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21/07/2022 | FRANCE | N°20/04406

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 21 juillet 2022, 20/04406


ARRET



















[N]





C/



CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'[Localité 3]









DB





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 21 JUILLET 2022





N° RG 20/04406 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H3DC



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS EN DATE DU 20 JUILLET 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANT





Monsieur [M]

[N]

[Adresse 2]

[Localité 3]





Représenté par Me Annick DARRAS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 76





(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/007876 du 08/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)







ET :





INTIMEE





CAISSE DE CRÉDI...

ARRET

[N]

C/

CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'[Localité 3]

DB

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 21 JUILLET 2022

N° RG 20/04406 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H3DC

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS EN DATE DU 20 JUILLET 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [M] [N]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Annick DARRAS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 76

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/007876 du 08/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)

ET :

INTIMEE

CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL D'[Localité 3], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Stéphanie DERIVIERE de la SCP STEPHANIE DERIVIERE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 10

DEBATS :

A l'audience publique du 04 Janvier 2022 devant Mme Dominique BERTOUX, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Mars 2022.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Dominique [N] en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 21 juillet 2022.

Le 21 juillet 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente a signé la minute avec Mme Vitalienne BALOCCO, Greffier.

DECISION

Suivant offre du 20 décembre 2014, la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] a consenti à M. [M] [N] une ouverture de compte courant n°156290260500023955140.

Par acte sous seing privé du 15 juin 2018, M. [N] a soucrit auprès de la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] un contrat de découvert au titre du compte courant susvisé à hauteur de 450 € et au taux effectif global de 17,75%.

Suivant offre du 11 août 2018 acceptée le même jour, la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] a consenti à M. [N] un crédit renouvelable Passeport Crédit n°2605 23955107 à hauteur de 10.000 €, d'une durée d'un an renouvelable, le montant et le taux d'intérêt des échéances étant fonction du montant de l'utilisation et de la durée de remboursement choisis, lequel a été utilisé :

- le 25 août 2018, sous la référence n° 15629 0260500023955108, pour un montant de 1.500 €, au taux débiteur fixe de 3,50%, remboursable en huit mensualités de 190,93 €;

- le 8 septembre 2018, sous la référence n° 15629 0260500023955109, pour un montant de 3.000 €, au taux débiteur fixe de 5,65%, remboursable en 24 mensualités de 134,32 €, dans le but de financer un projet personnel;

- le 18 septembre 2018, sous la référence n° 15629 0260500023955110, pour un montant de 5.860 €, au taux débiteur fixe de 4,80%, remboursable en 60 mensualités de 113,70 €, dans le but de financer l'acquisition d'un véhicule automobile;

- et le 19 janvier 2019, sous la référence n° 15629 0260500023955111, pour un montant de 1.500 €, au taux débiteur fixe de 3,50%, remboursable en 14 mensualités de 110,42 €, dans le but de financer un projet personnel.

Par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) du 5 juillet 2019, revenue avec la mention 'pli avisé non réclamé', le prêteur a mis en demeure M. [N] de lui régler sous huitaine :

- une mensualité de 438,78 €, au titre de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955109;

- une mensualité de 370,95 €, au titre de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955110;

- une mensualité de 359,61 €, au titre de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955111;

- et la somme de 1.953,95 €, au titre du solde débiteur du compte courant.

Par LRAR du 18 juillet 2019, la banque a informé l'emprunteur de la résiliation de l'autorisation de découvert à compter du 19 septembre 2019.

Par LRAR du 23 août 2019, revenue avec la mention 'pli avisé non réclamé', la Caisse de Crédit Mutuel a prononcé la déchéance du terme et la clôture du compte courant, sommant l'emprunteur de lui payer l'intégralité des sommes restant dues, soit un montant de 11.859,42 €.

Par acte d'huissier du 29 mai 2020, la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] a fait assigner M. [N] devant le tribunal judiciaire d'Amiens, afin de le voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer diverses sommes.

