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27/02/2008 | FRANCE | N°07/00029

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre sociale, 27 février 2008, 07/00029


ARRET
No

Y...

C /

SOCIETE ELECTROLUX

JL / SEI.

COUR D' APPEL D' AMIENS

5ème chambre sociale cabinet B
PRUD' HOMMES

ARRET DU 27 FEVRIER 2008

*************************************************************

RG : 07 / 00029

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD' HOMMES de CREIL en date du 29 juin 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur Alain Y...
...
75116 PARIS

Représenté, concluant et plaidant par Me Christian GARNIER, avocat au barreau de BEAUVAIS.

ET :

INTIMEE



SOCIETE ELECTROLUX FRANCE SAS, filiale française de la société suédoise HOLDING ELECTROLUX AB
43, Avenue Félix Louat
60300 SENLIS

Représentée, concluan...

ARRET
No

Y...

C /

SOCIETE ELECTROLUX

JL / SEI.

COUR D' APPEL D' AMIENS

5ème chambre sociale cabinet B
PRUD' HOMMES

ARRET DU 27 FEVRIER 2008

*************************************************************

RG : 07 / 00029

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD' HOMMES de CREIL en date du 29 juin 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur Alain Y...
...
75116 PARIS

Représenté, concluant et plaidant par Me Christian GARNIER, avocat au barreau de BEAUVAIS.

ET :

INTIMEE

SOCIETE ELECTROLUX FRANCE SAS, filiale française de la société suédoise HOLDING ELECTROLUX AB
43, Avenue Félix Louat
60300 SENLIS

Représentée, concluant et plaidant par Me Marie- Laure LABAT- OLIVEAU, avocat au barreau de PARIS.

DEBATS :

A l' audience publique du 11 Septembre 2007 ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives devant Mme SEICHEL, Conseiller, siégeant en vertu des articles 786 et 945- 1 du nouveau Code de procédure civile sans opposition des parties qui a renvoyé l' affaire à l' audience publique du 31 octobre 2007, pour prononcer l' arrêt par mise à disposition au greffe de la copie.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme SEICHEL en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, cabinet B de la Cour composée en outre de :

Mme DARCHY, Président de chambre,
Mme LECLERC- GARRET, Conseiller,
qui en a délibéré conformément à la loi.

A l' audience publique du 31 octobre 2007, la Cour a décidé de prolonger le délibéré et a renvoyé l' affaire à l' audience publique du 19 décembre 2007 pour prononcer l' arrêt.

A l' audience publique du 19 décembre 2007, la Cour a décidé de prolonger le délibéré et a renvoyé l' affaire à l' audience publique du 30 janvier 2008 pour prononcer l' arrêt.

A l' audience publique du 30 janvier 2008, la Cour a décidé de prolonger le délibéré et a renvoyé l' affaire à l' audience publique du 27 février 2008 pour prononcer l' arrêt.

PRONONCE :

A l' audience publique du 27 Février 2008, l' arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme DARCHY, Président de chambre et Mme LEROY, Greffier, présente lors du prononcé.

*
* *

DECISION :

Alain Y... a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 14 avril 1986 en qualité de Directeur Administratif au sein de la SA ELECTROLUX, devenue ELECTROLUX France SAS, filiale française de la société suédoise ELECTROLUX AB.

Il a successivement occupé les fonctions de Directeur Juridique à compter du 1er mai 1989 puis de Directeur Central des Ressources Humaines du Groupe ELECTROLUX France à compter du 1er juillet 1994.

Parallèlement à cette dernière fonction, il a occupé celle de Coordinateur Régional des Ressources Humaines pour la région Europe de l' Ouest à compter de 1997.

En mai 2003, dans le cadre d' une restructuration, il a fait l' objet d' une première procédure de licenciement qui a finalement été abandonnée.

En décembre 2003, il a été nommé Président de la société ELECTROLUX HOME PRODUCTS France SAS avec mission de gérer la fermeture de l' usine de REIMS qui est intervenue le 31 mars 2005.

La société ELECTROLUX ayant décidé une organisation des Ressources Humaines équivalente à celle des autres entités européennes, le poste d' Alain Y... a été supprimé.

Par courrier du 21 février 2005, il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement pour le 3 mars 2005.

Par courrier du 1er avril 2005, la Société ELECTROLUX adressait le descriptif de quatre postes disponibles à Alain Y... qui, le 6 avril suivant, lui demandait des informations complémentaires.

