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25/07/2024 | FRANCE | N°20/06933

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 25 juillet 2024, 20/06933


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 25 JUILLET 2024



N° 2024/ 132



RG 20/06933

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGCLS







S.A.S. PROSEGUR SECURITE HUMAINE





C/



[J] [N]















Copie exécutoire délivrée le 25 juillet 2024 à :



- Me Vincent BOUILLAUD, avocat au barreau de TOULOUSE



- Caroline DELAPLACE, avocat au barreau de MARSEILLE





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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 02 Juillet 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 18/2177.





APPELANTE



S.A.S.U FIDUCIAL SECURITE HUMA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 25 JUILLET 2024

N° 2024/ 132

RG 20/06933

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGCLS

S.A.S. PROSEGUR SECURITE HUMAINE

C/

[J] [N]

Copie exécutoire délivrée le 25 juillet 2024 à :

- Me Vincent BOUILLAUD, avocat au barreau de TOULOUSE

- Caroline DELAPLACE, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 02 Juillet 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 18/2177.

APPELANTE

S.A.S.U FIDUCIAL SECURITE HUMAINE, venant aux droits de la S.A.S. PROSEGUR SECURITE HUMAINE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Vincent BOUILLAUD, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [J] [N], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Caroline DELAPLACE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 25 Juillet 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Juillet 2024

Signé par Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M. [J] [Y] [N] a été engagé par la société Prosegur Sécurité Humaine à compter du 12 octobre 2016, en qualité d'agent de sécurité arrière-caisse, filière distribution, selon contrat à durée indéterminée à temps complet.

La convention collective nationale applicable était celle des entreprises de prévention et de sécurité.

Par avenant du 1er janvier 2017, le temps de travail était fixé à une durée mensuelle de 110 heures, pour une rémunération mensuelle brute de 1105,39 €. Le salarié était affecté sur le magasin de Carrefour [Localité 4].

Suite à la perte du marché de Carrefour [Localité 4] à la fin de l'année 2017, le salarié était affecté, à compter du 1er février 2018, à la surveillance des résidences privées des joueurs de [5], à [Localité 3].

M.[N] était victime d'un accident le 12 juillet 2018 et était pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le salarié saisissait le 22 octobre 2018 le conseil de prud'hommes de Marseille, en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein, en résiliation judiciaire et en paiement d'indemnités diverses.

Par jugement du 2 juillet 2020, le conseil de prud'hommes en sa formation de départage a statué comme suit :

« Requalifie le contrat de travail à temps partiel de [J] [Y] [N] en contrat à temps complet,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de [J] [Y] [N] à compter de la date de la présente décision

Condamne la société Prosegur Sécurité Humaine à payer à [J] [Y] [N] les sommes suivantes:

- 7 862,87 € à titre de rappel de salaires, outre 786,28 € de congés payés y afférents,

- 1 000 € pour non-respect de l'amplitude horaire,

- 1 169,29 euros à titre de rappel de salaire pour le mois de juin 2018, outre 116,92 € à titre de congés payés y afférents,

- 3 094 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 309 € de congés payés y afférents,

- 785,68 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 673,18 € à titre de congés payés acquis et non pris,

- 5 414 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Prosegur Sécurité Humaine :

- à remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation pôle emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte conformément à la présente procédure,

- régulariser la situation du salarié auprès des organismes sociaux,

Dit n'y avoir lieu à assortir cette remise d'une astreinte,

Précise :

- les condamnations concernant des créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

- les condamnations concernant les créances de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- toutes les condamnations bénéficieront de la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du Code civil,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions du présent jugement qui ne sont pas de droit exécutoire par provision,

Condamne la société Prosegur Sécurité Humaine à payer à [J] [Y] [N] la somme de 1500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette tout autre demande,

Condamne la société Prosegur Sécurité Humaine aux dépens ».

