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07/07/2022 | FRANCE | N°20/03889

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 07 juillet 2022, 20/03889


ARRET



















[G]





C/



CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL BRIE PI CARDIE









DB





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 07 JUILLET 2022





N° RG 20/03889 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H2CQ



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS EN DATE DU 24 JUIN 2020





PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE





Madam

e [V] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]





Représentée par Me Christèle VANDENDRIESSCHE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 79







ET :





INTIMEE





CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL BRIE PI CARDIE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en...

ARRET

[G]

C/

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL BRIE PI CARDIE

DB

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 07 JUILLET 2022

N° RG 20/03889 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H2CQ

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS EN DATE DU 24 JUIN 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [V] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Christèle VANDENDRIESSCHE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 79

ET :

INTIMEE

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL BRIE PI CARDIE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Bénédicte CHÂTELAIN substituant Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 06

DEBATS :

A l'audience publique du 01 Mars 2022 devant Mme Dominique BERTOUX, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Dominique BERTOUX en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le délibéré a été prorogé au 07 juillet 2022.

Le 07 juillet 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par acte sous seing privé du 11 février 2005, Mme [V] [G], sur les conseils et par l'entremise de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de la Somme, aux droits de laquelle vient la CRCAM Brie Picardie, a adhéré à un plan d'épargne retraite populaire n°88700001288515 dénommé 'Plan Vert Avenir' (devenu 'Plan Vert Vitalité' à compter du 1er janvier 2015), contrat collectif d'assurance sur la vie à adhésion facultative, souscrit pour le compte de ses adhérents par l'association Arvige, auprès de la société d'assurance Prédica (SA), à effet au 11 février 2005 et venant à expiration le 1er janvier 2029, moyennant un versement initial de 100 €, puis des versements mensuels d'un montant de 50 €, ledit contrat ayant pour objet la constitution d'un complément de retraite garantissant, en cas de vie de l'adhérent à l'échéance de la phase de constitution du complément de retraite, la conversion de l'épargne en rente viagère, et en cas de décès de l'adhérent durant la phase de constitution du complément de retraite, le versement d'une rente aux bénéficiaires désignés, en l'espèce les parents de Mme [G] et à défaut ses héritiers.

Par lettre recommandée du 28 décembre 2016, Mme [G] a indiqué à la CRCAM Brie Picardie vouloir disposer de l'argent placé sur ce contrat.

Par lettre du 27 janvier 2017, la CRCAM Brie Picardie lui a répondu que la clôture de ce contrat n'était pas possible, s'agissant d'un plan d'épargne retraite, dont le but est de se constituer un complément de retraite reversé sous forme de rente viagère, un rachat dudit contrat n'étant possible qu'en cas de force majeure, non caractérisé en l'espèce.

Par lettre recommandée du 25 octobre 2017, le conseil de Mme [G] a mis en demeure la CRCAM Brie Picardie de lui communiquer sous quinzaine une copie du contrat de souscription en cause, ce qui a été fait par lettre du 27 novembre 2017.

Par acte d'huissier du 17 octobre 2018, Mme [G] a fait assigner la CRCAM Brie Picardie devant le tribunal de grande instance d'Amiens en restitution des sommes placées sur le contrat litigieux.

Suivant jugement contradictoire du 24 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Amiens a :

- déclaré Mme [G] irrecevable en l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de la SA Prédica, non partie à l'instance;

- déclaré Mme [G] irrecevable en sa demande principale de nullité du contrat d'adhésion au plan d'épargne retraite populaire 'Plan Vert Avenir' n°88700001288515 du 11 février 2005 et en sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation d'information précontractuelle formées à l'encontre de la CRCAM Brie Picardie;

- débouté Mme [G] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral et financier formée à l'encontre de la CRCAM Brie Picardie;

- condamné Mme [G] à payer à la CRCAM Brie Picardie la somme de 1.800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens;

- et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Mme [G] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 28 juillet 2020.

Aux termes de ses conclusions remises le 27 octobre 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, l'appelante demande à la cour de:

- la dire et juger recevable et bien fondée en son appel;

- réformer le jugement entrepris en son ensemble;

statuant à nouveau,

à titre principal,

- prononcer la nullité du contrat litigieux, avec toutes les conséquences de droit attachées;

à titre subsidiaire,

- dire et juger que la CRCAM Brie Picardie a manqué à son obligation précontractuelle d'information et de conseil;

- ordonner la restitution des sommes appartenant à Mme [G] et placées sur le compte 'Plan Vert' n° 88700001288515 ouvert auprès de la SA Prédica à titre de dommages et intérêts;

- et au besoin, l'y condamner;

en tout état de cause,

- condamner la CRCAM Brie Picardie à lui payer la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et financier occasionné;

- condamner la CRCAM Brie Picardie à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement

de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la présente instance;

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.

