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12/04/2023 | FRANCE | N°21/01650

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 12 avril 2023, 21/01650


ARRET



















S.A. CREATIS





C/



[O]

[O] NÉE [W]









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 12 AVRIL 2023





N° RG 21/01650 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IBOI



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE BEAUVAIS EN DATE DU 01 MARS 2021





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE







S.A. CREATIS agis

sant par son représentant légal

[Adresse 3]

[Adresse 3]





Représentée par Me Frédéric MALINGUE substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65 et ayant pour avocat plaidant Me DEFRENNE, avocat au barreau de LILLE







ET :





INTIMES

...

ARRET

S.A. CREATIS

C/

[O]

[O] NÉE [W]

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 12 AVRIL 2023

N° RG 21/01650 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IBOI

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE BEAUVAIS EN DATE DU 01 MARS 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. CREATIS agissant par son représentant légal

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Frédéric MALINGUE substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65 et ayant pour avocat plaidant Me DEFRENNE, avocat au barreau de LILLE

ET :

INTIMES

Monsieur [N] [O] sous curatelle de l'APSJO dont le siège est [Adresse 2].

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me José-manuel CASTELLOTE, avocat au barreau de BEAUVAIS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/003853 du 22/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)

Madame [Y] [O] NÉE [W]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Non représentée

DEBATS :

A l'audience publique du 31 Janvier 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Avril 2023.

GREFFIER : Mme Sophie TRENCART, adjointe administrative faisant fonction.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 12 Avril 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Sophie TRENCART, faisant fonction de Greffier.

DECISION

Selon offre préalable du 12 août 2014, acceptée le 16 août 2014, M. [N] [O] et Mme [Y] [W], épouse [O], lesquels sont en instance de divorce, ont souscrit auprès de la société Créatis (SA) un contrat de regroupement de crédits n°28047000008042, d'un montant de 33.300 euros, au taux débiteur de 7,82% l'an, remboursable en 144 mensualités de 357,18 euros, hors assurance facultative.

Se prévalant d'incidents de paiement, par lettres recommandées avec accusé de réception (LRAR) séparées du 24 septembre 2018, la SA Créatis a mis en demeure chacun des époux [O]-[W], en leur qualité de co-emprunteurs solidaires, d'avoir à régulariser sous quinzaine, sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du contrat susvisé, la somme totale de 3.857,50 euros, dont :

- 1.835,76 euros, au titre du capital échu impayé (hors assurance), du 30 novembre 2017 au 31 août 2018;

- 1.736,04 euros, au titre des intérêts échus impayés;

- et 285,70 euros correspondant aux indemnités de retard.

Par LRAR séparées du 26 octobre 2018, la SA Créatis a notifié aux époux [O]-[W] le prononcé à leur égard de la déchéance du terme du contrat susmentionné de regroupement de crédits, les mettant chacun en demeure de lui régler la somme totale de 31.697,39 euros, dont :

- 2.025,98 euros, au titre du capital échu impayé;

- 2.044,66 euros, au titre des intérêts dûs entre le 30 novembre 2017 et 26 octobre 2018;

- 25.430,25 euros, au titre du capital restant dû;

- et 2.196,50 euros, au titre de l'indemnité légale.

Par acte d'huissier du 14 février 2019, la SA Créatis a fait assigner M. [N] [O] et Mme [W], épouse [O], devant le tribunal de grande instance de Beauvais, aux fins de les voir condamner solidairement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer la somme de 32.062,10 euros, avec intérêt au taux contractuel de 7,82%, à compter du 28 décembre 2018, date du dernier décompte, outre la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par actes d'huissier des 14 juin (délivré à domicile) et 12 novembre 2019 (délivré en la forme d'un procès-verbal de recherches infructueuses), la SA Créatis a fait assigner M. [N] [O] et mis en cause son curateur, Mme [X] [V], désignée suivant jugement rendu le 5 juillet 2019 par le tribunal d'instance de Saint Germain en Laye, lequel a placé l'intimé sous mesure de curatelle pour une durée de 5 ans.

