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28/03/2023 | FRANCE | N°21/00957

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 28 mars 2023, 21/00957


ARRET



















S.C.I. HOCHE





C/



S.A.S. INDUXIAL









CV





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 28 MARS 2023





N° RG 21/00957 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IAEY



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE AMIENS EN DATE DU 25 NOVEMBRE 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.C.I. HOCHE agissant en la p

ersonne de son gérant domicilié ès qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 06 et ayant pour avocat plaidant Me Olivier BERNE, avocat au barreau de LILLE







ET :





INTIMEE





S...

ARRET

S.C.I. HOCHE

C/

S.A.S. INDUXIAL

CV

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 28 MARS 2023

N° RG 21/00957 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IAEY

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE AMIENS EN DATE DU 25 NOVEMBRE 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.C.I. HOCHE agissant en la personne de son gérant domicilié ès qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 06 et ayant pour avocat plaidant Me Olivier BERNE, avocat au barreau de LILLE

ET :

INTIMEE

S.A.S. INDUXIAL agissant poursuites et diligences de son représentant Légal, domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric POILLY subsituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101

DEBATS :

A l'audience publique du 17 Janvier 2023 devant Mme Cybèle VANNIER, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Mars 2023.

GREFFIER : Mme Sophie TRENCART, adjointe administrative faisant fonction.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Cybèle VANNIER en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

et Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 28 Mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Sophie TRENCART, faisant fonction de Greffier.

DECISION

Suivant acte sous seing privé en date du 17 mars 2006 , la SCI Hoche a donné à bail à la SAS Alliance Aéronautique devenue la SAS Induxial des locaux à usage de bureaux d'une superficie de 84 m2 ainsi que 3 places de parking dans un ensemble immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 4] (Somme) pour une durée de 24 mois à effet au 1er avril 2006 pour finir au 31 mars 2008, la superficie totale des locaux étant étendue à 227, 40 m2 et le nombre de places de parking étant porté à 8 suivant avenants en date des 2 mai 2007 et 29 février 2008 .Le loyer annuel était fixé hors taxes à 7 200 € .

Suivant acte sous seing privé en date du 29 février 2008 , la SCI Hoche a donné à bail à la SAS Induxial des locaux à usage d'atelier d'une superficie de 322 m2 au sein du même ensemble immobilier pour une durée de 24 mois à effet du 1er octobre 2007 pour finir le 30 septembre 2009. Le loyer annuel était fixé hors taxes à 19 200 €.

Suivant acte sous seing privé en date du 1er avril 2008 , la SCI Hoche a de nouveau donné à bail à la SAS Induxial les mêmes locaux à usage de bureaux et places de parking pour une durée de 18 mois à effet au 1er avril 2008 pour finir le 30 septembre 2009 .Le loyer annuel prévu était de 17 748 € hors taxes ,

Suivant acte sous seing privé en date du 6 octobre 2009 , la SCI Hoche a de nouveau donné à bail à la SAS Induxial les mêmes locaux à usage d'atelier pour une durée de 22 mois à effet au 1er octobre 2009 pour finir au 31 juillet 2011. Le loyer mensuel hors taxes étant fixé à 1 750 € .

Suivant deux nouveaux actes sous seing privé en date du 5 octobre 2011, la SCI HOCHE a de nouveau donné à bail à la SAS Induxial au sein du même ensemble immobilier d'une part des locaux à usage de bureaux d'une superficie totale de 268, 40 m2 et places de parking pour une durée de 17 mois à compter du 1er août 2011 pour finir le 31 décembre 2012 moyennant un loyer mensuel de 2000 € hors taxes , et d'autre part des locaux à usage d'atelier pour une durée de 17 mois à effet au 1er août 2011 pour finir le 31 décembre 2012, moyennant un loyer mensuel hors taxes de 1800 € .