Après s' être tournée vers les personnes en charge du recrutement pour ces postes, elle informait Alain Y... le 18 avril 2005 de ce que les trois postes localisés à l' étranger nécessitaient des conditions de maîtrise de la langue étrangère ou de la législation du travail locale ne lui permettant pas d' y accéder et que la création du quatrième poste en France était reportée.

Par courrier du 20 avril 2005, elle notifiait son licenciement pour motif économique à Alain Y... suite à la suppression de son poste résultant d' une « restructuration destinée à sauvegarder la compétitivité de la société dans le cadre d' un effort général demandé par le groupe à l' échelle européenne et s' imposant à tous les secteurs ainsi qu' aux fonctions centrales ».

Sur demande d' Alain Y..., elle lui proposait par courrier du 10 mai 2005 de bénéficier des prestations d' un cabinet d' outplacement, ce qu' il acceptait par courrier du 16 mai suivant.

Contestant son licenciement et réclamant un rappel de bonus, Alain Y... a saisi le Conseil de Prud' hommes de CREIL qui, par un jugement du 29 juin 2006, a :

- dit le licenciement économique d' Alain Y... fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS ELECTROLUX France à lui payer les sommes suivantes :

* 15. 232, 00 euros à titre de rappel sur bonus 2003 et 2004,

* 1. 523, 20 euros à titre de congés payés y afférents,

* 3. 806, 10 euros à titre de complément d' indemnité de préavis,

* 380, 61 euros à titre de congés payés y afférents,

* 7. 420, 09 euros à titre de complément d' indemnité de licenciement,

- débouté Alain Y... du surplus de ses demandes,

- débouté la SAS ELECTROLUX France de sa demande au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Cette décision a été notifiée le 9 décembre 2006 à Alain Y... qui en a relevé appel le 3 janvier 2007.

Par des conclusions du 17 juin 2007, régulièrement communiquées et soutenues à l' audience du 11 septembre 2007, Alain Y... demande à la Cour :

- de dire que la SAS ELECTROLUX France ne justifie pas avoir régulièrement prononcé son licenciement pour les motifs économiques réels et sérieux évoqués dans la lettre de licenciement,

- de constater que l' employeur n' a procédé à aucune recherche réelle et sérieuse de tentative de reclassement,

- de dire que le défaut de cause économique justifiée équivaut à une absence de cause économique et que l' absence de recherche sérieuse de tentative de reclassement rend le licenciement sans motif économique réel et sérieux,

- de condamner la SAS ELECTROLUX France à lui payer une somme de 863. 481, 24 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de la condamner en outre au paiement des sommes suivantes :

*88. 805 euros à titre de complément de bonus pour les exercices 2003, 2004, et 2005,

* 8. 880 euros à titre de congés payés sur rappel de bonus,

* 37. 947, 42 euros à titre d' indemnité complémentaire de préavis,

* 3. 794 euros à titre d' indemnité complémentaire de congés payés sur préavis,

* 90. 357, 67 euros à titre d' indemnité complémentaire de licenciement,

- de dire qu' en procédant à son licenciement, la SAS ELECTROLUX France l' a privé de la chance de percevoir une retraite complémentaire dont le capital s' élève à la somme de 380. 000 euros,

- de condamner la SAS ELECTROLUX France à lui payer cette somme en réparation du préjudice subi par cette perte de chance,

- de la condamner à lui payer 1 euros en réparation du préjudice moral qu' il a subi,

- de la condamner enfin à lui payer 3. 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Alain Y... fait valoir :

- que la SAS ELECTROLUX France a montré une volonté affirmée de rompre les contrats de travail de ses plus anciens collaborateurs ; qu' en définitive, les motifs de la lettre de licenciement sont essentiellement la prétendue suppression des deux postes qu' il occupait à l' effet d' harmoniser la situation française avec celle des autres organisations européennes ; que cette anomalie existait depuis novembre 2002, alors qu' il a été licencié en avril 2005 ; qu' il n' est pas fait état en quoi cette restructuration était rendue nécessaire par la situation économique et la sauvegarde de la compétitivité à la fois de la société française et du Groupe mondial ; que le regroupement de toutes les fonctions était illusoire ; qu' aucun élément de preuve ne permet de vérifier si les difficultés économiques sont établies au niveau du secteur d' activité du groupe dont relève l' entreprise et ce à la date du licenciement ; que réduire les charges en supprimant son poste permet d' augmenter les profits et ne peut se confondre avec la notion de compétitivité ; que l' employeur ne justifie pas s' être trouvé dans l' impossibilité de maintenir son contrat de travail ; que par conséquent son licenciement est irrégulier et sans cause réelle et sérieuse ;

