La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2022 | FRANCE | N°21/04849

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 15 septembre 2022, 21/04849


ARRET

























[C]









C/







[Adresse 7]

Procureur de la République

S.E.L.A.R.L. GRAVE - RANDOUX



















COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022





N° RG 21/04849 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IHQ5





JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-QUENTIN EN DAT

E DU 17 SEPTEMBRE 2021



APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC



EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL





PARTIES EN CAUSE :





APPELANT





Monsieur [L] [C]

[Adresse 2]

[Localité 1]





Représenté par Me Nathalie CARPENTIER de la SCP ANAJURI...

ARRET

[C]

C/

[Adresse 7]

Procureur de la République

S.E.L.A.R.L. GRAVE - RANDOUX

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/04849 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IHQ5

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SAINT-QUENTIN EN DATE DU 17 SEPTEMBRE 2021

APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTERE PUBLIC

EN PRESENCE DU REPRESENTANT DE MADAME LE PROCUREUR GENERAL

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [L] [C]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Nathalie CARPENTIER de la SCP ANAJURIS, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

ET :

INTIMES

Madame [J] [Y]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentée par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 80

Plaidant par Me VANOVERSCHELDE, avocat au barreau de LILLE

Monsieur Procureur de la République

[Adresse 8]

[Localité 1]

S.E.L.A.R.L. GRAVE - RANDOUX, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société « CONCEPTHOUSE », agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-brigitte ALDAMA substituant Me Frédéric MANGEL de la SELARL MANGEL AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-QUENTIN

DEBATS :

A l'audience publique du 24 Mars 2022 devant :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

MINISTERE PUBLIC : M. Alain LEROUX, Avocat Général

PRONONCE :

Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 15 septembre 2022.

Le 15 septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par jugement du 5 septembre 2017, le tribunal de commerce de Saint-Quentin a :

- ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la SARL Concepthouse, sise à [Localité 1], ayant pour objet une activité de travaux d'électricité générale, de rénovation de l'habitat, de décoration, plâtre, construction et conseil en construction, dont la gestion était confiée à Monsieur [L] [C], puis à Madame [J] [Y];

- fixé la date provisoire de cessation des paiements au 5 mars 2016;

- et désigné la SELARL Grave-Randoux, en qualité de mandataire liquidateur.

Par jugement contradictoire du 17 septembre 2021 (n° 2020-019080-1), le tribunal de commerce de Saint-Quentin a notamment :

- dit qu'au regard des articles 693 et 855 du code de procédure civile, aucune des irrégularités soulevées ne faisant grief ni à Mme [Y], ni à M. [C], les moyens soulevés ne sont pas fondés;

- débouté Mme [Y] et M. [C] de leurs moyens, fins et conclusions à ce titre;

- constaté que le rapport du juge-commissaire a été régulièrement établi le 20 juillet 2020;

- dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise graphologique;

- dit n'y avoir lieu à sursis à statuer;

- débouté Mme [Y] et M. [C] de ce chef;

- dit M. le procureur de la République, recevable et fondé en ses demandes, fins et prétentions;

- condamné in solidum Mme [Y], en sa qualité de dirigeante de droit, et M. [C], en sa qualité de dirigeant de droit entre le 17 novembre 2015 et le 6 juillet 2016, sur le fondement de la responsabilité pour insuffisance d'actif, à payer à la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concepthouse, la somme de 50.000 €;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement;

- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure.

Par déclaration au greffe du 1er octobre 2021, M. [C] a interjeté appel (n° RG 21/04849) de ce jugement.

Par déclaration au greffe du 27 novembre 2021, Mme [Y] a interjeté appel (RG.21.05492) du même jugement.

Suivant ordonnance du 4 janvier 2022, le président de la chambre économique a ordonné la jonction des procédures n° RG 21/05492 et n° RG 21/04849, sous le n° RG 21/04849.

Par jugement contradictoire du 17 septembre 2021 (n° 2020-019079-1), le tribunal de commerce de Saint-Quentin a notamment :

- dit qu'au regard des articles 693 et 855 du code de procédure civile, aucune des irrégularités soulevées ne faisant grief à Mme [Y], les moyens soulevés ne sont pas fondés;

- débouté en conséquence Mme [Y] de ses moyens, fins et conclusions à ce titre;

- constaté que le rapport du juge-commissaire a été régulièrement établi le 20 juillet 2020;

- dit n'y avoir lieu à sursis à statuer;

- débouté Mme [Y] de ce chef;

- dit M. le procureur de la République, recevable et fondé en ses demandes, fins et prétentions;

- prononcé la faillite personnelle pour une durée de 7 ans de Mme [Y], ladite mesure emportant l'interdiction de diriger, gérer, administrer et contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale et artisanale, toute exploitation agricole et toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale, avec incapacité d'exercer une fonction publique élective pour une durée de 5 ans;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement;

- ordonné les mesures de publicité prévues par la loi et le décret;

- et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure.

