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18/07/2024 | FRANCE | N°22/15056

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 18 juillet 2024, 22/15056


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND



DU 18 JUILLET 2024



N°2024/





RG 22/15056

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKJYK







S.A.S. [6]





C/



URSSAF PACA





























Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :



- Me Isabelle COPPIN-CANGE, avocat au barreau de MARSEILLE



- URSSAF PACA

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 07 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 17/04088.





APPELANTE



S.A.S. [6], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Isabelle COPPIN-CANGE de la SELAS ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 18 JUILLET 2024

N°2024/

RG 22/15056

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKJYK

S.A.S. [6]

C/

URSSAF PACA

Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :

- Me Isabelle COPPIN-CANGE, avocat au barreau de MARSEILLE

- URSSAF PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 07 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 17/04088.

APPELANTE

S.A.S. [6], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Isabelle COPPIN-CANGE de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Hélène GOSSELIN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 7]

dispensée en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

La société par actions simplifiée (SAS) [3] a fait l'objet d'un contrôle de la l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires AGS sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale des allocations familiales et d'assurance chômage de Provence-Alpes-Côte d'Azur (URSSAF PACA) à l'issue duquel une lettre d'observations en date du 6 janvier 2016 lui a été adressée, comportant deux chefs de redressement pour l'établissement situé à [Localité 5] et trois chefs de redressement pour l'établissement situé à [Localité 4], pour un rappel global de cotisations et contributions sociales de 44.139 euros.

Par courrier daté du 1er février 2016, la société [3] a formulé des observations auxquelles l'inspectrice du recouvrement a répliqué par courrier du 18 février 2016, en maintenant le redressement dans ses principes et ses entiers montants.

Par deux lettres en date du 16 mars 2016, l'URSSAF PACA a mis en demeure la société [3] de lui payer d'une part la somme de 49.594 euros, dont 44.138 euros de cotisations et 5.456 euros de majorations de retard dues sur les années 2013 et 2014 suite au redressement notifié le 7 janvier 2016 pour l'établissement de [Localité 4], et d'autre part,la somme de 32.419 euros, dont 28.815 euros de cotisations et 3.604 euros de majorations de retard suite au redressement notifié le 7 janvier 2016 pour l'établissement de [Localité 5].

Par courrier du 19 avril 2016, la société a formé un recours devant la commission de recours amiable qui, dans sa séance du 27 juillet 2016, l'a rejeté.

Entre temps, par requête du 13 juin 2016, la société avait saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d'un recours contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Le 22 mai 2017, l'URSSAF PACA a émis une contrainte à l'encontre de la société [3] prise en son établissement situé à [Localité 4] pour un montant de 49.588 euros, dont 44.132 euros de cotisations et 5.456 euros de majorations de retard, qu'elle a fait signifier le 26 mai 2017.

Le 22 décembre 2017, l'URSSAF PACA a émis une contrainte à l'encontre de la société [3] prise en son établissement de [Localité 5] pour un montant de 32.419 euros dont 28.815 euros de cotisations et 3.604 euros de majorations de retard, qu'elle a fait signifier le 4 janvier 2018.

Le 18 janvier 2018, la société a, de nouveau, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une opposition à la contrainte émise le 22 décembre 2017 et signifiée le 4 janvier 2018.

Par jugement rendu le 7 octobre 2022, le tribunal, devenu pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, a :

- prononcé la jonction des procédures,

- confirmé la décision implicite de rejet et la décision explicite de rejet du 27 juillet 2016 de la commission de recours amiable,

- confirmé les rappels opérés par l'URSSAF PACA relatifs aux opérations de contrôle visant la SAS [3] sur les années 2013 et 2014,

- rejeté l'opposition de la SAS [3] à la contrainte 61838749 du 22 décembre 2017 pour un montant restant dû de 32.419 euros,

- rappelé que l'exécution provisoire en la matière est de droit,

- laissé les dépens à la charge de la société [3],

- rejeté les autres prétentions des parties.

Par courrier recommandé expédié le 10 novembre 2022, la SAS [3] a interjeté appel du jugement.