- que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit énoncer à la fois la cause économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l' emploi ; qu' un énoncé imprécis, ce qui est le cas, équivaut à une absence de motif ;

- que l' employeur ne justifie pas avoir effectué une recherche réelle de reclassement ; que celle- ci ne devait pas être réalisée uniquement lors de la procédure de licenciement en mars et avril 2005, mais dès la première procédure diligentée au cours de l' année 2003, comme il avait incité à plusieurs reprises les hauts responsables du groupe à le faire ; que doit être justifiée une réelle tentative de reclassement ; ce que ne constituaient pas les propositions formulées dans la lettre du 1er avril 2005 ; que lorsqu' il a proposé ces postes, l' employeur en connaissait les conditions ; que l' employeur s' est limité à des recherches sur un poste correspondant à son profil, alors qu' il aurait accepté des responsabilités et des conditions d' emploi différentes ; que les recherches ont été tardives et ont empêché que certains postes lui soient proposés ;

- que la revalorisation des salaires des cadres était annuellement examinée, ceux- ci bénéficiant depuis 1996, pour chaque exercice, d' un bonus annuel de revalorisation ; que l' employeur prenait lui- même l' initiative de lui notifier, soit par correspondance, soit par mémorandum interne, la valeur de son bonus et les conditions d' attribution, et ce après discussion ; que le principe de l' attribution d' un bonus n' est pas contestable ; qu' au titre de l' exercice 2003 seul un acompte lui a été versé ; qu' aucun avenant n' a plus été proposé à sa signature ; qu' il en est de même pour l' exercice 2004 ; qu' à cette date était prévu un bonus supplémentaire en raison de la clôture dans des conditions particulièrement excellentes de la mission qui lui avait été confiée, à savoir la fermeture de l' établissement de REIMS ; qu' en raison de la progression des chiffres, il affirme être en droit de soutenir que les plafonds auraient au moins été à la hauteur de 41. 200 euros par année ; que la distinction entre les objectifs personnels et le bonus financier complémentaire ne ressort que de l' avenant du 3 juillet 2002 que l' employeur lui- même a limité à cette année- là ; que ce raisonnement ne saurait s' appliquer aux autres années ;

- que la rémunération pendant la période du préavis ne peut être amputée du bonus sous prétexte qu' il a été dispensé de l' exécuter ; que l' employeur devait l' indemniser du salaire correspondant au préavis en tenant compte de la valeur du salaire de compensation intégrant nécessairement les indemnités complémentaires de bonus et de congés payés y afférents ; qu' il en a été de même en ce qui concerne l' indemnité de licenciement ;

- que les cadres du groupe ELECTROLUX bénéficient lorsqu' ils ont atteint 60 ans et 160 trimestres d' activité professionnelle d' une retraite complémentaire versée par le Groupe AXIVA ; qu' en procédant à son licenciement, l' employeur lui a interdit d' en bénéficier ; qu' il a perdu une chance de profiter de ce contrat ; qu' il doit donc obtenir réparation du préjudice subi par la perte de chance d' en bénéficier à hauteur de la somme qu' il aurait perçue, cette échéance étant plus que probable ;

- qu' à compter de la première procédure de licenciement, procédure interrompue, il n' a cessé d' interpeller l' employeur sur la poursuite de sa carrière ; que l' employeur s' est refusé à prendre en compte ses préoccupations ; que l' accès à plusieurs postes lui a été refusé ; que l' employeur reconnaît que l' accès aux réunions du Comité des Ressources Humaines du Groupe lui a été interdit, et que lui a été supprimée l' exécution de certaines tâches qui lui avaient toujours été confiées ; que la Cour réparera le préjudice moral subi en lui attribuant un euro symbolique de dommages et intérêts.