Aux termes de ses conclusions d'intimée remises le 19 janvier 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la CRCAM Brie Picardie demande à la cour de:

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la prescription des demandes de Mme [G];

à titre subsidiaire,

- débouter Mme [G] de l'ensemble de ses demandes (nullité du contrat, restitution des fonds placés, dommages et intérêts);

en tout état de cause,

- condamner Mme [G] à lui payer une somme de 2.000 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 'ainsi qu'aux entiers d'appel'.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2021, l'affaire ayant été fixée pour plaider à l'audience du 1er mars 2022.

SUR CE

A titre liminaire , la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif , et que les « dire et juger » ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence , la cour ne statuera pas sur celles ci , qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

- Sur la recevabilité de la demande principale en nullité du contrat

Mme [G] prétend, à titre liminaire, que sa demande d'annulation du contrat litigieux n'était pas prescrite au jour de l'acte introductif d'instance, le 17 octobre 2018, en raison de la découverte de manoeuvres dolosives ayant vicié son consentement à la lecture d'une lettre de refus de libération des fonds placés, que la CRCAM Brie Picardie lui a adressée le 27 janvier 2017, en réponse à une LRAR du 28 décembre 2016 qu'elle avait adressée au directeur de l'agence Crédit agricole de [Localité 5].

Elle soutient qu'il n'était pas dans son intention, le 11 février 2005, d'adhérer à un plan d'épargne retraite populaire, mais de souscrire un contrat de placement rentable lui permettant de disposer de son argent à tout moment, étant précisé que le document de 'demande d'adhésion au contrat collectif d'assurance sur la vie' qui lui a été transmis par la banque, ne l'informait pas sur l'impossibilité de disposer des fonds placés avant la date prévue de son départ à la retraite.

Elle ajoute, qu'indépendamment d'une période de validité comprise entre le 11 février 2005 et le 1er janvier 2029, le contrat litigieux ne précise pas les conditions particulières de retrait des fonds épargnés, étant souligné :

- d'une part, que les conditions générales portant sa signature ne la renseignaient pas davantage;

- et d'autre part, que sa signature ne figure pas sur la notice d'information produite par l'intimée, au motif que ce document ne lui a pas été remis le jour de la souscription.

Indiquant être employée de mairie et disposant d'une sécurité de l'emploi, ainsi que d'une retraite garantie, Mme [G] reproche à sa conseillère Crédit agricole, agissant au nom et pour le compte de la société Prédica, de l'avoir trompée en lui proposant d'adhérer à un plan d'épargne manifestement inadapté à son profil, alors qu'elle connaissait la volonté exprimée de sa cliente de souscrire un contrat classique d'assurance vie, comprenant la possibilité de procéder au rachat d'une partie ou de la totalité du placement, selon la nécessité.

Elle observe qu'en application du 'Plan Vert Avenir'contracté, la récupération de l'intégralité de son épargne est conditionnée par le fait d'atteindre l'âge minimal de 100 ans, lequel, rapporté à une espérance de vie statistique de 84 ans, suffit à démontrer l'inopportunité de son engagement; que la demande d'adhésion audit Plan comprenait la désignation de 'bénéficiaires' en cas de décès avant le terme du contrat, ce qui la confortait dans l'idée que son engagement portait sur un dispositif ordinaire d'assurance vie; que le contrat litigieux est nul par suite de réticences dolosives imputables à sa conseillère clientèle, laquelle lui a caché les modalités pratiques du placement, tout en insistant sur les avantages fiscaux de l'opération.

La CRCAM Brie Picardie prétend que l'action en nullité introduite le 17 octobre 2018 par Mme [G] est prescrite, conformément à la réforme de la prescription entrée en vigueur le 18 juin 2008.

