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26/04/2022 | FRANCE | N°18/01486

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre Économique, 26 avril 2022, 18/01486


ARRET



















E.A.R.L. POULET





C/



S.A.S. LOCAM









CV





COUR D'APPEL D'AMIENS



CHAMBRE ÉCONOMIQUE



ARRET DU 26 AVRIL 2022





N° RG 18/01486 - N° Portalis DBV4-V-B7C-G6FB



JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D' AMIENS EN DATE DU 21 MARS 2018





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE



E.A.R.L. POULET, agissant poursu

ites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Chloé Peyres substituant Me Marie-pierre ABIVEN de la SCP FRISON ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 2





ET :





INTIMEE



S.A.S. L...

ARRET

E.A.R.L. POULET

C/

S.A.S. LOCAM

CV

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 26 AVRIL 2022

N° RG 18/01486 - N° Portalis DBV4-V-B7C-G6FB

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D' AMIENS EN DATE DU 21 MARS 2018

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

E.A.R.L. POULET, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Chloé Peyres substituant Me Marie-pierre ABIVEN de la SCP FRISON ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 2

ET :

INTIMEE

S.A.S. LOCAM, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Hervé SELOSSE-BOUVET, avocat postulant au barreau d'AMIENS, vestiaire : 81, et ayant pour avocat plaidant la SELARL LEXI CONSEIL ET DEFENSE, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

DEBATS :

A l'audience publique du 08 Février 2022 devant Mme Cybèle VANNIER, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Avril 2022.

GREFFIER : Madame Vanessa IKHLEF

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Cybèle VANNIER en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Dominique BERTOUX, Présidente de chambre,

et Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 26 Avril 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Mme Dominique BERTOUX, Présidente a signé la minute avec Madame Vanessa IKHLEF, Greffier.

DECISION

La SAS Locam a conclu un contrat de location longue durée le 3 octobre 2015 avec l'Earl Poulet , entreprise agricole , destiné à financer du matériel d'éclairage . Le matériel a été livré , et les quatre premiers loyers ont été réglés , les loyers suivants n'ont pas été payés de sorte que la société Locam a adressé une mise en demeure de payer à l'Earl Poulet qui est restée infructueuse .

La SAS Locam a a fait assigner en paiement l'Earl Poulet devant le Tribunal de Grande Instance d'Amiens .

Par jugement en date du 21 mars 2018 , le Tribunal de Grande Instance d'Amiens a :

-débouté l'Earl Poulet de ses demandes tendant à voir constater la nullité du contrat sur le fondement des dispositions du code de la Consommation et du Code Monétaire et Financier et , de sa demande subséquente en restitution des sommes versées .

-débouté l'Earl Poulet de sa demande tendant à voir constater l'exercice de son droit de rétractation et de sa demande subséquente en restitution des sommes versées .

-condamné l'Earl Poulet à verser à la SAS Locam la somme de 11 086, 77 € avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2016 .

-rejeté la demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par l'Earl Poulet .

-condamné l'Earl Poulet à payer à la SAS Locam la somme de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

-condamné l'Earl Poulet aux entiers dépens dont distraction sera faite au profit de M.[I] [Y] .

-ordonné l'exécution provisoire .

Par déclaration enregistrée le 20 avril 2018 , l'Earl Poulet a interjeté appel de la décision .

Par ordonnance en date du 13 juillet 2018 , Mme la Première Présidente a arrêté l'exécution provisoire du jugement rendu le 21 mars 2018 .

Par ordonnance en date du 12 décembre 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la SAS Locam ,notifiées le 15 octobre 2018, au motif qu'elles n'avaient pas été transmises dans le délai imparti .

Par conclusions d'incident en date du 10 août 2020 , l'Earl Poulet a demandé un sursis à statuer dans l'attente des suites réservés à l'enquête préliminaire en cours auprès du parquet de [Localité 5] pour pratiques trompeuses de la société Afden , fournisseur du matériel en cause .

Le conseiller de la mise en état , par décision du 15 décembre 2020 , a :

-déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par l'Earl Poulet .

-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté la demande formée sur ce fondement par la société Locam .

-dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens .

