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30/06/2022 | FRANCE | N°21/05134

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 30 juin 2022, 21/05134


ARRET

























[I]

[I]









C/







S.A.R.L. LE VALENTIN



















COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 30 JUIN 2022





N° RG 21/05134 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IIER





ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 26 AOÛT 2021







PARTIES EN

CAUSE :





APPELANTS





Madame [Y], [R], [L] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]





Monsieur [C], [J], [N] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]





Représentés par Me BARLOY substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65

Plaidant par Me GODARD, avocat au barreau de ROU...

ARRET

[I]

[I]

C/

S.A.R.L. LE VALENTIN

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 30 JUIN 2022

N° RG 21/05134 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IIER

ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 26 AOÛT 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Madame [Y], [R], [L] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Monsieur [C], [J], [N] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentés par Me BARLOY substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d'AMIENS, vestiaire : 65

Plaidant par Me GODARD, avocat au barreau de ROUEN

ET :

INTIMEE

S.A.R.L. LE VALENTIN, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe TABART de la SCP PHILIPPE TABART, avocat au barreau de BEAUVAIS

Plaidant par Me Alexandre MABIRE, avocat au barreau de ROUEN

DEBATS :

A l'audience publique du 24 Mars 2022 devant :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi, la Présidente a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2022.

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Charlotte RODRIGUES

PRONONCE :

Le 30 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Par acte notarié du 22 juillet 2020, la SARL LeValentin a fait l'acquisition d'un fonds de commerce de restauration traditionnelle, comprenant le droit au bail commercial des locaux d'exploitation, dont le restaurant, un terrain extérieur, l'accès commun et un parking commun avec la SARL Le Tropico gérée par M [C] [I] et Mme [Y] [B] veuve [I] bailleurs de la SARL Le Valentin, le tout situé à [Adresse 4] ; les lieux devant faire l'objet d'un nouveau bail commercial par acte séparé.

Exposant être victimes de troubles de jouissance commis par les bailleurs ayant pour conséquence de ne plus pouvoir utiliser le parking dans les mêmes conditions que lors de la prise de possession des lieux, la SARL Le Valentin les a fait assigner en référé devant le Président du tribunal judiciaire de Beauvais, par acte d'huissier du 10 mai 2021, afin que soit ordonné sous astreinte la remise des clés du cadenas limitant l'accès, et que le portail demeure ouvert pendant les heures d'ouverture du restaurant Le Valentin.

Les demandes ont ultérieurement évoluées par voie de conclusions échangées entre les parties.

Suivant ordonnance contradictoire de référé du 26 août 2021, le président du tribunal judiciaire de Beauvais a :

- renvoyé les parties à se pourvoir au fond, ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent ;

- condamné Mme [Y] [B], veuve [I], et M. [C] [I] à procéder au retrait des plots en béton installés sur le parking commun désigné dans le bail commercial, et ce sous astreinte provisoire de 150 €par jour calendaire de retard pour une période de trois mois passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes des parties ;

- condamné Mme [Y] [B], veuve [I], et M. [C] [I] à verser à la SARL Le Valentin la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Mme [B], veuve [I], et M. [I] ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 25 octobre 2021.

Aux termes de leurs dernières conclusions d'appelants remises le 19 janvier 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, M et Mme [I] demandent à la cour :

- d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les a condamnés :

$gt; à procéder au retrait des plots en béton installés sur le parking commun désigné dans le bail commercial, et ce sous astreinte provisoire de 150 € par jour calendaire de retard pour une période de trois mois passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance;

$gt; à verser à la SARL Le Valentin la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens;

statuant à nouveau,

- de débouter la SARL Le Valentin de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- de condamner la SARL Le Valentin à leur payer la somme de 2.400 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimée et d'appelante incidente remises le 15 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, la SARL Le Valentin demande à la cour :

- de déclarer irrecevables les conclusions n°2 relatives à l'appel incident des consorts [I];

- de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné les consorts [I] :

$gt; à procéder au retrait des plots en béton installés sur le parking commun désigné dans le bail commercial, et ce sous astreinte provisoire de 150 € par jour calendaire de retard pour une période de trois mois passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance;

$gt; à verser à la SARL Le Valentin la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

- d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu a référé concernant la demande de condamnation des bailleurs à lui payer par provision les sommes indûment versées au titre des loyers commerciaux ;

- de condamner, en conséquence, les consorts [I] au paiement de la somme de 960 € à titre provisionnel, en restitution de l'indû des loyers commerciaux, dû en date du 30 novembre 2021;

en tout état, de cause,

- de condamner les consorts [I] à lui régler la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'affaire a été fixée a bref délai pour plaider à l'audience du 24 mars 2022.