A l'audience du 30 mai 2024, la société appelante reprend ses conclusions supplétives n°3 datées du 4 avril 2024. Elle demande à la cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions sauf celle relative à la jonction des instances,

- annuler les chefs de redressement suivants :

- sur les chefs de redressement de l'établissement [Localité 5] :

* chef de redressement n°1 : sur les rémunérations non déclarées de M. [W] et M. [C] (cadeaux en nature offerts par l'employeur) d'un montant de 364 euros,

* chef de redressement n°2 : sur les frais professionnels, utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques) d'un montant de 28.817 euros,

- Sur les chefs de redressement de l'établissement de [Localité 4] :

*chef de redressementn°2 : sur les frais professionnels non justifiés - principes généraux - indemnités complémentaires d'un montant de 4.721 euros,

- sur le chef de redressement de l'établissement [Localité 5] et de l'établissement de [Localité 4] (frais professionnels- petits déplacements) d'un montant de 19.732 euros pour l'année 2013 et 20.793 euros pour l'année 2014,

- condamner l'URSSAF PACA à lui verser la somme de 1.500 euros à titre de frais irrépétibles,

- condamner l'URSSAF PACA aux dépens.

L'URSSAF PACA reprend les conclusions déposées et visées par le greffe le jour de l'audience. Elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- valider les contraintes des 22 décembre 2017 n°61838749 et 22 mai 2017 n°61838583,

- condamner la société [3] à lui payer la somme de 32.419 euros dont 28.815 euros de cotisations et 3.604 euros de majorations de retard au titre de la contrainte n°61838749 du 22 décembre 2017, et la somme de 49.588 euros dont 44.132 euros de cotisations et 5.456 euros de majorations de retard au titre de la contrainte n°61838583 du 22 mai 2017,

- condamner la société [3] à lui payer la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles.

Il convient de se reporter aux écritures oralement reprises par les parties à l'audience pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les rémunérations non déclarées de M. [W] et M. [C]

Exposé des moyens des parties

La société appelante explique qu'elle est dépourvue de comité d'action sociale de sorte que la Direction est en droit de prendre directement en charge les avantages se rattachant aux oeuvres sociales des comités d'entreprise. Elle précise qu'elle a ainsi accordé des primes à l'occasion de Noël aux salariés ayant des enfants de moins de 16 ans et considère que ces avantages ont été attribués d'une manière personnalisée, à l'occasion d'un événement déterminé, en fonction d'un nombre minimal d'enfant de moins 16 ans par salarié, conférant ainsi un caractère collectif au versement des sommes. Elle en conclut que les primes remplissent les conditions nécessaires pour être exonérées de cotisations.

Elle ajoute que la prime de 300 euros attribuée à M. [W] ayant trois enfants de moins de 16 ans et celle de 200 euros attribuée à M. [C] ayant deux enfants de moins de 16 ans sont inférieures au seuil de 5% du plafond mensuel de la sécurité sociale (156 euros pour 2014), de sorte que si ces avantages avaient été accordés sous forme de cadeaux ou de bons d'achat, ils ne seraient pas entrés dans l'assiette des cotisations.

L'URSSAF PACA réplique que les primes versées aux salariés en fin d'année, sont des rémunérations soumises à cotisations, peu important les circonstances de fin dannée et le fait que les salariés aient des enfants. Elle fait valoir qu'il ne s'agit pas de bons d'achat qui seraient subordonnés à la justification d'un événement déterminé, du non dépassement d'un plafond ou à la démonstration du respect d'un caractère collectif.

Position de la cour

En vertu de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en espèces ou en nature versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations. Pour le calcul des cotisations et contributions sociales, sont considérées comme rémunérations d'un travail notamment, les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

En l'espèce, il ressort de la lettre d'observations du 6 janvier 2016, que l'inspectrice du recouvrement a constaté que 'l'examen du grand livre 2014 indique au sein du compte 64330000 'N.E.S' l'attribution, en fin d'année, de primes en faveur des salariés [W] et [C] en franchise de cotisations', d'un montant de 500 euros nets, soit 639 euros bruts.

Il appartient à la société employeur qui se prévaut du caractère d'oeuvres sociales des sommes versées de le démontrer.

Or, la société ne dispose pas de comité d'entreprise. Elle a directement versé les sommes de 300 euros et 200 euros à deux de ses salariés de sorte qu'il ne s'agit pas de bons d'achat ou de bons cadeaux.

Les tableaux produits par la société listant les salariés sur les années 2013 et 2014, desquels il ressort que M. [W] et M. [C] sont les deux seuls salariés à avoir des enfants de moins de 16 ans, ne suffisent pas à la cour pour vérifier que les sommes qui leur ont été versées sont des bons d'achat ou des cadeaux en nature ayant un caractère collectif justifié par un événement déterminé comme celui de la fête de Noël.

