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14/03/2023 | FRANCE | N°21/02091

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 14 mars 2023, 21/02091


ARRET



















[L]





C/



S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS C)









OG





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 14 MARS 2023





N° RG 21/02091 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICIL



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON EN DATE DU 09 FÉVRIER 2021





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





M

adame [S] [L]

[Adresse 1]

[Localité 3]





Représentée par Me Eric POLLY substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101







ET :







INTIMEE







S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, agissant poursuites et dili...

ARRET

[L]

C/

S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS C)

OG

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 14 MARS 2023

N° RG 21/02091 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICIL

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON EN DATE DU 09 FÉVRIER 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [S] [L]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Eric POLLY substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101

ET :

INTIMEE

S.A. COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Fabrice CHIVOT de la SELARL CHIVOT-SOUFFLET, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 92

DEBATS :

A l'audience publique du 10 Janvier 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Mars 2023.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 14 Mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par acte sous seing privé en date du 5 octobre 2009 la Caisse d'épargne de Picardie a consenti à Mme [S] [L] un prêt immobilier portant sur un capital de 98627,35 euros affecté d'un taux d'intérêt annuel de 4,45% remboursable en 180 mensualités de 776,63 euros.

Par acte sous seing privé en date du 22 septembre 2009 la SA Société d'assurance des crédits des caisses d'épargne de France (SACCEF) s'est portée caution solidaire de ce prêt à concurrence du montant du capital emprunté.

Se prévalant d'échéances impayées et ayant prononcé la déchéance du terme la Caisse d'épargne de Picardie a actionné la Compagnie européenne de garanties et de cautions (CEGC) venant aux droits de la SACCEF qui a procédé au règlement de la somme de 44840,74 euros selon quittance subrogative en date du 9 janvier 2020.

Par exploit d'huissier en date du 21 février 2020 la CEGC a fait assigner Mme [L] devant le tribunal judiciaire de Laon aux fins de la voir condamner au paiement de la somme de 48088,93 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,45% à compter du 28 janvier 2020.

Par jugement réputé contradictoire en date du 9 février 2021 le tribunal judiciaire de Laon a condamné Mme [L] à payer à la CEGC la somme de 44840,74 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020, ordonné la capitalisation des intérêts, débouté la CEGC de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et condamné Mme [L] aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 14 avril 2021 Mme [L] a interjeté appel de cette décision des chefs de sa condamnation, de la capitalisation des intérêts et des dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 13 juin 2022 Mme [L] demande à la cour d'infirmer la décision entreprise sur ces chefs et statuant à nouveau à titre principal de dire la CEGC irrecevable sinon mal fondée en ses demandes et à titre subsidiaire de voir reporter à deux années le paiement de sa dette ou de le voir échelonner en 12 mensualités de 500 euros puis 11 mensualités de 1000 euros outre le solde au 24ème mois, les sommes ainsi versées portant intérêts au taux légal.

En tout état de cause elle demande la condamnation de la CEGC à lui verser la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de la Selarl Lexavoué Amiens Douai.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 7 septembre 2022 la CEGC demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter Mme [L] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Chivot Soufflet.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er décembre 2022.

SUR CE

Mme [L] ne conteste pas avoir connu des difficultés dans le règlement de ses échéances et avoir réceptionné la mise en demeure d'avoir à régulariser les sommes dues au titre des échéances impayées mais ne se souvient pas avoir réceptionné le courrier recommandé dénonçant la déchéance du terme qui ne porte pas sa signature mais une signature inconnue d'elle.

Elle rappelle que le contrat de prêt prévoit qu'il sera résilié et que les sommes prêtées deviendront immédiatement exigibles après notification faite aux emprunteurs d'une lettre recommandée avec accusé de réception.

Elle soutient qu'en l'espèce la déchéance du terme ne lui est pas opposable car elle ne lui a pas été notifiée conformément au contrat de prêt et qu'ainsi la créance de la banque n'était pas exigible à son égard lorsque la caution a réglé la banque.

Elle fait valoir que la caution n'a pas vérifié l'exigibilité de la créance et n'a pas avisé le débiteur principal de son paiement avant qu'il intervienne et qu'elle l'a ainsi privée de la possibilité de faire valoir le défaut inhérent à la dette et qu'en application de l'article 2308 du code civil elle ne peut avoir de recours à son égard.

