ARRET
N°
S.A.R.L. TRAVAUX AGRICOLES NOEL - COUVERCELLE
C/
S.C.E.A. DU CHATEAU D'EAU
S.E.L.A.R.L. GRAVE - RANDOUX
CV
COUR D'APPEL D'AMIENS
CHAMBRE ÉCONOMIQUE
ARRET DU 24 JANVIER 2023
F N° RG 20/05478 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H45Q
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LAON EN DATE DU 13 OCTOBRE 2020
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A.R.L. TRAVAUX AGRICOLES NOEL - COUVERCELLE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Thierry BONNAFOUS de l'ASSOCIATION EFC, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN
ET :
INTIMEES
S.C.E.A. DU CHATEAU D'EAU, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
S.E.L.A.R.L. GRAVE - RANDOUX, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentées par Me Francis SONCIN, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN
DEBATS :
A l'audience publique du 08 Novembre 2022 devant Mme Cybèle VANNIER, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Janvier 2023.
GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES assistée de Mme Anne-Lise LEPLUMEY, greffier stagiaire
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Cybèle VANNIER en a rendu compte à la Cour composée en outre de :
Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,
Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,
et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 24 Janvier 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.
DECISION
Selon divers contrats verbaux la SCEA du Château d'eau ayant pour activité l'élevage de vaches laitières a confié à la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle, différentes prestations de service.
Par acte d'huissier en date du 1er avril 2019 la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle a fait assigner la SCEA du Château d'eau aux fins de la voir condamner au paiement d'une somme de 35135,54 euros au titre du règlement de factures non acquittées.
Par jugement du tribunal judiciaire de Laon en date du 13 octobre 2020, la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle a été déclarée recevable en sa demande et sa créance a été fixée à la procédure collective de la SCEA du Château d'eau pour un montant de 9576,38 euros. Elle a été déboutée de ses plus amples demandes, chacune des parties conservant la charge de ses propres dépens.
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 9 novembre 2020, la Sarl Travaux agricoles Noël- Couvercelle a interjeté appel de cette décision quant au montant de sa créance fixée à la procédure collective de la SCEA du Château d'eau et au rejet de ses demandes supplémentaires.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 18 janvier 2021 la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle demande à la cour d'infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau de fixer sa créance à la procédure collective de la SCEA du Château d'eau à la somme de 35135,54 euros et de condamner la SCEA du Château d'eau à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 1er février 2022, la SCEA du Château d'eau et la Selarl Grave-Randoux ès qualités de mandataire judiciaire de la SCEA demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris excepté en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens et statuant à nouveau de condamner la société Travaux agricoles Noël-Couvercelle à lui payer la somme de 2013 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens au titre de la première instance et à lui verser la somme de 2013 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel et de la condamner au paiement des dépens d'appel
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2022.
SUR CE,
La SARL Travaux agricoles Noël-Couvercelle soutient que dans l'hypothèse où les circonstances empêchent l'établissement d'une preuve écrite formelle comme en présence de longues relations professionnelles ayant pour usage la passation de commandes verbales, la preuve d'une obligation peut être rapportée par un simple commencement de preuve par écrit.
A ce titre elle fait valoir qu'outre les factures par elle établies elle a produit des chèques que le gérant et l'associé de la SCEA du Château d'eau lui ont adressés pour un montant total de 30000 euros et qui constituent un commencement de preuve par écrit de l'existence de la dette même s'ils se sont révélés sans provision.
Elle fait en outre observer que dans ses conclusions de première instance la SCEA du Château d'eau ne contestait pas la réalité ni le quantum des créances mais prétendait que deux factures (n° 4322 et n°4700) ne la concernaient pas mais concernaient l'entreprise individuelle de M [I], l'un de ses associés.
Cependant elle fait valoir qu'auparavant la SCEA du Château n'avait jamais contestée être débitrice de ces factures et surtout que l'entreprise individuelle de M. [I] n'a été créée que le 11 avril 2017 et immatriculée le 28 juin 2017 et ne pouvait ainsi être redevable d'une facture (n°4322) en date du 29 août 2016.
Elle soutient enfin que la SCEA ne peut prétendre n'être pas concernée par les travaux de pressage de paille dès lors qu'elle a auparavant déjà réglé une facture concernant ce type de service.
La SCEA du Château d'eau soutient que certaines des factures dont le règlement est sollicité portent sur des travaux qui n'ont pas été effectués pour son compte et qui ne présentent pas d'intérêt compte tenu de son activité.
Elle fait ainsi valoir qu'ayant pour activité l'élevage de vache laitière et la production de lait elle n'a jamais sollicité la société Travaux agricoles Noël-Couvercelle pour effectuer les travaux visés dans les deux factures contestées n° 4322 et 4700.