Par des conclusions du 3 septembre 2007, régulièrement communiquées et développées à l' audience du 11 septembre 2007, la SAS ELECTROLUX France demande à la Cour :

- de confirmer le jugement en ce qu' il a :

* dit que le licenciement pour motif économique d' Alain Y... était fondé sur une cause réelle et sérieuse et constaté qu' elle avait régulièrement rempli son obligation de reclassement,

* débouté Alain Y... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* débouté Alain Y... de son rappel de bonus pour l' année 2005,

* débouté Alain Y... de sa demande de dommages et intérêts pour perte de chance au titre de la retraite complémentaire,

* débouté Alain Y... de sa demande au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- d' infirmer le jugement en ce qu' il l' a condamné à payer à Alain Y... un rappel de bonus pour 2003 et 2004, et les congés payés y afférents, un complément d' indemnité de préavis et les congés payés y afférents, ainsi qu' un complément d' indemnité de licenciement,

- d' infirmer le jugement entrepris en ce qu' il l' a déboutée de sa demande au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Statuant à nouveau,

- de constater qu' elle a versé à Alain Y... toutes les sommes qui lui étaient dues au titre des bonus 2003 et 2004, et qu' elle ne lui doit aucun bonus au titre de l' année 2005, ni au titre d' un quelconque reliquat au titre du projet de REIMS pour lequel lui a été versée une prime exceptionnelle et non un bonus,

- de constater qu' aucun solde de bonus ne lui est dû au titre de ces exercices et de la prime LCI, ni aucune régularisation au titre de l' indemnité de préavis et de l' indemnité conventionnelle de licenciement,

- de débouter Alain Y... de ses demandes de rappel de bonus 2003, 2004 et 2005, et de ses demandes de rappels d' indemnité de licenciement et d' indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents,

- d' ordonner la restitution par Alain Y... de la somme de 24. 654, 07 euros perçue au titre de l' exécution provisoire,

- de débouter Alain Y... de l' intégralité de ses demandes,

- de condamner Alain Y... à lui payer une somme de 3. 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SAS ELECTROLUX France fait valoir :

- que le groupe ELECTROLUX a engagé en novembre 2002 une restructuration globale de toutes les holdings ; que le but était de diviser l' Europe en zones géographiques et de rendre plus autonome chaque secteur d' activité du groupe ; que les départements des ressources humaines ont été directement touchés par cette réorganisation, une part de leur mission étant attribuée aux CHO (« Country Holding Officer ») et l' autre étant reprise par chaque secteur d' activité ; que le résultat de cette réorganisation était la suppression des départements Ressources Humaines centraux par pays ; qu' en Italie et en France la restructuration a été appliquée plus tardivement ; qu' elle devait se traduire par la suppression des fonctions d' Alain Y... qui ont été reprises par Guillaume X..., Président et Directeur Général de la société et CHO pour la France ; qu' une première procédure de licenciement a été engagée à l' encontre du salarié ; qu' elle n' a pas été poursuivie, des missions additionnelles pouvant lui être confiées ; qu' il s' agissait d' une recherche de reclassement réussie ; que c' est ainsi que lui a été confiée la fermeture de l' usine de REIMS ; que parallèlement le Comité de Direction des Ressources Humaines a été réorganisé et Alain Y... n' a plus assisté à ses réunions, ses collègues des autres pays n' y assistant pas ; que la société mère l' ayant informé qu' elle ne pouvait conserver en France une organisation des ressources humaines différente de celle des autres entités européennes, il a été décidé de nouveau de supprimer le poste d' Alain Y... ;

- que cette décision a été prise dans un but de sauvegarde de la compétitivité du secteur d' activité du groupe qui a constaté que ses concurrents se réorganisaient en concentrant leur production sur un nombre d' usines réduit disposant d' une grande capacité de production, ce qui permettait de proposer des produits à des prix encore plus bas ; que cette concurrence accrue s' est doublée d' une hausse des matières premières et des composants ; que devant cette situation le groupe a dû réagir et a entrepris une politique de réorganisation globale des entités en Europe afin de la rationaliser ; que cette réorganisation s' est traduite en termes de gestion administrative par la suppression des départements centraux des ressources humaines et par la suppression d' usines en termes de localisation des sites de production ; que Alain Y... bien informé de cette situation ne la conteste pas ; qu' il n' est nul besoin de justifier de difficultés économiques actuelles pour fonder le licenciement économique prononcé à son encontre en vue de la sauvegarde de la compétitivité du groupe ; que la réorganisation de l' entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement ; que les résultats de 2005 montrent que le Groupe a pu sauvegarder sa compétitivité en raison de la réorganisation opérée ; que la décision de la réorganisation appartient au pouvoir de direction de l' employeur qui est seul juge des choix économiques envisagés ;

