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18/07/2024 | FRANCE | N°22/16202

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 18 juillet 2024, 22/16202


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND



DU 18 JUILLET 2024



N°2024/





RG 22/16202

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKODJ







[R] [N]





C/



CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE























Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :





-Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE <

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- CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 09 Novembre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/00301.





APPEL...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 18 JUILLET 2024

N°2024/

RG 22/16202

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKODJ

[R] [N]

C/

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :

-Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 09 Novembre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/00301.

APPELANTE

Madame [R] [N], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Marianne BALESI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE, demeurant Service Contentieux - [Adresse 2]

dispensée en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

Mme [N] a été victime d'un accident de trajet le 25 juillet 2014, pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par courrier du 16 septembre 2015, la caisse primaire d'assurance maladie lui a notifié sa décision de fixer la consolidation de son état de santé au 24 octobre 2015.

Mme [N] a contesté la décision et une expertise technique médicale a été organisée.

Le docteur [E], désigné d'un commun accord entre le médecin conseil de la caisse et le médecin conseil désigné par l'assurée, a, le 30 novembre 2015, conclut que l'état de santé de l'assurée pouvait être considéré comme étant consolidé ou guéri le 24 octobre 2015.

Par lettre datée du 16 décembre 2015, Mme [N] a formé un recours devant la commission de recours amiable qui, dans sa séance du 21 décembre 2017, l'a rejeté.

Par requête expédiée le 16 janvier 2018, Mme [N] a élevé son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône.

Par jugement avant-dire-droit du 13 décembre 2021, une expertise judiciaire a été ordonnée et le docteur [F] a rendu son rapport le 26 avril 2022, dans lequel, il a conclu que la date de consolidation de l'état de santé de Mme [N] suite à son accident du travail du 25 juillet 2014, devait être fixée au 26 janvier 2018.

Par jugement rendu le 9 novembre 2022, le tribunal, devenu pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, a:

- fait droit partiellement à la demande de Mme [N] en révision de la date de consolidation des lésions consécutives à l'accident du travail dont elle a été victime le 25 juillet 2014,

- dit que la date de consolidation des lésions consécutives à l'accident du travail dont Mme [N] a été victime le 25 juillet 2014 doit être fixée au 25 mars 2016,

- renvoie Mme [N] devant la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône afin d'être remplie de ses droits en conséquence,

- Laissé les dépens à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Par courrier recommandé expédié le 6 décembre 2022, Mme [N] a interjeté appel du jugement.

A l'audience du 30 mai 2024, Mme [N] reprend ses conclusions d'appelante n°3 et demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la date de consolidation de son état de santé au 25 mars 2016,

- fixer la date de consolidation au 26 janvier 2018,

- ordonner qu'elle soit rétablie dans ses droits,

- subsidiairement, ordonner une contre-expertise médicale en application des articles L.141-1, L.141-2 et R.141-1 et suivants du code de la sécurité sociale,

- en tout état de cause, débouter la caisse primaire d'assurance maladie et statuer ce que de droit sur les dépens.

Au soutien de ses prétentions, l'appelante se fonde essentiellement sur le rapport du docteur [F] qui rappelle que ses lésions initiales consistent en trois fractures au niveau des deux épaules et de la cheville gauche, qu'elle a subi une ostéosynthèse de la fracture de l'astragale gauche par deux vis et une ostéosynthèse de l'extrémité supérieure de l'humerus droit par un enclouage centromédullaire et que l'évolution a été marquée par plusieurs complications :

- une algodystrophie réactionnelle sur l'épaule droite justifiant la prolongation de la prise en charge par rééducation,

- des troubles sensitivomoteurs apparus au 6ème mois post-traumatique ayant justifié la réalisation de plusieurs électromyogrammes dont le dernier date du 26 janvier 2018,

- des douleurs de la cheville gauche en rapport avec une ostéonécrose.

Elle considère que la date de la consolidation de son état de santé ne peut être fixée au 25 mars 2016 dès lors que des interventions chirurgicales sont encore nécessaires après le 6 mars 2017 pour retirer le matériel de la cheville gauche, que le médecin chargé de son suivi a attesté qu'elle était toujours en suivi médico-chirurgical et que le 31 octobre 2018, elle a dû se rendre à une consultation de chiropractie.

La caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître, se réfère aux conclusions datées du 6 mai 2024 et communiquées le 22 mai suivant. Elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le 25 mars 2016 comme date de consolidation de l'état de santé de Mme [N] à la suite de l'accident du travail dont elle a été victime le 25 juillet 2014,

- débouter Mme [N] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [N] à lui payer la somme de 800 euros à titre de frais irrépétibles.