Bien que régulièrement citée et avisée de la date d'audience, Mme [Y] [W], épouse [O], n'a pas comparu, ni été représentée à l'audience de première instance.

Suivant jugement réputé contradictoire du 1er mars 2021, le tribunal judiciaire de Beauvais a déclaré la SA Créatis recevable en son action, prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat n°28047000008042, condamné solidairement M. [N] [O] et Mme [Y] [O], née [W] à payer à la SA Créatis la somme de 19.570,13 euros, pour solde du prêt, dit que cette somme ne sera productive d'aucun intérêt, condamné in solidum M. [N] [O] et Mme [Y] [O], née [W] aux dépens, condamné in solidum M. [N] [O] et Mme [Y] [O], née [W], à payer à la SA Créatis la somme de 200 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rappelé que le jugement est immédiatement exécutoire de plein droit.

La SA Créatis a relevé appel de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour le 22 mars 2021.

L'appelante n'a pas fait signifier sa déclaration d'appel à Mme [Y] [W], épouse [O] qui n'a pas constitué avocat.

Suivant ordonnance du 22 juillet 2021, Mme la conseillère de la mise en état de la cour d'appel d'Amiens a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'égard de Mme [Y] [W], épouse [O], pour défaut de signification dudit acte à cette dernière, au visa de l'article 902 du code de procédure civile, étant précisé que la procédure demeure régulière à l'égard de M. [N] [O].

Suivant ordonnance du 3 février 2022, le juge des tutelles du tribunal judiciaire de Senlis a déchargé l'Association tutélaire du Ponant de la mesure de curatelle sur M. [N] [O] et désigné en qualité de curateur l'Association protection sociale et juridique de l'Oise (APSJO).

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelante remises le 31 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SA Créatis demande à la cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, condamné solidairement les époux [O]-[W] à payer à la concluante uniquement la somme de 19.570,13 euros, pour solde du prêt et dit que cette somme ne sera productive d'aucun intérêt et statuant de nouveau de débouter M. [N] [O] et Mme [Y] [W], épouse [O], de l'intégralité de leurs prétentions, demandes, fins et conclusions, de les condamner solidairement, à lui payer la somme en principal de 32.062,10 euros, avec intérêts contentieux au taux de 7,82% l'an à compter du 28 décembre 2018 et jusqu'à parfait paiement et de condamner solidairement M. [N] [O] et Mme [Y] [W], épouse [O], à lui payer la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Delahousse et associés.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimé remises le 5 avril 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [N] [O] demande à la cour d'acter l'intervention volontaire de l'APSJO en qualité de nouveau curateur du concluantd'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau, à titre principal de prononcer la nullité du contrat de prêt et à titre subsidiaire de prononcer la déchéance du droit aux intérêts;

en conséquence de débouter la SA Créatis de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions et de la condamner à lui payer la somme de 1.095,56 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au regard de la convention d'honoraires en matière d'aide juridictionnelle partielle validée par le Bâtonnier.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 janvier 2023, l'affaire ayant été renvoyée pour plaider à l'audience du 31 janvier 2023.

SUR CE

Sur les demandes de l'appelante à l'encontre de Mme [Y] [W], épouse [O]

Au vu de l'ordonnance de caducité partielle de la déclaration d'appel portant le numéro 21/01310 rendue le 22 juillet 2021 par Mme la conseillère de la mise en état de la cour d'appel d'Amiens, il convient de déclarer la SA Créatis irrecevable en ses demandes formulées à l'encontre de Mme [Y] [W], épouse [O].

Sur l'intervention volontaire du curateur

Le majeur protégé doit être assisté de son curateur dans le cadre d'une action en justice qui plus est de nature patrimoniale.

L'intervention en la cause du nouveau curateur de M. [O] doit être reçue.