- que dans le cadre de l' obligation de reclassement, elle a interrogé l' ensemble des filiales françaises et étrangères du groupe ; que quatre postes disponibles ont été recensés, trois à l' étranger et une création de poste envisagée en France ; que ces postes étaient de catégorie inférieure à celui d' Alain Y... ; qu' il s' est avéré qu' une formation complémentaire serait insuffisante pour permettre à Alain Y... d' occuper un de ces postes ; qu' elle ne saurait être tenue pour responsable des réponses des responsables de recrutement de chacune des filiales concernées ; que concernant le quatrième poste, sa création n' étant pas prévue dans un proche avenir, un reclassement sur ce poste ne pouvait être envisagé ; que les raisons qui ont empêché le reclassement du salarié sont tout à fait objectives ; que les démarches de reclassement ne peuvent être démarrées qu' à partir du moment ou le licenciement est envisagé et en tout état de cause avant sa notification ;

- que les années 2003 et 2004 ne sont pas les seules années où l' appelant n' a pas reçu d' avenant contractuel fixant les modalités du bonus ; qu' il en a été de même en 2001, bien avant qu' un licenciement ne soit envisagé ; que les sommes reçues au titre des bonus représentent le montant total qui lui était dû ; qu' il ne ressort d' aucun écrit qu' il s' agissait d' acomptes ; que les provisions passées au titre des bonus correspondent au montant maximal des bonus qui pouvaient être alloués dans le cas où les objectifs fixés étaient atteints ; que c' est dans ce sens qu' il a été provisionné 41. 200 euros pour 2003 en référence au montant provisionné pour 2002 ; que responsable des provisions passées pour les bonus, Alain Y... était parfaitement informé de ces méthodes ; que le montant des bonus incluait un bonus sur création de valeur dont le montant fluctuait en fonction des résultats du groupe sur l' exercice concerné ; que l' appelant ne peut prétendre à un rappel de bonus au titre des années 2002 à 2004 sur la base du maximum de 22. 400 euros défini pour les objectifs personnels dans l' avenant de 2002 ; que l' octroi de bonus était discrétionnaire ; que le salarié ne saurait prétendre qu' il s' agissait de bonus garantis ;

- que pour 2002, le montant versé correspondait à 18. 800 euros sur la création de valeur Groupe et à 14. 784 euros pour les objectifs personnels d' Alain Y..., sur un maximum de 22. 400 euros, le groupe ayant réalisé une excellente année ; qu' en 2003, il correspondait à 1. 174 euros pour la création de valeur Groupe et à 14. 784 euros pour les objectifs personnels ; qu' en 2004, il correspondait à 7. 157 euros pour la création de valeur groupe et 14. 784 euros pour les objectifs personnels ; qu' en 2005, il ne saurait prétendre à aucun bonus de rémunération variable, ainsi que l' a reconnu le Conseil de Prud' hommes ; qu' enfin, lui a été versée une prime spéciale (prime LCI) et non un bonus de 11. 035 euros au titre du projet de REIMS en mai 2005 ; que cette prime exceptionnelle était strictement liée à cette mission ; qu' il doit donc être débouté de ses demandes de rappel de bonus ;

- qu' en conséquence, les montants dus au titre du préavis et de l' indemnité de licenciement n' ont pas à être revalorisés ; que les montants du bonus 2004 et de la prime LCI ont été inclus dans le calcul de l' indemnité de préavis et de l' indemnité de licenciement, alors qu' elle n' était pas tenue de le faire ;

- que Alain Y... ne remplissait pas les conditions requises pour bénéficier de la retraite complémentaire AXIVA ; que le préjudice dont il demande réparation est indirect et incertain, lié à un événement futur et aléatoire ;

- que Alain Y... ne peut lui reprocher de ne pas avoir répondu à ses attentes concernant certains postes dans la mesure où d' une part celles- ci étaient disproportionnées par rapport aux postes qui pouvaient lui être offerts et d' autre part il ne s' est pas manifesté pour exprimer son intérêt pour ces postes précis ; qu' en outre, il n' a jamais fait valoir sa priorité de réembauchage dans l' année qui a suivi le licenciement.