Par acte du 23 juillet 2020, le conseil de la société a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 22 juin 2021, la société Fiducial Sécurité Humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine, demande à la cour de :

«Infirmant le jugement de première instance :

Débouter Monsieur [N] de sa demande visant à obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein ;

Débouter par conséquent Monsieur [N] de la demande en rappel de salaire qu'il formule à ce titre ;

Débouter Monsieur [N] de sa demande concernant le paiement d'un rappel de salaire et des droits à congés payés y afférents au titre du mois de juin 2018 ;

Débouter à titre principal Monsieur [N] de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour non-respect de l'amplitude horaire ;

Constater à titre subsidiaire que Monsieur [N] ne justifie pas de l'existence et de l'importance des préjudices qu'il prétend avoir subis ;

Réduire en conséquence le quantum de ses demandes ;

Débouter Monsieur [N] de sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société Fiducial Sécurité Humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine;

Débouter par conséquent Monsieur [N] que l'ensemble des demandes qu'il formule à ce titre;

Confirmer pour le surplus le jugement de première instance ;

Y ajoutant :

Condamner Monsieur [N] à verser à la société Fiducial Sécurité Humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine une somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamner, à titre reconventionnel, Monsieur [N] à verser à la société Fiducial Sécurité Humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine une somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Monsieur [N] aux frais et dépens de la présente procédure ».

Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 14 janvier 2021, M.[N] demande à la cour de :

«Recevoir les demandes en appel de Monsieur [J] [N] et les dire bien fondées,

Confirmer le jugement de départage du conseil de prud'hommes de Marseille du 2 juillet 2020 en ce qu'il a :

Requalifié le contrat de travail à temps partiel de [J] [Y] [N] en contrat à temps complet ;

Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de [J] [Y] [N] à compter de la date de la présente décision,

Condamné la société Prosegur Sécurité Humaine à verser à [J] [Y] [N] les sommes suivantes :

- 7.862,87 € à titre de rappel de salaire, outre 786,28 € de congés payés y afférents,

- 1.000 € pour non-respect de l'amplitude horaire,

- 1.169,29 € à titre de rappel de salaire pour le mois de juin 2018 outre 116,92 € à titre de congés payés y afférents,

- 3.094 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 309 euros de congés payés y afférents,

- 785,68 € au titre d'indemnité légale de licenciement,

- 673,18 € de congés payés acquis et non pris,

- 5.414 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Condamné la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humaine :

A remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail et un solde de tout compte conformément à la présente procédure, A régulariser la situation du salarié auprès des organismes sociaux,

Précisé que :

Les condamnations concernant des créances de nature salariale porteront intérêt au taux légal à compter de la demande en justice,

Les condamnations concernant les créances de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Toutes les condamnations bénéficieront de la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil,

Condamné la société Prosegur Sécurité Humaine à payer à [J] [Y] [N] la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamné la société Prosegur Sécurité Humaine aux entiers dépens de la présente procédure,

Infirmer le jugement en ce qu'il a :

Rejeté la demande de monsieur [J] [N] afin que la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humaine, soit condamnée à lui verser la somme de 370,42 euros à titre de rappel des primes dues au changement de planning,

Rejeté la demande de Monsieur [J] [N] afin que la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humaine, soit condamnée à payer à Monsieur [J] [N] la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence des visites médicales d'embauche et périodique,

Et par conséquent :

Condamner la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humaine, à payer à Monsieur [J] [N] la somme de 370,42 euros à titre de rappel des primes dues au changement de planning, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil

Condamner la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humain, à payer à Monsieur [J] [N] la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour absence des visites médicales d'embauche et périodique, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

Infirmer le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à ordonner une astreinte :

Et par conséquent :

Assortir l'exécution des condamnations d'une astreinte de 100 euros par jour de retard commençant à courir quinze (15) jours après la signification de l'arrêt à intervenir,

Confirmer le jugement sur la condamnation aux frais irrépétibles de première instance,

Y ajoutant,

Condamner la société Prosegur Sécurité Humaine, aux droits de laquelle vient 1a SASU Fiducial Sécurité Humaine, à payer à Monsieur [J] [N] la somme de 2.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance en appel ».