Par exploits d'huissier en date du 20 décembre 2017 , la SAS Induxial a signifié à la SCI Hoche son congé relatif aux locaux loués à usage de bureaux pour le 30 juin 2018 et son congé relatif aux locaux loués à usage d'atelier pour le 30 septembre 2018 .

La SCI Hoche a contesté la date d'effet des deux congés .

Par acte d'huissier en date du 17 janvier 2019 , la SCI Hoche a fait assigner la société Induxial devant le Tribunal de Grande Instance d'Amiens en fixation de la date des congés litigieux et en paiement des loyers restant dus.

Par jugement en date du 25 novembre 2020 , le Tribunal judiciaire d'Amiens a :

-débouté la SCI Hoche de ses demandes en paiement au titre des loyers des mois de juillet à décembre 2018 s'agissant du bail commercial afférent aux locaux à usage de bureaux et au titre des loyers des mois d'octobre 2018 à juillet 2020 , s'agissant du bail commercial afférent aux locaux à usage d'atelier .

-débouté la SCI Hoche de sa demande aux fins d'injonction de faire assurer les locaux à usage d'atelier .

-condamné la SAS Induxial à payer à la SCI Hoche la somme de 9 407, 31 € au titre des arriérés de charges relatifs aux baux commerciaux afférents aux locaux à usage de bureaux et aux locaux à usage d'atelier pour l'année 2018 .

-condamné la SCI Hoche à payer à la société Induxial la somme de 7 600 € en restitution des dépôts de garantie relatifs aux baux commerciaux afférents aux locaux à usage de bureaux et aux locaux à usage d'atelier .

-débouté la SCI Hoche et la SAS Induxial du surplus de leurs demandes .

-débouté la SCI Hoche et la SAS Induxial de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

-dit que les dépens de l'instance seront partagés par moitié entre le SCI Hoche et la SAS Induxial .

-ordonné l'exécution provisoire de la décision .

Par déclaration enregistrée le 19 février 2021 , la SCI Hoche a interjeté appel de la décision .

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 4 janvier 2023 , la SCI Hoche demande à la Cour de :

-débouter la SAS Induxial de l'ensemble de son appel incident .

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Induxial à lui payer la somme de 9 407, 31 € , débouté la société Induxial de sa demande d'intérêts au taux légal sur la somme de 7 600 € au titre de la restitution du dépôt de garantie , du surplus de ses demandes et de sa demande au titre des frais irrépétibles .

-infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes en paiement au titre des loyers des mois de juillet à décembre 2018 , s'agissant du bail commercial afférent aux locaux à usage de bureaux et au titre des loyers des mois d'octobre 2018 à juillet 2020, s'agissant du bail commercial afférent aux locaux à usage d'atelier, condamné la SCI Hoche à payer à la société Induxial la somme de 7 600 € en restitution des dépôts de garantie relatifs aux baux commerciaux afférents aux locaux à usage de bureaux et aux locaux à usage d'atelier, débouté la SCI Hoche de sa demande formée au titre des frais irrépétibles et partagé les dépens par moitié .

Statuant à nouveau ,

-fixer la date des effets du congé délivré par la SAS Induxial le 21 décembre 2017 par M.[I] huissier de justice au 31 décembre 2018 concernant la partie bureaux et au 31 juillet 2020 s'agissant de la partie ateliers .

-condamner la SAS Induxial à payer la somme de 14 400 € TTC correspondant aux loyers des mois de juillet à décembre 2018 concernant le bail de la partie bureaux .

-condamner la SAS Induxial à payer la somme de 39 600 € TTC correspondant au loyer d'octobre 2018 à juillet 2020 concernant le bail de la partie ateliers .

-condamner la SAS Induxial à lui payer la somme de 8000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d'appel .

-débouter la SAS Induxial de sa demande au titre des frais irrépétibles devant la Cour .

-condamner la société Induxial aux entiers dépens de première instance et d'appel .

