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13/04/2023 | FRANCE | N°20/01614

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 13 avril 2023, 20/01614


ARRET



N°





















S.C.I. LA RESIDENCE DU PARC









C/







S.A.R.L. BT CONSULTING

S.A.R.L. NBN TP





S.C.P. CANET









FLR



COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 13 AVRIL 2023





N° RG 20/01614 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HV4O





JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SENLIS EN DATE DU 11 FÃ

‰VRIER 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.C.I. LA RESIDENCE DU PARC, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]





Représentée par Me DAVID substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avo...

ARRET

N°

S.C.I. LA RESIDENCE DU PARC

C/

S.A.R.L. BT CONSULTING

S.A.R.L. NBN TP

S.C.P. CANET

FLR

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 13 AVRIL 2023

N° RG 20/01614 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HV4O

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE SENLIS EN DATE DU 11 FÉVRIER 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.C.I. LA RESIDENCE DU PARC, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me DAVID substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101

Ayant pour avocat plaidant, Me Philippe LOUIS, avocat au barreau du VAL DE MARNE

ET :

INTIMEES

S.A.R.L. BT CONSULTING, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Francois MUHMEL de la SELARL CABINET MUHMEL, avocat au barreau de COMPIEGNE

S.A.R.L. NBN TP, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Assignée dans les conditions de l'article 659 du code de procédure civile, le 07/07/20

ET :

PARTIE INTERVENANTEE

S.C.P. CANET

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Assignée à personne morale, le 19/08/20

DEBATS :

A l'audience publique du 09 Février 2023 devant :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 13 Avril 2023.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

PRONONCE :

Le 13 Avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

La Sci Résidence du Parc a acquis le 14 septembre 2016 une parcelle de terrain à bâtir formant l'îlot dénommé G du projet de renouvellement urbain du secteur des hautes haies du quartier Rouher à [Localité 4] aux fins d'y construire un programme immobilier, à vendre sur plan par lots, comportant 25 logements, 5 commerces et 58 places de parking.

Pour la réalisation de ce programme immobilier la Sci a conclu le 27 octobre 2016 avec la Sarl Bt Consulting, un contrat dit de 'gestionnaire réalisateur de l'opération immobilière de la résidence du Parc à [Localité 4]'. Le montant du marché y a été fixé à l'article 5 à la somme de 3.060.000 € ht, soit 3.672.000 € Ttc.

Un contrat de groupement d'entreprise représenté par la Sarl Nbn Tp a été constitué, fixant le budget des travaux à la somme de 2.550.000 € ht soit 3.060.000 € Ttc.

Le 27 janvier 2017 la société Bt Consulting a fait 1'avance sur sa trésorerie de sommes dues par la Sci Résidence du Parc à la société Nbn Tp au titre de la situation de travaux n°1.

La société Bt Consulting a adressé à la Sci Résidence du Parc une facture du 25 novembre 2016 d'un montant de 116.180,64 € Ttc, correspondant à la situation n°1 outre Tva au taux de 20% .

Cette facture n'a pas été payée.

Le groupement a poursuivi les travaux et la société Nbn Tp, en sa qualité de mandataire du groupement, a émis des situations de travaux n°2 et 3.

Le chantier a été interrompu le 9 mars 2017 par le maître de l'ouvrage en raison des problèmes financiers.

Se prévalant du défaut de règlement des situations 2 et 3, la société Nbn Tp a assigné en référé provision par acte du 23 mai 2017, la Sci Résidence du Parc et la société Bt Consulting devant le président du tribunal de commerce de Compiègne, lequel s'est déclaré incompétent par ordonnance du 10 octobre 2017 au profit du juge des référés près le tribunal de grande instance de Senlis.

Entre temps soit le 5 juin 2017 les sociétés Nbn Tp, Bt consulting et Résidence du Parc ont signé un protocole d'accord tendant à mettre fin à la procédure de référé et à faire le compte entre elles à divers titres.

Par courrier du 6 juin 2017 la Sci Résidence du Parc a mis fin aux relations contractuelles avec la société Bt Consulting du fait de l'arrêt du chantier et des problèmes financiers rencontrés pour la réalisation du programme.