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. Sur l'exécution du contrat de travail

Sur le temps de travail

Le salarié soutient que l'avenant au contrat de travail du 1er janvier 2017, qui fixe la durée du travail à 110 heures mensuelles, ne respecte pas les mentions obligatoires prévues par l'article L. 3123-6 du code du travail, et en particulier, la répartition de la durée du travail sur la semaine ou sur le mois.

Il estime qu'en l'état de ce manquement, le contrat est présumé avoir été conclu à temps complet car il lui était impossible de prévoir son rythme de travail et il devait se tenir constamment à la disposition de son employeur. Il souligne que la société n'a pas respecté les dispositions conventionnelles de l'accord du 18 mai 1993 et qu'aucun délai de prévenance n'a été respecté.

La société réplique que la présomption de travail à temps complet résultant de l'absence de mention de la durée du travail de sa répartition dans le contrat de travail ou du non-respect des stipulations contractuelles, peut être renversée par l'employeur.

Elle indique que les bulletins de salaire mentionnent un horaire mensuel de travail de 110 heures correspondant à des périodes ou des heures complémentaires qui ont été effectuées et rémunérées. Elle précise qu'en application de l'accord collectif intervenu entre les partenaires sociaux le 30 novembre 2016, la rémunération mensuelle des salariés était lissée sur la base de la moyenne mensuelle de la durée contractuelle du travail, indépendamment du nombre d'heures effectivement travaillées sur le mois en question, les heures complémentaires étant comptabilisées sur cette même période de référence, au cas d'espèce au trimestre.

Elle soutient que l'accord du 18 mai 1993 a été conclu pour une durée de trois ans et qu'il n'est plus applicable, et qu'au surplus ces dispositions ont été modifiées par les partenaires sociaux par l'accord collectif du 30 novembre 2016.

Elle souligne que le salarié avait la possibilité de refuser toute modification de son planning, communiquée moins de sept jours avant la date de prise d'effet de cette modification et conteste le fait que le salarié était dans l'obligation d'être à la disposition de son employeur à temps plein.

Elle estime que le salarié, parfaitement informé de son droit en la matière, a régulièrement accepté de telles modifications de ses plannings de travail en les appliquant sans aucune contestation de sa part, qu'il pouvait être informé des modifications de plannings par voie téléphonique ou par SMS, la note interne visée en pièce 33 n'étant applicable qu'aux salariés à temps plein.

En application de l'article L.3123-6 du code du travail, le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit qui doit nécessairement préciser la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue.

Il doit également prévoir la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification, les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié et les limites dans lesquelles peuvent être accomplies les heures complémentaires au-delà de la durée initialement fixée dans le contrat de travail.

L'article L.3123-11 du même code prévoient que toute modification de la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois est notifiée au salarié en respectant un délai de prévenance.

En l'absence de telles précisions, si le salarié a été mis dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il pourrait travailler chaque mois et s'est trouvé dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur, le contrat doit être requalifié en contrat de travail à temps complet.

Par ailleurs, les dispositions prévues par l'accord du 18 mai 1993 prévoient pour l'organisation du temps de travail :

- article 2 : «Par application de l'article L. 212-5, le temps du travail peut être aménagé sur une période maximale de 4 semaines ; à l'intérieur de cette période, la durée hebdomadaire du travail est susceptible de variation dans la limite maximale de 48 heures.

La répartition du temps de travail doit se répéter à l'identique d'une période à l'autre, cette répétition étant appréciée relativement à la durée hebdomadaire du travail et non relativement à la répartition des jours de travail à l'intérieur de la semaine (...).

L'organisation des services de la période fait l'objet de plannings prévisionnels qui doivent être remis aux salariés au moins 1 semaine avant leur entrée en vigueur ».

- article 3 : « Les plannings de vacation sont établis par référence à la durée du travail sur la base d'un horaire nominatif et individuel.

Toute modification doit être portée par écrit, sur un document identifiant l'entreprise, à la connaissance du salarié au moins 1 semaine avant son entrée en vigueur.

Cette modification ne remet pas en cause l'application des dispositions du présent accord.