SUR CE :

Les appelants soutiennent que les aménagements qu'ils ont réalisés ne constituent pas un trouble manifestement illicite et permettent de prévoir un accès pompiers et un autre lieu de stationnement pour les clients du restaurant. Ils expliquent qu'ils ont la possibilité de procéder à ces travaux de pose de plots en raison de la clause 'travaux' se trouvant au bail dans la mesure où il s'agit de respecter la mise en sécurité des accès aux établissements accueillant du public permettant l'arrivée aisée des pompiers, rappelant qu'ils exploitent via la SARL Le Tropico une discothèque et que ces aménagements sont nécessaires.

Ils s'étonnent que la SARL Le Valentin ne s'explique pas sur la surface supplémentaire de 336 m2 à usage de parking mise à sa disposition dans la perspective de la signature d'un nouveau bail commercial.

Ils affirment que les demandes se heurtent à une contestation sérieuse dans la mesure où l'usage fait par la SARL Le Valentin du parking, empêche l'accès aux engins de secours et une jouissance paisible des lieux.

Enfin elle fait valoir que ses conclusions d'intimé incident sur appel incident de la SARL Le Valentin portant sur les sommes indûment perçues sont recevables comme remises dans le délai de l'article 905-2 alinéa 3 du code de procédure civile.

Sur le fond elle fait valoir que les parties n'ont jamais eu de désaccord sur le montant du loyer, de sorte qu'elle n'est pas tenue de rembourser quelconques sommes.

La SARL Le Valentin demande la confirmation de l'ordonnance entreprise dans la mesure où l'organisation du parking commun a été unilatéralement modifiée par les bailleurs qui ont déplacé deux gabions remplis de terre afin de réduire l'accès et posé des plots en béton reliés par une chaîne sur laquelle se trouve accrochée une pancarte contenant une inscription 'accès pompiers'. Elle précise que les bailleurs ne justifient pas de l'obligation qui leur est faite de procéder ainsi pour organiser l'accès des pompiers dans la mesure où la seule obligation est celle d'assurer l'accès aux véhicules de secours accéder aux établissements, ce qui est possible sans modifier le parking dans la mesure où les entrées des deux établissements ne se trouvent pas à proximité du parking. Elle explique également que le chemin d'accès pour les pompiers, fléché par le bailleur réduit fortement la surface d'occupation et n'est pas adapté à l'accès d'urgence revendiqué.

La clause travaux selon elle ne permet pas aux bailleurs de modifier les lieux ainsi à défaut de pouvoir être qualifiés de travaux convenables.

Enfin elle fait remarquer qu'elle n'utilise pas le parking annexe créé dans la mesure où ce point n'a pas été contractuellement prévu.

Elle se porte appelante incidente et demande paiement de sommes indûment perçues par le bailleur et soutient que les conclusions du bailleurs intimés incidents ne sont pas recevables à défaut d'avoir été remises dans le délai d'un mois prévu à l'article 905-2 du code de procédure civile.

Selon elle seuls les termes du bail initial trouvent à s'appliquer, fixant le loyer à la somme mensuelle de 500 € HT et non 550 € HT de sorte que les bailleurs doivent lui restituer l'indû sous forme de provision.

Sur l'appel principal

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

S'il n'appartient pas au juge des référés de trancher le litige opposant les parties portant sur le bail commercial les unissant, ce dernier est néanmoins compétent pour faire cesser un trouble manifestement illicite même en présence d'une contestation sérieuse.

L'acte de cession du 22 juillet 2020, dans un paragraphe intitulé 'désignation de l'immeuble dans lequel le fonds est exploité', décrit le bien comme suit :

- bâtiment construit en aggloméré couvert en tôles ondulées, divisés en salle de restaurant, bar, cuisine aménagée, salle de plonge, WC, terrain extérieur, accès commun parking commun avec la SARL Le Tropico.