La Sci Résidence du Parc, par acte d'huissier du 29 septembre 2017 a attrait les sociétés Bt consulting, Nbn Tp, maître [V] en qualité de liquidateur de l'architecte (Cap sud architecture) devant le président du tribunal de grande instance de Senlis aux fins de voir désigner expert, lequel par ordonnance du 12 décembre 2017 a désigné M. [R].

Se prévalant du non respect du protocole d'accord, la société Bt consulting a attrait la Sci Résidence du Parc par acte du 3 octobre 2017, en paiement de la somme de 116 180,64 € devant le tribunal de grande instance de Senlis.

Suivant ordonnance du 22 mars 2018, le juge de la mise en état, saisi par la Sci Résidence du Parc, a notamment :

- ordonné le sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de M. [R] ;

- débouté Bt Consulting de sa demande de provision.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 26 octobre 2018.

Par acte d'huissier de justice du 24 avril 2019, la Sci Résidence du Parc a assigné en intervention forcée la société Nbn Tp.

Suivant jugement réputé contradictoire du 11 février 2020, le tribunal judiciaire de Senlis a :

- condamné la Sci Résidence du Parc à payer la somme de 1l6.l80,64€ Ttc à Bt Consulting, majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 ;

- ordonné la capitalisation des intérêts à échoir, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil ;

- débouté la Sci Résidence du Parc de sa demande en paiement formée à l'encontre de Nbn Tp

- déclaré irrecevable la demande formée par la Sci Résidence du Parc aux fins de voir condamner Nbn Tp à rembourser la somme de 72.820,40€ Ttc à Bt Consulting ;

- condamné la Sci Résidence du Parc aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, dont distraction au profit de Me François Muhmel ;

- dit n'y avoir lieu à distraction des dépens au profit de la Selarl Lexjurismo ;

- condamné la Sci Résidence du Parc à payer à Bt Consulting la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La Sci Résidence du Parc a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 26 mars 2020, signifiée à la société Nbn Tp par acte du 7 juillet 2020 en application de l'article 659 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 25 juin 2020 signifiées le 7 juillet 2020 dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile à la société Nbn Tp, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, l'appelante demande à la cour de :

- la recevoir en son appel et de l'en déclarer bien fondée ;

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

statuant à nouveau,

- déclarer nul le protocole d'accord du 5 juin 2017 au regard de l'altération de son consentement suite à la contrainte morale et financière subie et eu égard à l'absence de concessions réciproques

- débouter Bt Consulting de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner Bt Consulting à réparer les fautes commises dans le cadre du contrat de gestionnaire réalisateur au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- condamner Nbn Tp à réparer les dommages causés au titre de l'exécution défectueuse de ses obligations contractuelles constitutive d'une faute en lien avec le préjudice subi engageant sa responsabilité délictuelle.

en conséquence,

- condamner conjointement et solidairement Bt Consulting et Nbn Tp à lui payer à titre de dommages et intérêts le solde du trop-perçu en sa faveur de 72.820,40 € Ttc, tel qu'apprécié par l'expert ;

- condamner conjointement et solidairement Bt Consulting et Nbn Tp à lui payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile les sommes :

$gt; 6.000€ pour la procédure de première instance ;

$gt; 6.000€ pour la procédure d'appel ;

- condamner conjointement et solidairement Bt Consulting et Nbn Tp en tous les dépens, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué, avocat aux offres de droit, en application de l'article 699 du code de procédure civile, en ce compris les frais d'expertise pour 2.794,50€.

Entre temps la société Nbn Tp a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 12 juin 2020, la Scp Canet ayant été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte d'huissier en date du 19 août 2020 la Sci Résidence du Parc a assigné en intervention forcée le liquidateur et demande à la cour au dispositif de cette assignation de fixer au passif de la liquidation de la société Nbn Tp les différentes sommes auxquelles elle sera condamnée.

Par conclusions remises le 21 septembre 2020 signifiées le 24 septembre 2020 au liquidateur de la société Nbn Tp dans les formes de l'article 658 du code de procédure civile, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, Bt Consulting demande à la cour de  :

- la dire et juger recevable et bien fondée en ses demandes,

en conséquence,

à titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Sci Résidence du Parc à lui payer la somme de 116 180,64€ Ttc, majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 et a ordonné la capitalisation des intérêts à échoir ;

à titre infiniment subsidiaire,

- condamner la Sci Résidence du Parc à lui payer la somme de 96.817,20€, majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017, date de première mise en demeure, en sus de la capitalisation des intérêts à échoir

dans tous les cas,

- débouter la Sci Résidence du Parc de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la Sci Résidence du Parc à lui verser la somme de 5.000€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel (pour chaque procédure), soit 10.000€ au total, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me François Muhmel, avocat aux offres de droit.