Le délai spécifié de 1 semaine pourra être réduit avec l'accord exprès du salarié concerné, notamment dans les cas suivants :

1. Remplacement d'un salarié absent, notamment pour cause de :

' maladie, accident du travail ;

' absences inopinées ;

' congés pour événements familiaux ;

' congé mutualiste ;

' congé de représentation ;

' congés statutaires pour les représentants des organisations syndicales ;

' congés dans le cadre de la formation professionnelle continue ;

' heures de délégation pour les représentants du personnel.

Cette modification n'entraîne pas, pour des absences de courte durée, de changement au planning normal; le salarié absent retrouve à son retour son poste de travail.

2. En cas de prestation supplémentaire demandée par le client :

' dans ce cas, l'accord du salarié intervenant en supplément doit être confirmé et formalisé par écrit. Un exemplaire contresigné est remis au salarié. Le refus d'un salarié d'assurer ce ou ces services supplémentaires ne pourra entraîner de sanctions d'aucune nature, toute disposition contraire étant nulle de plein droit.

Tout service supplémentaire ne pourra être compensé, dans le cadre de la durée du travail, par la suppression d'un service équivalent prévu au planning, sauf demande du salarié ».

La société a toutefois passé un accord collectif avec les partenaires sociaux le 30 novembre 2016 s'agissant des heures complémentaires et des modalités de communication et de modification de la répartition de la durée des horaires de travail :

« article 5.1 6 : en application de l'article L. 3123-18 du code du travail, il peut être demandé à tout salarié à temps partiel d'effectuer des heures complémentaires dans la limite de 33 % de la durée de travail prévu à son contrat de travail comptabilisé sur la période de référence entre parenthèses au trimestre ou sur quatre semaines selon les salariés concernés, la réalisation de telles heures complémentaires ne pourra avoir pour effet de porter la durée moyenne du travail du salarié à hauteur de celle d'un salarié à temps complet. Ces heures sont rémunérées conformément aux dispositions légales et conventionnelles en vigueur.

article 5.1.7 : la répartition de la durée du travail et les horaires sont communiqués avec un délai de prévenance fixé à sept jours calendaires au salarié à temps partiel, une fois par mois avant la première vacation pour le personnel direct et une fois par période de quatre semaines pour le personnel indirect.

Les plannings mentionneront des semaines travaillées et des semaines non travaillées sur ladite période et mentionne pour chacune des semaines travaillées des horaires de celle-ci. Toutefois, une telle planification ne doit pas être figée doit prendre en compte les nécessités de service et les besoins des établissements.

Ainsi, et sous réserve de respecter un délai de prévenance fixée à sept jours calendaires, la société pourra procéder à toute modification de la répartition dans la durée du travail des horaires du salarié à temps partiel. Conformément aux dispositions conventionnelles, le délai prévu ci-dessus peut être réduit à condition que le salarié concerné y consente. Dans cette hypothèse les dispositions concernant les primes de changement de planning de l'article 3.1.1.3. B du présent accord s'applique » (pièce appelante 9).

La société a communiqué aux salariés la note interne suivante : « En fin de mois, le service planification établit et met à disposition votre planning initial pour le mois suivant : 10 jours avant votre 1ère vacation: à l'agence sur votre site habituel de prestation ou à votre demande par messagerie internet ou 7 jours avant votre première vacation : chez vous par courrier. Dans tous les cas : Vous recevez un planning initial Si les délais ne sont pas respectés, vous bénéficiez d'une compensation dans les conditions prévues par l'accord (...) (pièce appelante 14).

Il s'avère que l'avenant du 1er janvier 2017 au contrat de travail ne mentionne qu'une durée du temps de travail de 110 heures par mois, sans indication sur la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois et sans aucune référence à des heures complémentaires ainsi qu'à leurs modalités.

En l'absence d'une des mentions légales requises, le contrat de travail à temps partiel est réputé à temps plein et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle de travail convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était ainsi pas tenu d'être constamment à la disposition de l'employeur.

A cet effet, la société produit les plannings du salarié ainsi que les bulletins de paie (pièce 8).