Il n'y a donc pas à vérifier si le montant de l'avantage est inférieur à 5% du plafond annuel de la sécurité sociale pour savoir s'il est exonéré des cotisations sociales.

La cour confirme ainsi la décision des premiers juges qui ont maintenu le redressement pour le montant de 364 euros.

Sur les frais professionnels - limites d'exonération : utilisation du véhicule personnel (indemnités kilométriques)

Exposé des moyens des parties

La société appelante fait valoir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle ne produisait pas de justificatifs des kilomètres effectués par M. [Z] alors qu'elle produit des fiches de frais, la copie de sa carte grise et des attestations faisant état de ses déplacements.

Elle considère que les justificatifs permettent d'évaluer les kilomètres effectués par l'intéressé à hauteur de 55.875 kms en 2013 et 57.820 kms en 2014 et que, compte tenu de la puissance fiscale de son véhicule (7cv), les indemnités kilométriques sont calculées comme suit :

- 2013 : 55.875 km x 0,399 = 22.294 euros

- 2014 : 57.917 km x 0,401 = 23.225 euros.

Elle précise qu'ayant appliqué une indemnité forfaitaire, celle-ci est présumée utilisée conformément à son objet, sans qu'il soit besoin de produire des justicatifs. Elle indique démontrer le bien-fondé de l'exonération des indemnités kilométriques en justifiant du moyen de transport utilisé par le salarié concerné, du nombre de kilométres effectués et de la puissance de son véhicule.

Elle précise que M. [Z] a restitué les indemnités kilométriques qui lui avaient été versées, de sorte que le redressement n'a plus d'objet et doit être annulé.

L'URSSAF PACA réplique que la société ne justifie pas des indemnités kilométriques versées à son salarié par des documents utiles alors qu'elle produit des justificatifs hebdomadaires plutôt que journaliers et que le motif du déplacement n'est pas précisé.

Elle considère que la société ne peut valablement se prévaloir de la restitution des sommes par le salarié dès lors que les sommes ne sont pas concordantes avec le montant redressé, d'une part, et qu'il n'est fourni que l'extrait du grand livre sans précision des écritures en parallèle plutôt que le bilan comptable, d'autre part. Elle ajoute que cette dernière pièce n'a pas été soumise à l'inspecteur du recouvrement pendant le contrôle, de sorte qu'elle doit être écartée.

Position de la cour

Conformément aux dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations, à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels.

L'alinéa 3 de ce même article précise qu'il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

L'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2002 dispose que les frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Il résulte de l'article 2 suivant que l'indemnisation des frais professionnels s'effectue:

- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé. Dans ce cas, l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents,

- soit sur la base d'allocations forfaitaires. Dans ce cas, l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans certaines limites, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet, cette condition étant réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants déterminés par ce même arrêté.

En outre, l'article 4 du même arrêté prévoit que : 'Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint d'utiliser son véhicule personnel à des fins professionnelles, l'indemnité forfaitaire kilométrique est réputée utilisée conformément à son objet dans les limites fixées par les barèmes kilométriques annuellement publiés par l'administration fiscale.'

En l'espèce, il ressort de la lettre d'observations du 6 janvier 2016, que l'inspectrice du recouvrement a constaté que 'l'examen du compte 625100 indique que le président de la société, M. [B] [Z] a percu des remboursements de frais sous forme d'indemnités kilométriques en 2013 et 2014. Les montants relevés au débit sont inscrits au crédit du compte courant 455100, rendant ce dernier créditeur en fin d'exercice.'

Il y est également indiqué que l'inspectrice a considéré que 'les éléments apportés postérieurement aux opérations de contrôle sur place (récapitulatifs des montants attribués par semaine) ne sont pas de nature à justifier l'attribution de ces montants (...)'.

La société produit la carte grise du véhicule utilisé par M. [Z], immatriculé au nom de ce dernier et deux attestations de salariés décrivant les missions de celui-ci comme étant présent au dépôt de l'entreprise chaque matin, répartissant les équipes sur les différents chantiers, suivant l'avancée de chacun d'eux en les visitant pour rencontrer sur place les représentants des clients et participé aux réunions de chantier, permettant ainsi de vérifier que M. [Z] est amené à utiliser son véhicule personnel pour effectuer des trajets professionnels.