Sur la validité du contrat de regroupement de crédits

M. [N] [O] sollicite, à titre principal, l'annulation du contrat d'espèce, sans en préciser le fondement juridique, aux motifs que dès le départ, les conditions du regroupement de crédits n'étaient pas viables, étant précisé que les ressources réelles des époux [O]-[W] ne leur permettaient pas de faire face à leurs engagements vis-à-vis de l'appelante.

La SA Créatis fait valoir que M. [N] [O] ne produit aucun élément relatif à la situation financière du couple [O]-[W] au moment de la conclusion du contrat litigieux, ou susceptible de rapporter un manquement du prêteur à son obligation de mise en garde de l'emprunteur non-averti sur un risque d'endettement excessif mais qu'à l'inverse, elle justifie de la vérification préalable de la solvabilité des époux [O]-[W] et de leur capacité à rembourser le contrat de regroupement de crédits sollicité en produisant la fiche de dialogue remplie et signée par eux le 16 août 2014, ainsi que des justificatifs de ressources les concernant, notamment les bulletins de paie de M. [N] [O], ainsi que les bulletins de paie de Mme [Y] [W], épouse [O] et le dernier avis d'impôt sur le revenu du couple [O]-[W].

Elle ajoute que même en tenant compte de la mensualité du regroupement de crédits en cause, les époux [O]-[W] disposaient encore, aux termes de leur déclaration du 16 août 2014, d'un reste à vivre mensuel de 2.577,20 euros et que ce contrat de regroupement de trois crédits a permis aux co-emprunteurs solidaires de réduire leurs mensualités de remboursement de 597,99 euros à 357,18 euros, et de solder un découvert bancaire de sorte qu'elle n'a commis aucune faute, ni aucun manquement à ses obligations dans l'octroi du contrat de regroupement de crédits litigieux.

Selon l'article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En l'espèce il est essentiellement reproché au prêteur d'avoir accordé un prêt permettant le regroupement de crédits à des débiteurs dont la situation financière ne leur permettait pas de faire face au remboursement de ce prêt.

Il semble plus exactement être reproché au prêteur d'avoir accordé un prêt sans prendre en compte la solvabilité des emprunteurs et la possibilité pour ces derniers de faire face à leurs obligations.

Il résulte de l'article L. 311-9 du code de la consommation en sa version applicable au contrat, qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Il consulte le fichier des incidents de remboursements des crédits aux particuliers.

Toutefois le non-respect de ces dispositions est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en totalité ou dans la proportion fixée par le juge aux termes de l'article L. 311-48 du même code et non pas par la nullité du contrat.

Outre le fait que la défaillance du prêteur dans la vérification de la situation du débiteur serait de nature à entraîner non pas la nullité du contrat mais la déchéance du droit aux intérêts il résulte des éléments produits aux débats que préalablement à la conclusion du prêt litigieux, l'appelante a vérifié les capacités de remboursement des époux [O]-[W], au travers de la formalisation d'une fiche de dialogue reprenant les revenus et charges des emprunteurs et les trois crédits à la consommation et le découvert bancaire rachetés dans le cadre de l'opération de regroupement de crédits d'espèce et de la communication de pièces justificatives par les co-emprunteurs solidaires, savoir des bulletins de salaire sur la période allant de décembre 2013 à juin 2014, un avis d'impôt 2013 sur les revenus de l'année 2012 et une attestation de paiement d'allocations familiales pour leurs deux enfants mineurs, entre les mois de mars et juillet 2014.

Par ailleurs il est admis que le prêteur est tenu à l'égard de l'emprunteur non averti d'un devoir de mise en garde en cas de risque d'endettement excessif. Ce devoir oblige le premier, avant d'apporter son concours, à vérifier les capacités financières du second et de l'alerter, le cas échéant, sur les risques encourus.

L'éventuel manquement à ce devoir de mise en garde n'est pas sanctionné par l'annulation du contrat de prêt concerné, mais par l'engagement de la responsabilité contractuelle du prêteur sur le fondement de l'article 1147 précité du code civil.

