ARRET No
DU
07 Juin 2007
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06 / 02160
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LE GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE LA CROIX DE FER
C /
LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AMIENS
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COUR D'APPEL D'AMIENS
CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS
JUGEMENT DU JUGE DES EXPROPRIATIONS DU DEPARTEMENT DE LA SOMME EN DATE DU 05 mai 2006
APPELANT :
LE GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE LA CROIX DE FER
1 Impasse du Hameau
VAL DE MAISON
80260 TALMAS
Représenté et plaidant par Maître Stéphane ENGUELEGUELE, Avocat au barreau d'AMIENS.
INTIMEE :
LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE D'AMIENS
6 boulevard de Belfort
80039 AMIENS
Représentée par Madame CARON, Responsable foncier, et plaidant par Maître MOUSSAULT, Avocat au barreau de PARIS.
PARTIE INTERVENANTE :
L'Association des Derniers Propriétaires de Terres Agricoles de Longueau
18 Rue du Chevalier de la Barre
80330 LONGUEAU
Représentée et plaidant par Maître Stéphane ENGUELEGUELE, Avocat au barreau d'AMIENS.
DEBATS : A l'audience publique de la Chambre des Expropriations tenue à la Cour d'Appel d'AMIENS le 12 Avril 2007, ont été entendus :
Monsieur GRANDPIERRE en son rapport,
Maître MOUSSAULT et Maître ENGUELEGUELE, représentant les parties en leurs explications à l'appui de leurs mémoires respectifs régulièrement notifiés,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur GRANDPIERRE, Président de la Chambre des Expropriations,
Madame LORPHELIN, Conseiller à la Cour, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 26 juin 2006, pour composer la Chambre des Expropriations siégeant en l'absence des Juges de l'Expropriations de l'AISNE, et de leur suppléant, empêchés.
Madame SAUVE, Juge de l'Expropriation de l'OISE.
Qui en a délibéré conformément à la loi et renvoyé l'affaire à l'audience du 07 Juin 2007 pour prononcer arrêt et indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu par mise à disposition de la copie au Greffe.
Madame PILVOIX, Greffier.
ARRET
Considérant que, par ordonnance en date du 20 décembre 2004, le Juge de l'expropriation du département de la Somme a déclaré expropriée pour cause d'utilité publique au profit de la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens plusieurs parcelles de terrain situées à Longueau et cadastrées section AC numéro 289, lieudit..., pour 14 ares 64 centiares, section AC, numéro 295, lieudit... pour 15 ares et 70 centiares, et section ZB numéro 26, lieudit..., pour 11 hectares, 6 ares et 50 centiares, appartenant au groupement foncier agricole de la Croix de fer ;
Considérant que le groupement foncier agricole de la Croix de fer a saisi le Juge de l'expropriation d'une demande tendant à ce que soit constaté le manque de base légale de cette ordonnance sur le fondement de l'article L. 12- 5 du Code de l'expropriation en faisant valoir que le Tribunal administratif d'Amiens, en ses jugements du 28 juillet 2005, avait annulé l'arrêté du préfet de la Somme portant déclaration d'utilité publique de l'acquisition faite par la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens d'immeubles sis à Longueau et annulé les arrêtés de cessibilité relatifs aux parcelles dont il s'agit ; que le Groupement foncier agricole de la Croix de fer sollicitait, en conséquence, la restitution des terrains et une somme de 448. 102, 08 euros à titre de dommages et intérêts et une somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Que l'Association des derniers propriétaires fonciers de terres agricoles de Longueau est intervenue volontairement à l'instance ;
Que, par un premier jugement du 13 janvier 2006, le Juge de l'expropriation a constaté le caractère définitif des jugements rendus par le Tribunal administratif d'Amiens ;
Que, par jugement rendu le 5 mai 2006, la même juridiction a déclaré recevable l'intervention de l'association des derniers propriétaires fonciers de terres agricoles de Longueau et condamné la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens à payer au groupement foncier agricole de la Croix de fer la somme de 200. 000 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1. 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Considérant qu'appelant du jugement rendu le 5 mai 2006, le groupement foncier agricole de la Croix de fer en demande l'infirmation des chefs de l'indemnisation ; qu'en conséquence, il demande que la Chambre de commerce et d'industrie d'Amiens soit condamnée à lui payer la somme de 448. 