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28/04/2022 | FRANCE | N°20/02016

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 28 avril 2022, 20/02016


ARRET



















[N]

[F]





C/



S.A. SOCIETE GENERALE









DB





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 28 AVRIL 2022





N° RG 20/02016 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HWSG



Jugement du tribunal judiciaire de Senlis en date du 05 mai 2020.





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTS





Monsieur [B] [N]

[Adresse 3]

MONTATAIRE



Représenté par Me Khadija AKHZAM, avocat postulant au barreau de SENLIS, et ayant pour avocat plaidant Me Smeth SAMBA, avocat au barreau de PARIS





Madame [I] [F]

[Adresse 3]

MONTATAIRE



Représentée par Me Khadija AKHZAM, avocat postulant au barreau de SENLIS, et ayant pour ...

ARRET

[N]

[F]

C/

S.A. SOCIETE GENERALE

DB

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 28 AVRIL 2022

N° RG 20/02016 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HWSG

Jugement du tribunal judiciaire de Senlis en date du 05 mai 2020.

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur [B] [N]

[Adresse 3]

MONTATAIRE

Représenté par Me Khadija AKHZAM, avocat postulant au barreau de SENLIS, et ayant pour avocat plaidant Me Smeth SAMBA, avocat au barreau de PARIS

Madame [I] [F]

[Adresse 3]

MONTATAIRE

Représentée par Me Khadija AKHZAM, avocat postulant au barreau de SENLIS, et ayant pour avocat plaidant Me Smeth SAMBA, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

S.A. SOCIETE GENERALE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric KRAMER de la SCP FABIGNON,LARDON-GALEOTE,EVEN,KRAMER,ALLARD,REBOURCE, avocat au barreau de SENLIS, vestiaire : 160

DEBATS :

A l'audience publique du 30 Novembre 2021 devant Mme Dominique BERTOUX, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Février 2022.

GREFFIER : Madame [E] [R]

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre, en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 28 avril 2022.

Le 28 avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente a signé la minute avec Madame Vanessa IKHLEF, Greffière.

DECISION

Suivant offre de prêt immobilier en date du 24 avril 2018, acceptée le 07 mai 2018, la Société Générale a consenti à M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] un prêt d'un montant de 195.000 €, remboursable en 240 mensualités de 1.048,07 €, au taux d'intérêt de 1,80% l'an, hors assurance (TEG 2,47%).

Les fonds ont été intégralement décaissés le 28 mai 2018.

Soutenant avoir été informée par les services de police et de justice de l'existence d'une procédure judiciaire actuellement à l'instruction diligentée à l'encontre des époux [N], notamment pour travail dissimulé et abus de biens sociaux, la Société Générale, par actes d'huissier de justice du 17 décembre 2019, a fait assigner les époux [N] devant le tribunal de grande instance devenu tribunal judiciaire de Senlis, qui, par jugement réputé contradictoire en date du 05 mai 2020, a :

- rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture et écarté des débats les conclusions et pièces notifiées par les époux [N] postérieurement à l'ordonnance de clôture du 06 janvier 2020;

- prononcé la nullité du contrat de prêt conclu entre la Société Générale d'une part et M. [B] [N] et Mme [I] [F], épouse [N], d'autre part, d'un montant de 195.000 € en principal au taux de 1,80% selon offre acceptée en date du 24 avril 2018;

- condamné solidairement M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la Société Générale la somme de 186.662,86 € suivant décompte arrêté au 5 juin 2019, outre intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019;

- ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière;

- condamné in solidum M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la Société Générale la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile;

- rejeté le surplus de la demande de la Société Générale au titre des frais irrépétibles;

- condamné in solidum M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] aux dépens dont distraction au profit de Me Eric Kramer, avocat aux offres de droit en application de l'article 699 du code de procédure civile;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration au greffe en date du 02 juin 2020, les époux [N] ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises le 31 août 2020, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, les époux [N] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :

* ordonné la capitalisation des intérêts;

* rejeté le surplus de la demande de l'article 700 de la Société Générale;

* ordoinné l'exécution provisoire de la décision;

- dire et juger que :

* les pièces adverses concernant une enquête préliminaire sont irrecevables en ce que les éléments exposés ne peuvent être entendus et vus comme avérés;

* le contrat de prêt est valide;

* les époux [N] sont à même de remplir leurs obligations issues du contrat de prêt;

- ordonner l'exécution du prêt litigieux;

- condamner la Société Générale au paiement :