Par déclaration au greffe du 27 novembre 2021, Mme [Y] a interjeté appel (RG. 21/05483) de ce jugement, objet d'une instance distincte de la présente instance.

Aux termes de ses conclusions d'appelant remises le 29 novembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [C] demande à la cour de :

à titre principal,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il :

* fixe la période de sa gérance du 17 novembre 2015 au 6 juillet 2016 et celle de Mme [Y] à compter du 6 juillet 2016;

* dit que Mme [Y] a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif et/ou à son accroissement;

statuant à nouveau,

- constater :

* que les défendeurs n'ont pas été convoqués par lettre recommandée avec accusé de réception à la diligence du greffe du tribunal de Saint-Quentin;

* qu'il n'est pas justifié de la non réception par les dirigeants d'un courrier recommandé qui leur aurait été adressé par le greffe du tribunal de Saint-Quentin en vue de comparaître devant la présente juridiction et en conséquence pour suppléer cette situation, de la nécessité de recourir à la signification par voie d'assignation;

- dire, qu'en tout état de cause, en cas de citation des dirigeants par voie d'assignation, celle-ci ne peut être délivrée sur invitation du greffe du tribunal de commerce qu'à la requête du ministère public et non du président du tribunal de commerce;

- constater que l'exploit introductif d'instance a été signifié à la requête du président du tribunal de commerce de Saint-Quentin;

- juger que :

* l'absence de saisine régulière d'une juridiction est une fin de non-recevoir qui ne nécessite pas la preuve d'un grief;

* le tribunal de commerce de Saint-Quentin n'a pas été saisi régulièrement;

- prononcer la nullité si ce n'est l'irrecevabilité de l'acte introductif d'instance;

- condamner qui de droit à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel;

à titre subsidiaire,

si la fin de non-recevoir est rejetée et le jugement entrepris confirmé du chef de la régularité de la saisine de la juridiction,

1°) si la cour ne confirme pas la période de gérance de M. [C] fixée par les premiers juges du 17 novembre 2015 au 6 juillet 2016 et estime les actes de cessions et procès-verbaux y afférents entachés d'un doute quant à l'identité des signataires,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'expertise graphologique;

- ordonner une expertise graphologique à laquelle seront soumis les 2 défendeurs et qui prendra en considération l'ensemble des exemplaires de signatures de Mme [Y] versés aux débats;

- surseoir à statuer en l'attente du dépôt du rapport du graphologue;

en tant que de besoin,

- surseoir à statuer dans l'attente des résultats de la plainte pénale pour faux en signature déposée par me [Y];

2°) si la cour confirme la date de gérance de droit de M. [C] du 17 novembre 2015 au 6 juillet 2016 et confirme le jugement entrepris en ce qu'il le déboute de sa demande d'expertise graphologique,

- juger que :

* l'absence de déclaration de l'état de cessation de paiement de la société dans les 45 jours, l'absence de comptabilité et l'absence de collaboration avec les organes de la procédure, ne peuvent pas lui être imputées;

* la preuve n'est pas rapportée de ce qu'il aurait commis, durant sa période de gérance, des fautes de gestion qui auraient contribué ou aggravé une éventuelle insuffisance d'actif de la SARL Concepthouse, telle qu'elle apparaîtrait au 6 juillet 2016;

en tout état de cause,

- constater la carence de Mme la substitut du procureur de la République dans l'administration des preuves qui lui incombe;

en conséquence,

- débouter Mme la substitut du procureur de la République de toutes ses demandes et prétentions, à l'encontre de M. [R];

- condamner qui de droit à lui payer la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel;

à titre très infiniment subsidiaire,

si par extraordinaire, la cour de céans estimait ne pas devoir infirmer du chef des condamnations prononcées à l'encontre de M. [C],

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

- dit Mme [Y], en sa qualité de gérant de droit à compter du 6 juillet 2016, responsable de fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif ou à son aggravation;

- et l'a condamnée, in solidum avec M. [C] et (sic) aux dépens de première instance.