Par jugement réputé contradictoire du 20 juillet 2020, le tribunal judiciaire a:

- condamné M. [N] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] les sommes suivantes :

* 1.947,32 € au titre du débit au compte courant avec intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2019;

* 2.564.76 € au titre du prêt Util Projet n°15629 0260500023955109 avec intérêts à 5.65% à compter du 24 octobre 2019;

* 5.969,63 € au titre du prêt Util Auto n°15629 0260500023955110 avec intérêts au taux de 4.80% à compter du 24 octobre 2019;

* 1.428.82 € au titre du prêt Util Projet n° 15629 0260500023955111 avec intérêts au taux de 3.50% à compter du 24 octobre 2019;

- ordonné l'exécution provisoire;

- condamné M. [N] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] la somme de 400 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [N] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 31 août 2020.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 17 mai 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [N] demande à la cour de :

- le dire et juger recevable et bien fondé en son appel;

- infirmer le jugement entrepris;

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts au titre des utilisations de crédit n°15629 0260500023955109, n°15629 0260500023955110 et 15629 0260500023955111;

- réduire à une somme symbolique le montant des indemnités conventionnelles sollicité au titre des utilisations de crédit n°15629 0260500023955109, n°15629 0260500023955110 et 15629 0260500023955111;

en tout état de cause,

- lui accorder des délais de paiement et rééchelonner la dette sur une période de deux ans;

- débouter la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- statuer ce que droit quant aux dépens, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

Aux termes de ses conclusions remises le 16 décembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] demande à la cour de :

- la dire et juger recevable et bien fondée en sa demande;

- débouter M. [N] de l'intégralité de ses demandes;

- confirmer l'intégralité des dispositions du jugement entrepris;

- condamner M. [N] à lui verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 décembre 2021, l'affaire ayant été fixée pour plaider à l'audience du 4 janvier 2022.

SUR CE

- Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

M. [N] prétend au visa des articles L.312-31 et L.341-6 du code de la consommation à la déchéance du droit aux intérêts contractuels du prêteur au motif que ce dernier ne justifie pas l'avoir informé de l'évolution du taux débiteur applicable aux utilisations de crédit n°15629 0260500023955109, n°15629 0260500023955110 et 15629 0260500023955111, étant précisé qu'entre la date respective de leur souscription et le 5 juillet 2019:

- le taux de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955109 a augmenté de 5,65% à 7%;

- le taux de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955110 a augmenté de 4,80%, à 6,15%;

- et le taux de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955111 a augmenté de 3,50%, à 4,85%.

La Caisse de Crédit Mutuel réplique qu'un exemplaire des conditions générales et particulières du contrat de crédit litigieux a été remis à l'appelant lors de son engagement du 11 août 2018;

que les caractéristiques particulières dudit prêt étaient connues dès la souscription, à savoir qu'il est renouvelable chaque année par tacite reconduction et utilisable par fraction d'un montant minimal de 1.500 €, dans la limite de 10.000 €, étant souligné que le taux d'intérêt y est prédéterminé en fonction de l'objet, du montant et de la durée de remboursement de chaque utilisation; que les conditions financières de chaque utilisation étaient adressées à l'emprunteur, lequel recevait en outre :

* chaque mois, une lettre d'information sur l'état des encours, les mensualités et taux pratiqués;

* et chaque année, une lettre d'information sur les conditions de renouvellement du prêt; que M. [N] a été avisé :

* de la suspension du crédit litigieux suite à son refus des nouvelles conditions de taux applicables;

* et de la nouvelle grille des taux applicables en avril 2019, soit au moment du renouvellement annuel du crédit litigieux.

Selon l'article L.312-31 du code de la consommation : 'En cas de modification du taux débiteur, l'emprunteur en est informé sur support papier ou sur un autre support durable, avant que la modification n'entre en vigueur. Cette information indique le montant des échéances après l'entrée en vigueur du nouveau taux débiteur ainsi que, le cas échéant, toute modification du nombre ou de la périodicité des échéances.

Lorsque la modification du taux débiteur résulte d'une variation du taux de référence, que le nouveau taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l'information relative au nouveau taux de référence est également disponible dans les locaux du prêteur, les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que cette information est fournie périodiquement à l'emprunteur'.

Selon l'article L.341-6 du code de la consommation : 'Le prêteur qui n'a pas respecté les obligations relatives à l'information de l'emprunteur en cas de modification du taux débiteur fixées à l'article L.312-31 et, pour les opérations de découvert en compte, à l'article L.312-89 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge'.