Cependant, le récapitulatif hebdomadaire de ses trajets sur les années contrôlées, mentionnant pour chaque semaine, le cas échéant, un nombre de kilomètres en indiquant la nature du trajet ('visite client' ou 'chantier' ou 'divers') sans préciser le point de départ et la destination du trajet, ou bien en indiquant la destination des trajets et le nombre d'aller retour dans la semaine, mais sans en préciser l'objet, ni la date précise (par exemple : St Vict.Peyruis 4x125x2 = 920),

sans non plus que les fiches produites ne soient datées et signées par l'intéressé, ce qu'aurait permis la production des récapitulatifs de ses trajets s'ils avaient été établis quotidiennement par l'intéressé, ne permet pas de vérifier la réalité des frais kilométriques professionnels engagés.

En conséquence, l'URSSAF était bien-fondée à redresser la société de ce chef.

Si tant M. [Z] que son cabinet d'expert comptable attestent en dates des 9 janvier 2022 et 20 mars 2024, qu'il a restitué les sommes rappelées par l'URSSAF au titre des indemnités kilométriques aux fins de ne pas mettre davantage la société en difficulté financière, il résulte de l'attestation du cabinet d'expertise comptable que M. [Z] a restitué la somme de 22.294,80 euros pour 2013 et de 23.225,92 euros pour 2014. Or, ces sommes ne correspondent pas aux montants rappelés par l'URSSAF au titre des indemnités kilométriques. En effet, il ressort de la lettre d'observations du 6 janvier 2016, en son point 2, que la vérification a entraîné un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale de 28.817 euros dont 13.886 euros pour 2013 et 14.567 euros pour 2014.

La société ne s'explique pas sur cette différence de montants.

Il s'en suit que la cour, comme les premiers juges, conclut que la société demeure redevable du montant de ce chef de redressement.

Sur les frais professionnels non justifiés - principes généraux 'indemnités complémentaires'

Exposé des moyens des parties

La société appelante fait valoir que la somme de 4.721 euros réintégrée dans l'assiette des cotisations au motif qu'il s'agirait d'indemnités complémentaires versée en sus des indemnités de panier et de transport sans justificatif professionnel, est comptabilisée dans le compte 625100 qui fait aussi l'objet du redressement au point suivant de la lettre d'observations, relatif aux frais professionnels, limites d'exonération petits déplacements, de sorte que la même somme ne peut pas être réintégrée deux fois dans l'assiette des cotisations.

Elle se fonde sur un tableau Excel récapitulatif du compte n°625100 et un extrait du Grand livre de ce même compte pour faire dire que le redressement est infondé.

L'URSSAF PACA réplique que la société ne peut valablement pas faire valoir que les 'indemnités complémentaires' versées en sus des primes de panier et de transport, sans aucun justificatif professionnel, constituent des doublons avec les frais de transport dans la mesure où les pièces justificatives invoquées, qui ne sont que de simples fichiers Excel, n'ont aucune valeur probante.

Position de la cour

Conformément aux dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations

Il résulte de la lettre d'observations du 6 janvier 2016, en son point 4, que l'inspectrice du recouvrement a constaté que 'la société attribue en 2014 des 'indemnités complémentaires' en sus des indemnités de panier et de transport, sans aucun justificatif professionnel.' Il y est également indiqué que la somme de 4.721 euros nets, soit 5.959 euros a été réintégrée dans l'assiette des cotistaions sociales.

Comme l'ont pertinemment retenu les premiers juges, la société ne produit aucune pièce justifiant la réalité des frais engagés.

En outre, l'extrait comptable du compte de charge 6251 voyages et déplacements et le tableau récapitulatif des sommes visées sur le compte et redressées par l'URSSAF n'ont aucune valeur probante et ne permettent pas de vérifier qu'une même somme a, effectivement, été réintégrée deux fois dans l'assiette des cotisations.

C'est à bon droit que les premiers juges ont maintenu le redressement de ce chef.

Sur les frais professionnels, limite d'exonération : petits déplacements ETT/BTP/Tolerie/Chaudronnerie

Exposé des moyens des parties

La société fait d'abord valoir que l'URSSAF n'a jamais expliqué pourquoi elle avait réintégré dans l'assiette des cotisations de l'année 2013, le montant de 27.941 euros alors qu'elle entendait réintégrer :

- les factures de la société [1] pour un montant de 6.466,61 euros,

- le remboursement de frais aux salariés pour unmontant de 1.748,38 euros,

- des indemnités de grand déplacement pour un montant de 12.302,25 euros,

- une erreur de saisie pour un montant de 111,9 euros

- des indemnités de transport pour un montant de 6.758 euros,

soit un total de 27.387,14 euros inférieur à celui rappelé de plusieurs centaines d'euros.