* d'une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts en tant qu'elle a interrompu le contrat la liant aux époux [N] sans faits tangiles, leur causant un préjudice moral certain et direct, ainsi que la perte de l'espérance des gains espérés en vue du contrat de prêt;

* d'une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises le 30 novembre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la Société Générale, formant appel incident, demande à la cour de :

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a prononcé la nullité du contrat de prêt;

- l'infirmer quant aux sommes mises à la charge des époux [N] en les portant de la somme de 186.662,86 € à la somme de 187.089,47 €, suivant décompte arrêté au 05 juin 2019, outre intérêts au taux légal à compter du 06 juin 2019, jusqu'à parfait paiement, et de les condamner solidairement à ces sommes;

- débouter les époux [N] de l'intégralité de leurs demandes;

en conséquence,

A titre principal,

- prononcer la nullité du contrat de prêt litigieux;

- condamner solidairement les époux [N] à lui payer la somme de 187.089,47 € suivant décompte arrêté au 05 juin 2019, outre intérêts au taux légal, jusqu'à parfait paiement;

A titre subsidiaire,

- prononcer la résiliation judiciaire à compter de la décision à intervenir du prêt litigieux;

- condamner solidairement les époux [N] à lui payer la somme de 187.089,47 € suivant décompte arrêté au 05 juin 2019, outre intérêts au taux légal, jusqu'à parfait paiemen;

A titre infiniment subsidiaire,

- prononcer la résolution judiciaire du prêt litigieux;

- condamner solidairement les époux [N] à lui payer la somme de 187.089,47 € suivant décompte arrêté au 05 juin 2019, outre intérêts au taux légal, jusqu'à parfait paiemen;

En toute hypothèse,

- ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière;

- condamner in solidum les époux [N] à lui payer la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me [K].

L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 novembre 2021.

SUR CE :

Pour statuer comme il l'a fait, et donc prononcer la nullité du contrat de prêt pour dol, le tribunal a relevé que les époux [N] avaient remis à la Société Générale différents documents et, notamment des bulletins de paye, destinés à permettre à la banque d'apprécier leur situation financière et patrimoniale ainsi que leur solvabilité. Il a considéré que l'analyse de ces documents (les bulletins de paye) permet de douter de leur sincérité et de leur véracité. Il a retenu que le fait d'avoir remis à la Société Générale de faux bulletins de paie a nécessairement trompé l'analyse de la banque sur le risque qu'elle prenait en accordant à M. et Mme [N] sur la foi de revenus fictifs un prêt immobilier; qu'il est évident que si les époux [N] n'avaient pas produit de tels documents financiers, la Société Générale ne leur aurait pas consenti un crédit immobilier et certainement pas à ces conditions dans la mesure où la banque s'est basée sur ces documents pour se convaincre qu'ils présentaient une capacité de remboursement suffisante pour honorer leurs engagements; que les manoeuvres des époux [N] sont suffisamment caractérisées et présentent une gravité justifiant la nullité du contrat de prêt dès lors qu'elles affectent l'essence même du contrat, celle d'exécuter avec loyauté et bonne foi; que les époux [N] ont ainsi manqué de loyauté dès l'origine des relations contractuelles avec la Société Générale, en communiquant de fausses informations sur la base desquelles le consentement de la banque a été vicié.

- sur le rejet de la demande de révocation de l'ordonnance de clôture

Les époux [N] demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté leur demande de révocation de l'ordonnance de clôture et a écarté des débats les conclusions et pièces des époux [N].

Outre le fait que les époux [N] ne formulent aucune demande d'accueillir les conclusions et pièces qui ont été rejetées par les premiers juges, l'ordonnance de clôture, et partant le rejet de la demande de révocation de l'ordonnance de clôture, sont insusceptibles de recours.

- sur la demande d'irrecevabilité des pièces de la Société Générale concernant une enquête préliminaire et sur la falsification des documents

Les époux [N] font valoir que la procédure pénale est en cours d'instruction; que la présomption d'innoncence doit primer; que l'ouverture d'une enquête préliminaire ne peut suffire à établir le caractère frauduleux des éléments fournis par eux (des bulletins de paye); qu'en vertu de l'article 11 du code de procédure pénale, il n'est pas admis de produire devant un juge civil des documents provenant d'une enquête en cours; que par conséquent les échanges avec les services de police ainsi que les réquisitions judiciaires seront écartés des débats.

Ils ajoutent que les éléments relevés par la Société Générale ne permettent pas d'établir qu'il n'y ait pas de réalité de l'emploi et que ces bulletins de paie n'aient pas été remis en réponse à une fourniture de travail de la part des époux [N]; qu'en tout état de cause leurs revenus étaient conformes à la réalité.