La Caisse de Crédit Mutuel verse aux débats :

- la copie d'une fiche d'informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs, valables du 11 au 31 août 2018, indiquant les caractéristiques principales du contrat litigieux et notamment, sous le paragraphe 'coût du crédit', la grille des taux d'intérêts applicables au 11 août 2018, étant précisé que le taux débiteur est déterminé selon différents critères, dont la nature de l'utilisation ('Véhicule Auto/Moto', 'Travaux' ou 'Autres projets'), les options et la durée choisies (12 à 60 mois) pour chacune d'elles;

- la copie de l'offre de crédit renouvelable Passeport crédit (n° 15629 0260500023955107) du 11 août 2018, signée le même jour par l'appelant, laquelle stipule notamment la grille des taux d'intérêts applicables à cette date, en fonction de la nature de l'utilisation ('Véhicule Auto/Moto', 'Travaux' ou 'Autres projets'), des options et de la durée choisies (12 à 60 mois) pour chacune d'elles; le taux débiteur fixe applicable (sans option) étant alors :

* de 4,80% (TAEG de 6,88%) pour un crédit 'Véhicule Auto/Moto';

* de 4,80% (TAEG de 6,88%) pour un crédit 'Travaux';

* et de 5,65% (TAEG de 7,80%) pour un crédit 'Autres projets';

- la copie d'une fiche d'information préalable à la mise à disposition d'une utilisation (n° 15629 0260500023955109) du Passeport Crédit (n° 15629 0260500023955107) du 8 septembre 2018, signée par M. [N], portant sur un montant de 3.000 €, destinée à un financement 'divers', sans option, d'une durée de 24 mois, au taux débiteur fixe de 5,65% (TAEG fixe de 6,83%) et remboursable par mensualités de 134,32 €;

- la copie d'une lettre de confirmation adressée le 10 septembre 2018 à M. [N], laquelle réitère les conditions particulières de l'utilisation (n° 15629 0260500023955109) du 8 septembre 2018;

- la copie d'une fiche d'information préalable à la mise à disposition d'une utilisation (n° 15629 0260500023955110) du Passeport Crédit (n° 15629 0260500023955107) du 18 septembre 2018, signée par M. [N], portant sur un montant de 5.860 €, destinée à un financement 'auto', sans option, d'une durée de 60 mois, au taux débiteur fixe de 4,80% (TAEG fixe de 5,33%) et remboursable par mensualités de 113,70 €;

- la copie d'une lettre de confirmation adressée le 18 septembre 2018 à M. [N], laquelle réitère les conditions particulières de l'utilisation (n° 15629 0260500023955110) du 18 septembre 2018, sauf la mention d'un TAEG fixe à 5,34%;

- la copie d'une fiche d'information préalable à la mise à disposition d'une utilisation (n° 15629 0260500023955111) du Passeport Crédit (n° 15629 0260500023955107) du 19 janvier 2019, signée par M. [N], portant sur un montant de 1.500 €, destinée à financer un projet personnel, sans option, d'une durée de 14 mois, au taux débiteur fixe de 3,50% (TAEG fixe de 4,37%) et remboursable par mensualités de 51,16 €;

- la copie d'une lettre de confirmation adressée le 21 janvier 2019 à M. [N], laquelle réitère les conditions particulières de l'utilisation (n° 15629 0260500023955111) du 19 janvier 2019;

- la copie des relevés mensuels du crédit renouvelable adressés à M. [N] entre les mois d'août 2018 et de juillet 2019, lesquels mentionnent pour chaque utilisation le capital prêté, la durée résiduelle de remboursement, le montant de chaque mensualité et le TAEG, étant précisé que ce dernier est conforme à celui annoncé dans chacune des lettres de confirmation susvisées;

- la copie d'une lettre préalable au renouvellement du crédit litigieux, adressée le 29 avril 2019 à M. [N], à laquelle sont joints un bordereau de refus au nom de l'emprunteur et la grille des taux débiteurs fixes sans option applicables au 30 avril 2019, ces derniers étant :

* portés de 4,80% à 5,40% (TAEG de 7,53%) pour un crédit 'Auto/Moto' ou 'Travaux';

* et maintenus à 5,65% (TAEG de 7,80%) pour un crédit 'Autres projets';

- la copie d'une lettre de suspension du crédit renouvelable litigieux, adressée le 23 avril 2019 à M. [N], suite au refus par ce dernier des nouvelles conditions de taux applicables, laquelle précise que les utilisations en cours devront continuer à être remboursées conformément aux conditions prévues au contrat;

- la copie du décompte de créances joint à la LRAR de mise en demeure préalable du 5 juillet 2019, ledit décompte appliquant :

* à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955109, un taux d'intérêt de 7%;

* à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955110, un taux d'intérêt de 6,15%;

* et à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955111, un taux d'intérêt de 4,85%;

- la version originale de la LRAR de déchéance du terme du 23 août 2019, à laquelle est jointe un décompte des créances arrêté à cette date, lequel applique :

* à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955109, un taux d'intérêt de 5,65%;

* à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955110, un taux d'intérêt de 4,80%;

* et à l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955111, un taux d'intérêt de 3,50%;

- et un exemplaire de la lettre adressée le 23 octobre 2019 à M. [N] contenant le dernier décompte arrêté le même jour, lequel applique des taux identiques à ceux de la LRAR du 23 août 2019.

