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19/01/2023 | FRANCE | N°21/00416

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 19 janvier 2023, 21/00416


ARRET







[V]





C/



[Y]

[Z]

[Y]

[Y]



















COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU DIX NEUF JANVIER

DEUX MILLE VINGT TROIS





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/00416 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H7CH



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT

ET UN





PARTIES EN CAUSE :



Monsieur [M] [V]

né le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 10] ([Localité 10])

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]



Représenté par Me Sérène MEDRANO, avocat au barreau D'AMIENS

Ayant pour avocat pl...

ARRET

[V]

C/

[Y]

[Z]

[Y]

[Y]

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU DIX NEUF JANVIER

DEUX MILLE VINGT TROIS

Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/00416 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H7CH

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT ET UN

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [M] [V]

né le [Date naissance 3] 1984 à [Localité 10] ([Localité 10])

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représenté par Me Sérène MEDRANO, avocat au barreau D'AMIENS

Ayant pour avocat plaidant Me Guillaume DEMARCQ avocat au barreau d'AMIENS

APPELANT

ET

Monsieur [W] [Y]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Madame [D] [Z] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Madame [P] [Y]

née le [Date naissance 7] 1993 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Monsieur [T] [Y]

né le [Date naissance 6] 1992 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentés par Me Marie-pierre ABIVEN de la SCP DUMOULIN-CHARTRELLE-ABIVEN, avocat au barreau D'AMIENS

INTIMES

DEBATS :

A l'audience publique du 17 novembre 2022, l'affaire est venue devant Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre, Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L'ARRET :

Le 19 janvier 2023, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

*

* *

DECISION :

FAITS ET PROCÉDURE

M. et Mme [W] et [D] [Y] et leurs enfants Mme [P] [Y] et M.[T] [Y] ( ci après les consorts [Y]) et M.[V] sont voisins.

Le 21 juin 2015, les consorts [Y] ont retrouvé leur chien « Jazz » agonisant au fond de leur jardin alors qu'il venait de sortir de la maison. L'animal est mort le jour même au cabinet vétérinaire,d'un empoisonnement.

Soutenant que cet empoisonnement a été causé par M.[V] qui aurait répandu sur son terrain un produit toxique et interdit, les consorts [Y] l'ont fait assigner devant le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Amiens en indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement en date du 4 janvier 2021, le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Amiens a ainsi statué:

Déclare M.[V] responsable de la mort du chien « Jazz » ;

Condamne M.[V] à payer à M.[W] [Y] la somme de 2127,60  euros au titre du préjudice matériel ;

Condamne M.[V] à payer aux consorts [Y] la somme de 4000 euros au titre du préjudice moral ;

Condamne M.[V] à payer aux consorts [Y] la somme de 1200 euros sur le fondement sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M.[V] aux dépens.

M.[V] a interjeté appel de cette décision le 15 janvier 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 juin 2022 et l'affaire fixée pour être plaidée le 17 novembre 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 12 octobre 2021, M.[V] demande à la cour, infirmant la décision entreprise de:

Dire que la responsabilité de M.[V] est pas établie ;

Débouter les consorts [Y] de la totalité de leurs demandes présentées en première instance et en appel ;

Les condamner à lui payer la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il soutient que les consorts [Y] n'apportent aucun élément de nature à établir que leur chien a été empoisonné sur son terrain en ingérant de l'Alcicarde [S] que lui même aurait utilisé alors que les pièces qu'il produit établissent qu'il était en congés lorsque les faits se sont produits et qu'il avait d'ailleurs emmené avec lui son chien pour ne pas le laisser seul. Il précise qu'une perquisition effectuée à son domicile n'a pas permis de retrouver trace de ce produit toxique, que le rapport de l'ONEMA sur lequel s'appuient les consorts [Y] n'est nullement catégorique étant en outre relevé que l'ONEMA a été dissoute en 2016 à raison de plaintes relatives à son fonctionnement.

Il ajoute que depuis 2010 ses voisins ont multiplié les plaintes à son encontre, procédures qui ont toutes été classées.

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 8 mars 2022, les consorts [Y] demandent à la cour de

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de M.[V] et l'a condamné au règlement d'une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens ;

Réformer le jugement en ce qu'il a limité l'indemnisation des consorts [Y] à 6.127,60 euros tous préjudices confondus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant

Condamner M.[V] à verser aux consorts [Y] une somme de 3.127,60 euros en réparation de leur préjudice matériel ;

Condamner M.[V] à verser aux consorts [Y] une somme de 6.000 euros au titre de leurs préjudices affectif et moral ;

Condamner M.[V] à verser aux consorts [Y] la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et au titre de l'instance d'appel ;

Condamner M.[V] aux dépens de l'instance d'appel.