Ni la société Nbn Tp ni son liquidateur judiciaire n'ont constitué avocat.

La clôture a été prononcée le 2 septembre 2021 et l'affaire fixée pour plaider à l'audience du 16 septembre 2021.

Par arrêt avant dire droit en date du 26 janvier 2022 la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 15 septembre 2022 à 13h30 pour production éventuelle de la déclaration de créance de la Sci Résidence du Parc auprès de la Scp Canet en sa qualité de liquidateur de la société Nbn Tp et des conclusions des parties sur cette fin de non-recevoir soulevée par la cour et sursis à statuer sur l'ensemble des demandes.

Par conclusions remises le 14 septembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la Sci Résidence du Parc demande dorénavant à la cour de la recevoir en son appel et de la dire bien fondée, d'infirmer le jugement du 11 février 2020, de déclarer nul le protocole d'accord du 5 juin 2017, de la déclarée bien fondée à opposer l'exception d'inexécution, de débouter la société Bt consulting de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 72 820,40 € Ttc de dommages et intérêts au titre d'un trop perçu, de condamner Bt consulting à lui payer une somme de 6 000 € en première instance et 6 000 € devant la cour sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à supporter les dépens dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué.

Par conclusions remises le 31 octobre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la société Bt consulting demande à la cour :

In limine litis de déclarer irrecevable la demande de condamnation au paiement d'une somme de 72 820,40 € et l'argumentation nouvelle développée en page 19 et 20 des conclusions récapitulatives.

A titre principal de confirmer le jugement.

A titre subsidiaire de condamner la Sci Résidence du parc à lui payer la somme de 96 817,20 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 date de la première mise en demeure en sus de la capitalisation des intérêts à échoir conformément à l'article 1231-6 du code civil.

Dans tous les cas de débouter la Sci Résidence du Parc de l'ensemble de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 5 000 € en première instance et 10 000 € en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens dont recouvrement direct auprès de maître [B] [M].

SUR CE :

Il est observé à titre liminaire que la Sci Résidence du Parc acquiesce à la fin de non-recevoir soulevée par la cour dans son arrêt avant dire droit et qu'elle ne présente plus de demande à l'endroit de la société Nbn Tp dans ses dernières écritures de sorte que les demandes antérieures dirigées contre cette société sont présumées abandonnées.

Sur la recevabilité des demandes et moyens de la Sci Résidence du Parc

La société Bt consulting soutient que les demandes de la Sci Résidence du Parc ne sont pas recevables comme nouvelles dès lors qu'elles sont différentes de celles développées devant le premier juge. Elle soutient également que dans ses dernières conclusions elle présente des demandes nouvelles et une nouvelle argumentation en page 19 et 20 qui sont irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile.

La Sci Résidence du Parc ne conclut pas sur ce point.

Les demandes développées par la Sci Résidence du Parc tendant à faire écarter les prétentions de Bt consulting (exception d'inexécution) ou à se compenser avec les sommes dues (demande indemnitaire) sont recevables et celles développées consécutivement à l'arrêt avant dire droit le sont également en ce qu'elles sont identiques sauf à ne plus demander que les condamnations soient conjointement et solidairement prononcées à l'égard de la société Nbn Tp en liquidation judiciaire. L'article 910-4 du code de procédure civiles n'interdit pas aux parties de développer des moyens nouveaux au soutien de leurs prétentions de sorte que cet autre moyen développé par la société Bt consulting est inopérant.

Sur la demande en paiement de la société Bt Consulting dirigée contre la Sci Résidence du Parc

La Sci Résidence du Parc fait grief aux premiers juges de l'avoir condamnée à payer une somme de 116 180,60 € à la société Bt Consulting en se fondant sur un protocole d'accord en date du 5 juin 2017 qui selon elle doit être déclaré nul.

Elle fait valoir que ce protocole est nul au visa de l'article 1130 du code civil au motif que le consentement de son représentant légal a été donné par erreur et qu'il a été signé sous la contrainte morale et financière.