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 12 juillet 2018 , l'Earl Poulet demande à la Cour de :

Avant dire droit ,

-Surseoir à statuer dans l'attente des suites réservées à l'enquête préliminaire en cours auprès du parquet de Créteil sur les pratiques trompeuses

A titre principal,

-constater et dire que la société Locam a manqué à son devoir de conseil et d'information au titre du code de la consommation.

-constater la nullité du contrat de location dont se prévaut la société Locam

-infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Amiens en date du 21 mars 2018.

-débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire ,

-constater et dire que la société Locam a méconnu son devoir d'information relative au droit de rétractation.

-Constater l'exercice effectif de son droit de rétractation.

-Infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Amiens en date du 21 mars 2018.

-Débouter la société Locam de son droit de l'intégralité de ses demandes fins et prétentions

A titre infiniment subsidiaire ,

-constater et dire que la société Locam a manqué à son devoir de conseil et d'information au titre du code monétaire et financier.

-constater la nullité du contrat de location dont se prévaut la société Locam .

-en conséquence , infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Amiens en date du 21 mars 2018.

-débouter la société Locam de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions .

En tout état de cause ,

-déclarer la demande recevable bien-fondée ,

-infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'Amiens en date du 21 mars 2018.

-condamner la société Locam sous astreinte de 300 € par jour de retard dans le mois suivant la signification de la décision à intervenir à payer la somme de 719 , 92 € outre intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2016.

-condamner la société Locam à verser à l'Earl Poulet la somme de 5000€ au titre du préjudice moral.

-condamner la société Locam à verser à l 'Earl Poulet la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

-condamner la société Locam aux entiers dépens .

L'Earl Poulet expose qu'elle est une petite entreprise agricole en difficulté, propriétaire de 48 ha sur lesquels elle élève des vaches , que le 3 octobre 2015 , un vendeur de la société Locam ou de la société Afden est venu pour lui proposer un contrat de location longue durée d'un kit led , que malgré des imprécisions sur le bon de commande , un kit Led lui a été livré le 19 novembre 2015 , que ce n'est que le 4 décembre 2015 , qu'elle n'a eu connaissance du montant exact de cette location. Elle fait valoir que le contrat est en réalité un contrat tripartite entre la société Afden , fournisseur , la société Locam , société de financement intermédiaire et l'Earl Poulet , qu'elle a appris qu'une enquête pénale était ouverte contre la société Afden notamment pour des faits de pratique commerciale trompeuses , remise d'un contrat non conforme , que le sursis à statuer s'impose eu égard aux informations que permettront de révéler cette procédure .

Elle déclare que les dispositions du code de la consommation sont applicables au litige en application de l'article L 121 -6 dudit code , qu'elle a été démarchée par un vendeur à domicile ,et que le contrat n'entre pas dans le champ de son activité principale , qu'elle n'a pas reçu les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation , aux frais supportés en cas d'exercice de ce droit , ni les informations relatives aux coordonnées du professionnel , aux modalités de résiliation , aux modes de règlement des litiges , que la société Locam a donc méconnu son obligation d'information précontractuelle , que le contrat ne comporte pas les mentions obligatoires au titre de l'article L 121-17 ,que le contrat est donc entaché de nullité .

Elle fait valoir à titre subsidiaire que s'il était considéré que la nullité est couverte par l'exécution du contrat , le délai de rétractation a été prolongé de 12 mois puisque les informations relatives à ce droit ne lui ont pas été données , et ce , en application de l'article L 121-17 du code de la consommation , qu'en l'espèce , le contrat est daté du 17 octobre 2015 , qu'elle avait jusqu'au 17 octobre 2016 pour se rétracter , ce qu'elle a fait le 19 mai 2016 par courrier en LRAR , qu'aucune somme ne peut donc lui être demandée .

A titre infiniment subsidiaire , elle déclare que les dispositions propres au contrat portant sur des services financiers ont été méconnues que les renseignements prévus aux articles L 341-12 et R 341 -16 du code monétaire et financiers n'ont pas été donnés , que le démarcheur n'a fait connaître que son prénom et non son nom et son adresse professionnelle , qu'aucun document d'information particulier relatifs aux produits , instruments financiers et services proposés n'a été porté à sa connaissance , que le contrat ne comporte pas la mention de la loi applicable ni les droits relatifs à la résiliation , que les conditions particulières du contrat sont situées au verso lequel n'est pas signé , que ces manquements entrainent la nullité du contrat.