Elle fait valoir par ailleurs que les chèques versés aux débats ne peuvent être des commencements de preuve dès lors que le co-gérant de la SCEA, M. [G] [I] a développé sa propre activité exerçant une activité de soutien aux cultures, la SCEA cessant alors la partie de son activité nécessitant le pressage de paille et que les factures litigieuses concernent cette activité personnelle même si l'enregistrement de celle-ci a pris du temps et si les factures portent un libellé de leur destinataire erroné.
Elle conteste en outre l'existence d'une impossibilité morale de se procurer un écrit soulevée par la société Travaux agricoles Noël-Decourcelle.
En application des articles 1360 et 1361 du code civil il peut être suppléé à l'écrit par l'aveu judiciaire , le serment décisoire ou un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve notamment en cas d'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit ou s'il est d'usage de ne pas se procurer un écrit.
Le commencement de preuve par écrit est constitué selon l'article 1362 du code civil par tout écrit qui émanant de celui qui conteste un acte, rend vraisemblable ce qui est allégué.
En l'espèce il est justifié par la société Travaux agricoles Noël-Couvercelle de relations d'affaires anciennes avec la SCEA du Château d'eau au moyen de factures liant les deux sociétés depuis l'année 2013.
Au demeurant la SCEA du Château d'eau ne conteste pas cet état de fait et reconnaît devoir certaines des factures litigieuses même si elles ne sont pas davantage que celles contestées justifiées par un contrat.
Ces relations anciennes et l'usage instauré par les deux sociétés constituent effectivement l'impossibilité morale de se procurer un écrit légitimant le recours pour établir la preuve de l'obligation relative aux deux factures contestées à un commencement de preuve par écrit.
Il convient de rappeler que la SARL Travaux agricoles Noël-Couvercelle sollicite le paiement de la somme de 35135,54 euros en règlement de quatre factures établies au nom de la SCEA du Château d'eau :
- une facture n° 4322 en date du 29 août 2016 d'un montant de 7185,75 euros pour du pressage de paille
- une facture n° 4512 en date du 26 octobre 2016 d'un montant de 4518,80 euros pour des travaux d'ensilage de maïs
- une facture n° 4700 en date du 21 août 2017 d'un montant de 18373,41 euros pour du pressage de paille
- une facture n° 4923 en date du 21 novembre 2017 d'un montant de 5057,58 euros pour des travaux d'ensilage de maïs
Sur ces quatre factures seules les factures n° 4700 et 4322 euros sont contestées.
Pour autant la société Travaux agricoles Noël-Couvercelle produit trois chèques émis par les deux gérants de la SCEA en date des 21 juin et 8 décembre 2017 pour un montant total de 30000 euros.
Ces titres de paiement qui se sont révélés sans provision constituent manifestement un commencement de preuve de la dette de la SCEA du Château d'eau et une reconnaissance par les gérants de la SCEA d'une dette envers la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle .
A ce commencement de preuve par écrit s'ajoute le règlement de précédentes factures pour les mêmes causes et l'absence de toute contestation des sommes dues avant la procédure judiciaire et a fortiori la contestation de deux factures sur quatre.
Les deux factures litigieuses sont contestées au motif qu'elles seraient libellées à tort au nom de la SCEA alors qu'elles concerneraient l'entreprise individuelle créée par M. [G] [I].
Cependant la SCEA du château d'eau ne justifie aucunement de ces allégations et ce d'autant que l'une des factures contestées est bien antérieure à l'entrée en activité de l'entreprise de M. [G] [I]et à son immatriculation.
Il n'est pas davantage justifié du fait que la SCEA qui avait déjà commandé des travaux de paillage qu'elle avait réglés n'avait plus besoin de ces travaux en juin 2017 du fait de la création de la société personnelle de M. [G] [I].
Il convient en conséquence de considérer que la Sarl Travaux agricoles Noël Couvercelle rapporte bien la preuve de sa créance à l'encontre de la SCEA du Château d'eau et infirmant le jugement entrepris de fixer la créance de la Sarl Travaux agricoles Noël-Courvercelle au passif de la procédure collective de la SCEA du Château d'eau à un montant de 35135,54 euros.
Il convient de condamner la SCEA du Château aux entiers dépens de première instance et d'appel, de confirmer la décision entreprise quant au rejet de la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en première instance mais de condamner la SCEA du Château d'eau à payer à la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,
Statuant dans les limites de l'appel
Confirme la décision entreprise excepté sur le quantum des sommes dues et les dépens ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Fixe la créance de la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle au passif de la procédure collective de la SCEA du Château d'eau à la somme de 35135,54 euros ;
Condamne la SCEA du Château d'eau aux entiers dépens de première instance ;
Y ajoutant,
Condamne la SCEA du Château d'eau aux entiers dépens d'appel ;
Condamne la SCEA du Château d'eau à payer à la Sarl Travaux agricoles Noël-Couvercelle la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel.
Le Greffier, La Présidente,