L'acte prévoit également que les lieux feront l'objet d'un nouveau bail par le bailleur au profit du cessionnaire par acte séparé intervenir ensuite du présent acte.

L'acte de cession contient un paragraphe 'énonciation du bail à venir'.

Le bail commercial joint, est dérogatoire au statut des baux commerciaux, il est d'une durée de trois ans à compter du 1er février 2017 pour se terminer le 31 janvier 2020 et contient le même descriptif des lieux loués que dans l'acte de cession.

Il n'est pas contesté par les parties que le nouveau bail n'a jamais été passé de sorte que pour apprécier le bien fondé des demandes présentées au visa de l'article 835 sus mentionné, le juge de l'urgence, qui n'est pas compétent pour apprécier la commune intention des parties en phase de négociation, se réfère au contenu du bail dérogatoire faisant en l'état la loi des parties prévoyant le partage du parking commun avec la SARL Le Tropico peu importe que les bailleurs aient unilatéralement envisagé de nouveaux aménagements, par la construction d'un parking annexe, la pose de plots reliés par des chaînes sur le parking et d'un cadenas sur une barrière dès lors que ces modalités n'ont pas été contractuellement finalisées.

Les bailleurs ne contestent d'ailleurs pas leur projet de réorganisation des espaces comme cela ressort du courrier daté du 17 mai 2021 adressé par leur notaire conseil au conseil de la SARL Le Valentin auquel sont jointes des photographies comportant des commentaires 'réalisation travaux pour l'indépendance du restaurant Le Valentin' dès lors que cette indépendance n'a pas été prévue dans un contrat. Cet état de fait ressort également du procès-verbal de constat dressé par huissier duquel il est établi que les bailleurs ont tenté de délimiter des espaces de parking propres à leur locataire alors que le bail prévoit un parking commun.

Enfin les bailleurs ne démontrent pas que ces réaménagements sont imposés par la loi ou par l'autorité.

Les aménagements litigieux réalisés par les bailleurs dans ces circonstances causent un trouble à la société Le Valentin dans l'exploitation de son commerce dans la mesure où elle ne peut plus jouir du parking commun dans les termes du bail.

Partant c'est à juste titre que le premier juge a condamné Mme [Y] [B], veuve [I], et M. [C] [I] à procéder au retrait des plots en béton installés sur le parking commun désigné dans le bail commercial, et ce sous astreinte provisoire de 150 €par jour calendaire de retard pour une période de trois mois passé un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance.

Sur l'appel incident

Aux termes de l'article 905-2 du code de procédure civile, l'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d'un délai d'un mois à compter de la notification de l'appel incident ou de l'appel provoqué à laquelle est jointe une copie de l'avis de fixation pour remettre ses conclusions au greffe.

En l'espèce, l'appelante incidente a remis ses conclusions au greffe le 16 décembre 2021 et Mme [I] et M. [C] [I] ont remis leurs conclusions postérieures le 19 janvier 2022 et l'avis de fixation à bref délai délivré par le greffe le 4 janvier 2022.

Dans ces circonstances, les conclusions d'intimés incidents remises le 19 janvier 2022,au delà du délai d'un mois, sont irrecevables, peu importe que l'avis de fixation ait été délivré le 4 janvier 2022 dès lors que l'intimé incident avait constitué avocat.

Cependant le juge des référés n'est pas compétent pour statuer sur une action en répétition de l'indû au titre de loyers commerciaux, cette dernière étant conditionnée à la détermination du montant du loyer applicable, faisant observer qu'en l'espèce un loyer a été contractuellement prévu et que celui réglé est supérieur, de sorte que la demande est sérieusement contestable.

Partant c'est à juste titre que le premier juge a dit n'y avoir lieu à référé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Les appelants succombant en majorité supportent les dépens d'appel et sont condamnés à payer à la SARL Le Valentin la somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe ;

déclare irrecevables les conclusions d'intimés incidents des consorts [I] remises le 19 janvier 2022 ;

confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

y ajoutant ;

condamne M [C] [I] et Mme [Y] [B] veuve [I] à payer à la SARL Le Valentin la somme de 1 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamne M [C] [I] et Mme [Y] [B] veuve [I] aux dépens d'appel.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/05134
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;21.05134 ?
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