L'intimée fait valoir que l'appelante avait une connaissance précise, dès la souscription du contrat litigieux le 11 février 2005, des modalités spécifiques de son engagement, en particulier de l'indisponibilité des fonds épargnés avant son départ à la retraite, aux motifs :

- que la demande d'adhésion au contrat collectif d'assurance sur la vie mentionne que le versement des fonds épargnés interviendra sous forme de rente viagère à compter de la date prévue de départ à la retraite de Mme [G];

- que la signature de cette demande d'adhésion le 11 février 2005 par l'appelante est précédée de la mention: 'Je reconnais avoir reçu un double de la présente demande, avec les conditions générales comportant la notice d'information, un modèle de lettre de renonciation, ainsi que le code de déontologie';

- que le contrat d'adhésion stipule qu'il 'prendra effet le 11 février 2005 et [...] atteindra son terme le 1er janvier 2029";

- que la signature de ce contrat d'adhésion le 11 février 2005 par l'appelante est précédée de la mention: 'Je reconnais avoir reçu un double de la présente demande, [ainsi que] les conditions générales, une note d'information, un modèle de lettre de renonciation, un code de déontologie et une notice fiscale';

- que le dossier contractuel intitulé 'Plan Vert Avenir' remis à Mme [G] comporte notamment une note d'information, ainsi que les conditions générales 'K' visées par le contrat d'adhésion, les deux documents indiquant expressément :

* l'objet de son engagement, savoir la constitution d'une retraite complémentaire individuelle versée sous forme de rente viagère à partir de l'âge prévu de départ à la retraite de l'assurée;

* l'impossibilité pour cette dernière de procéder à un rachat anticipé, partiel ou total, sauf dans les cas prévus aux 3ème, 4ème et 5ème alinéas de l'article L132-23 du code des assurances (force majeure);

- Mme [G] recevait depuis le 21 janvier 2008, une lettre information annuelle relative à son adhésion au contrat litigieux, contenant une 'estimation de la rente viagère individuelle, qui lui serait versée, selon [qu'elle sorte] en rente à 62 ou 67 ans, [...] fondée sur le montant de l'épargne-retraite acquise au 31 décembre' de l'année précédente.

Selon l'article 122 du code de procédure civile : 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

Selon l'article 1304 du code civil, dans sa version applicable au litige : 'Dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

Ce temps ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé; dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts [...]'.

Selon l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile :

'I. Les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

II. Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

III. Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation''.

Selon l'article 2224 du code civil : 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'.

Il est admis d'une part, que lorsque la loi susvisée du 17 juin 2008 n'a pas eu pour effet de modifier la durée, ni le point de départ d'un délai de la prescription ayant commencé à courir antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi - le 19 juin 2008, les dispositions pertinentes de la loi ancienne, en l'occurrence l'article 1304 du code civil, continuent de s'appliquer [Civ. 3e, 24 janvier 2019, n° 17-25.793], d'autre part, que la signature du contrat qui renvoie expressément à des conditions générales et mentionne que l'assuré reconnaît avoir reçu un exemplaire de chacun des documents du dossier contractuel, y compris ceux qui n'ont pas été signés, suffit à démontrer que ces documents ont été portés à sa connaissance au moment de la signature du contrat d'assurance et que les conditions stipulées y figurant lui étaient opposables [Civ. 2e, 14 juin 2018, n° 17-19.717].

Les éléments produits par la CRCAM Brie Picardie démontrent :

- que la signature de Mme [G] apposée sur la demande d'adhésion et sur le contrat d'adhésion du 11 février 2005 est précédée à chaque fois d'une mention attestant qu'elle a reçu plusieurs documents, notamment les conditions générales de son engagement, ainsi qu'une notice d'information;

- que les conditions générales 'K', figurant dans le dossier contractuel remis à l'appelante et auxquelles se réfère le contrat litigieux, stipulent que ce dernier 'ayant pour objet la construction d'une retraite complémentaire, aucun rachat total ou partiel n'est possible. Néanmoins, le rachat total de l'épargne retraite acquise est possible dans l'un des cas de force majeure suivants : invalidité de l'adhérent-assuré correspondant au classement en 2e ou 3e catégorie de sécurité sociale, expiration des droits à l'assurance chômage et cessation d'activité à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire de l'entreprise individuelle';

- que la note d'information, figurant également dans le dossier contractuel remis à l'appelante

confirme que le contrat souscrit 'permet de se constituer une retraite complémentaire individuelle versée sous forme de rente viagère exprimée en euros à partir de l'âge prévu de liquidation des droits à la retraite [et qu'il] ne peut faire l'objet de rachat, sauf dans les cas prévus aux 3ème, 4ème et 5ème alinéas de l'article L132-23 du code des assurances (force majeure)', dans sa version applicable au litige.

Dans ces conditions, il est établi que l'appelante avait une connaissance précise, dès la souscription du contrat d'adhésion le 11 février 2005, de l'objet et de la portée de son engagement, soit la constitution d'une épargne retraite lui permettant d'obtenir le versement d'une rente viagère à compter du 1er janvier 2029, sans possibilité de rachat anticipé, sauf cas de force majeure.