Aux termes de ses conclusions remises le 4 février 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, Mme [Y], formant appel incident, demande à la cour de:

infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger que le président du tribunal de commerce de Saint-Quentin est dépourvu d'intérêt à agir à son encontre;

- déclarer irrecevables le président du tribunal de commerce de Saint-Quentin, le procureur de la République et le liquidateur judiciaire en leurs demandes, sans examen du fond de l'affaire;

- débouter l'ensemble des parties, le procureur de la République, le ministère public et le liquidateur judiciaire de l'intégralité de leurs demandes;

à titre subsidiaire,

- juger que sa signature a été falsifiée sur le procès-verbal de nomination de gérante daté du 6 juillet 2016 ;

en conséquence,

- annuler ledit procès-verbal et, par voie de conséquence;

- dire et juger qu'elle n'a jamais été régulièrement nommée gérante de la SARL Concepthouse;

- rappeler, en tout état de cause, qu'il appartient à celui qui oppose ou revendique un acte argué de faux de rapporter la preuve de son authenticité;

- juger que M. [C], le procureur de la République, le ministère public et le liquidateur judiciaire échouent dans cette preuve ;

- débouter le procureur de la République, le ministère public et le liquidateur judiciaire de l'intégralité de leurs demandes ;

à titre plus subsidiaire,

- ordonner une expertise graphologique à laquelle seront soumis Mme [Y] et M. [C] afin d'étudier leurs signatures respectives, ainsi que celles figurant sur les pièces versées au débat et/ou toute autre pièce que l'expert jugerait utile;

- et, par voie de conséquence, surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert;

à titre infiniment subsidiaire,

si par impossible, la cour ne retenait pas les précédents moyens de contestation et invoquait la publication de la nomination de changement de gérance en dépit de l'absence de consentement de Mme [Y],

- juger :

* qu'elle n'était gérante, vis-à-vis des tiers, tels que le procureur de la République et le liquidateur judiciaire, qu'à compter du 21 février 2017, soit la date de l'enregistrement au greffe du tribunal du procès-verbal de sa nomination;

* qu'il n'est rapporté par le procureur de la République et le liquidateur aucune preuve d'actes volontaires, omissions volontaires, agissements de mauvaise foi, fautes de gestion, contributions à l'insuffisance d'actif ou au passif de la SARL Concepthouse, absences de coopération avec les organes de la procédure, défaut de tenue d'une comptabilité, déclaration tardive de cessation des paiements' de la part de Mme [Y] depuis sa nomination en tant que gérante le 21 février 2017 ;

- débouter en conséquence le procureur de la République, le ministère public et le liquidateur judiciaire de l'ensemble de leurs demandes ;

en tout état de cause,

- rejeter toutes demandes à son encontre, en ce qu'elle sont irrecevables et infondées;

- condamner solidairement M. [C] et la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités, à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Aux termes de ses conclusions remises le 14 février 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, Mme la Procureure générale près la cour d'appel d'Amiens requiert qu'il plaise à la cour de:

- dire et juger les appels recevables mais mal fondés, les rejeter ;

- dire et juger le ministère public recevable en ses conclusions d'intimé;

- confirmer les jugements N° 2020-019079-l et N° 2020-019080 rendus le 17 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Saint-Quentin en ce qu'ils condamnent in solidum Mme [Y] et M. [C] sur le fondement de la responsabilité pour insuffisance d'actif à verser la somme de 50.000 € à la SELARL Grave-Randoux, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Cconcepthouse;

- confirmer le jugement N° 2020-019079-l du 17 septembre 2021 du tribunal de commerce de Saint-Quentin en ce qu'il condamne Mme [Y] à une mesure de faillite personnelle pour une durée de sept ans;

- dire et juger que les dépens seront à la charge de Mme [Y] et de M. [C].

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 31 janvier 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concepthouse, demande à la cour de:

- juger que ni M. [C], ni Mme [Y] n'ont cru devoir déclarer l'état de cessation des paiements dans le délai requis;

- encore qu'ils se sont désintéressés du sort des créanciers de l'entreprise sans jamais entrevoir les moyens par lesquels, ils pourraient parvenir à enrayer la situation;

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions;

- confirmer le jugement querellé en son ensemble;

- débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions;

- condamner M. [C] et Mme [Y] à lui payer chacun la somme de 4.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'affaire a été fixée à bref délai pour plaider à l'audience du 24 mars 2022.

SUR CE

A titre liminaire , la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif , et que les « dire et juger » et les « constater » ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence , la cour ne statuera pas sur celles ci , qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

Sur les nullités de l'acte introductif d'instance et fin de non-recevoir

M.[C] soutient que les modalités de citation du dirigeant prévues par le législateur ne sont pas une saisine par voie d'assignation signifiée à la requête du président du tribunal mais dans un premier temps par lettre recommandée avec demande d'avis de réception envoyée par le greffe du tribunal ; qu'à supposer que cette lettre recommandée ne parvienne pas à son destinataire, il incombe au greffier en chef du tribunal de commerce d'inviter le ministère public en sa qualité de demandeur à l'instance à procéder par voie de citation judiciaire; qu'en l'espèce, la convocation ne pouvait pas être faite par voie de citation judiciaire par application de l'article R.631-4 du code de commerce, mais dans un premier temps par lettre recommandée à la diligence de M. le greffier du tribunal ; que les défendeurs ne pouvaient pas être cités par voie d'huissier qu'à la condition de ne pas avoir été destinataires du courrier recommandé avec accusé de réception adressé par le greffier en chef ; qu'en ce cas cette citation doit être signifiée à la requête du ministère public sur invitation du greffier en chef du tribunal de commerce ; qu'or l'exploit introductif d'instance du 02 juillet 2020 a été signifié à la demande de M. le président du tribunal de commerce ; que ce dernier n'a pas qualité à agir en sanctions contrairement au mandataire judiciaire et au ministère public ; que le défaut de saisine régulière du tribunal ne constitue par un vice de forme mais une fin de non-recevoir qui doit être accueillie sans avoir à justifier d'un grief ; que la saisine du tribunal de commerce de Saint Quentin n'étant pas régulière, l'appel est dépourvu d'effet dévolutif.