SUR QUOI :

Sur le bien fondé du licenciement

Attendu que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est libellée ainsi qu' il suit :

A la suite de notre entretien du 3 mars 2006, nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour le motif économique suivant :

Suppression de votre poste de " Directeur RH Groupe " Electrolux France SAS et " Human Resources European Projects Director " à la suite d' une restructuration destinée à sauvegarder la compétitivité de la société dans le cadre d' un effort général demandé par le groupe à l' échelle européenne et s' imposant à tous les secteurs, ainsi qu' aux fonctions centrales.

C' est ainsi qu' au mois de novembre 2002, il a été décidé de diviser l' Europe en 4 régions avec un " Regional Chief Administrative Officer " (RAO) à la tête de chacune des régions. Dans chaque pays, un " Country Holding Officer " CHO était nommé qui devait rapporter au RAO et était chargé de différentes fonctions et notamment de la coordination de la politique des Ressources Humaines.

C' est à la suite de cette décision que le Département des Ressources Humaines d' Electrolux France a été réorganisé, les missions de ce Département étant réaffectées à l' un des secteurs d' activité (la Direction Aspirateur " Floor Care ") dans le cadre d' un transfert des services communs aux secteurs d' activité.

A l' exception de la France et de l' Italie, cette politique s' est traduite dans la plupart des pays européens par la suppression des postes des coordinateurs des Ressources Humaines, leurs fonctions étant attribuées à temps partiel aux " Country Holding Officers " (CHO).

C' est à cette époque que pour la première fois, la suppression de votre poste a été envisagée, la France étant une exception dans le cadre de la politique de réorganisation du groupe, et que la société vous a adressé le 16 mai 2003 une convocation à un entretien préalable en vue d' un licenciement pour motif économique.

Après cet entretien préalable, des recherches de reclassement ont été faites au niveau français et européen. Puis il a été finalement décidé de ne pas poursuivre la procédure.

Vous avez donc conservé votre poste de " Directeur RH Groupe " Electrolux France SAS et " Human Resources European Projects Director " et la France est restée une exception.

En décembre 2003, vous avez été nommé Président de la société Electrolux Home Products France SAS avec pour mission la fermeture de l' usine de Reims, projet qui se termine actuellement.

A partir de février 2004, le Comité de Direction des Ressources Humaines du Groupe au niveau mondial a été recomposé, les représentants de pays ou de régions n' y étant plus représentés. C' est dans ces conditions qu' il a été décidé que vous n' assisteriez plus aux réunions de ce Comité.

Aujourd' hui, la société n' a plus aucun projet à vous confier au niveau européen.

Vos missions de coordination RH en France vont être reprises par le CHO et ce, afin d' aligner finalement la France sur l' organisation existant dans les autres pays.

C' est donc dans ces conditions que nous sommes contraints de supprimer votre poste.

A l' issue de notre entretien préalable, nous avons interrogé les filiales françaises et étrangères du groupe susceptibles d' avoir des postes disponibles correspondant à votre formation, votre catégorie et vos compétences professionnelles. Nous avons également recherché en interne une mesure de reclassement. Malheureusement ni notre société, ni nos filiales françaises et étrangères ne sont en mesure de vous proposer un nouveau poste.

Dans ces conditions, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour motif économique de la société Electrolux France. "

Attendu que la lettre de licenciement, qui expose de manière détaillée le motif économique invoqué et son incidence sur l' emploi d' Alain Y... est parfaitement motivée ;

Attendu que le motif économique exprimé dans la lettre de licenciement d' Alain Y... est une restructuration destinée à sauvegarder la compétitivité de la société ;

Que s' agissant d' un groupe de sociétés, le motif économique s' apprécie au niveau du groupe ;

Attendu qu' il appartient à l' employeur, pour justifier de la réalité du motif économique de démontrer que la restructuration avait bien pour but la sauvegarde de la compétitivité de l' entreprise et non, comme le soutient Alain Y..., une simple volonté de faire des économies ;

Attendu que l' employeur verse aux débats le " Rapport de gestion " sur les opérations des exercices clos les 31 décembre 2003 et 2004 de la société ELECTROLUX FRANCE SAS ;

Que ces rapports présentent une analyse non seulement de la situation de la société française, mais également du groupe ;

Qu' il apparaît de ces rapports que le résultat consolidé, déduction faite des intérêts minoritaires et de l' impôt, est en constante baisse sur ces deux exercices, cette baisse s' accentuant en 2004 ;