-accorder à M.Franck Derbise , avocat, un droit de recouvrement direct.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 14 septembre 2022, la société Induxial demande à la Cour de :

-confirmer le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société Induxial à payer à la SCI Hoche la somme de 9 407, 31 au titre des arriérés de charges pour l'année 2018 et a débouté la société Induxial de sa demande d'intérêts au taux légal sur la somme de 7 600 € au titre de la restitution des dépôts de garantie .

Statuant à nouveau ,

-débouter la SCI Hoche de sa demande en paiement de la somme de 9 407, 31 € .

-condamner la SCI Hoche à lui payer les intérêts au taux légal sur la restitution des dépôts de garantie, à compter du 30 juin 2018 sur la somme de 4 000 € , à compter du 29 septembre 2018 sur la somme de 3 600 €.

-condamner en toutes hypothèses la SCI Hoche à lui payer la somme de 12 000 € à titre d'indemnité de procédure en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

-condamner la SCI Hoche aux entiers dépens de première instance et d'appel .

Pour un exposé détaillé des prétentions et moyens des parties , la Cour renvoie à leurs écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile .

L'ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 17 janvier 2023 .

SUR CE

Sur la prescription

La SCI Hoche a fait assigner en paiement la société Induxial , laquelle a présenté des défenses au fond , ces dernières peuvent être présentées en tout état de cause, elles échappent à la prescription en application de l'article 72 du code de procédure civile .

Sur les baux et les demandes en paiement de loyers

La Sci Hoche expose qu'elle était une société familiale dont le dirigeant est décédé en 2013 , ses héritiers ayant ensuite revendu les parts de la SCI , que seuls les baux en cours ont été communiqués alors à l'acquéreur, que la société Induxial est une société spécialisée dans la confection de pièces métalliques pour l'aéronautique, qu'il a été choisi par la société Induxial au début de la relation contractuelle de souscrire des baux de courte durée afin de ne pas s'engager durablement sur des locaux .Elle précise que deux types de locaux ont fait l'objet de baux , des locaux à usage de bureaux et des locaux à usage d'atelier .

S'agissant des locaux à usage de bureaux, elle déclare que le premier bail est un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux, de même que le deuxième qui contient une clause selon laquelle la société Induxial renonce à ce statut, que la renonciation n'est pas équivoque et a eu lieu à un moment où le locataire bénéficiait effectivement du statut des baux commerciaux , que les parties sont convenues en 2008 de conclure un nouveau bail précaire et ont signé un nouveau bail précaire le 1er avril 2008 et non un bail commercial ainsi qu' allégué, la société Induxial ayant un projet d'installation dans des locaux plus vastes et souhaitant conserver ses locaux sans s'engager dans un bail commercial de 9 ans .

Elle ajoute qu'à l'issue de cette période , qui a pris fin le 30 septembre 2009 , la société Induxial est restée dans les lieux , qu'à partir du 1er octobre 2009 , un bail commercial s'est donc formé, les parties n'ayant pas formalisé de contrat et alors que ce bail était en cours , que les parties ont décidé d'y mettre fin et ont conclu un nouveau bail dérogatoire à compter du 1er août 2011 se terminant le 31 décembre 2012, la société Induxial souhaitant conclure un bail dérogatoire , envisageant son déménagement . Elle précise qu'à l'issue de ce bail dérogatoire, la société Induxial est restée dans les lieux de sorte qu'un bail commercial s'est formé le lendemain du bail dérogatoire, soit le 1er janvier 2013, pour se terminer le 31 décembre 2022 , qu'en application de l'article L 145-4 du code de Commerce, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale sans avoir à invoquer de motifs et en respectant un délai de préavis de 6 mois , que le congé concernant la partie bureaux date du 20 décembre 2017, que la période triennale la plus proche de cette date prend fin le 31 décembre 2018, que la date d'effet du congé doit donc être fixée au 31 décembre 2018 et non au 30 juin 2018 , qu'elle est donc redevable des loyers de juillet à décembre 2018 soit un montant total de 14 400 € TTC (2400 € x 6 mois ) .