Elle ajoute que pour 2014, le montant réintégré est de 29.253 euros, alors que le total des sommes réintégrées est égal à 29.242 euros, sans que l'URSSAF n'ait donné aucune explication.

En outre, elle reproche aux premiers juges de n'avoir pas analysé les pièces produites pour justifier la réalité des frais remboursés, à savoir les factures [1] concernant l'abonnement pour neuf badges et la note de service affichée dans les locaux de l'entreprise depuis 2012 pour poser le principe selon lequel ils ne sont utilisables que pour les trajets professionnels, les notes de frais et tickets de péage permettant de justifier le remboursement de frais aux salariés qui n'ont pas de badge, ainsi que les impressions de trajet sur le site internet Mappy, les fiches de frais des salariés concernés et leur bulletins de paie permettant de justifier le remboursement de frais de grand déplacement. Elle explique que l'erreur de saisie de 111,9 euros correspondant à des frais de transport pour lesquels les justificatifs ont été égarés.

Elle reproche aux premiers juges d'avoir considéré que sa flotte de 36 véhicules était nécessairement utilisée par les salariés alors que ceux-ci ne sont pas tous destinés à réaliser des déplacements sur des chantiers, certains étant volé, immobilisés, avec une benne arrière trés anciens, à fort kilométrage, affectés à certains salariés spécifiquement, et ne peuvent pas toujours transporter des personnes (remorques, poids lourds, engins de chantier). Elle explique que l'assurance souscrite pour la 'flotte de véhicules' est un seul et même contrat de sorte que c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il était incompréhensible de continuer d'assurer des véhicules volés ou hors d'usage. Enfin, elle rappelle qu'elle compte 16 salariés en 2013 et 15 salariés en 2014 de sorte que les autres salariés que ceux, au nombre de trois, à qui est spécifiquement affecté un véhicule, ont nécessairement utilisé leur véhicule.

L'URSSAF PACA réplique que les justificatifs apportés par la société ne concernent qu'une partie des frais relevés, que l'examen des contrats d'assurance de la société indique la présence de 28 véhicules quand la société compte 16 salariés en 2013 et 15 salariés en 2014, de sorte que ces derniers n'ont pas besoind'utiliser leur véhicule personnel. Elle considère que l'attribution spécifique d'un véhicule à certains des salariés démontre qu'ils n'utilisent pas leur véhicule personnel. Elle en conclut que le redressement est bien fondé.

Position de la cour

Conformément aux dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations, à l'exclusion des sommes représentatives de frais professionnels.

L'alinéa 3 de ce même article précise qu'il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.

L'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2002 dispose que les frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale s'entendent des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi du travailleur salarié ou assimilé que celui-ci supporte au titre de l'accomplissement de ses missions.

Il résulte de l'article 2 suivant que l'indemnisation des frais professionnels s'effectue:

- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé. Dans ce cas, l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents,

- soit sur la base d'allocations forfaitaires. Dans ce cas, l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans certaines limites, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet, cette condition étant réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants déterminés par ce même arrêté.

En outre, l'article 4 du même arrêté prévoit que : 'Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est contraint d'utiliser son véhicule personnel à des fins professionnelles, l'indemnité forfaitaire kilométrique est réputée utilisée conformément à son objet dans les limites fixées par les barèmes kilométriques annuellement publiés par l'administration fiscale.'

En l'espèce, il ressort de la lettre d'observations du 6 janvier 2016, en son point 5, que l'inspectrice du recouvrement a constaté l'attribution de remboursement de frais au profit des salariés qui, d'après les justificatifs apportés et les éléments de paie, correspondraient au remboursement de frais de transport, sans pourtant que les justificatifs ne concernent la totalité des frais relevés en comptabilité d'une part et sans qu'ils soient de nature à justifier les déplacements professionnels des salariés d'autre part.

Les factures de la société [1], produites par la société pour justifier le paiement d'abonnement de neuf badges, ne sont pas de nature à établir la réalité des déplacements des salariés avantagés, ni leur caractère professionnel.