102, 08 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du dommage de jouissance et de la perte de chance de réaliser la promesse de vente de la parcelle cadastrée section ZB Numéro 26 comprise dans le périmètre de la déclaration d'utilité publique et de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; qu'il sollicite également une indemnité de 15. 000 euros en réparation de son préjudice moral et une somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Qu'au soutien de ses prétentions, le groupement foncier agricole de la Croix de fer expose d'abord que, contrairement à ce que soutient la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens, le premier juge n'a pas méconnu le principe de la contradiction dès lors que l'une des deux pièces litigieuses qui sont produites en cause d'appel, était connue de la chambre de commerce et d'industrie qui, en tous cas, ne sollicite pas l'annulation du jugement ;
Qu'au fond, l'appelant soutient qu'en raison de l'irrégularité de la procédure, il a subi un préjudice lié à la perte de la chance de poursuivre la viabilisation du terrain par l'intermédiaire de la société Emin, qui a renoncé à acquérir le bien, alors qu'il avait mis en place un projet sérieux ;
Que, pour arrêter le montant de son préjudice à 448. 102, 08 euros, l'appelant retient une indemnité de 3, 94 euros le mètre carré calculé sur la variation du coût de la construction entre le deuxième trimestre 1998, époque de la promesse de vente, et le troisième trimestre 2003, époque de la déclaration d'utilité publique, et appliqué à une parcelle de 11 hectares, 6 ares et 50 centiares. Il ajoute que l'éviction dont il a été victime lui a causé un préjudice moral ;
Considérant qu'également appelante de ce jugement, la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens en sollicite l'infirmation en demandant que le groupement foncier agricole de la Croix de fer soit débouté de ses réclamation ;
Qu'à ces fins et après avoir fait observer que le premier juge n'a pas respecté le principe du contradictoire en fondant sa décision sur une promesse de vente et une lettre qui n'ont pas été versées aux débats, l'appelante fait valoir que le groupement foncier agricole de la Croix de fer n'a subi aucun préjudice dès lors que, d'une part, il n'existe aucun lien de causalité entre l'annulation de déclaration d'utilité publique et le défaut de réitération de la promesse de vente qui est antérieure, non seulement à cette annulation, mais également à la déclaration d'utilité publique elle- même et que, d'autre part, l'irrégularité de l'ordonnance d'expropriation n'a causé aucun préjudice, les parcelles dont il s'agit étant encore exploitées ;
Considérant qu'il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de joindre les deux procédures et de statuer par un seul et même arrêt ;
Considérant que le premier juge a rendu le jugement au vu notamment d'une promesse de vente en date du 7 juin 1999 conclue entre le groupement foncier agricole de la Croix de Fer et la société G. R. C. Emin développeur et d'une lettre adressée le 2 juillet 2002 par le représentant de cette société à Jean- François X..., dirigeant du groupement foncier agricole qui n'avaient pas été communiquées à la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens à l'occasion de la procédure ; qu'il n'a donc pas respecté le principe du contradictoire ;
Que, toutefois, la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens sollicitant, non l'annulation mais l'infirmation du jugement, il convient, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur le fond du litige en prenant en considération les deux documents litigieux que le groupement foncier agricole de la Croix de Fer a joint à son mémoire d'appel et sur lesquels la Chambre de commerce et d'industrie d'Amiens s'est expliquée en son mémoire en réponse ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 12- 5 et L. 12- 5- 4 du Code l'expropriation, " en cas d'annulation par une décision définitive du juge administratif de la déclaration d'utilité publique ou de l'arrêté de cessibilité, tout exproprié peut faire constater par le juge de l'expropriation que l'ordonnance portant transfert de propriété est dépourvue de base légale " et que le juge "... détermine les indemnités à restituer à l'expropriant " et qu'il " statue sur la demande de l'exproprié en réparation du préjudice causé par l'opération irrégulière " ;
Considérant qu'en l'espèce, la promesse de vente invoquée par le groupement foncier agricole de la Croix de Fer à l'appui de ses prétentions expirait le 1er septembre 2000 si la société si la société G. R. C. Emin, bénéficiaire, n'avait pas produit l'autorisation de la Communauté urbaine ou le 15 novembre 2001, date de caducité, si la bénéficiaire n'a produit l'accord avant l'expiration du premier délai ou si elle n'avait pas réalisé la vente ou demandé sa réalisation avant l'expiration du deuxième délai ;
