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02/06/2022 | FRANCE | N°21/00140

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 02 juin 2022, 21/00140


ARRET



















[I]





C/



[C]

[F]









FLR





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 02 JUIN 2022





N° RG 21/00140 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H6Q5



JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-QUENTIN EN DATE DU 16 NOVEMBRE 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





Madame [X] [I]

[

Adresse 3]

[Localité 2]





Représentée par Me Stéphanie CACHEUX de la SCP PINCHON-CACHEUX-BERTHELOT, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN





(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/000292 du 04/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)







ET :





INTIMES



...

ARRET

[I]

C/

[C]

[F]

FLR

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 02 JUIN 2022

N° RG 21/00140 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H6Q5

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-QUENTIN EN DATE DU 16 NOVEMBRE 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [X] [I]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Stéphanie CACHEUX de la SCP PINCHON-CACHEUX-BERTHELOT, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/000292 du 04/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)

ET :

INTIMES

Monsieur [L] [C]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Madame [O] [F] épouse [C]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentés par Me Vanessa COLLIN de la SCP VANESSA COLLIN & EMILIE SCHOOF, avocat au barreau de LAON

DEBATS :

A l'audience publique du 22 Mars 2022 devant Mme Françoise LEROY-RICHARD, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 02 Juin 2022.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Françoise LEROY-RICHARD en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 02 Juin 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Suivant bail dérogatoire en date du 30 juin 2018, M [L] [C] et Mme [O] [F], épouse [C], ont donné en location à Mme [X] [I] un local commercial situé [Adresse 4]) pour une durée d'un an.

La locataire a quitté les lieux.

Par acte d'huissier du 13 mai 2019, Mme [X] [I] a fait assigner les époux [C]-[F] devant le tribunal de grande instance de Saint-Quentin afin de les voir condamnés à lui payer la somme de 4.656,18 € au titre de la restitution du dépôt de garantie, de loyers indus, du coût de l'assurance, de matériaux et d'ouverture et de fermeture d'un compteur.

A titre reconventionnel, les époux [C]-[F] ont sollcité sa condamnation au paiement de la somme de 5 676,45 € au titre de loyers impayés, d'une indemnité de 10% sur loyers impayés, de la taxe foncière et de l'indemnité d'occupation du mois de juillet 2019.

Suivant jugement contradictoire du 16 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Quentin a :

- déclaré les époux [C]-[F] solidairement redevables envers Mme [X] [I] de la somme de 1.575 € à titre de restitution du dépôt de garantie ;

- déclaré Mme [X] [I] redevable envers les époux [C]-[F] unis d'intérêts de la somme totale de 3.913,25 €, à titre de loyers impayés, de clause pénale et de participation à la taxe foncière;

- ordonné la compensation entre ces deux sommes ;

en conséquence,

- condamné Mme [X] [I] à payer aux époux [C]-[F] unis d'intérêts la somme de 2.338,25 € ;

par ailleurs,

- condamné Mme [X] [I] à payer aux époux [C]-[F] unis d'intérêts la somme de l.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

- rappelé que la demande de donner acte ne constitue pas une demande de justice ;

- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire ;

- dit ne pas y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire du jugement.

Mme [X] [I] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 29 décembre 2020.

Aux termes de ses conclusions remises le 22 février 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, l'appelante demande à la cour :

- de la dire et juger recevable et bien fondée en son appel ;

- d'infirmer le jugement entrepris;

statuant à nouveau,

- de condamner solidairement les époux [C]-[F] à lui payer la somme de 4.656,18 €, dont

$gt; 1.575 €, au titre de la restitution du dépôt de garantie ;

$gt; 2.250 €, au titre des loyers de juillet 2018 à décembre 2018 ;

$gt; 500,28 €, au titre du coût de l'assurance ;

$gt; 226,72 €, au titre du coût de matériaux ;

$gt; 104,18 €, au titre de frais d'ouverture et de fermeture de compteur ;

- de débouter les époux [C]-[F] de l'intégralité de leurs demandes;

- de condamner solidairement les époux [C]-[F] à lui payer la somme de 2.000 €, en application de l'article 37 de la loi de 1991, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'appelante soutient que le contrat de bail est frappé de nullité dans la mesure où les bailleurs, par des manoeuvres dolosives, ont fait signer deux contrats différents comportant des dispositions contradictoires. En conséquence, elle demande la restitution des sommes réglées en exécution de cet acte nul.