Cependant, l'intimé justifie que la transmission des plannings initiaux n'a pas respecté le délai de prévenance de 7 jours, en violation des dispositions de l'accord collectif d'entreprise du 30 novembre 2016 et de l'accord interne de la société et établit que les plannings modificatifs pouvaient intervenir d'un jour à l'autre, soit le même jour où dans l'heure suivante, sans que le salarié ne consente à ces modifications.

Ainsi et sans être exhaustif :

- le planning du mois de mars 2017 a été transmis par e-mail le 28 février 2017 à 17h08 pour une vacation au 1er mars 2017,

- le planning du mois d'août 2017 a été transmis par e-mail le 26 juillet 2017, pour une vacation au 1er août 2017 et a été modifié les 4, 5, 10,15, 16, 17 et le 21 août 2017, le salarié ayant même reçu à nouveau un planning pour le mois d'août le 2 septembre 2017

- le planning du mois de novembre 2017 a été transmis par e-mail le 27 octobre 2017 à 7h54 pour une vacation au 1er novembre 2017. Ce planning a été modifié le 27 octobre 2017 à 20 h, le 10, 18, 28 octobre 2017 (pièces intimé 9,14 et 17)

- le planning du mois de mai a été transmis par e-mail le 27 avril 2018 pour une vacation au 2 mai et a été modifié 3 fois (pièce intimé 24).

- le planning du mois de juillet a été transmis par e-mail le 26 juin 2018 à 21h27 pour une vacation au 1er juillet 2018 (pièce intimé 26)

Le salarié a par ailleurs été confronté à plusieurs annulations de vacations, à la dernière minute par SMS comme au mois d'avril 2018, alors qu'il était sur le trajet pour se rendre sur son lieu de travail (pièce intimé 23 et 24).

Il est ainsi démontré que les plannings initiaux n'ont pas été transmis dans les délais et que les plannings modificatifs, intervenus par la suite, l'ont été sans l'accord du salarié, la société ne produisant aucun élément en ce sens.

Le salarié a donc été dans l'impossibilité de prévoir à l'avance son emploi du temps et de savoir à quel rythme il devait travailler et a dû se tenir à la disposition de la société.

La cour relève également les éléments suivants :

- le salarié a régulièrement réclamé à la société ses horaires de travail et a adressé à plusieurs reprises des SMS à son responsable afin de faire cesser les modifications intempestives qui selon ses termes ' lui ont mis la pression' précisant 'qu'il avait sa vie privée' (pièces 9 à 26)

- l'accord du 18 mai 1993, initialement prévu pour trois ans, s'est poursuivi en un accord à durée indéterminée et avait donc vocation à s'appliquer

- la note interne de la société a été rédigée à l'attention de l'ensemble du personnel à temps complet comme à temps partiel, puisque intitulée « Temps de Travail du Personnel Direct »,

- l'accord du salarié pour les modifications n'est pas repris dans cette note, celle-ci ne prévoyant qu'une indemnisation en cas de non respect des délais, ce qui ne laissait pas de choix au salarié.

En l'état de ces éléments, c'est donc à juste titre que les premiers juges ont requalifié le contrat à temps partiel en temps complet.

Sur les rappels de salaire

En l'état de la requalification du contrat de travail en temps complet, le calcul opéré par le salarié pour la période du 1er janvier 2017 au 12 juillet 2018 doit être retenu, et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

S'agissant du mois de juin 2018, le salarié soutient qu'après avoir été destinataire de trois plannings modificatifs en l'espace de deux jours, il a refusé le 1er juin 2018 les modifications imposées à son planning sans respect du délai de prévenance et indique qu'ainsi,la société a abusivement retenu son salaire à titre de sanction.

La société fait valoir que le délai de prévenance de sept jours a été respecté pour ce mois et que rien ne justifiait le refus du salarié de se présenter à son poste de travail après le 7 juin 2018, et qu'il ressort de son planning de travail pour le mois de juin 2018 qu'il n'a pas travaillé étant soit en congés, soit en absence non payée.

C'est par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le juge départiteur, faisant une analyse précise et détaillée des moyens soulevés par le salarié, a démontré qu'en l'absence de réponse informant le salarié sur ses dates de vacation, après le refus de ses plannings modificatifs, l'employeur ne pouvait pas considérer ce dernier en absence injustifiée.