Que le tableau comparatif pour les exercices 2002 à 2004 publié dans le rapport annuel pour l' année 2004, communiqué par Alain Y..., confirme cette dégradation du résultat consolidé ;

Que cette période a connu la fermeture de l' usine de REIMS, dont s' est chargé Alain Y... ;

Que l' activité du groupe ELECTROLUX se situe dans un marché difficile et très concurrentiel ;

Qu' en outre, cette période a connu une hausse des matières premières ainsi qu' une pression grandissante des concurrents produisant dans des pays à bas coûts ;

Que pour la société française après une perte pour l' exercice 2003, l' exercice 2004 a été bénéficiaire ;

Qu' Alain Y... ne peut soutenir que la restructuration n' a pour but que de faire des économies et d' accroître les dividendes des actionnaires dans la mesure où il apparaît que les dividendes distribués et le revenu réel est en constante dégradation, celle- ci s' accentuant en 2004 ;

Que l' article des Echos communiqué par Alain Y... et commentant les résultats annuels pour l' exercice 2005, s' il constate que les coûts de restructuration ont pesé lourd, surtout au quatrième trimestre, indique que le bénéfice net a chuté de 44, 5 % ;

Qu' il mentionne également des résultats satisfaisants dans un " contexte difficile, en raison notamment de la flambée des prix des matières premières et de la concurrence farouche des producteurs asiatiques " ;

Qu' il indique également que la politique de restructuration se poursuivra en 2006 et annonce la fermeture d' unités de production dans divers pays en Europe et aux Etats Unis ;

Attendu que la restructuration intervenait donc bien pour sauvegarder la compétitivité de l' entreprise et avait dès lors un motif économique ;

Attendu qu' il apparaît des pièces versées aux débats par les parties que cette restructuration, qui a concerné tous les pays européens, a concerné toutes les catégories de salariés et non pas seulement la production ;

Que le licenciement d' Alain Y... reposait sur une cause économique réelle et sérieuse ;

Que le jugement sera dès lors confirmé de ce chef ;

Sur la recherche de reclassement

Attendu qu' Alain Y... ne peut reprocher à ELECTROLUX France SAS de ne pas avoir recherché un poste où le reclasser à partir du moment où la première procédure de licenciement avait été initiée ;

Que lorsque cette procédure a été arrêtée, il a fait l' objet d' un reclassement puisqu' il a été nommé Président de la société ELECTROLUX HOME PRODUCTS France SAS en décembre 2003 afin de gérer la fermeture de l' usine de REIMS ;

Qu' il ne peut reprocher à l' employeur de ne pas lui avoir proposé certains postes qui se sont libérés alors qu' il était encore salarié de la société ELECTROLUX France SAS ;

Que, d' une part, à cette époque il occupait le poste de Président de la société ELECTROLUX HOME PRODUCTS France SAS, et d' autre part, étant parfaitement au courant de la disponibilité de ces postes de par sa position, il n' y a jamais postulé ;

Attendu, concernant la seconde procédure de licenciement qui fait l' objet du débat, que ELECTOLUX France SAS produit tous les courriers adressés tant à ses filiales françaises qu' étrangères ainsi que les réponses obtenues ;

Que ces recherches sont intervenues après l' entretien préalable, mais avant que le licenciement ne soit prononcé ;

Qu' elle verse également les définitions de poste adressées à l' intéressé concernant les trois postes disponibles à l' étranger et indiquant les caractéristiques s' opposant à ce que Alain Y... puisse y postuler ;

Attendu concernant le quatrième poste en France, qu' il s' agissait d' un projet de création de poste qui ne s' est pas concrétisé ;

Que l' employeur, s' il doit rechercher les postes disponibles dans la société et le groupe, n' est pas tenu dans le cadre de la recherche de reclassement de créer un poste nouveau ;

Qu' il n' apparaît pas des documents versés aux débats et qu' il n' est pas démontré par Alain Y... qu' il s' agissait de recherches fictives ;

Attendu que dès lors la société ELECTROLUX France SAS a respecté son obligation de reclassement ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur le rappel de bonus pour les années 2003, 2004 et 2005

Attendu qu' il apparaît du tableau communiqué par Alain Y... pour les années 2000 à 2004, que les bonus, même avant la période litigieuse, ne faisaient pas toujours l' objet d' un avenant et qu' ils variaient d' année en année ;

Qu' en outre les sommes versées n' ont jamais atteint le plafond provisionné, de sorte que ce plafond ne peut servir de base pour déterminer la somme due au titre des bonus ;