S'agissant des locaux à usage d'ateliers , elle fait valoir que le premier bail en date du 29 février 2008 est un bail dérogatoire , rétroagissant au 1er octobre 2007 , que le bail du 6 octobre 2009 est également un bail dérogatoire, puisqu'il comporte une clause de renonciation expresse aux statut des baux commerciaux, que le premier bail a pris fin le 30 septembre 2009 , que le 1er octobre 2009 , la société Induxial qui est laissée en possession bénéficie du statut des baux commerciaux , que la société Induxial pouvait donc valablement renoncer à ce statut et ne démontre pas que son consentement aurait été vicié .

Elle ajoute qu'à l'issue de ce second bail , un troisième bail a été conclu le 5 octobre 2011 avec pour date d'effet le 1er août 2011, sans qu'une clause de renonciation expresse au statut des baux commerciaux soit intégrée, qu'il s'agit donc d'un bail commercial dont le terme est fixé au 31 juillet 2020, bail pouvant être révoqué à chaque période triennale, que la société Induxial a donné congé le 20 décembre 2017 pour le 30 septembre 2018 , ce qui était impossible , que le congé ne pouvait prendre effet qu'au 31 juillet 2020, que malgré des courriers de relance , elle a cessé de régler ses loyers et qu'il reste dû la somme de 39 600 € soit 1800 € par mois x22 mois d'octobre 2018 à juillet 2020. A titre subsidiaire, elle déclare que si la Cour considérait que ce 3eme bail est un bail dérogatoire conclu le 5 octobre 2011 avec effet rétroactif le 1er août 2011 , le congé produirait ses effets au 31 décembre 2018 et non au 30 septembre 2018, qu'il serait dû une somme de 5 400 € TTC soit 3 mois de loyers à 1 800 € chacun .

Elle ajoute en ce qui concerne la demande en nullité des baux , que cette demande n'a jamais été présentée , que toute demande en nullité serait au demeurant prescrite en application de l'article L 145-60 du code de Commerce et que ces baux ont été intégralement exécutés par les parties en leur temps , que par ailleurs une demande de requalification de baux se prescrit également par deux ans , le point de départ de l'action étant la date de la conclusion du contrat, que la société Induxial est dès lors irrecevable à soutenir que le bail dérogatoire qu'elle a signé le 5 octobre 2011 et qui prenait fin le 21 décembre 2012 doit faire l'objet d'une requalification .

La société Induxial , anciennement dénommée Alliance Aéronautique expose qu'elle a été locataire suivant deux baux distincts de bureaux et d'ateliers dans un même ensemble immobilier , qu'elle a décidé de quitter les lieux loués et a fait délivrer par huissier de justice le 20 décembre 2017 , un congé pour la partie bureaux, avec effet au 30 juin 2018 et pour la partie atelier avec effet au 30 septembre 2018 , que la SCI Hoche a contesté ces congés , que nonobstant une convocation pour un état des lieux le 29 juin 2018 pour les bureaux et le 28 septembre 2018 pour l'atelier , la SCI Hoche ne s'est pas présentée puis a fait délivrer une assignation en paiement devant le Tribunal judiciaire d'Amiens le 7 janvier 2019 .