Si, pour chacune des trois utilisations de crédit n° 15629 0260500023955109, 0260500023955110 et 0260500023955111, le taux d'intérêt retenu par le décompte joint à la LRAR du 5 juillet 2019 (mise en demeure préalable) s'avère plus élevé que celui contracté, force est de constater que les décomptes adressés postérieurement à M. [N], le 23 août 2019 (LRAR de déchéance du terme) et le 23 octobre 2019 (dernier décompte), ont été calculés à partir de taux conformes à ceux d'origine, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce des dispositions précitées des articles L312-31 et L341-6 du code de la consommation.

Il convient par suite de débouter M. [M] [N] de sa demande de déchéance du droit aux intérêts de la Caisse de Crécit Mutuel d'[Localité 3] et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas déchu la Caisse de Crédit Mutuel des intérêts contractuels dus au titre des trois utilisations de crédit litigieuses.

- Sur la réduction du montant des indemnités contractuelles

L'appelant sollicite, au visa de l'article 1231-5 du code civil, la réduction à une somme symbolique de l'indemnité conventionnelle de 8% due pour chacune des trois utilisations de crédit n°15629 0260500023955109, 0260500023955110 et 0260500023955111, faisant valoir qu'il est de bonne foi; qu'il exerce la profession de maçon et que ses déplacements du lundi au vendredi l'ont empêché de récupérer les LRAR adressées par la banque; qu'il avait besoin de sa carte bancaire pour régler ses frais professionnels d'essence et d'hôtel; que le montant sollicité par l'intimée au titre de l'indemnité conventionnelle est disproportionné compte tenu de sa situation financière, ses revenus ayant diminué à la suite de la mise en place d'un mi-temps thérapeutique.

La Caisse de Crédit Mutuel revendique le paiement de l'indemnité d'inexécution prévue par le contrat d'espèce en cas de déchéance du terme avec remboursement immédiat du capital restant dû, indiquant qu'il ne s'agit pas d'une clause pénale susceptible de réduction judiciaire à un montant symbolique; que son montant est proportionné au capital emprunté.

L'intimée ajoute que M. [N] avait la possibilité de récupérer les LRAR dont il était destinataire en personne le samedi matin, ou du lundi au vendredi par procuration, dans les quinze jours des avis de passage respectifs, ce qu'il n'a pas fait; qu'il ne démontre pas la réduction de ses revenus professionnels à compter de son arrêt de travail de mars 2020.

Le contrat de crédit renouvelable du 11 août 2018 stipule en page 3/7, sous le paragraphe 'Avertissement sur les conséquences d'une défaillance - indemnités de retard', que : 'L'emprunteur est informé qu'en cas de défaillance de sa part, le prêteur pourra [...] exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du réglement effectif, les sommes restant dues produisent des intérêts de retard au taux conventionnel. En outre, le prêteur pourra demander à l'emprunteur une indemnité égale à 8% du capital dû'.

Selon l'article L.312-39 du code de la consommation : 'En cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.

En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret'.

Selon l'article D312-17 du code de la consommation : 'Lorsque le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, il peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité égale à 8 % des échéances échues impayées. Cependant, dans le cas où le prêteur accepte des reports d'échéances à venir, le montant de l'indemnité est ramené à 4 % des échéances reportées'.

Selon l'article 1231-5 du code civil: 'Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure'.

Contrairement à ce que prétend la banque, l'indemnité conventionnelle de 8% stipulée en cas d'inexécution du contrat litigieux est une clause pénale régie par l'article 1231-5 précité du code civil.

Selon le dernier décompte du 23 octobre 2019, cette indemnité s'élève à une somme totale de 714,49 euros, dont :

- 183,10 euros, concernant l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955109;

- 428,12 euros, concernant l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955110;

- et 103,27 euros, concernant de l'utilisation de crédit n° 15629 0260500023955111.

Au vu du degré d'exécution partielle de chaque utilisation de crédit, du caractère non abusif de leur taux débiteur respectif et de la reprise par M. [N] de son activité professionnelle à temps plein, le montant revendiqué par l'intimée, au titre de l'indemnité conventionnelle de 8%, n'est pas manifestement excessif.

Il convient dès lors de débouter M. [M] [N] de sa demande et de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné au paiement d'une indemnité conventionnelle de 8% sur le capital restant dû pour chacune des utilisations de crédit en cause.