Au soutien de ce moyen elle fait valoir que le protocole a été préparé à l'avance par la société Nbn Tp, présenté comme tel lors d'une réunion qui s'est tenue à minuit, qu'une somme de 116 000 € au profit de Bt Consulting a été ajoutée sans qu'elle dispose d'un temps de réflexion ou qu'elle puisse prendre conseil. Elle considère que les parties n'ont pas entendu donner force de chose jugée à ce document et déplore que son argumentaire n'ait pas été repris en préambule.

Elle affirme que son représentant non rompu au monde des affaires a été trompé, qu'il n'a pas compris ce qu'il signait, qu'il se trouvait en situation de dépendance économique et dans l'obligation de le signer pour que les travaux cessent.

Elle considère également que le protocole n'est pas valable au motif que la société Bt Consulting n'a fait aucune concession, que les engagements étaient déséquilibrés.

Enfin elle ajoute que si elle a commencé à exécuter les termes du protocole, des éléments survenus ultérieurement ont attiré son attention sur le fait que lors de la signature elle ne disposait de tous les documents lui permettant d'apprécier la réalité de la situation du chantier et plus particulièrement l'importance des malfaçons.

Elle oppose également l'exception d'inexécution au motif que la société Bt Consulting a mal rempli sa mission.

La société Bt Consulting demande que le jugement soit confirmé en ce qu'il a condamné la Sci Résidence du Parc à lui payer la somme de 116 180,64 € visées dans le protocole d'accord.

Elle souligne que les premiers juges ont relevé l'existence de concessions réciproques et notamment le fait qu'elle ait abandonné de présenter une demande indemnitaire du fait de la rupture des relations contractuelles. Elle fait valoir que l'attestation produite par l'appelante ne caractérise pas le vice du consentement allégué susceptible de remettre en cause la validité du protocole d'accord.

Elle explique que la somme de 116 180,64 € correspond à une avance faite au profit de la Sci Résidence du Parc au titre de la situation de travaux n°1, que la Sci a reconnu être redevable de cette somme dans un courrier du 28 mars 2017 et dans le protocole, qu'un échéancier a été convenu et que la Sci Résidence du Parc n'a jamais respecté son engagement de payer malgré une relance en date du 3 août 2017.

Aux termes de l'article 1130 du code civil l'erreur le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que sans eux l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Selon l'article 1131 l'erreur est une cause de nullité lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celle du cocontractant.

L'article 1440 dispose qu'il y a violence lorsqu'une partie s'engage sous la pression d'une contrainte qui lui inspire la crainte d'exposer sa personne, sa fortune ou celle de ses proches à un mal considérable.

En l'espèce il ressort des pièces (contrats, situations de travaux, factures, courrier, rapport d'expertise judiciaire) que la construction du programme immobilier pour lequel la Sci Résidence du Parc a obtenu un permis de construire le 18 avril 2016 a été arrêté à la demande de cette dernière le 7 mars 2017 en raison de problèmes financiers, alors que trois situations de travaux avaient été facturées et demeuraient impayées à l'exception d'une première situation avancée par la société Bt consulting.

Dans ces circonstances, le représentant de la Sci Résidence du Parc qui à la date du protocole n'a payé aucune somme depuis le début du chantier et qui est à l'origine de la rupture au mois de mars 2017 ne peut sérieusement soutenir que les sociétés Bt consulting et Nbn Tp ont souhaité trouvé une solution dans l'empressement au mois de juin 2017 et en le mettant sous pression et qu'il ignorait la teneur des discussions ayant abouti à la transaction du 5 juin 2017.

D'ailleurs l'émission d'un premier projet amendé le jour même suite à des discussions s'étant achevées à minuit du propre aveu du représentant de la Sci et la remise d'un chèque de 100 000 € le jour même démontre que le protocole n'a pas été signé dans l'empressement. Chaque page est au demeurant paraphée et la dernière contient les signatures des trois parties et le tampon humide de la société Nbn Tp et de la société Bt consulting.

Ce protocole reprend les termes des échanges préalables et notamment ceux se trouvant dans un courrier envoyé par le représentant de la Résidence du Parc à Bt Consulting rédigé comme suit : « un retrait inattendu des futurs partenaires a fait qu'aujourd'hui nous nous trouvons en difficulté de caisse pour régulariser les situations que vous nous avez soumises, à savoir : situation n°1 de 116 180,64 € Ttc que vous avez réglé en notre lieu et place sur caisse de Bt Consulting à Nbn Tp et la situation n° 2 de 360 660,96 € qui est en instance de régularisation ».