Subsidiairement, elle fait valoir que les clauses contradictoires contenues dans les deux actes devront être interprétées en sa faveur de sorte que les travaux seront mis à la charge des bailleurs. Elle ajoute qu'à défaut pour ces derniers d'avoir respecté leurs obligations elle a été privée de l'exercice de son activité commerciale mais également de recevoir l'association humanitaire ' Ethan'.

Elle considère que le bail s'est trouvé résilié en raison de la défaillance des bailleurs et que ces derniers lui doivent restitution de toutes les sommes payées à savoir le dépôt de garantie, les loyers de juillet à décembre 2018, le coût de l'assurance, les matériaux et les frais d'ouverture et de fermeture de compteur.

Elle s'oppose au paiement des sommes réclamées par les bailleurs reconventionnellement.

Aux termes de leurs conclusions d'intimés remises le 28 avril 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé détaillé des moyens développés, les époux [C]-[F] demandent à la cour :

- de dire bien jugé sur le débouté des réclamations de Mme [X] [I], mal jugé sur les sommes rejetées à titre accessoire ;

- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Mme [X] [I] à leur payer la somme de 2.338,25 €, outre 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- d'infirmer la décision entreprise pour le surplus.

y ajoutant,

- de débouter Mme [X] [I] de sa demande de dommages et intérêts infondée et irrecevable ;

-de déclarer recevables et bien fondées leurs demandes reconventionnelles ;

- de condamner Mme [X] [I] à leur payer les sommes additionnelles de :

$gt; 392 € au titre des 10 % sur loyers impayés ;

$gt; 989,45 €, au titre des 35% de la taxe foncière ;

$gt; 375 €, au titre de l'indemnité d'occupation du mois de juillet 2019 ;

$gt; 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Les intimés soutiennent que le contrat passé avec la locataire est clair, qu'elle produit un exemplaire tronqué et que pour le cas où il existe des contrats discordants il appartient au juge de les interpréter.

Ils soutiennent que les travaux étaient à la charge de la locataire et que ceux qu'elle a réalisés ne leur sont pas opposables. Dans ces circonstances ils considèrent que la résiliation du bail n'est pas consécutive à leur défaillance et que c'est la locataire qui y a mis fin abusivement en abandonnant le local, de sorte qu'ils sont bien fondés à lui demander paiement des loyers et pénalités jusqu'au terme.

Ils affirment que c'est à tort qu'ils ont été déboutés de leur demande en paiement portant sur l'indemnité de 10 %, les 35 % de la taxe foncière et l'indemnité d'occupation du mois de juillet 2019.

Ils s'opposent à la restitution du dépôt de garantie à défaut pour la locataire d'avoir réalisé les travaux auxquels elle s'était engagée et d'avoir payé les 35 % de la taxe foncière dans les termes du bail, mais également au motif qu'elle a gardé par devers elle les clés durant le mois de juillet 2019.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2021, l'affaire ayant été fixée pour plaider à l'audience du 22 mars 2022.

SUR CE :

A titre liminaire il est précisé que dans le corps de ses conclusions l'appelante soutient que le contrat de bail est nul en raison des manoeuvres dolosives des bailleurs, sans formuler de prétentions au dispositif, tirées de ce moyen, de sorte que ce développement est inopérant en application des articles 4 et 954 du code de procédure civile.

Sur le contrat applicable

Il ressort des échanges que si les parties sont d'accord pour dire qu'elles étaient liées contractuellement par un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux, que ce dernier portait sur la location d'un local commercial situé à [Localité 6] pour une durée d'une année à compter du 1er juillet 2018 sans possibilité de prolongation et sur le montant du dépôt de garantie versé par la locataire à hauteur de 1 575 €, elles sont en désaccord quand au document régissant leur relation contractuelle et plus particulièrement sur les modalités d'exécution du bail (loyer, travaux et charges).

Le bailleur produit un contrat comportant 13 pages signé par les parties et la locataire un document incomplet signé par les parties, ne comportant pas les pages 2,4,6,8,10 et 12 à savoir celles portant sur les dispositions litigieuses à savoir le montant du bail et la charge des travaux.

Cette situation contractuelle impose au juge de déterminer la commune intention des parties et le sens des documents versés aux débats et celui qui trouve à s'appliquer.

Aux termes de l'article 1188 le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes.

Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

Le contrat produit par les bailleurs contient un article fixant le loyer annuel à 5 400 € pour l'année soit 450 € par mois outre charge, et une clause travaux se trouvant en page 6 par lequel le bailleur a accepte de réduire le montant du loyer mensuel à la somme de 375 € en contre partie de la réalisation de travaux par la locataire d'une valeur de 900 €. La locataire produit des quittances de loyer originales remises par le bailleur démontrant que du mois de septembre à décembre 2018 elle a payé un loyer réduit de 370 € et un courrier dans lequel elle conteste le montant mentionné qui aurait dû être celui de 375 € ainsi qu'une attestation du bailleur dans laquelle il indique qu'elle est à jour des ses loyers d'un montant de 375 € par mois du 1er juillet au mois d'octobre 2018.