Au soutien de ses prétentions, la caisse intimée fait valoir que le médecin missionné dans le cadre de l'expertise technique médicale, le docteur [E], a confirmé la consolidation des fractures au regard dune arthrographie et d'un arthroscanner du 19 novembre 2015 de l'épaule droite et cheville gauche et de l'absence de traitement actif à venir.

Elle considère que le rapport du docteur [F] est imprécis dès lors qu'il justifie l'absence de stabilisation par l'invocation de lésions retrouvées à l'imagerie, qui ne sont pas imputables à l'accident du travail. Elle précise sur ce point, que l'expert vise une atteinte du plexus brachiale alors que cette atteinte n'a pas été confirmée médicalement et qu'au contraire, l'examen du 13 décembre 2017 a permis de confirmer qu'il n'y a pas de souffrance radiculaire dans le membre supérieur droit. Elle ajoute que l'expert vise une tendinopathie chronique du tendon supra-épineux qui, pourtant, est sans lien avec l'accident.

En outre, elle considère que le rapport du docteur [F] est insuffisamment motivé dans la mesure où, selon elle, aucun élément objectif ne permet d'affirmer une quelconque évolution de l'état de santé de l'assurée après le mois de février 2016.

Elle s'appuie sur le rapport du docteur [Y], émanant de la compagnie d'assurance [3], dans lequel la date du 25 mars 2016 est retenue au regard de la stabilisation des lésions séquellaires imputables à l'accident et la fin des soins actif, pour faire valoir que les premiers juges ont eu raison de retenir cette date.

Elle ajoute enfin que les pièces médicales produites par l'appelante, postérieures à la date du 25 mars 2016, ne sont pas de nature à contredire les conclusions du docteur [Y].

Il convient de se reporter aux écritures oralement reprises par les parties à l'audience pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

La consolidation est le moment où, à la suite d'un état transitoire que constitue la période active des soins, la lésion se fixe et prend un caractère permanent, sinon définitif, tel qu'un traitement n'est plus nécessaire, si ce n'est pour éviter une aggravation et qu'il est possible d'apprécier un certain degré d'incapacité permanente réalisant un préjudice définitif.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise du docteur [F] en date du 26 avril 2022, que l'état de santé de Mme [N], suite à son accident du travail du 25 juillet 2014, est consolidé au 26 janvier 2018.

Il motive son avis en indiquant que l'assurée a initialement souffert d'une fracture comminutive au niveau de l'extrémité prox imale de l'humérus droit et une fracture déplacée de l'astragale de la cheville gauche, qui ont été prises en charge chirurgicalement, avec une ostéosynthèse de la fracture de l'astragale gauche par deux vis et une ostéosynthèse de l'extrémité supérieure de l'humérus droit par un enclouage centromédullaire, dont l'évolution a été marquée par des complications.

Il vise les complications suivantes :

- une algodystrophie réactionnelle au niveau de l'épaule droite qui sera confirmée sur deux examens scintigraphiques et qui a justifié une prolongation de la prise en charge par rééducation,

- des troubles sensitivomoteurs qui sont apparus au 6ème mois post-traumatique, justifiant la réalisation de plusieurs électromyogrammes de contrôle, faisant suspecter une atteinte du plexus brachial et le dernier, du 26 janvier 2018, attestant de la stabilisation des lésions et de la négativité des troubles électriques,

- et des douleurs de la cheville gauche en rapport avec une ostéonécrose évoluant petit à petit vers une arthrose tibio talienne.

Cependant, il résulte du propre exposé des faits par l'expert, que le 4 septembre 2015 une radiographie de l'épaule droite permet de vérifier 'une consolidation acquise', et qu'il a été procédé à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse de l'épaule droite le 1er février 2016, soit près de deux ans avant la date de consolidation retenue par l'expert.

Il y est également indiqué que l'échographie du 4 septembre 2015 a mis en évidence une rupture partielle du tendon du long biceps, et que l'arthroscanner du 19 novembre 2015 et l'IRM de l'épaule droite du 23 avril 2016 ont confirmé l'existence d'une tendinopathie du biceps. Or, comme l'ont fait pertinemment remarqué les premiers juges, il n'est ni invoqué, ni justifié, que cette tendinopathie chronique du tendon supra épineux, sans signe de rupture, soit en lien direct avec l'accident du travail, d'autant que celle-ci n'a pas fait l'objet d'une déclaration de nouvelle lésion. Il s'en suit qu'il n'y a pas à prendre en compte cette tendinopathie dans l'appréciation de l'évolution de l'état de santé de l'assurée dans les suite de son accident du travail du 25 juillet 2014.