La cour ajoute que le planning du mois de juin 2018 a été transmis par e-mail le 29 mai 2018 à 19h39, puis modifié par e-mail du 30 mai 2018 à 15h36 pour une première vacation au 4 juin 2018 et que compte tenu des heures de transmission, le délai de 10 jours de la note interne, et à tout le moins de 7 jours, ne peut être considéré comme avoir été respecté.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef.

Sur les primes de changement de planning

Le salarié invoque des changements de planning répétitifs et demande à percevoir les primes de changement de planning,en application de l'accord interne de la société.

L'accord interne de la société a prévu des primes en cas de changement de planning :

« - 9,46 € pour un changement entre 48h et 7 jours avant la modification, changement touchant au moins un jour entier, non férié, du lundi au vendredi, où le salarié est en repos

- 11,56 € pour un changement entre 48h et 7 jours avant la modification et qui crée une vacation un samedi, dimanche ou un jour férié, prime dite de « week-end et jour férié »

- 20 € pour un changement moins de 48 heures avant la modification, touchant au moins un jour entier ou vous étiez de repos, que ce soit en semaine, en week-end ou en jour férié, ces primes sont susceptibles d'être revalorisées par accord de branche ou accord d'entreprise».

Le juge départiteur a estimé que le salarié n'établissait pas un décompte suffisamment précis et conforme aux plannings adressés, relevant que pour le mois de novembre 2017, ce dernier avait reçu une prime de 20 € pour changement de planning et que pour le mois de mars 2018, le salarié a réclamé à tort 40 € de prime de changement de planning, alors que deux vacations avaient été ajoutées, plus de sept jours avant la modification.

Le salarié, qui se contente en cause d'appel de reprendre simplement le nombre de changements de plannings, sans reporter de manière précise les jours et heures de vacation modifiées en indiquant les changements de plus de 48h et moins de 48h, doit être débouté de sa demande, par voie de confirmation.

Sur le non respect de l'amplitude horaire

Le salarié fait valoir que l'employeur n'a pas, à plusieurs reprises, respecté l'obligation de l'amplitude horaire, au cours des mois de février, mars et avril 2018 et qu'il est fondé à solliciter la réparation du préjudice subi, directement en lien avec sa santé et sa sécurité.

La société sans le dénier, réplique que ce n'est qu'à quatre reprises tout au long de sa collaboration que le salarié n'a pas bénéficié d'un tel repos entre deux vacations et qu'une partie des critiques formulées par le salarié n'est pas justifiée, celui-ci n'ayant jamais émis aucune contestation à ce sujet.

La convention collective nationale dans son accord du 18 mai 1993 relatif à la durée et à l'aménagement du temps de travail prévoit aux articles 1 et 2 :

«Dans le souci d'éviter les difficultés d'organisation des services pour les entreprises, les parties signataires conviennent que la durée quotidienne maximale du travail peut être supérieure à 10 heures mais ne peut dépasser 12 heures.

La durée théorique moyenne du travail pour un salarié à temps complet sur 1 mois est de 169 heures et de 39 heures par semaine ».

« Le temps de repos entre deux services ne peut être inférieur à 12 heures. 24 heures de repos doivent être prévues après 48 heures de travail ».

En l'état des pièces produites par le salarié et notamment du planning du mois d'avril 2018 (pièces 17- 21 à 23), il est constaté que le temps de repos entre deux services n'a été respecté, de sorte que la demande d'indemnisation doit être accueillie, et le montant fixé par le jugement doit être confirmé.

Sur le défaut de visite médicale d'embauche et périodique

Le salarié réclame une indemnité, soutenant qu'il n'a eu aucune visite médicale d'embauche et qu'il n'a pu se rendre à la visite médicale de contrôle du 6 février 2018 en raison d'un énième changement de planning.

Il estime qu'en l'absence de toute visite médicale, l'employeur ne pouvait pas connaître l'aptitude à exercer le poste pour lequel il était employé et qu'il l'a délibérément exposé à un danger en contrevenant l'obligation de sécurité imposée par l'article L. 4121-1 du code du travail, d'autant plus qu'il a été victime d'un accident de travail le 12 juillet 2018.