A supposer que la demande des emprunteurs puisse être requalifiée en une demande au titre du manquement au devoir de mise en garde du prêteur il ressort des pièces versées aux débats que préalablement à la conclusion du prêt litigieux, l'appelante a vérifié les capacités de remboursement des époux [O]-[W] et qu'il ressort des documents produits qu'au 23 juillet 2014, les revenus et allocations mensuels des co-emprunteurs solidaires s'élevaient à une somme de 3.823,86 euros, pour des charges de 889,48 euros par mois, exclusion faite des échéances de remboursement, à hauteur de 597,99 euros par mois, des trois crédits à la consommation et du découvert bancaire rachetés dans le cadre de l'opération de regroupement de crédits d'espèce.

Rapportées au revenus et charges déclarés et justifiés par les époux [O]-[W] en amont de leur engagement du 16 août 2014, les mensualités de remboursement du contrat de regroupement de crédits d'espèce, à hauteur de 357,18 euros, hors assurance facultative, ne constituaient pas un risque d'endettement excessif, si bien qu'aucun manquement de la SA Créatis à son obligation de mise en garde n'est rapporté en l'espèce.

Dès lors, il convient de débouter l'intimé de sa demande principale.

Sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la SA Créatis

Le premier juge a considéré que la SA Créatis ne justifiait pas avoir joint un formulaire détachable à l'exemplaire du contrat de crédit original signé par les emprunteurs .

La SA Créatis soutient qu'elle n'est pas obligée de verser aux débats un exemplaire du contrat comportant un bordereau de rétractation, sachant que la faculté de se rétracter ne bénéficie qu'à l'emprunteur mais qu'elle prend soin de verser aux débats en cause d'appel la copie de la liasse contractuelle intitulée 'Dossier de Financement' envoyée le 12 août 2014 à M. [N] [O] et Mme [Y] [W], épouse [O], étant précisé que ce dossier comprend trois exemplaires du contrat de regroupement de crédits, le premier exemplaire devant être renvoyé au prêteur et les deux autres exemplaires destinés à chaque emprunteur et devant être conservés par eux.

Elle précise que si l'exemplaire du contrat de regroupement de crédits destiné à être renvoyé au prêteur est effectivement dépourvu de bordereau de rétractation, les deux autres exemplaires de ce même contrat de regroupement de crédits, dont celui destiné à M. [N] [O], comportent un bordereau de rétractation, conformément à l'article L311-12 du code de la consommation.

Elle fait observer que M. [N] [O] s'abstient volontairement de produire l'exemplaire du contrat de regroupement de crédits litigieux qui lui a été adressé, malgré une sommation de communiquer.

Elle soutient qu'elle rapporte suffisamment la preuve de la remise à l'intimé d'un exemplaire du contrat de regroupement de crédits doté d'un bordereau de rétractation.

En retour, M. [N] [O] prétend que l'appelante, sur qui pèse la charge de la preuve, échoue à démontrer la remise d'un bordereau de rétraction, étant souligné qu'elle reconnait n'avoir conservé aucun double dudit bordereau et que son état de santé l'empêche de pouvoir affirmer quoi que ce soit relativement à ce bordereau de rétractation.

Selon l'article L311-12 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige : 'L'emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l'article L311-18. Afin de permettre l'exercice de ce droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit. L'exercice par l'emprunteur de son droit de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier.

En cas d'exercice de son droit de rétractation, l'emprunteur n'est plus tenu par le contrat de service accessoire au contrat de crédit'.

Selon l'article L311-48 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige : 'Le prêteur qui accorde un crédit [...] sans remettre à l'emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par [l'article] L. 311-12 [...], est déchu du droit aux intérêts [...].

L'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû [...]'.

Il est admis que si aucune disposition légale n'impose au prêteur de conserver un exemplaire du bordereau joint à l'exemplaire de l'offre communiquée à l'emprunteur , il lui incombe de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles et que la signature par l'emprunteur de l'offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu'il incombe à ce dernier de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, comme cela résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne , et appliquée par les juridictions françaises.