De même, l'expert prend en compte la réalisation d'électromyogrammes le 12 juillet 2016 et le 16 février 2017, mais le premier n'a fait que 'suspecter une atteinte du plexus brachial'et le second a permis de confirmer qu'il n'y avait pas d'atteinte radiculaire. Il s'en suit que ces examens d'exploration n'ont pas permis de constater que la fracture de l'épaule droite causée par l'accident du travail générait un état séquellaire encore évolutif après l'ablation du matériel d'ostéosynthèse du 1er février 2016.

Enfin, l'expert retient une date de consolidation en janvier 2018 au motif que la fracture astragalienne de la cheville gauche a évolué vers une ostéonécrose, alors, cependant, que si l'arthroscanner du 26 novembre 2015 a mis en évidence une chondropathie talienne grade 3, soit une usure du cartilage de l'articulation, rien ne permet de vérifier que l'usure est traumatique et donc en lien direct avec l'accident du travail. Au contraire, l'expert indique lui-même, dans l'exposé des faits de son rapport, que l'IRM de la cheville gauche, réalisée le 23 décembre 2016, 'permet de confirmer la consolidation qui est acquise, sans phénomènes d'ostéonécrose'. Il s'en suit que ce phénomène ne peut valablement justifier la fixation de la date de consolidation de l'état de santé de l'assurée en janvier 2018.

C'est donc à juste titre que les premiers juges n'ont pas entériné les conclusions du docteur [F] selon lequel la date de consolidation de Mme [N] à la suite de l'accident du travail dont elle a été victime le 25 juillet 2014, doit être fixée au 26 janvier 2018.

La date du 25 mars 2016, retenue par les premiers juges est justifiée les conclusions du docteur [Y] dans son rapport d'expertise diligentée par la compagnie d'assurance la [3] et rendu le 12 juillet 2016.

En effet, il ressort de la conclusion de cette expertise, versée aux débats par les deux parties, que

le médecin fixe la date de consolidation au 25 mars 2016 au motif qu'à cette date, la stabilisation des lésions séquellaires imputables à l'accident du travail est acquise.

En outre, les premiers juges font, à juste titre, remarquer que cette date correspond à la durée usuelle d'arrêt de travail suite à ablation de matériel d'ostéo-synthèse, qui est intervenu le 1er février 2016.

De surcroît, les pièces médicales datées postérieurement au 25 mars 2016, que l'appelante produit, ne sont pas de nature à remettre en cause ces conclusions expertales.

En effet, le bulletin d'hospitalisation du 7 mars 2017 vise un acte chirurgical sans qu'il soit établi qu'il est en lien direct avec l'accident du travail du 25 juillet 2014.

Par certificat médical du 20 janvier 2018, le docteur [O] atteste que 'Mme [N] est toujours actuellement en soins et en suivi médico-chirurgical et en attente de résultats d'exploration' mais sans préciser si ces soins, suivi et examens sont liés aux séquelles de l'événement traumatique du 25 juillet 2014.

Par lettre du 26 janvier 2018, le docteur [H], chirurgien orthopédique du membre supérieur, indique que Mme [N] souffre toujours de son épaule droite, mais il n'est pas établi que les soins ou interventions qu'il envisage (infiltration acromio-claviculaire, ténotomie du long biceps, résection acromio-claviculaire) soient en lien direct avec les séquelles de l'accident, plutôt qu'avec la tendinopathie dont elle souffre.

De même, l'attestation de la chiropraticienne en date du 31 octobre 2018, selon laquelle elle prend en charge l'assurée pour 'des céphalées cervicogéniques et irradiation bracchiale droite et une perte de mobilité significative avec douleur de l'articulation de la cheville gauche qui est à l'origine d'une claudication permanente', ne permet pas de dire que les séquelles de l'épaule droite et de la cheville gauche ne sont pas stabilisées depuis mars 2016. En effet, la consolidation qui suppose un état permanent stable, ne signifie pas que l'assurée soit sans séquelles permanentes.

En conséquence, sans qu'il soit besoin d'une nouvelle expertise, la cour adopte les motifs des premiers juges et confirme le jugement en ce qu'il a dit que la date de consoldiation de l'état de santé de Mme [N] à la suite de l'accident de trajet dont elle a été victime le 25 juillet 2014 doit être fixée au 25 mars 2016.

Mme [N], sucombant à l'instance, sera condamnée au paiement des dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du même code, l'équité commande de rejeter la demande en frais irrépétibles de la caisse.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Déboute Mme [N] de l'ensemble de ses prétentions,

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de sa demande en frais irrépétibles,

Condamne Mme [N] au paiement des dépens de l'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/16202
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.16202 ?
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