Mme [Y] fait valoir qu'il n'y a jamais eu de convocation par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, comme exigé par l'article R.631-4 du code de commerce ; qu'elle a reçu, le 29 juillet 2020, une citation à la requête du président du tribunal de commerce qui n'est pas compétent puisque qu'il n'a pas qualité de demandeur, que c'est le ministère public qui devait procéder à la signification ; que par conséquent le président du tribunal, le procureur de la République et le liquidateur judiciaire sont irrecevables en leurs demandes, sans examen au fond ; que, ce faisant, le président du tribunal de commerce s'est auto-saisi alors que l'-auto-saisine du tribunal est prohibée en matière de prononcé de sanctions, du type faillite personnelle ou interdiction de gérer ; que la fin de non-recevoir qu'elle soulève doit être accueillie sans qu'elle ait à justifier d'un grief.

La SELARL Grave Randoux, es-qualités, réplique que les parties s'appuient sur un avis de la Cour de cassation du 04 avril 2016 qui estime que lorsque le procureur de la République poursuit afin de sanctions le dirigeant, il procède par voie de requête, tandis que ce même dirigeant est convoqué par la voie d'une lettre recommandée avec accusé de réception et tant est qu'il ne soit pas touché, il revient alors au greffier du tribunal d'inviter le magistrat à agir par voie de signification ; qu'il s'agit d'un avis ; que chacun des débiteurs était présent à l'instance et à tout le moins représenté ; que M. [C] et Mme [Y] ont donc été touchés dans les temps de l'action par le contenu de la requête rédigée et déposée par Mme le procureur de la République ; que dans ces conditions il est difficile de voir l'ombre d'un grief occasionné.

Elle cite pour ce faire un arrêt de la [6] de cassation du 13 septembre 2016 n°14.10.927, rendu dans une affaire où la dirigeante soutenait que l'action en sanction était prescrite dès lors que si la requête avait été déposée au greffe avant l'expiration du délai de trois ans, seule l'assignation portée à sa connaissance interrompait la prescription. Elle précise que la Cour, pour rejeter le pourvoi, a considéré que l'article 2244 du code civil n'exige pas que l'acte interruptif de prescription soit porté à la connaissance du débiteur dans le délai de la prescription, « qu'ayant énoncé que le dépôt de la requête du ministère public est l'un des modes de saisine du tribunal aux fins de prononcé d'une sanction personnelle, la cour d'appel en a exactement déduit que cet acte constituait une demande en justice interruptive de prescription au sens de l'article 2241 du code civil ; que le moyen n'est pas fondé.

Elle fait valoir qu'en tout état de cause, jamais les défendeurs n'ont été en mesure de justifier se trouver dans le champ exonératoire du dispositif prévu à l'article 117 du code de procédure civile sans que les autres cas envisagés par les articles 693 et 855 du code de procédure civile ne puissent jamais secourir le défendeur devenu appelant faute de justification d'un quelconque grief ;

Le ministère public considère que le tribunal a, par une juste appréciation de fait et de droit, écarté l'argument de M.[C] et Mme [Y] tiré de la violation de l'article R.631-4 du code de commerce, en faisant observer que par application de l'article 651 alinéa 3 du code de procédure civile, le président avait demandé dans son ordonnance du 23 juin 2020 que la requête du procureur soit dénoncée par acte extra-judiciaire à M. [C] et Mme [Y] qui avaient été convoqués devant le tribunal à la date du 18 septembre 2020 et qu'ils n'avaient pas pu se tromper sur le demandeur à l'action ayant eux-mêmes répondu aux motifs soulevés par le procureur, de sorte que la procédure utilisée ne saurait leur faire grief puisqu'ils ont été en mesure de présenter leur défense.

L'article L.651-3 du code de commerce dispose que « Dans les cas prévus par l'article L.651-2, le tribunal est saisi par « le mandataire judiciaire », le liquidateur ou le ministère public.

L'article R.651-2 de ce code prévoit que «Pour l'application de l'article L.651-2 le tribunal est saisi selon le cas par voie d'assignation ou dans les formes et selon la procédure prévue à l'article R.631-4 »

Selon l'article R.631-4 de ce code, « Lorsque le ministère public demande l'ouverture de la procédure par requête, celle-ci indique les faits de nature à motiver cette demande. Le président du tribunal, par les soins du greffier, fait convoquer le débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à comparaître dans le délai qu'il fixe.