Qu' Alain Y... ne peut donc réclamer un rappel de bonus en fondant sa demande sur le montant provisionné ;

Qu' il ne peut se baser sur l' avenant de 2002 pour calculer les bonus 2003 et 2004, cet avenant spécifiant clairement qu' il ne concerne que le bonus pour l' année 2002 ;

Qu' en outre il fait référence à la réalisation d' objectifs spécifiques au cours de l' année 2002 et ne peut servir à fixer par analogie les bonus 2003 et 2004 ;

Qu' enfin, s' il fixe des règles de calcul, Alain Y... ne produit pas les éléments à partir desquels ces règles vont pouvoir recevoir application ;

Attendu que concernant le projet de REIMS, les sommes reçues sont qualifiées sur les bulletins de paie de " prime exceptionnelle " et non de " bonus " ;

Qu' Alain Y... ne peut donc leur appliquer le calcul qu' il applique aux bonus ;

Attendu en conséquence qu' Alain Y... doit être débouté de sa demande

Que le jugement sera réformé de ce chef ;

Sur le rappel de préavis et les congés payés y afférents, et d' indemnité conventionnelle de licenciement

Attendu qu' Alain Y... ayant été débouté de sa demande de rappel de bonus, le calcul effectué par la société ELECTROLUX France SAS pour déterminer le montant de l' indemnité de préavis et de l' indemnité de licenciement est exact ;

Qu' il convient dès lors de débouter Alain Y... de ses demandes de ces chefs et de réformer le jugement ;

Sur la demande au titre de la retraite complémentaire AXIVA

Attendu que les indemnités allouées dans le cadre d' un licenciement ne couvrent que le préjudice découlant du licenciement proprement dit ;

Attendu que cette retraite complémentaire constituait un avantage supplémentaire consenti aux seuls salariés présents dans l' entreprise au jour où ils atteignent l' âge de la retraite ;

Qu' il s' agit d' un régime de retraite qui relève d' un engagement unilatéral de l' employeur qui s' applique à une catégorie de salariés et constitue un élément du statut collectif même si les prestations sont individualisées au moment du paiement ;

Qu' il ne s' incorpore pas au contrat de travail ;

Qu' il ne confère des droits qu' aux salariés qui achèvent leur carrière dans l' entreprise ;

Qu' il ne peut être garanti aux salariés qu' ils achèveront leur carrière dans la même entreprise ;

Attendu en conséquence qu' Alain Y... ne peut prétendre qu' il disposait d' un droit acquis ;

Que le préjudice résultant de la perte du droit au régime de retraite, dont il demande la réparation, est donc indirect et incertain, et lié à un événement futur et aléatoire ;

Qu' en conséquence cette demande sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;

Sur le préjudice moral

Attendu que sa demande au titre du préjudice moral repose sur le fait que l' employeur ne lui a pas proposé certains postes, alors qu' il occupait un poste devant prendre fin dès que sa mission serait accomplie ;

Que d' une part lorsque ces postes se sont libérés, il en avait un, la procédure de licenciement n' étant pas encore initiée ;

Que d' autre part, il avait connaissance de la disponibilité de ces postes et n' y a pas postulé ;

Que dans ces conditions, il ne démontre pas avoir subi un quelconque préjudice du fait de l' employeur ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu' il l' a débouté de cette demande ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu qu' Alain Y..., qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d' appel et débouté de sa demande au titre de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Attendu qu' il ne paraît pas inéquitable de condamner Alain Y... à payer à ELECTROLUX France SAS une indemnité de 1. 500 euros sur même fondement ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels principal et incident réguliers en la forme,

Au fond,

Infirme le jugement en ce qu' il a condamné ELECTROLUX France SAS à payer à Alain Y... diverses sommes au titre du rappel de bonus 2003 et 2004 et des congés payés y afférents, du rappel de préavis et des congés payés y afférents, ainsi que du rappel d' indemnité de licenciement,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Alain Y... de l' intégralité de ses demandes,

Condamne Alain Y... aux dépens de première instance et d' appel,

Condamne Alain Y... à payer à ELECTROLUX France SAS une indemnité de 1. 500 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER : LE PRESIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/00029
Date de la décision : 27/02/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 31 mars 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 31 mars 2010, 08-41.978, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Creil, 29 juin 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2008-02-27;07.00029 ?
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