Dans ces circonstances, il y a lieu de faire application du contrat produit par les bailleurs dans la mesure où il est corroboré par les faits et caractérise la volonté des parties comme suit :

durée du bail : un an du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019 ;

loyer : 5 400 € pour l'année

charge : 35 % de la taxe foncière

clause travaux : le locataire s'engage à faire des travaux d'amélioration de l'arrière boutique à savoir :

$gt; le remaniement et remplacement des plaques de la verrière ;

$gt; le remplacement des toilettes ;

Ces travaux représentent la somme de 900 €.

En contre partie, celui ci se voit accordé une exonération de loyer de deux mois soit 75 € par mois déduit du loyer principal.

Le locataire versera la somme de 375 € par mois du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019.

Pour le surplus il ressort du bail que le locataire prendra les lieux loués dans l'état où ils se trouveront au moment de l'entrée en jouissance sans pouvoir exiger aucune réfection, remise en état, adjonction d'équipements supplémentaires, ou travaux quelconques mêmes s'ils étaient rendus nécessaires par l'inadaptation des locaux à l'activité.

Il se comprend de ces clauses qu'en contre partie de la réalisation de travaux d'une valeur de 900 €, le bailleur a accepté de réduire le loyer annuel du même montant soit 4 500 € au total et que pour le surplus la locataire a pris les lieux en l'état.

Sur la rupture du contrat

Mme [I] qui a pris les locaux en l'état sans pouvoir exiger la réalisation de travaux ne peut sérieusement soutenir que le contrat a été résilié aux torts des bailleurs à défaut pour ces derniers d'avoir réalisé des travaux lui permettant d'exploiter son activité.

Sur le compte entre les parties

Pour réaliser le compte entre les parties il convient au préalable de vérifier si la locataire a réalisé les travaux conditionnant la possibilité de bénéficier d'un loyer réduit.

Il ressort du procès verbal de constat dressé par l'huissier mandaté par la locataire sortante que

les plaques de la verrière n'ont pas été remaniées ni remplacées et que les toilettes n'ont pas été remplacé, de sorte que dans ces circonstances, Mme [I] ne pouvait bénéficier du loyer réduit.

Par ailleurs elle ne peut demander remboursement des matériaux achetés pou réaliser les travaux à sa charge, ni le montant de la cotisation d'assurance, ni le coût d'ouverture et de fermeture du compteur, dans la mesure où ces sommes sont à sa charge en sa qualité de preneur, faisant observer qu'en exposant ces frais elle a pu commencer à réaliser les travaux nécessaires à l'exploitation de son commerce, peu importe qu'ultérieurement elle n'ait pas poursuivi son projet.

Par ailleurs, la locataire a quitté les lieux le 30 juin 2019 sans pouvoir restituer les clés aux bailleurs, à défaut pour ses derniers de répondre à ses appels comme cela résulte d'un courrier qu'elle leur a adressé qu'ils ne contestent pas avoir reçu, de sorte qu'ils sont mal fondés à demander paiement d'une indemnité d'occupation pour le mois de juillet 2019.

Enfin, le bailleur qui a difficilement géré le compte de loyers et charges qui a établi des quittances portant des montants erronés est également mal fondé à demander paiement d'une clause pénale de 10 % portant sur le montant des loyers dus.

En conséquence le compte entre les parties pour la période du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019 se présente ainsi :

Loyer 5 400, 00 €

Taxe 943,25 € (35 % de 2 695 €)

soit au total : 6 343,25 €

dont à déduire :

Dépôt de garantie 1 575, 00 €

Loyers : 2 250, 00 € (6 x 375)

soit au total : 3 825 €

En conséquence, Mme [X] [I] est débitrice de la somme de 2 518,25 € à l'endroit des époux [C]-[F].

Sur les demandes accessoires

Chaque partie succombant il est fait masse des dépens de première instance et d'appel qui seront partagés par moitié entre les parties.

Pour le même motif il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties le montant des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe ;

Infirme la décision entreprise ;

statuant à nouveau et y ajoutant ;

condamne Mme [X] [I] à payer à M. [L] [C] et Mme [O] [F] épouse [C] la somme de 2 518,25 € ;

déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

déboute les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel ;

fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 21/00140
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;21.00140 ?
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