A cette convocation est jointe la requête du ministère public. »

Dans son avis n°16003 en date du 04 avril 2016, la Cour de cassation énonce que :

« Lorsque le ministère public saisit le tribunal d'une demande d'ouverture de procédure collective ou d'une demande de sanction, l'article R.631-4 du code de commerce, dans sa rédaction issue du décret du 30 juin 2014, prévoit la convocation du débiteur ainsi que celle du dirigeant d'une personne morale ou de l'une des personnes mentionnées à l'article L.653-1 du même code par lettre recommandée avec demande d'avis de réception envoyée par le greffe du tribunal.

Selon l'article R.662-1, 1° du code de commerce, les règles du code de procédure civile doivent recevoir application, à moins qu'il n'en soit disposé autrement dans le livre VI du code de commerce.

Aucune disposition de ce livre ne régit l'hypothèse où la convocation par lettre recommandée avec demande d'avis de réception revient au greffe sans avoir atteint son destinataire.

Il en résulte que, dans ce cas, les dispositions du code de procédure civile s'appliquent.

Selon l'article 670-1 de ce code, en cas de retour au secrétariat de la juridiction d'une lettre de notification dont l'avis de réception n'a pas été signé dans les conditions prévues par l'article 670, c'est-à-dire par son destinataire ou par une personne munie d'un pouvoir à cet effet, il appartient au greffier d'inviter la partie à procéder par voie de signification.

Il s'ensuit que, dans l'hypothèse du retour de l'avis de réception de la lettre de convocation adressée, en application de l'article R.631-4 du code de commerce, non signé dans les conditions prévues par l'article 670 du code de procédure civile. Il incombe au greffier d'inviter le ministère public, demandeur à l'instance, à procéder par voie de signification.

Il ne peut être suppléé à l'accomplissement de cette formalité par l'exercice de la simple faculté offerte au juge par l'article 471 du code de procédure civile de faire procéder à une nouvelle citation lorsque le défendeur ne comparaît pas.

En conséquence,

LA COUR EST D'AVIS QUE

Lorsqu'en application de l'article R.631-4 du code de commerce, le président du tribunal fait convoquer, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, un dirigeant de personne morale et que l'avis de réception de la lettre retourné au greffe n'a pas été signé dans les conditions prévues à l'article 670 du code de procédure civile, il incombe au greffier d'inviter le ministère public, demandeur à l'instance, à procéder par voie de signification.

Il ne peut être suppléé à l'accomplissement de cette formalité par l'exercice de la simple faculté offerte au juge par l'article 471 du code de procédure civile de faire procéder à une nouvelle citation lorsque le défendeur ne comparaît pas. »

L'article R.651-2 renvoie aux formes et à la procédure de l'article R.631-4, de sorte que le ministère public qui agit en responsabilité pour insuffisance d'actif contre le dirigeant d'une personne morale saisit le tribunal de commerce par requête.

En l'espèce, il ressort de la pièce n°26 du dossier de M. [C] intitulé « acte de saisine du 02 juillet et requête et ordonnance y annexées », que le tribunal de commerce de SAINT QUENTIN a été saisi par requête du ministère public en date du 25 mars 2020 d'une demande de sanction patrimoniale (action en responsabilité pour insuffisance d'actif) à l'encontre de Mme [J] [Y] et M. [L] [C], déposée au greffe de cette juridiction, et ce conformément aux dispositions des articles R.651-2 et R.631-4 du code de commerce qui prévoient la saisine du tribunal par requête, la requête du ministère public déposée au greffe constituant l'acte de saisine du tribunal.

Par ordonnance en date du 23 juin 2020 y annexée, le président du tribunal de commerce a, au visa de la requête du ministère public, dit qu'à la diligence de M. le greffier, seront signifiés aux intéressés la présente ordonnance, la requête du procureur de la République et les pièces jointes à ladite requête, et qu'il leur sera donné citation d'avoir à comparaître devant le tribunal de commerce à l'audience du 18 septembre 2020 à 14 :30.

Les dispositions de l'article R.631-4 du code de commerce n'ont certes effectivement pas été respectées en ce qu'il n'a pas été procédé, à la suite du dépôt de la requête, à la convocation des défendeurs qualifiés de dirigeants de la personne morale, la SARL Concepthouse, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception envoyée par le greffe du tribunal.

Pour autant, le président du tribunal de commerce de SAINT QUENTIN a ordonné la signification, à la diligence du greffier, à M. [C] et Mme [Y], de la requête de Mme le procureur de la République en date du 25 mars 2020 et des pièces jointes, et leur citation à comparaître à l'audience du 17 septembre 2014.