Le représentant de la Sci ne peut invoquer le vice du consentement tiré de l'erreur dans la mesure où il connaissait les différents points sur lesquels les parties devaient transiger du fait de la rupture des relations à son initiative à savoir, le paiement des travaux réalisés par les différentes entreprises représentées par la société Nbn Tp, des honoraires de la société Bt consulting et des sommes avancées par cette dernière, de l'arrêt de la procédure judiciaire et des conséquences de la rupture des relations contractuelles de façon prématurée.

Il ne caractérise pas plus la violence exercée par ses cocontractants qui l'aurait contraint à signer l'accord dans la mesure où l'attestation produite en pièce n°19 supposée caractériser cette violence ne permet pas de l'établir à défaut d'être écrite de la main de son auteur comme l'exige l'article 202 du code de procédure civile. Son supposé auteur fait état de sa qualité d'ancien associé alors que les statuts de la Sci ne mentionnent que deux associés en ce compris le représentant légal et son épouse.

Il fait état également de courriels qu'il aurait reçus en copie de la part de Bt consulting et avoir assisté à la réunion de finalisation du protocole sans préciser à quel titre et sans produire la copie des courriels.

Enfin le représentant de la Sci Résidence du Parc ne justifie pas avoir demandé un délai pour réfléchir au contenu du protocole reçu selon lui par courriel.

Si l'empressement des prestataires à obtenir un début de paiement des prestations peut se comprendre en l'espèce, il ne caractérise pas la violence définie à l'article 1140 du code civil ni décrite par le représentant de la Sci.

En conséquence le protocole d'accord ne peut être annulé sur le fondement des vices du consentement.

Aux termes de l'article 2044 du code civil la transaction est un contrat par lequel les parties par des concessions réciproques terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Il doit être écrit.

Ce protocole rappelle que trois situations de travaux n'ont pas été payées par la Sci, qu'une d'entre elle a été avancée par la société Bt consulting, que les situations 2 et 3 sont évaluées à 300 000 € Ttc et la première à 116 180,64 €.

Il indique que les 300 000 € seront payés à la société Nbn Tp au jour de la signature par chèque d'un montant de 100 000 € et le solde par virement mensuel de 15 000 € à compter du 15 juillet pendant 13 mois et le solde de 5 000 € le 14ème mois afin d'éviter toutes pénalités et intérêts de retard et une procédure juridique.

Il prévoit également que la somme de 116 180,64 € peut être remboursée à Bt consulting en une ou deux fois sans frais si la trésorerie de la Sci le lui permet ou dans le cadre d'un échéancier débutant le 1er août 2017 jusqu'au 31 décembre 2017 par mensualité de 23 236 €. Ce protocole prévoit également que le représentant de la Sci se porte caution des sommes dues. Cet accord contient également un article 5 dans lequel la société Nbn Tp s'engage dès la signature à ne pas poursuivre Bt Consulting et la Sci, à les libérer de tout engagement et à déclarer l'arrêt de l'opération à toutes les entreprises.

Du contenu de ce protocole il est établi que la Sci Résidence du Parc a entendu terminer une contestation existant entre elle et la société Bt Consulting portant notamment sur la situation de travaux facturée le 25 novembre 2016 à hauteur de 116 180,64 €, avancée par la société Bt consulting pour permettre à la société Nbn Tp de payer les entreprises qu'elle représentait, tout en lui accordant un échéancier sans frais et afin d'éviter également tout contentieux.

En conséquence, la reconnaissance par la Sci Résidence du Parc de sa dette et l'accord de la société Bt Consulting pour que cette dernière la règle dans le cadre d'un échéancier et contre abandon des poursuites, caractérisent les concessions réciproques conditionnant la validité du protocole d'accord.

La Sci Résidence du Parc n'a pas contesté les termes de la facture portant sur la situation n°1, ne conteste pas que la société Bt Consulting en a avancé le paiement pour permettre la poursuite du chantier, a reconnu être redevable de cette somme et le protocole d'accord ne fait que reprendre ces faits.