Elle fait valoir au surplus que si la CEGC prétend agir sur le fondement de l'article 2305 du code civil elle ne justifie pas du paiement effectué la quittance subrogative étant insuffisante dès lors que la caution fait partie du même groupement que la Caisse d'épargne.

La CEGC rappelle qu'elle agit sur le fondement de l'article 2305 du code civil et qu'elle a ainsi droit au remboursement du montant garanti et payé au créancier augmenté de plein droit de l'intérêt au taux légal à compter du paiement. Elle fait valoir qu'exerçant son recours personnel, la débitrice ne peut lui opposer utilement les exceptions tirées de la conclusion ou de l'exécution du contrat principale qu'elle peut opposer au créancier principal.

Elle ajoute au demeurant qu'elle a bien averti la débitrice du règlement effectif au prêteur de deniers par lettre recommandée avec accusé de réception.

Elle soutient qu'en tout état de cause le défaut allégué de l'accusé de réception de la lettre recommandée valant déchéance du terme ne concerne que les relations entre la banque et Mme [L] ne peut lui être opposée.

Elle s'oppose à l'application de l'article 2308 du code civil qui ne concerne que le recours subrogatoire et fait observer qu'en l'espèce il n'est justifié d'aucune extinction de la créance avant la date de la quittance subrogative et conteste le défaut d'exigibilité de la dette.

Selon l'article 2305 du code civil en sa version applicable au présent litige, la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur, ce recours ayant lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle.

L'article 2306 du même code prévoit, quant à lui, que la caution qui a payé la dette est subrogée dans tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur.

Le cautionnement étant l'engagement de payer la propre dette du débiteur, il est donc un accessoire de la dette garantie, dépendant de cette dette, qu'il s'agisse de son existence, de sa validité, de son étendue, des conditions de son exécution ou de son extinction.

Le créancier ne peut donc engager de poursuites à l'égard de la caution tant que la dette de celle-ci n'est pas exigible. La date d'exigibilité du cautionnement est généralement calquée sur celle de la dette principale de sorte que l'obligation de la caution est exigible lorsque celle du débiteur principal l'est aussi du fait du caractère accessoire du cautionnement.

L'exigibilité de la dette principale est une condition de l'obligation au paiement de la caution.

Ainsi la faute du prêteur quant aux modalités entreprises afin de prononcer la déchéance du terme du crédit consenti, en ce qu'elle entraîne des conséquences sur l'exigibilité de la créance du débiteur principal, peut utilement être opposée à la caution qui s'est acquittée d'une dette qui n'était pas exigible.

Quel que soit le recours choisi par la caution, personnel sur le fondement de l'article 2305 du code civil, ou subrogatoire sur le fondement de l'article 2306 du même code, le caractère accessoire de l'engagement de caution impose que la créance du débiteur principal soit exigible.

Par ailleurs, l'article 2308 alinéa 2 du même code dispose que lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu les moyens pour faire déclarer la dette éteinte, sauf son action en répétition contre le créancier.

Le défaut d'exigibilité de la dette principale n'est aucunement une cause d'extinction de la dette privant définitivement la caution de son recours à l'encontre du débiteur, néanmoins tant que la dette de celui-ci n'est pas exigible la caution qui a néanmoins payé n'est pas fondée à exercer son recours même personnel.

Toutefois en l'espèce il résulte des pièces versées aux débats et de l'aveu même de Mme [L] qu'à la suite de plusieurs échéances demeurées impayées elle a conformément aux dispositions de son contrat de prêt reçu une mise en demeure de régler la somme de 3107,51 euros avant le 16 octobre 2019 sous peine de déchéance du terme et ce par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 1er octobre 2019 reçue le 3 octobre 2019.

La Caisse d'épargne produit une seconde lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 octobre 2019 adressée à Mme [L] toujours domiciliée à la même adresse l'avisant du prononcé de la déchéance du terme ainsi que l'accusé de réception faisant état d'une présentation le 2 novembre 2019 et d'une distribution le 7 novembre.

Si cet accusé de réception comporte une signature distincte du précédent, Mme [L] se contente d'indiquer que cette lettre recommandée a été remise à son domicile à une personne qu'elle ne connait pas.

Dès lors que ce courrier a été adressé avec accusé de réception par l'intermédiaire des services postaux, il n'appartient pas à l'expéditeur de justifier que ce courrier a été réceptionné par le destinataire, la signature de l'accusé de réception valant présomption de cette réception, à charge pour celui qui la conteste de rapporter la preuve que la personne qui a apposé sa signature n'était pas habilitée pour le faire.