Pour un exposé détaillé des prétentions et moyens de l'Earl Poulet , la Cour renvoie à ses écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile .

L'ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 2 décembre 2021 .

SUR CE

A titre liminaire , la Cour rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile , la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les « dire et juger » et les « constater » ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi , en conséquence , la Cour ne statuera pas sur celles-ci , qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués .

Sur la demande de sursis à statuer

Selon l'article 4 alinea 3 du code de procédure pénale , la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile , de quelque nature qu'elles soient , même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer directement ou indirectement , une influence sur la solution du procès civil .

En l'espèce , le présent litige concerne la validité et l'exécution du contrat de location financière conclu avec la société Locam .Quand bien même ce dernier contrat est interdépendant avec le contrat principal de fourniture , seule la société Afden , qui n'a pas été attrait en la cause , est actuellement concernée par les poursuites pénales exercées devant le Tribunal correctionnel de Créteil , le sursis à statuer ne s'impose donc pas .

Sur l'application et le non respect des dispositions du Code de la consommation

En application de la loi n° 2014 -344 du 17 mars 2014 , le droit de rétractation a été rallongé et étendu au professionnel dans certaines conditions.

Les articles L 221-1 à L 221-3 du code de la consommation prévoient que les dispositions relatives à l'obligation d'information précontractuelle aux contrats conclus hors établissement et au droit de rétractations sont étendus aux contrats conclus entre deux professionnels dés lors que ces contrats n'entrent pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à 5 .

Il est constant que le contrat de location a été signé à la suite d'un démarchage chez M.[N] Poulet par un commercial de la société Agence Française des énergies nouvelles , l'objet de la location étant un kit led et une batterie de condensateur .Ce bien n'entre pas dans le champ de l'activité principale de l'entreprise Poulet qui a une activité agricole , et qui comprend moins de 5 salariés .

En application de l'article L 121 -17 dudit code en vigueur à la date du contrat ,devaient être communiquées les informations sur le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation, un formulaire type de rétractation .L'article L 121 -21 -2 dispose notamment que le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies dans les conditions de l'article L 121-17 .

Le contrat a été signé le 3 octobre 2015 , aucun élément n'est produit qui établirait que des informations aient été données à l'Earl Poulet sur le délai de rétractation dont elle bénéficiait et sur les modalités de son exercice éventuel , dans ces conditions , elle a bénéficié d'une prolongation de son délai de rétractation de 12 mois à compter du 17 octobre 2015 , or l'Earl Poulet justifie avoir fait valoir son droit de rétractation par courrier en recommandé avec accusé de réception tant auprès de la société Locam que de la société Agence des Energies Nouvelles les 24 et 25 mai 2016 , soit dans le délai imparti , en raison de l'anéantissement du contrat principal , l'Earl Poulet n'a donc plus d'obligation à paiement envers la société Locam et il convient de faire droit à sa demande de restitution de la somme de 719, 92 € outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 24 mai 2016 , sans qu'il y ait lieu d'ordonner une astreinte .

Sur la demande de dommages et intérêts

L'earl Poulet ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice distinct du simple retard réparé par les intérêts au taux légal et notamment la preuve de l'existence d'un préjudice moral , sa demande de dommages et intérêts ne peut prospérer .

Sur les frais irrépétibles

La société Locam succombant , sera condamnée à payer à l'Earl Poulet la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens .

PAR CES MOTIFS ,

La Cour , statuant par arrêt contradictoire , en dernier ressort , par mise à disposition au greffe

Déboute l'Earl Poulet de sa demande de sursis à statuer .

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions .

Condamne la SAS Locam à payer à l'Earl Poulet la somme de 719, 92€ outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 24 mai 2016 .

Dit n'y avoir lieu à astreinte .

Condamne la SAS Locam à payer à l'Earl Poulet la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

Déboute l'Earl Poulet de toute autre demande .

Condamne la SAS Locam aux dépens

Le Greffier,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre Économique
Numéro d'arrêt : 18/01486
Date de la décision : 26/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-26;18.01486 ?
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