La signature de ce protocole par le représentant de la Sci, associée à la lettre dans laquelle il reconnaît devoir la somme avancée par la société Bt Consulting au titre de la première situation de travaux, vaut reconnaissance par la Sci Résidence du Parc qu'elle est débitrice de la somme de 116 180,64 €.

Par ailleurs les sommes dont il est demandé paiement correspondent à des travaux réalisés par les entreprises représentées par la société Nbn Tp dont le paiement a été avancé par Bt Consulting et non des prestations de gestion et d'accompagnement de projet telles que défini dans le contrat passé entre la société Bt Consulting et la Sci Résidence du Parc de sorte que cette dernière ne peut opposer l'exception d'inexécution pour être dispensée de rembourser la somme litigieuse.

Enfin la Sci Résidence du Parc ne conteste pas ne pas avoir payé cette somme mise à sa charge dans le protocole même dans le cadre de l'échéancier accordé se terminant le 31 décembre 2017.

Dans ces conditions le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné la Sci Résidence du Parc à payer à la société Bt Consulting la somme de 116 180,64 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 août 2017 et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts à échoir, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Sur la demande d'indemnisation de la Sci Résidence du Parc dirigée contre la société Bt Consulting

La Sci Résidence du Parc demande que la société Bt Consulting soit condamnée à réparer le dommage qu'elle lui a causé du fait de fautes commises dans la réalisation des travaux confiés, relevés par l'expert judiciaire dans son rapport du 2 octobre 2018. Elle fonde ses demandes aussi bien sur la responsabilité contractuelle que délictuelle (cf dispositif de ses conclusions) et chiffre son préjudice à la somme de 72 820,40 € Ttc.

Elle fait valoir que le contrat passé s'apparente à un contrat de promotion immobilière prévu à l'article 1831-1 du code civil, qu'en sa qualité de mandataire Bt Consulting doit répondre de ses manquements.

Elle précise également que son intervention peut s'apparenter également avec celle d'un maître d''uvre au motif que Bt Consulting s'est chargé de consulter les entreprises sur la base du cahier des charges rédigé par l'architecte.

Elle relève que l'expert a indiqué dans son rapport qu'il pesait sur le magistrat l'obligation de qualifier le contrat.

Elle affirme donc que Bt Consulting a commis des défaillances dans l'organisation et le suivi des travaux, pour lesquels elle avait une obligation de résultat.

Elle en conclut que Bt Consulting doit réparation aussi bien en raison de ses défaillances mais également de celles des entreprises appartenant au groupement Nbn Tp.

Elle considère que son préjudice se présente comme suit :

Facture à régler : 233 742 €

Dont à déduire les sommes payées : 196 817,20 €

Soit un solde de : 36 924,80 €.

Travaux de reprises : 99 439,20 €

Clôture de chantier : 10 306 €

Soit une somme de 72 820, 40 €.

La société Bt Consulting soutient qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution du contrat qui la liait à la Sci Résidence du Parc, qu'elle l'a tenue régulièrement informée de l'état d'avancement du chantier, que tous les documents étaient à sa disposition dans le local destiné à la commercialisation du projet, que l'expert n'a retenu aucune faute à son endroit et que seules les responsabilités du maître d''uvre (l'architecte) et du groupement d'entreprise Nbn Tp peuvent être recherchées.

Elle fait également valoir que sa responsabilité délictuelle ne peut être recherchée au titre des travaux réalisés par les entreprises appartenant au groupement de travaux représenté par la société Nbn Tp.

En tout état de cause elle considère que le préjudice de 72 820,40 € chiffré par la Sci est erroné.

Reprenant le rapport de l'expert, la société Bt Consulting considère qu'à supposer que des sommes soient dues à la Sci, elles le sont par la société Nbn Tp à hauteur de 47 751,81 €.

L'objet du contrat passé entre la Sci Résidence du Parc et la société Bt Consulting intitulé « contrat de gestionnaire réalisateur de l'opération immobilière de la résidence du [6] » est renseigné à l'article 3 comme suit  : réalisation d'une promotion immobilière ayant pour finalité la vente sur plan de 25 logements, de 5 commerces et 58 places de parking en R-1 tous corps d'état.

Le contrat mentionne le nom et les coordonnées du cabinet d'architecte en charge de la maîtrise d''uvre.