S'agissant des baux afférents aux locaux à usage de bureaux , elle fait valoir que le tribunal a retenu à juste titre que le bail commercial relatif à ces locaux avait pris fin le 30 juin 2018, que la location de ces locaux a commencé dès le 6 avril 2006 suivant bail dérogatoire du 17 mars 2006 pour une durée de 24 mois, pour finir le 31 mars 2008, et que cette occupation des lieux a été continue jusqu'au 29 juin 2018 , que le bail daté du 1er avril 2008 n'était pas conforme à la loi en application de l'article L 145-5 du code de Commerce, que la conclusion de ce bail a donné naissance en réalité à un bail commercial de droit commun de 9 ans avec résiliation triennale possible pour le preneur , que ce bail est arrivé à son terme le 31 mars 2017 et qu'elle est restée dans les lieux , qu'aucun bail tacite n'a été conclu le 1er octobre 2009. Elle souligne que la Sci Hoche ne pouvait en aucun cas déroger à ces règles en faisant signer un nouveau bail dérogatoire le 5 octobre 2011, alors même que le preneur n'a jamais cessé d'occuper les lieux loués depuis 2006 et qu'il était sous l'égide d'un bail commercial de droit commun qui ne pouvait expirer que le 31 mars 2017 , que ce bail reconduit tacitement ouvrait droit à la société Induxial de signifier sa résiliation à tout moment en respectant un délai de préavis de 6 mois , que le congé délivré le 20 décembre 2017 en vue d'un départ des lieux au 30 juin 2018 est donc valable .Elle ajoute que la loi prévoyait expressément qu'il ne pouvait y avoir qu'un seul bail dérogatoire , que la Sci Hoche avait épuisé son droit à bail dérogatoire à l'issue du bail du 17 mars 2006 et que la renonciation préalable au statut des baux commerciaux a été imposée par la SCI Hoche dans l'unique but de se soustraire aux dispositions protectrices de ce statut .

Elle souligne qu'en 2011 , elle a eu besoin d'un bureau supplémentaire , compte tenu de son développement , et a adressé une demande en ce sens au bailleur , que ce dernier lui a fait signer un bail dérogatoire avec un terme au 31 décembre 2012 mais que ce bail ne comporte aucune clause selon laquelle les parties auraient été d'accord pour résilier le bail commercial préexistant, qu'elle peut donc soulever l'absence de résiliation amiable et à défaut de congé ayant mis fin au bail commercial entré en vigueur le 1er avril 2008 préalablement à la conclusion du bail du 5 octobre 2011 , que si on admet qu'un nouveau bail ait pu être conclu à compter du 1er août 2011 , il ne concerne qu'une pièce de 41 m2 au loyer annuel de 4 025 € HT représentant la différence de loyer entre les actes de 2008 à 2011, après application de la clause de révision , pour prendre fin au 31 décembre 2018 .

S'agissant des locaux à usage d'ateliers, elle fait valoir qu'elle a commencé à occuper ces locaux depuis le 1er octobre 2007 et les a occupés de façon continue jusqu'au 30 septembre 2018 , en application d'un bail dérogatoire de 24 mois en date du 29 février 2008 prenant effet le 1er octobre 2007 pour expirer le 30 septembre 2009, qu'un second bail dérogatoire a été conclu le 6 octobre 2009 pour une durée de 22 mois avec effet au 1er octobre 2009 pour s'achever le 30 juillet 2011, que si l'article L 145-5 permettait alors de conclure plusieurs baux dérogatoires successifs , encore fallait -il que la durée totale de ces baux n'excède pas 2 ans , que le second bail n'a donc pas été conforme à la loi et a donc donné naissance à un bail commercial de droit commun de 9 ans , soit du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2018 , avec résiliation triennale possible du preneur , que le congé délivré le 20 décembre 2017 pour un départ le 30 septembre 2018 est donc valable.

Elle déclare que si un troisième bail a été signé le 5 octobre 2011 pour une durée de 17 mois courant du 1er août 2011 expirant le 31 décembre 2012, aucun accord des parties n'avait été formalisé pour renoncer au statut des baux commerciaux, que le bail commercial n'a pas été résilié amiablement , que le bail commercial qui s'est formé le 1er octobre 2009 a continué à produire ses effets .

La société Induxial précise qu'elle n'a pas sollicité la nullité des contrats dérogatoires mais la requalification de ces derniers en baux commerciaux .

Les contrats ont été conclus de 2006 à 2011 , il convient donc d'appliquer les dispositions des articles L 145-4 et L 145-5 du Code de Commerce dans leur version en vigueur à cette date .

