déchue de son droit aux intérêts contractuels par application de l'article L. 341-1 du code de la consommation.

Sur le montant de la créance

En application de l'article L341-8 du code de la consommation lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts dans les conditions prévues aux articles L 341-1 à L 341-7 du code de la consommation , l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu ainsi que le cas échéant au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu.

Le premier juge a ainsi justement rappelé que le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du seul capital restant dû après déduction de l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit par l'emprunteur depuis l'origine et notamment les intérêts réglés à tort.

Au regard des décomptes, tableau d'amortissement et historique de compte produits il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle condamné Mme [Y] au paiement de la somme de 22989,84 euros et retenant que la limitation de la créance liée à la déchéance du droit aux intérêts excluait que le prêteur puisse prétendre au paiement de l'indemnité légale de 8%.

De même la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a écarté la majoration de l'intérêt légal prévue par l'article L 313-3 du code monétaire et financier dès lors qu'au regard du montant du taux de l'intérêt légal et du taux d'intérêt conventionnel, l'application de cette majoration serait à même de vider de sa pertinence la sanction de la déchéance du droit aux intérêts.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner la SA Créatis qui succombe en son appel aux entiers dépens d'appel et de la débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition au greffe,

Confirme la décision entreprise

Y ajoutant,

Déboute la SA Créatis de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel;

Condamne la SA Créatis aux entiers dépens d'appel.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 22/00243
Date de la décision : 25/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-25;22.00243 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award