La Société Générale réplique qu'elle a été contactée par les services de police judiciaire chargée d'une enquête ouverte dans le cadre d'une instruction diligentée à l'encontre des époux [N] pour travail dissimulé et abus de biens sociaux; qu'à cette occasion, elle a pu constater que certains des documents qui lui avaient été remis par ces derniers au soutien de leur demande de prêt n'étaient pas sincères, ceux-ci laissant apparaître de fausses informations; que les époux [N] ne justifient aucunement de la réalité de leur emploi; que les pièces qu'ils ont remis constituent des documents falsifiés qui ont trompé l'appréciation de la banque.

Elle précise que le secret de l'enquête ne concerne que les seules personnes concourant à cette procédure; que conformément à l'alinéa 2 de l'article 11 du code de procédure pénale et à la jurisprudence, la Société Générale ne peut être considérée comme concourant à la procédure pénale; qu'aussi, quand bien même la Société Générale serait considérée comme victime au sens pénal du terme, rien ne pourrait s'opposer à ce qu'elle communique des informations dont elle a pu avoir connaissance et justifiant de la falsification des documents qui lui ont été remis, en dépit du fait que ceux-ci soient au moins pour partie tirés d'une procédure pénale en cours; que ces pièces sont donc recevables.

Selon l'article 11 du code de procédure pénale ' sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal' dans sa version antérieure à la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021, 'dans les conditions et sous les peines de l'article 434-7-2 du code pénal' dans sa version postérieure.

Il est admis que la personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit et qui s'est constituée partie civile devant le juge d'instruction ne peut être considérée comme concourant à la procédure d'information de sorte qu'elle n'est pas soumise aux exigences de l'article 11.

C'est, par conséquent, à bon droit, que la Société Générale en déduit que le secret de l'enquête ne concerne que les seules personnes concourant à cette procédure, que n'y concourant pas, les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ne lui sont pas applicables.

Ainsi, quand bien même la Société Générale serait elle considérée comme victime, elle peut communiquer des informations dont elle a eu connaissance au soutien de ses déclarations selon lesquelles des documents falsifiés lui ont été remis, en dépit du fait que ceux-ci soient au moins pour partie tirés d'une procédure pénale en cours.

Les pièces provenant de l'enquêtre préliminaire, et plus particulièrement les pièces 12 (Mail de M. [W] [J], brigadier chef de police, groupe d'intervention régional des Hauts de Seine du 11 février 2019) et 13 (réquisitions judiciaires et réponses de la Société Générale) versées aux débats par la Société Générale sont par conséquent recevables.

- sur la nullité du contrat de prêt

Selon l'article 1128 du code civil applicable au présent litige, ' sont nécessaires à la validité d'un contrat :

1°) le consentement des parties;

2°) leur capacité de contracter;

3°) un contenu licite et certain.'

L'article 1130 de ce code dispose que 'l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.'

Aux termes de l'article 1131 du même code 'Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.'

Enfin l'article 1137 énonce que 'le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.'

En l'espèce, c'est par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le premier juge a prononcé la nullité du contrat de prêt immobilier consenti aux époux [N] selon offre en date du 24 avril 2018, acceptée le 07 mai 2018, pour dol. Le jugement sera par conséquent confirmé de ce chef, la cour observant qu'il n'est produit en cause d'appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation faite par le tribunal.

En effet, au soutien de leur appel, les époux [N] font valoir que le contrat de prêt ne peut être annulé sur le fondement du dol car les manoeuvres ou les mensonges ne sont nullement établis.

Toutefois, alors que les époux [N] ne contestent pas avoir remis à la Société Générale lors de la souscription du prêt immobilier, pour justifier de leur situation financière et patrimoniale ainsi que de leur solvabilité, des bulletins de salaires sur la période de décembre 2017 à mars 2018, les services de police ont informé la banque de ce qu'ils avaient constaté, dans le cadre d'une enquête pénale préliminaire, qu'il s'agissait de fausses fiches de paye en ce qu'ils mentionnaient :

* en ce qui concerne Mme [I] [F] épouse [N], comme employeur une société Art du Sol placée en liquidation judiciaire le 02 juillet 2014 avec une date de cessation des paiements fixée au 01 mai 2014, avec un numéro de SIREN et un siège social falsifiés (520 895 624 au lieu de 520 895 642, et 123 au lieu de [Adresse 1]), ainsi qu'une date d'embauche à compter du 02 janvier 2017 sans qu'il soit justifié de l'existence d'une déclaration d'embauche la concernant entre 2016 et 2018,

* en ce qui concerne M. [B] [N], comme employeur la société Peinture Générale Matt connue comme une société suspecte ayant eu plusieurs gérants successifs, une date d'embauche du 02 mai 2016 sans déclaration d'embauche faite par cette société, alors que les investigations avaient établies que pendant cette même période, M. [N] tirait l'essentiel de ses revenus d'une autre société dont il était le gérant de fait : la société Artsol.