La société indique avoir omis de faire bénéficier le salarié d'une visite médicale d'embauche mais lui oppose que le préjudice n'est pas démontré.

L'article R.4624-10 du code du travail dans sa rédaction applicable, prévoit que le salarié doit bénéficier d'un examen médical par le médecin du travail avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai.

C'est à l'employeur de justifier qu'il s'est conformé à ses obligations en matière de visites médicales.

Le manquement est établi et le salarié se limite à affirmer qu'il a nécessairement subi un préjudice, sans produire d'élément probant à l'appui de sa demande d'indemnisation.

Or, l'accident de travail du 12 juillet 2018 invoqué par le salarié ne peut être rattaché par un lien de causalité à ce manquement, s'agissant d'un accident de voiture, le salarié se trouvant en qualité de passager sur un trajet de retour.

Par ailleurs, l'intimé ne démontre aucun préjudice distinct de celui déjà réparé au titre du non respect de l'amplitude horaire minimale de 12 heures de repos entre deux vacations.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef.

II. Sur la résiliation judiciaire

Le salarié reprend les manquements reprochés à la société ci-dessus exposés, à savoir : les changements intempestifs des horaires de travail, le non respect de la durée légale de son temps de repos, le non-paiement de son salaire du mois de juin 2018, le non paiement de la prime de changement de planning, l'absence de visite médicale d'embauche et périodique.

Il rajoute que les directives de l'employeur ont porté une atteinte à sa santé et à sa sécurité, du fait de l'accident de trajet intervenu le 12 juillet 2018 avec un autre employé de la société et au visa de l'article R 4224-15 du code du travail, que la société ne lui a pas permis dans le cadre de sa formation continue de prolonger la certification de sauveteur secouriste du travail.

La société conteste les manquements reprochés en particulier s'agissant de sa responsabilité dans l'accident de circulation survenu au salarié le 12 juillet 2018 qui n'avait aucun caractère de gravité. Elle réplique qu'aucune faute ne peut être retenue à son encontre et souligne que le salarié n'explique pas en quoi les dispositions de l'article R 4224-15 du code du travail auraient vocation à s'appliquer.

Le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

La cour a retenu à l'encontre de la société plusieurs manquements fautifs qui rendaient impossible la poursuite de la relation contractuelle, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le surplus des griefs, de sorte que le prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de la société qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du jugement, doit être confirmée.

III) Sur les conséquences financières de la rupture

Les indemnités de rupture et les congés payés non pris ont été calculées par le premier juge conformément aux dispositions légales et conventionnelles et ne font l'objet d'aucune critique.

S'agissant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié, employé dans une entreprise employant habituellement plus de onze salariés et qui présentait deux années complètes d'ancienneté, peut prétendre en application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2018, à une indemnité comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire.

Eu égard au montant de son salaire brut reconstitué, le préjudice résultant pour le salarié de la rupture du contrat de travail a été justement apprécié par le juge départiteur.

La cour applique d'office la sanction des dispositions de l'article 1235-4 du code du travail.

IV) sur les autres demandes

Il n'est pas nécessaire d'assortir d'une astreinte l'obligation de faire relative à la remise des documents sociaux.

La société appelante, qui succombe en grande partie doit être déboutée de sa demande pour procédure abusive, et de celle faite en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle doit s'acquitter des dépens et condamnée à payer au salarié la somme de 2 500 €, au titre des frais dits irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Ordonne le remboursement par la société Fiducial Sécurité Humaine, aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage ;

Dit qu'à cette fin, une copie certifiée conforme de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi (France Travail), par le greffe ;

Condamne la société Fiducial Sécurité Humaine à payer à M. [J] [Y] [N] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société Fiducial Sécurité Humaine aux dépens d'appel.

LE GREFFIER Pour Mme MARTIN empéchée,

Mme MARTI en ayant délibéré


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 20/06933
Date de la décision : 25/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-25;20.06933 ?
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