De plus, si la société produit deux notes de frais datées et signées par M. [M] et M. [O], mentionnant par jour, le cas échéant, le montant et le lieu d'un péage, sur les deux années contrôlées 2013 et 2014, ainsi que des facturettes de passages au péage pour les mois de septembre et décembre 2014 concernant M. [M] et les mois de décembre 2013 et 2014 pour M. [O], ces justificatifs ne permettent pas de vérifier le caractère professionnel des déplacements des personnes concernées dont la mission professionnelle reste inconnue malgré l'attestation de M. [M] selon lequel il a été amené à se déplacer à plusieurs reprises sur les chantiers avec son véhicule personnel, sans précision de lieux et de dates. En outre, les justificatifs apportés sont loins de justifier les montants de frais relevés en comptabilité. Ainsi, pour 2014, il est justifié des notes de frais pour 1.752,43 euros tandis qu'il a été relevé des indemnités de transport et complémentaires de transport à hauteur de 16.762,75 euros selon les propres conclusions de la société appelante.

De la même façon, les éléments produits pour justifier les frais de grands déplacements de M. [T] et de M. [S] (notes de frais, bulletins de paie portant mention de l'indemnité de déplacement, et attestation du salarié) pour les montants respectifs de 8.506,75 euros et 3.275 euros, ne permettent pas de justifier les montants de frais relevés en comptabilité, même si la cour prend en compte ceux retenus par la société dans ses conclusions, plutôt que ceux de l'inspectrice du recouvrement dans la lettre d'observations, à hauteur de 12.302, 25 euros pour les indemnités de grand déplacement 2013 et 11.212, 80 euros pour les indemnités de grand déplacement 2014.

De surcroît, sur la flotte de 36 véhicules assurée par la société, selon son propre décompte, s'il est exclu les 3 engins de chantier, 8 remorques et 9 poids lourds qui ne sont pas destinés au transport de personnes, le véhicule volé, deux autres hors d'usage, deux destinés au dépannage des engins de chantiers, conformément aux conclusions de la société, il demeure encore trois véhicules affectés spécifiquement à trois salariés, trois véhicules à fort kilométrage et cinq véhicules de 3 tonnes 500 avec benne arrière susceptibles de transporter des personnes sur des chantiers et qui ne sont pas hors d'usage.

La cour, comme les premiers juges, considère que les onze véhicules restant utiles pour le transport de personnes en direction des chantiers, assurés par la société qui compte 16 salariés en 2013 et 15 salariés en 2014, rendent peu crédible l'utilisation de leur véhicule personnel par les salariés auxquels il a été attribué des sommes au titre de frais de transport.

Il s'en suit que c'est à bon droit que les juges ont conclu au bien fondé du chef de redressement.

En conséquence de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et d'ajouter que conformément à la contrainte signifiée le 4 janvier 2018 aux fins de recouvrement des sommes redressées sur les années 2013 et 2014 concernant l'établissement de [Localité 5], à l'égard de laquelle l'opposition de la société [3] a été rejetée, cette dernière sera condamnée à payer à l'URSSAF PACA la somme de 32.419 euros dont 28.815 euros de cotisations et 3.604 euros de majorations de retard.

En outre, conformément à la contrainte signifiée le 26 mai 2017, aux fins de recouvrement des sommes redressées en 2013 et 2014 concernant l'établissement de [Localité 4],la société [3] sera condamnée à payer à l'URSSAF PACA la somme de 49.588 euros dont 44.132 euros de cotisations et 5.456 euros de majorations de retard.

Sur les frais et dépens

La société [3], succombant à l'instance, sera condamnée aux dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du même code, elle sera condamnée à payer à l'URSSAF PACA la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles et sera déboutée de sa propre demande présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

Condamne la société [3] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 32.419 euros dont 28.815 euros de cotisations et 3.604 euros de majorations de retard au titre des sommes redressées sur les années 2013 et 2014 concernant l'établissement situé à [Localité 5],

Condamne la société [3] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 49.588 euros dont 44.132 euros de cotisations et 5.456 euros de majorations de retard au titre de la contrainte n°61838583 du 22 mai 2017 émise aux fins de recouvrement des sommes redressées sur les années 2013 et 2014 concernant l'établissement situé à [Localité 4],

Condamne la société [3] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles,

Déboute la société [3] de sa demande en frais irrépétibles,

Condamne la société [3] au paiement des dépens de l'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/15056
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.15056 ?
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