Selon l'article L 145-4 du code de commerce , la durée du contrat de location ne peut être inférieure à 9 ans . Toutefois , à défaut de convention contraire , le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale dans les formes et délais de l'article 145-9 .

Selon l'article L 145-5 dans sa version vigueur jusqu'au 5 août 2008 , les parties peuvent lors de l'entrée dans les lieux du preneur , déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans .Si à l'expiration de cette durée , le preneur est resté en possession , il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre .Il en est de même en cas de renouvellement exprès du bail , ou de conclusion, entre les mêmes parties d'un nouveau bail pour le même local .

Et selon cet article dans sa version en vigueur à compter du 6 août 2008 au 20 juin 2014 , les parties peuvent , lors de l'entrée dans les lieux du preneur , déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à 2 ans .Si à l'expiration de cette durée , le preneur reste et est laissé en possession , il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre. Il en est de même à l'expiration de cette durée , en cas de renouvellement exprès du bail ou de conclusions, entre les mêmes parties d'un nouveau bail pour le même local .

a) sur les baux afférents aux locaux à usage de bureaux et la demande en paiement de loyers

Les parties ne contestent pas que le premier bail en date du 17 mars 2006 conclu pour une durée de 24 mois à compter du 1er avril 2006 pour finir le 31 mars 2008 constitue un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux , ainsi qu'il le mentionne .

Si à l'expiration du bail dérogatoire , le preneur reste et est laissé en possession , il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les articles L 145-1 et suivants du Code de Commerce . Il n'est pas contesté que la société Induxial soit restée dans les lieux après le 31 mars 2008 , elle avait donc acquis le droit au bénéfice du statut des baux commerciaux dès le 1er avril 2008 , la conclusion d'un nouveau bail dérogatoire le 1er avril 2008 pour une durée de 18 mois à compter du 1er avril 2008 pour finir le 30 septembre 2009 n'était pas possible, car contraire à la loi s'agissant des mêmes locaux et des mêmes parties . Il s'agit d'un bail commercial de droit commun d'une durée de 9 ans , arrivant à son terme le 31 mars 2017 et aucun autre bail dérogatoire ne pouvait être conclu étant précisé que le preneur n'a jamais quitté les locaux loués , en conséquence , le bail conclu en 2011 pour ces mêmes locaux, nonobstant l'ajout d'un bureau, est privé d'effet .

Le bail commercial s'est prolongé tacitement à compter du 1er avril 2017, la société Induxial pouvait y mettre un terme en respectant un préavis de 6 mois , ce qu'elle a fait en délivrant un congé le 20 décembre 2017 pour le 30 juin 2018, elle a quitté les lieux le 29 juin 2018, il convient donc de débouter la Sci Hoche de sa demande en paiement de la somme de 14 400 € au titre des loyers de juillet à décembre 2018 , le jugement sera confirmé .

b) sur les baux afférents aux locaux à usage d'ateliers et la demande en paiement de loyers .

Les parties ne contestent pas que le premier bail en date du 29 février 2008 portant sur des locaux à usage d'ateliers conclu pour une durée de 24 mois à compter du 1er octobre 2007 pour finir le 30 septembre 2009 constitue un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux .

Il n'est pas contesté que la société Induxial soit restée dans les lieux après le 30 septembre 2009 , elle avait donc acquis le droit au bénéfice du statut des baux commerciaux dès le 1er octobre 2009 , la conclusion d'un bail dérogatoire le 6 octobre 2009 ne pouvait être effectuée, la durée de 2 ans était atteinte et il s'agissait des mêmes locaux et des mêmes parties . Un bail commercial de droit commun s'est formé entre les parties à compter du 1er octobre 2009 , pour une durée de 9 ans , venant à expiration le 30 septembre 2018 , en conséquence , le bail conclu pour ces mêmes locaux à usage d'atelier , en date du 5 octobre 2011 pour une durée de 17 mois se trouve privé d'effet .