Ainsi, il a été procédé à la signification de la requête et des pièces jointes et à la citation par acte extrajudiciaire régularisée à la demande du président du tribunal de commerce de SAINT QUENTIN en date du 02 juillet 2020.

Toutefois, cet acte n'est pas l'exploit introductif d'instance, puisque la saisine du tribunal de commerce s'opère par requête du ministère public, en l'occurrence le substitut près le tribunal de grande instance de SAINT QUENTIN, lequel a qualité pour agir, de sorte qu'aucune fin de non-recevoir n'entache l'acte de saisine.

L'acte de saisine n'est pas davantage affectée d'irrégularité par le fait que la signification de la requête avec convocation a été faite à la demande du président du tribunal de commerce de SAINT QUENTIN.

Au demeurant, l'emploi de la signification de la requête et des pièces jointes avec citation, faite à la demande du président du tribunal de commerce, à la place de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, est régulière, compte tenu de la prééminence de la signification en termes de garanties de présentation, eu égard aux modalités de signification propres aux significations par actes d'huissier de justice incluant l'obligation de tout tenter pour signifier l'acte à personne et à défaut de relater les diligences accomplies pour effectuer cette signification à personne.

M. [C] et Mme [Y] ont d'ailleurs été touchés par cet acte puisqu'ils étaient représentés à l'audience du 18 septembre 2020 ; l'affaire a été renvoyée d'audience en audience pour être plaidée et mise en délibéré le 02 juillet 2021.

Dès lors que l'acte de saisine du tribunal que constitue la requête émane du ministère public qui dispose de la qualité à agir en responsabilité le dirigeant pour insuffisance d'actif, la saisine est régulière et aucune fin de non-recevoir n'est encourue.

Il convient, dans ces conditions, de débouter M. [C] et Mme [Y] de leur demande respective tendant à la nullité de l'acte pour l'un et à l'irrecevabilité des demandes pour l'autre.

Sur la qualité de dirigeant de Mme [Y]

Mme [Y] conteste sa qualité de dirigeante de la SARL Concepthouse de sorte qu'elle ne saurait être condamnée à la moindre sanction pour cause de fautes de gestion, expliquant que sa signature a été falsifiée sur le procès-verbal de nomination de gérante daté du 06 juillet 2016, enregistré au greffe que le 21 février 2017, ni l'acte de cession de parts, et ignorait totalement leur existence.

M. [C] réplique qu'il a démissionné de ses fonctions de gérant le 06 juillet 2016 ainsi qu'il ressort de l'assemblée générale de cette date et du procès-verbal alors dressé ; qu'à partir de cette date, Mme [Y], signataire du procès-verbal d'assemblée générale des associés du 06 juillet 2016, a été désignée gérante en ses lieu et place, étant et pour cause, parfaitement informée de cette démission ; qu'elle a racheté, ce même jour, pour l'euro symbolique, ses parts sociales, et a été désignée gérante en ses lieu et place; qu'à la simple analyse des propres pièces de Mme [Y], la cour constatera la multiplicité des graphologies de signatures, dont celle-ci atteste pourtant bien être l'auteur.

Aux termes de l'article 287 du code de procédure civile, « Si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres. »

L'article 288 de ce code dispose qu'« il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture.

Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l'une des parties, qu'ils aient été émis ou non à l'occasion de l'acte litigieux. »

Il est admis qu'il appartient à celui qui se prévaut de l'acte de prouver que l'acte a bien été écrit ou signé par la personne à laquelle on l'oppose (cass.1ère civ. 05 janvier 1983)

Pour justifier de la falsification de sa signature, Mme [Y] verse aux débats :

Copie de sa pièce d'identité en date du 08 février 2016

Copie de son permis de conduire en date du 06 novembre 2000

Copie des statuts et déclaration de bénéficiaire effectif d'Engineering Méthod datés du 27 août 2018

Copie du dépôt d'un procès-verbal de plainte pour faux et usage de faux du 15 septembre 2020

Pour démontrer l'existence d'une multiplicité de graphologie dans la signature de Mme [Y], M. [C] produit de son côté :

Copie d'un acte de cession du 24 juillet 2014 de parts sociales auquel il n'est pas partie,

Copie des statuts de la société Synergelec du 02 mai 2015 auquel il est partie,

Copie d'un procès-verbal d'assemblée générale d'associés du 02 mai 2015,

Copie d'un procès-verbal d'assemblée des associés du 24 juillet 2014 auquel il n'est pas partie,

Copie d'un procès-verbal de modification de l'objet social de la SAS RB Partners auquel il n'est pas partie,