En l'espèce, la SA Créatis verse aux débats l'exemplaire 'à renvoyer' (au prêteur) de l'offre de regroupement de crédits, lequel ne comporte pas de bordereau de rétractation, mais seulement une déclaration des époux [O]-[W] (page 2), aux termes de laquelle ils reconnaissent notamment rester en possession d'un exemplaire de ce contrat de crédit doté d'un formulaire détachable de rétractation ainsi que deux copies d'un exemplaire 'à conserver' (emprunteur) du contrat litigieux à conserver par les co-emprunteurs solidaires, lequel est prérempli, mais non-signé, et comprend un bordereau de rétractation (page 1).

Bien que sommé par l'appelante de communiquer l'exemplaire du contrat de regroupement de crédits resté en sa possession, M. [N] [O] ne l'a pas produit.

L'indice de remise du bordereau de rétractation constitué par la formule déclarative de sa reconnaissance par les époux [O]-[W] dans l'encadré d'acceptation de l'offre figurant en page 2 de la version originale, datée et signée par ces derniers, de l'exemplaire 'à retourner' (prêteur) du regroupement de crédits est suffisamment corroboré par la production de la copie préremplie de l'exemplaire 'à conserver' (emprunteur) du contrat en cause, laquelle comprend un bordereau de rétractation (page 1).

M. [N] [O] échouant à rapporter la preuve contraire, il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris sur ce point, seulement en ce qui concerne l'intimé.

Sur les sommes dues au titre du contrat de regroupement de crédits

L'appelante sollicite la condamnation solidaire de M. [N] [O] avec Mme [Y] [W] épouse [O] notamment à lui payer la somme en principal de 32.062,10 euros, dont :

- 27.456,23 euros au titre du capital;

- 2.409,37 euros au titre des intérêts échus;

- et 2.196,50 euros, au titre d'une indemnité conventionnelle de 8%;

- outre les intérêts contentieux au taux de 7,82% l'an courus et à courir à compter du 28 décembre 2018, et jusqu'à complet règlement.

Cette somme et les montants qu'elle comprend sont établis par l'historique de compte et le dernier décompte de créance arrêté au 27 décembre 2018, que l'appelante verse aux débats.

Dès lors, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de condamner M. [N] [O] à payer à la SA Créatis la somme de 32.062,10 euros, étant précisé, d'une part, que le capital restant dû, à hauteur de 27.456,23 euros, portera intérêts au taux contractuel de 7,82% l'an à compter du 28 décembre 2018, et jusqu'à parfait paiement, et d'autre part, que les intérêts échus à hauteur de 2.409,37 euros et l'indemnité conventionnelle, à hauteur de 2.196,50 euros, porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et jusqu'à parfait paiement.

Il convient de préciser que la solidarité entre les emprunteurs ne s'appliquera qu'à concurrence de la condamnation de première instance soit à hauteur de la somme de 19570,13 euros.

Sur les demandes accessoires

L'intimé, qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Delahousse et associés, qui le demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Enfin, il ne parait pas inéquitable de condamner M. [N] [O] à payer à la SA Créatis une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

Prend acte de l'intervention volontaire du curateur de M. [N] [O] ;

Confirme le jugement entrepris excepté en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts;

Statuant de nouveau et y ajoutant

Condamne M. [N] [O] à payer à la SA Créatis la somme de 32.062,10 euros, que le capital restant dû, à hauteur de 27.456,23 euros, avec intérêts au taux contractuel de 7,82% l'an à compter du 28 décembre 2018 sur le capital restant dû soit 27456,23 euros et intérêts au taux légal pour le surplus à compter du présent arrêt;

Dit que M. [N] [O] sera tenu solidairement au paiement de la créance de la SA Créatis avec Mme [Y] [O] à concurrence de la somme de 19570,13 euros ;

Condamne M. [N] [O] à payer la somme de 500 euros à la SA Créatis en application de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne M. [N] [O] aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Delahousse et associés, qui le demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/01650
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;21.01650 ?
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