Le bail arrivant à expiration le 30 septembre 2018 , le congé signifié par la société Induxial le 20 décembre 2017 pour la date du 30 septembre 2018 est valable , la société Induxial a quitté les lieux le 28 septembre 2018 , il convient donc de débouter la SCI Hoche de sa demande en paiement de la somme 39 600 € ainsi que de sa demande subsidiaire en paiement de la somme de 5 400 € , le jugement sera confirmé .

Sur la condamnation au paiement de la somme de 9 407, 31 € au titre de charges

Le tribunal a déclaré que la SCI Hoche justifiait sa demande au titre des charges afférentes aux locaux donnés relatives aux factures d'électricité, de gaz des mois de mars à juin 2018 , à la facture d'eau du premier semestre 2018 et à la taxe foncière due pour cette même année soit antérieurement à l'expiration des baux commerciaux litigieux pour un montant total de 9 407, 31 €.

La société Induxial conclut à l'infirmation du jugement de ce chef , faisant valoir que les demandes excèdent la période de location , qu'en outre concernant la taxe foncière , seul le bail de 2006 était valide pour la partie bureaux , que le bail comportait une clause selon laquelle le loyer annuel incluait la quote-part de la taxe foncière supportée par le bailleur , que pour la partie atelier le bail du 29 février 2008 s'appliquait et qu'en application de ce bail si le preneur devait supporter la taxe foncière ,cette dernière était due au prorata des surfaces louées au vu des justificatifs produits , que le bailleur se contente de produire un extrait du Grand Livre mentionnant une ligne débitrice de 5155, 96 € .

La SCI Hoche réplique qu'elle démontre que la société Induxial n'a pas payé ses charges afférentes au gaz pour les mois de mars , avril , mai et juin 2018 , qu'il en est de même pour l'électricité de mars à juin 2018 , qu'elle n'a pas réglé non plus sa facture d'eau ni la taxe foncière , soit un total de charges non réglées de 9 407, 31 € .

Si le bail en cause concernant les bureaux précisait que le loyer incluait la quote- part de la taxe foncière supportée par le bailleur , tel n'est pas le cas pour le loyer afférent aux locaux de l'atelier qui prévoyait un remboursement de la quote- part de taxe foncière en sus du loyer , il n'est pas allégué que la comptabilité de la SCI Hoche n'ait pas été tenue de façon régulière , aucun élément ne contredit l'extrait du Grand livre de la SCI Hoche produit aux débats , il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Induxial à payer la somme de 9 407, 31 € au titre de ses charges impayées ( 659, 99 €+ 992, 71 € + 669, 16 € + 171, 38 € + 98, 21 € +506, 58 € + 95, 50 € +619, 12 € + 402, 70 € + 5155, 96 € ) .

Sur les dépôts de garantie

La société Induxial a versé deux dépôts de garantie pour un montant total de 7 600 € , il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI Hoche à payer à la société Induxial la somme de 7 600 € en restitution des dépôts de garantie , les demandes d'intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2018 sur la somme de 4 000 € et à compter du 29 septembre 2018 sur la somme de 3 600 € ne pouvant être accordées ainsi que l'a estimé le premier juge, dés lors que la restitution des dépôts de garantie était soumise à la complète exécution de ses obligations par le preneur et au parfait règlement de l'intégralité des sommes dues au bailleur en application des contrats conclus .

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La SCI Hoche succombant en ses prétentions , sera condamnée à payer à la société Induxial la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel .

PAR CES MOTIFS

La Cour , statuant par arrêt contradictoire , en dernier ressort , par mise à disposition au greffe

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception des dépens .

Y ajoutant

Condamne la SCI Hoche à payer à la SAS Induxial la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

Condamne la SCI Hoche aux entiers dépens de première instance et d'appel .

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/00957
Date de la décision : 28/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-28;21.00957 ?
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