Ils exposent que l'autopsie du chien au cours de laquelle une feuille morte a été retrouvée dans son estomac, a conclu à une empoisonnement. L'analyse des prélèvements a conclu à la présence d'Aldicarbe [S] qui est une substance active de produit phytosanitaire interdit en France depuis 2003, avec dérogation pour la culture des betteraves jusqu'en 2007.

Ils indiquent que ce produit chimique, employé par M.[V] autour de sa volière à canards d'appel pour éloigner les rats, a atteint leur compost situé le long de la clôture. Lors de leur enquête les gendarmes intervenus sur place ont relevé de fortes odeurs de produits chimiques et l'huissier de justice a noté que près du compost les orties étaient complètement courbées avec aggravation en seulement 6 jours.

L'ONEMA a constaté les dégâts, confirmant l'usage du [S] par les chasseurs de gibier d'eau pour éloigner les nuisibles et relevé le non respect de la réglementation relative à la zone de traitement.

Ils considèrent que leur chien est mort d'un empoisonnement par ingestion de produit chimique et qu'il est établi par les constats et rapports que ce produit a été dispersé depuis le terrain de M.[V].

Ils relèvent que M.[V] n'apporte aucune information sur le produit qu'il a utilisé, refusant de donner son nom et qu'il a quitté son terrain avec son propre chien pour éviter de l'exposer, qu'il importe peu que le produit ne soit plus disponible à la vente. La perquisition vaine ne peut être retenue dès lors qu'elle a eu lieu plusieurs mois après les faits et après l'audition à la gendarmerie.

En considération de ces éléments qui établissent que le chien est mort d'ingestion de produits chimiques dispersés par M.[V] sur son terrain, c'est à lui, par application de l'article 1353 du code civil, d'apporter la preuve que le produit qu'il a utilisé ne peut avoir causé le dommage. Ce qu'il ne fait pas.

Ils demandent à la cour de réévaluer leur préjudice matériel en y incluant les frais de soins et de dressage et leur préjudice moral qui s'est trouvé aggravé en raison notamment de la lourdeur de l'appareil judiciaire qui n'a pas permis une enquête efficace.

MOTIVATION

1.Sur la responsabilité

Vu l'article 1242 du code civil

C'est par une exacte appréciation des faits et éléments qui lui étaient soumis et qui sont les mêmes que ceux soumis à la cour, et par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a considéré que dès lors que la responsabilité de M.[V] était recherchée sur le fondement de la responsabilité des choses dont il a la garde, en l'espèce son jardin et les traitements utilisés sur celui-ci, il importait peu qu'il fût en vacances lorsque l'empoisonnement s'est produit.

Il a exactement retenu des analyses, observations et constats effectuées tant par le vétérinaire, le laboratoire, les gendarmes, l'huissier, l'ONCFS et l'ONEMA (qui n'a pas été dissoute comme l'affirme M.[V] dans ses conclusions en raison de dysfonctionnement mais qui a fusionné avec d'autres agences pour former l'agence française de la biodiversité) que la mort du chien par ingestion d'Aldicarbe était concomitante avec le traitement de son jardin par M.[V] et que par ruissellement le produit s'est trouvé entraîné sur le terrain de M. et Mme [Y], atteignant le compost sur lequel se trouvaient des feuilles, l'une de celle-ci ayant été retrouvée dans l'estomac du chien.

Le tribunal a donc justement retenu la responsabilité de M.[V].

2.Sur le préjudice matériel

Pas plus à hauteur de cour que devant le premier juge, les consorts [Y] ne justifient du montant des frais de dressage et de soins dont ils demandent le remboursement au titre du préjudice matériel.

Les justificatifs d'achat du chien et des frais de vétérinaires étant établis au nom de M.[Y], le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M.[V] à lui payer la somme de 2127,60 euros.

3.Sur le préjudice moral

En considération des photographies produites, des attestations et des courriers versés aux débats qui établissent le profond attachement de chacun des quatre membres de la famille [Y] au chien empoisonné, il convient de confirmer le jugement qui a justement évalué à 1000 euros le préjudice moral de chacun d'entre eux et a condamné M.[V] au paiement de 4000 euros de dommages-intérêts pour ce préjudice.

4.Sur les frais du procès

M.[V] qui succombe sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamné aux dépens de première instance.

L'équité commande d'allouer aux consorts [Y] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de confirmer le jugement qui a condamné M.[V] au paiement de la somme de 1200 euros de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant

Condamne M.[V] à payer aux consorts [Y] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M.[V] aux dépens

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00416
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;21.00416 ?
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