Que le défaut de réalisation de la promesse de vente en date du 7 juin 1999survenu le 15 novembre 2001, est donc antérieur, non seulement à la déclaration d'utilité publique du 30 avril 2003 annulée, mais également à la convention publique d'aménagement datée du 8 octobre 2002 et désignant la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens comme aménageur de la zone d'aménagement concerté Jules Verne ;
Que, s'agissant d'une promesse de vente unilatérale ainsi qu'il ressort d'une clause contenue page six de l'acte, la société bénéficiaire n'était pas liée par son contenu de sorte que la perte de chance invoquée par le groupement foncier agricole de la Croix de Fer est incertaine ;
Considérant que la lettre adressée le 2 juillet 2002 par le représentant de la société G. R. C. Amin à Jean- François X..., dirigeant du groupement foncier agricole de la Croix de Fer, fait apparaître que " notre objectif était de demander que votre terrain soit exclu de la ZAC afin de ne pas en être tributaire surtout au niveau des délais " ; que " la réponse d'Amiens métropole a été négative " et qu'" aucune précision n'a pu nous être apportée sur les délais et les participations financières qui découlent de l'absorption de votre terrain dans la ZAC " ; qu'il s'ensuit que la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens n'est pas à l'origine du refus d'exclure de la zone d'aménagement concerté le terrain dont il s'agit ;
Considérant que le groupement foncier agricole de la Croix de Fer ne démontre aucunement que la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens aurait, d'une façon ou d'une autre, empêché la réalisation de la vente alors surtout qu'elle n'a été chargée de l'aménagement de la zone d'aménagement concerté que le 8 octobre 2002, date de la convention d'aménagement, c'est- à- dire postérieurement à la date de caducité de la promesse de vente ;
Considérant que l'annulation de la déclaration d'utilité publique a été prononcée non seulement avant la prise de possession des biens appartenant au groupement foncier agricole de la Croix de Fer, mais avant l'introduction de l'instance en fixation de l'indemnité d'expropriation ; qu'il s'ensuit que le groupement, dont les terres n'ont, ni perdu leur nature de terre agricole, ni cessé d'être exploitées, n'a subi aucun préjudice matériel qui serait consécutif à la perte temporaire de sa qualité de propriétaire ;
Qu'en particulier, le groupement foncier agricole de la Croix de Fer n'apporte pas la preuve de l'impossibilité de participer à la valorisation de ses biens dès lors que la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens n'a pas pris possession desdits biens ; qu'en outre, il n'apporte aucun commencement de preuve du comportement de l'expropriante qui, selon lui, aurait tout entrepris pour l'empêcher de viabiliser son terrain et " dissuadé d'éventuels aménageurs de contracter avec lui postérieurement à l'annulation de la déclaration d'utilité publique " ; qu'il ne fait donc pas la preuve d'un préjudice matériel consécutif à l'opération irrégulière ;
Que, de plus, le groupement foncier agricole de la Croix de Fer n'établit aucunement la réalité du préjudice moral allégué ;
Qu'il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement en ce que le premier juge a partiellement satisfait à la demande de dommages et intérêts présentée par le groupement foncier agricole de la Croix de Fer et de le débouter de ses demandes ;
Et considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit donné satisfaction au groupement foncier agricole de la Croix de Fer et à la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens quant à leur demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en denier ressort,
Prononce la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 06 / 2160 et 06 / 2299,
Infirme le jugement rendu le 5 mai 2006 par le Juge de l'expropriation du département de la Somme en ce qu'il a condamné la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens à payer au groupement foncier agricole de la Croix de fer la somme de 200. 000 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1. 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
Faisant droit à nouveau quant à ce :
Déboute le groupement foncier agricole de la Croix de Fer de toutes ses demandes indemnitaires,
Déboute le groupement foncier agricole de la Croix de Fer, d'une part, et la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens, d'autre part, chacun de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
Laisse les dépens à la charge de la chambre de commerce et d'industrie d'Amiens.
Fait et prononcé publiquement le 07 Juin 2007 par mise à disposition au Greffe :
Monsieur GRANDPIERRE, Président, a signé la minute avec Madame PILVOIX, Greffier.
Le Greffier, Le Président,