- Sur les délais de paiement

M. [N] demande des délais de paiement et le rééchelonnement de sa dette sur 24 mois au visa de l'article 1343-5 du code civil, justifiant de:

- son absence à l'audience de première instance du 15 juin 2020 par son état de santé, lequel ne lui permettait pas de se déplacer;

- la réduction temporaire de ses revenus mensuels à la somme de 936,95 €, par suite de son placement à mi-temps thérapeutique;

- l'augmentation de ses revenus mensuels à la somme de 1.630,88 € par mois, par suite de la reprise de son activité professionnel à temps plein;

- une saisie sur salaire de 48,90 € par mois en paiement d'arriérés de pension alimentaire;

- versement d'une pension alimentaire de 195 € par mois, au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de ses trois enfants;

- son remariage le 25 janvier 2021;

- un état de santé fragilisé par une embolie pulmonaire et deux infarctus le contraignant à un suivi médical deux fois par mois au centre hospitalier d'[4].

La Caisse de Crédit Mutuel s'oppose à la demande de délais ou d'échelonnement des paiements, aux motifs que l'appelant ne justifie pas de:

- sa situation financière actuelle;

- ni des indemnités journalières et assurances qu'il a pu percevoir au moment de son arrêt de travail;

- ni des revenus de son épouse, suite à son remariage.

Enfin, l'intimée précise que les problèmes de santé de l'appelant sont intervenus en mars 2020, soit postérieurement au prononcé de la déchéance du terme par LRAR du 23 août 2019; que la bonne foi de ce dernier est remise en cause par son refus de réceptionner les LRAR qui lui ont été adressées.

Selon l'article 1343-5 du code civil : 'Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment'.

L'appelant justifie de sa situation actuelle - familiale, financière, médicale et professionnelle - en versant aux débats :

- un extrait du livret de famille [N]-[K], lequel identifie les trois enfants du couple [K]-[N];

- une copie du jugement de divorce rendu le 22 septembre 2005 par le tribunal de grande instance d'Amiens entre Mme [W] [K] et M. [N];

- un extrait d'acte de mariage du 25 janvier 2021 de M. [N] avec Mme [P] [G];

- un avis d'impôt de 2020 sur les revenus de 2019, lequel indique un revenu fiscal de référence de 15.352 €, soit 1.279,33 € par mois;

- plusieurs bulletins de salaire pour les mois de mars à juillet 2020, lesquels indiquent des revenus nets imposables de : 1.382,89 € (mars 2020), 57,35 € (avril 2020), 167,02 € (mai 2020), 1.082,27 € (juin 2020) et 1.545,28 € (juillet 2020);

- un bulletin de salaire de mars 2021, lequel indique un salaire net imposable de 1.306,51 €;

- deux relevés de compte courant pour les mois de janvier et février 2021, lesquels mentionnent chacun en début de mois un virement SEPA permanent de 195 €;

- un compte rendu d'hospitalisation du 18 mars 2020, pour la période du 27 février au 16 mars 2020, concernant la prise en charge des douleurs thoraciques latéralisées à droite de M. [N];

- une lettre de liaison du 10 mars 2020 établie pour M. [N] par le service de rhumatologie maladie des os et des articulations de l'hôpital [5];

- une lettre de la Maison départementale des personnes handicapées de la Somme adressée à M. [N] le 7 janvier 2021, laquelle l'informe, en réponse à une demande du 21 août 2020, de l'octroi d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé avec orientation professionnelle vers le marché du travail, à compter du 6 janvier 2021 et pour une durée indéterminée;

- un avis d'aptitude réalisé le 3 décembre 2020 par le service de santé au travail, étant précisé que M. [N] ne doit pas conduire d'engins plus de quelques minutes, ni porter des charges supérieures à 15 kg.

Toutefois, les revenus mensuels actuels de M. [M] [N] ne lui permettent pas de supporter une mensualité de plus de 900 € en vue de solder la dette dans un délai de 24 mois.

Il convient, en conséquence, de le débouter de sa demande de délais de paiement.

- Sur les demandes accessoires

M. [N], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel.

L'indemnité de procédure allouée en première instance à la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] sera confirmée.

En revanche, il ne paraît inéquitable de laisser à la charge de la Caisse de Crédit Mutuel ses frais irrépétibles d'appel, non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

- DEBOUTE M. [M] [N] de toutes ses demandes à l'encontre de la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3];

- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 juillet 2020 par le tribunal judiciaire d'Amiens;

- DEBOUTE la Caisse de Crédit Mutuel d'[Localité 3] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel;

- CONDAMNE M. [M] [N] aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 20/04406
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;20.04406 ?
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