A cet égard, la cour observe que cet élément est corroboré par l'examen des relevés du compte joint ouvert par les époux [N] au Crédit Agricole pour la même période où est mentionné chaque mois un 'virement Artsol Salariés'.

L'ensemble de ces éléments suffisent à caractériser la falsification de ces documents, étant observé que les époux [N] ne versent aux débats aucune pièce permettant d'établir la réalité des emplois qu'ils prétendaient occuper lors de la souscription du prêt et des revenus qu'ils leur procuraient.

Or le fait d'avoir remis à la Société Générale de faux bulletins de paye a nécessairement trompé l'appréciation faite par la banque de la solvabilité des candidats à l'emprunt et partant du risque qu'elle prenait en leur accordant sur la foi de revenus fictifs un prêt immobilier, ce qui est constitutif de manoeuvres frauduleuses ayant vicié le consentement du prêteur suffisamment graves pour justifier la nullité du contrat de prêt, dès lors qu'elles affectent l'essence même du contrat, celle d'exécuter avec loyauté et bonne foi.

- sur l'appel incident de la Société Générale

Le tribunal a condamné solidairement les époux [N] à payer à la Société Générale la somme de 186.662,86 € correspondant au principal demandé augmenté des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019, date de l'assignation valant mise en demeure, après compensation entre les sommes dues par chacune des parties suite à l'annulation du contrat de prêt.

La Société Générale sollicite en sus, comme en première appel, le règlement des intérêts calculés au taux légal arrêtés au 05 juin 2019, date d'arrêté du décompte produit, pour un montant de 426,61 €, outre les frais et intérêts au taux légal du 06 juin 2019 jusqu'à parfait paiement pour mémoire.

Les époux [N] n'opposent aucun moyen à cette demande.

Il est admis que celui qui est condamné à restituer une somme indûment perçue doit les intérêts du jour de la demande s'il était de bonne foi et du jour du paiement s'il ne l'était pas.

Dès lors, dans la mesure où le contrat de prêt est annulé pour dol qui est la démonstration de la mauvaise foi des emprunteurs, la Société Générale est fondée à solliciter le règlement des intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2018, soit au 05 juin 2019, la somme de 426,61 €, qui continuent à courir jusqu'à parfait paiement.

Il convient, dans ces conditions, de condamner solidairement M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la SA Société Générale la somme de 187.089,47 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 06 juin 2019 jusqu'à parfait paiement.

La décision entreprise sera réformée en ce sens.

Le jugement dont appel sera en revanche confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

- sur la demande de dommages et intérêts des époux [N]

Le contrat de prêt étant annulé pour dol des époux [N], ces deniers ne justifient donc d'aucun préjudice résultant de l'interruption de ce contrat sans faits tangibles comme ils le prétendent.

Il convient, en conséquence, de les débouter de ce chef de demande.

- sur les autres demandes

Les époux [N] qui succombent en cause d'appel seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de la SA Société Générale ses frais irrépétibles, non compris dans les dépens, exposés en cause d'appel, qu'il convient d'évaluer à la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité de procédure allouée en première instance, justement évaluée en équité à la somme de 1.000 € qui sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

DECLARE recevables les pièces provenant de l'enquêtre préliminaire et plus particulièrement, les pièces 12 et 13 versées aux débats par la Société Générale;

CONFIRME la décision entreprise sauf en ce qu'elle a condamné solidairement M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la Société Générale la somme de 186.662,86 € suivant décompte arrêté au 5 juin 2019, outre intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2019;

statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant

CONDAMNE solidairement M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la Société Générale la somme de 187.089,47 € suivant décompte arrêté au 5 juin 2019, outre intérêts au taux légal à compter du 06 juin 2019;

DEBOUTE les époux [N] de leur demande de dommages et intérêts;

CONDAMNE in solidum M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] à payer à la Société Générale la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE in solidum M. [B] [N] et Mme [I] [F] épouse [N] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Eric Kramer, avocat, qui le demande.

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 20/02016
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;20.02016 ?
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