Il résulte de l'examen comparatif de la signature qui figure sur le procès-verbal d'assemblée générale du 06 juillet 2016 litigieux d'une part, et des signatures figurant sur les pièces produites par chacune des parties, que :

si la graphologie de la signature de Mme [Y] a évolué, elle présente toutefois des similitudes entre elles à compter de février 2016 en ce qu'elle est constituée du nom [Y], facilement reconnaissable, entouré d'une boucle qui part du « e » final et se termine par un trait soulignant ce nom sur les différents documents produits par Mme [Y], avec un tracé plus rond ;

elle diverge totalement de celle qui est apposée le 06 juillet 2016 sur le procès-verbal et l'acte de cession de parts litigieux, les documents litigieux où le nom [Y] est beaucoup moins lisible que celles figurant sur les documents produits par M. [C] dont le tracé est sûr alors que celui de la signature sur le document du 06 juillet 2016 est hésitant, notamment en ce qui concerne la lettre « l » en majuscule en début de signature et le « a » qui la suit ; ces deux lettres sont d'ailleurs espacées sur les documents versés en comparaison par Mme [Y] alors qu'elles sont collées sur la signature contestée ; les deux autres « l » ont chacune une boucle sur le procès-verbal du 06 juillet 2016 alors qu'ils sont tracés sous la forme d'un trait, sur les autres pièces produites par l'appelante ;

les documents produits par M. [C] pour justifier de la multiplicité des signatures de Mme [Y] sont par ailleurs tous antérieurs à février 2016.

Au surplus les signatures attribuées à Mme [Y] sur le procès-verbal d'assemblée générale et l'acte de cession de parts sont totalement différentes l'une de l'autre alors que les actes sont tous deux datés du 06 juillet 2016.

Il résulte de ces constatations, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise en écriture et signature, que la signature figurant tant sur le procès-verbal d'assemblée générale et l'acte de cession de parts sociales du 06 juillet 2016, comporte une signature qui a été imitée, de sorte que la désignation de Mme [Y] en qualité de gérante à compter du 06 juillet 2016 en remplacement de M. [L] [C] en résultant n'est pas établie.

Il convient, en conséquence, de débouter le ministère public et par suite la SELARL Grave-Randoux de leurs demandes à l'encontre de Mme [J] [Y].

Sur les fautes de gestion

Le ministère public et la SELARL Grave Randoux reprochent à M. [C] de ne pas avoir déclaré l'état de cessation des paiements dans le délai requis, lequel est corroboré, selon eux, par les déclarations de créances de différents fournisseurs ainsi que par l'endettement auprès du SIE et de l'URSSAF, ce qui démontre l'existence d'une situation obérée depuis 2015.

Le mandataire liquidateur ajoute que le désintérêt porté au sort des créanciers de l'entreprise est une faute de gestion.

M. [C] réplique qu'il ne suffit pas d'alléguer un éventuel dépôt tardif de déclaration de cessation de paiement ; que la preuve que ce retard n'est pas dû à de la simple négligence doit être rapportée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce; que se prévalant de sa démission le 06 juillet 2016, il ne peut lui être reproché, comme faute de gestion, le refus de collaboration avec des organes de la procédure collective, l'absence de communication aux organes de la procédure collective de la liste des créanciers et l'absence de déclaration de cessation de paiement dans les 45 jours ; que la preuve de ce qu'il aurait, durant son mandat de gestion venu à terme le 06 juillet 2016, commis des fautes de gestion ayant contribué à une éventuelle insuffisance d'actif ou à son aggravation, et la preuve de cette insuffisance d'actif ou de son aggravation au 06 juillet 2016, ne sont pas rapportées ; que les factures invoquées n'y suffisent pas, ce d'autant qu'elles ont été émises à une date extrêmement proche de sa démission de ses fonctions de gérant et de la cession des parts sociales.

L'article L. 651-2 du code de commerce dispose que : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la personne morale, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée. »

Comme l'a rappelé, à bon droit, le tribunal :

- la responsabilité pour insuffisance d'actif du dirigeant d'une personne morale peut être engagée à la demande du liquidateur s'il est démontré :

L'existence d'une insuffisance d'actif,

L'existence de fautes de gestion,

Un lien de causalité entre les fautes et l'insuffisance d'actif ;

la jurisprudence retient un certain nombre d'exemples de fautes de gestion, parmi lesquels :

L'absence de comptabilité ou la tenue d'une comptabilité irrégulière

Un compte d'associé débiteur

Le défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements

La poursuite d'une exploitation déficitaire.

Le tribunal de commerce a, également, rappelé, à bon droit que l'insuffisance d'actif résulte d'un écart négatif entre l'actif et le passif de la personne morale peu important que ces deux valeurs soient exactement chiffrées ; qu'il suffit que l'insuffisance d'actif soit certaine, peu important que le passif et l'actif soit exactement chiffrées au jour où la juridiction statue.

En l'espèce, le passif déclaré s'élève à la somme de 82.551,46 € pour un actif n'ayant pu être recensé à ce jour ainsi qu'il résulte du rapport du mandataire liquidateur joint à la requête du ministère public.