Dans ce contrat Bt Consulting s'engage à présenter toutes les fins de mois les états d'avancement travaux et la consommation financière au maître de l'ouvrage, les règlements devant se faire sur le compte Bt Consulting.

Le contenu des articles 6 à 17 caractérise le rôle de la société Bt Consulting à savoir l'assistance de la Sci Résidence du Parc dans toutes les étapes du projet : travaux supplémentaires, sous-traitance éventuelle, protection santé sécurité, planning, nettoyage, opérations préalable à la réception, levée des réserves.

Ces dispositions contractuelles caractérisent le fait que la société Bt Consulting s'est engagée à conseiller, accompagner sur le plan technique, juridique et administratif la Sci Résidence du Parc.

En conséquence la société Bt Consulting s'est engagée dans une mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage excluant la maîtrise d''uvre confiée à un architecte.

Ce rôle d'assistant à maîtrise d'ouvrage a été rempli par la société Bt Consulting qui justifie s'être chargé de faire régulariser les conventions de coordination en matière de sécurité et protection de la santé, de contrôle technique, de vérifications techniques, de bureau d'étude, d'architecte mais également de se procurer l'attestation d'assurance de l'architecte etc'

Ce rôle est également confirmé par les constats de l'expert qui a analysé les échanges entre les parties et indique que la société Bt Consulting a informé l'architecte de l'évolution de l'étude technique du projet, qu'elle a procédé à la consultation des entreprises et qu'elle a adressé à la société Nbn Tp représentant le groupement d'entreprise une lettre d'intention lui confiant la réalisation des travaux pour un prix de 3 060 000 €.

L'expert a constaté que la société Nbn Tp a commencé les travaux après trois réunions, que la première situation de travaux a été réglée par la société Bt Consulting et que les travaux ont été arrêtés à l'initiative du maître de l'ouvrage.

Il ressort des pièces que la Sci Résidence du Parc n'a arrêté le projet de promotion immobilière qu'en raison de problèmes de trésorerie, des difficultés à trouver des investisseurs l'empêchant de payer les situations de travaux régulièrement émises au point que la société Bt Consulting ait dû faire l'avance de la première.

La société Bt Consulting a fait le lien en permanence avec la société Nbn Tp représentant le groupement d'entreprise et a piloté les négociations lorsque le maître d'ouvrage a pris la décision d'arrêter le chantier à défaut d'avoir trouvé des investisseurs.

Il est établi que la Sci Résidence du Parc n'a jamais remis en cause le rôle de la société Bt Consulting ni la qualité de son travail dans l'exécution de la mission confiée.

Concernant les travaux, l'expert affirme que la société Nbn Tp ne les a pas surfacturés de sorte qu'il ne peut être reproché à la société Bt Consulting des défaillances dans leur organisation et leur suivi susceptibles d'engager sa responsabilité délictuelle.

Si des désordres sont relevés par l'expert portant sur des voiles béton consécutifs à une mauvaise exécution par l'entreprise en charge de ce lot sous la surveillance de la société Nbn Tp, qui nécessiteront en cas de redémarrage du chantier des travaux de reprise, la responsabilité de la société Bt Consulting en qualité d'assistant à maîtrise d'ouvrage ne peut être recherchée ni sur le terrain contractuel ni  délictuel.

D'ailleurs en première instance, sur cette question, la Sci Résidence du Parc ne recherchait pas la responsabilité contractuelle ou délictuelle de la société Bt Consulting mais uniquement la responsabilité de la société Nbn Tp, se contentant de demander au juge que la somme de 72 820,40 € soit remboursée à la société Bt Consulting qui avait avancé la première situation de travaux.

La Sci Résidence du Parc est en conséquence déboutée de sa demande d'indemnisation.

Sur les demandes accessoires

La Sci Résidence du Parc qui succombe supporte les dépens d'appel et est condamnée à payer à la société Bt Consulting la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu de relever la somme déjà accordée en première instance à la société Bt Consulting au titre des frais irrépétibles. 

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement du 11 février 2020 du tribunal judiciaire de Senlis ;

Y ajoutant :

Déboute la Sci Résidence du Parc de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne la Sci Résidence du Parc à payer à la Sarl Bt Consulting la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Sci Résidence du parc aux dépens d'appel dont recouvrement direct au profit de maître François Muhmel qui le demande.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 20/01614
Date de la décision : 13/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-13;20.01614 ?
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