L'action de Mme [G] en nullité pour dol, introduite le 17 octobre 2018, soit plus de cinq ans après la date de souscription du contrat litigieux, est prescrite en application de l'article 1304 précité du code civil.

Il convient de prononcer l'irrecevabilité de la demande principale de l'appelante, suivant l'article 122 précité du code de procédure civile.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Sur la recevabilité de la demande subsidiaire en responsabilité extracontractuelle

Mme [G] fait valoir subsidiairement qu'en s'abstenant de lui proposer un produit de placement en lien avec sa situation personnelle et professionnelle, outre ses besoins exprimés, puis en omettant de la renseigner sur les caractéristiques essentielles du 'Plan Vert Avenir', au sens de l'ancien article L.111-1 du code de la consommation, dont le rendement ou les modalités particulières de rachat des fonds placés, l'intimée a violé ses obligations précontractuelles d'information et de conseil, telles qu'imposées en vertu de l'ancien article 1147 du code civil.

En conséquence, l'appelante prétend à la restitution des sommes épargnées à titre de dommages intérêts et en réparation de sa perte de chance de contracter à de meilleures conditions.

La CRCAM Brie Picardie fait valoir que la demande subsidiaire de Mme [G] est également prescrite, car formulée postérieurement au 18 juin 2013, conformément à la réforme de la prescription entrée en vigueur le 18 juin 2008, pour des motifs identiques à ceux développés au soutien de la prescription de l'action en nullité du contrat litigieux, à savoir que l'appelante avait une connaissance précise, dès le 11 février 2005, des modalités spécifiques de son engagement, en particulier de l'indisponibilité des fonds épargnés avant son départ à la retraite.

Selon l'ancien article 2270-1 du code civil : 'Les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation'.

Selon l'article 2224 du code du code civil : 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'.

Selon l'article 26.II précité de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile :

'Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure'.

La cour ayant retenu ci-dessus que Mme [G] avait une connaissance précise, dès la souscription du contrat d'adhésion le 11 février 2005, de l'objet et de la portée de son engagement, soit la constitution d'une épargne retraite lui permettant d'obtenir le versement d'une rente viagère à compter du 1er janvier 2029, sans possibilité de rachat anticipé, sauf cas de force majeure, il y a lieu de fixer le point de départ du délai de prescription de sa demande subsidiaire en responsabilité extracontractuelle pour manquement à une obligation précontractuelle au 11 février 2005.

La loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit le délai de prescription de l'action en matière extracontractuelle de dix ans à cinq ans, il résulte de l'article 26.II précité de cette loi, entrée en vigueur le 19 juin 2008, que lorsque le point de départ de l'ancien délai de prescription décennale est, comme en l'espèce, antérieur au 19 juin 2008, le point de départ du nouveau délai de prescription quiquennale s'applique à compter de cette dernière date, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit en l'occurrence dix ans à compter du 11 février 2005.

L'action en responsabilité extracontractuelle de Mme [G], introduite le 17 octobre 2018, soit plus de cinq ans après le 19 juin 2008, est prescrite en application de l'article 26.II précité de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 et de l'article 2224 précité du code civil.

Il convient de prononcer l'irrecevabilité de la demande subsidiaire de l'appelante, suivant l'article 122 précité du code de procédure civile.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral et financier

Mme [G] revendique en outre la condamnation de la CRCAM Brie Picardie à lui payer, sur le fondement de l'article 1240 du code civil et en réparation de son préjudice moral et financier, une somme de 10.000 € comprenant le dédommagement :

- du risque d'avoir à restituer les avantages fiscaux perçus;

- de la perte de rendements financiers intéressants;

- et des tracas liés à la nécessité d'engager une action judiciaire.

L'intimée fait valoir le caractère injustifié du préjudice moral et financier allégué par l'appelante.

Selon l'article 1382 du code civil, dans sa version applicable au litige : 'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.

Mme [G] ne justifiant pas d'une faute qui serait distincte de l'objet de ses demandes prescrites, à savoir le dol et le manquement à une obligation précontractuelle d'information, ni de son préjudice, ni d'un lien de causalité entre les deux, il convient de la débouter de sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral et financier.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

- Sur les demandes accessoires

Mme [G], qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Enfin, il paraît inéquitable de laisser à la charge de la CRCAM Brie Picardie ses frais irrépétibles d'appel non compris dans les dépens, qu'il convient d'évaluer à la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

- CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

- CONDAMNE Mme [V] [G] à payer à la CRCAM Brie Picardie la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

- CONDAMNE Mme [V] [G] aux dépens d'appel.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 20/03889
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.03889 ?
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