En effet, ou Mme [L] au vu de la présentation d'une pièce d'identité a signé elle-même l'accusé de réception, ou il s'agit d'un tiers dûment habilité, puisque la fiabilité de l'envoi d'un recommandé avec accusé de réception repose sur la vérification de l'identité du destinataire ou de celle de son mandataire et de l'habilitation de ce dernier.

Mme [L] ne rapporte aucun élément susceptible de permettre de conclure qu'un tiers aurait établi un faux mandat pour retirer ce courrier, ce qui supposait d'une part une information sur l'existence de ce courrier et un intérêt qui, à l'évidence, n'existait que pour elle.

En conséquence les affirmations non étayées selon lesquelles elle n'aurait pas été destinataire du courrier de notification adressé en LRAR sont infondées.

L'accusé de réception signé par le destinataire ou son mandataire et la lettre recommandée a bien été délivrée à l'adresse de Mme [L] à une personne habilitée à la recevoir, faute d'éléments contraires produits aux débats.

Il convient de considérer que la déchéance du terme lui a été régulièrement notifiée comme l'a été la mise en demeure l'ayant précédée.

La CEGC a donc procédé au paiement d'une somme exigible en exécution de son acte de cautionnement.

Sur le montant des sommes dues

Mme [L] soutient que la société CEGC ne justifie pas avoir payé en qualité de caution le créancier en produisant la quittance délivrée dès lors qu'elle fait partie du même groupement que celui-ci .

La CEGC soutient qu'au contraire la quittance subrogative émane de la Caisse d'épargne des Hauts de France qui est une société distincte et qu'elle apporte ainsi la preuve du règlement du créancier.

Il est produit aux débats la quittance subrogative en date du 9 janvier 2020 par laquelle la Caisse d'épargne des Hauts de France reconnaît avoir reçu de la CEGC la somme globale de 44840,74 euros au titre du remboursement du prêt contracté par Mme [L].

Quand bien même les deux sociétés , le créancier et la caution appartiendrait au même groupe s'agissant de deux sociétés distinctes la quittance subrogative en date du 9 janvier 2020 établit l'exécution par la caution de son obligation et le paiement de la somme de 44840,74 euros.

Il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Mme [L] à payer à la CEGC la somme de 44840,74 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020.

Sur les délais de paiement

Mme [L] demande le report de sa dette à deux ans dès lors qu'elle entend effectuer la vente de biens personnels afin de solder sa dette.

A titre subsidiaire elle demande un échelonnement de sa dette dès lors que dirigeant un établissement de restauration son activité a été impacté par la crise sanitaire. Elle fait valoir que l'échelonnement proposé permettrait de restructurer sa dette sans mettre en péril sa situation personnelle.

La CEGC s'oppose à cette demande dès lors que Mme [L] qui indique posséder plusieurs immeubles sur [Localité 3] et dans le 92 et des parts d'une société exploitant un fonds de commerce sur [Localité 4] ne justifie pas cependant de ses revenus sociaux ou locatifs ni de la valeur de ses biens.

Elle fait valoir en outre qu'elle a déjà bénéficié de fait de larges délais ne lui ayant pas permis d'apurer sa dette par la vente de l'un de ses biens.

Mme [L] se contente de verser aux débats son avis d'imposition sur les revenus 2020 commun avec son époux faisant état d'un revenu annuel de 38775 euros en ce qui la concerne et de revenus locatifs déficitaires pour le couple et deux fiches de paye pour l'année 2022 faisant état d'un revenu mensuel de 4161,50 euros.

Elle ne justifie pas davantage de sa situation.

Ainsi elle n'établit pas qu'elle sera en mesure de vendre des biens personnels pour faire face au paiement de sa dette dans un délai de deux années, ne justifiant aucunement de son patrimoine.

Elle n'établit pas davantage être en mesure de régler sa dette par un échelonnement sur deux années et l'échelonnement par elle proposé laisserait subsister au bout de deux ans une dette de 27840,74 euros qu'elle ne justifie pas être alors en mesure de régler.

Il convient en conséquence de la débouter de sa demande de délais de paiement.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner Mme [L] aux entiers dépens d'appel mais de débouter la CEGC de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme la décision entreprise;

Y ajoutant,

Déboute Mme [L] de sa demande de délais ;

Déboute la SA Compagnie européenne de garanties et de cautions de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [S] [L] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/02091
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;21.02091 ?
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