Il ne peut être retenu à l'encontre de M. [C] l'absence de collaboration avec les organes de la procédure collective dans la mesure où cette faute de gestion ne peut lui être imputable puisque la SELARL Grave-Randoux s'est adressée, pour obtenir la remise de document ou information nécessaire au bon déroulement de la procédure, à Mme [Y] considérée comme dirigeante de droit au moment de l'ouverture de la procédure collective.

En revanche, il est constant que par jugement en date du 05 septembre 2017, le tribunal de commerce de SAINT QUENTIN a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Concepthouse et fixé la date de cessation des paiements au 05 mars 2016, de sorte que l'absence de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours peut être invoquée à l'encontre de M. [C].

Le ministère public et le mandataire liquidateur se prévalent de l'existence des factures impayées suivantes :

Serem, factures impayées du 03 mars 2016, 21 mars 2016, 01er juillet 2016, 15 juillet 2016 pour 18.072 €,

Docks de l'Oise, solde factures des 31 mars 2016, 30 avril 2016, 31 mai 2016, 30 juin 2016 pour 3.606,09 €,

J2M Entreprise, facture du 31 mars 2016 pour 14.513,40 €,

Kpmg, facture à compter du 31 mars 2016 pour 1.893,85 €,

Ppg Distribution, factures des 30 avril 2016, 31 mai 2016, 27 juin 2016 pour 15.014,26 €.

Ils font également état de dettes fiscales au SIE de SAINT-QUENTIN pour un montant de 5.551 € (IS de mars 2015 à février 2016), au SIE de ROUBAIX SUD pour 4.799 € (TVA Taxation d'office, amendes et pénalités) de mars à octobre 2015 ' CFE 2016), de dettes sociales auprès de l'Urssaf de [Localité 9] pour 21.650,12 € (cotisations à compter du 2ème trimestre 2016), BTP congés intempéries pour 11.314,64 € (cotisations du 2ème trimestre 2016 au premier trimestre 2017).

Outre le fait que certaines de ces créances concernent la période pour laquelle M .[C] reconnaît avoir été gérant de la SARL Concephouse, dans la mesure où le procès-verbal d'assemblée générale du 06 juillet 2016 dont il se prévaut pour preuve de son remplacement par Mme [Y] dans ces fonctions, ne permet pas de démontrer ce changement de gouvernance de cette personne morale, il reste donc gérant de droit et partant responsable des dettes postérieures au 06 juillet 2016.

Force est de constater que M. [C] ne justifie pas qu'à l'époque de l'exigibilité desdites créances, la SARL Concepthouse disposait de l'actif disponible pour les couvrir, comme le remarque à juste titre la SELARL Grave-Randoux qui souligne également, à bon droit, que le désintérêt porté au sort des créanciers de l'entreprise est également une faute de gestion.

Dès lors, ce retard dans la déclaration de l'état de cessation des paiements constitue une faute de gestion ayant contribué à l'accroissement du passif de la SARL Concepthouse qui aurait été moindre si M. [C] avait procédé à cette déclaration dans le délai imparti, celle-ci ne pouvant résulter d'une simple négligence du dirigeant eu égard à la nature fiscale et sociale de certaines d'entre elles, et ce à hauteur de la somme de 50.000 €.

Il convient, dans ces conditions, infirmant le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum M. [L] [C] et Mme [J] [Y] à contribuer partiellement à l'insuffisance d'actif, de condamner M. [L] [C], seul, à payer à la SELARL Grave Randoux es-qualités de liquidateur de la SARL Concepthouse la somme de 50.000 €.

Sur les autres demandes

M. [C], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel, et débouté de sa demande d'indemnité de procédure.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme [Y] et de la SELARL Grave Randoux les frais irrépétibles non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel, qu'il convient d'évaluer à la somme de 2.000 € chacun.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné in solidum Mme [Y], en sa qualité de dirigeante de droit, et M. [C], en sa qualité de dirigeant de droit entre le 17 novembre 2015 et le 6 juillet 2016, sur le fondement de la responsabilité pour insuffisance d'actif, à payer à la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concepthouse, la somme de 50.000 € ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé, y ajoutant

DEBOUTE le ministère public et la SELARL Grave-Randoux, es-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concephouse de leurs demandes à l'encontre de Mme [J] [Y],

CONDAMNE M. [L] [C], en sa qualité de dirigeant de droit de la SARL Concepthouse, sur le fondement de la responsabilité pour insuffisance d'actif, à payer à la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concepthouse, la somme de 50.000 € ;

CONDAMNE M. [L] [C] à payer à Mme [J] [Y] et à la SELARL Grave-Randoux, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Concepthouse, la somme de 2.000 € chacune, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE M. [L] [C] aux dépens d'appel.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/04849
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;21.04849 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award