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18/07/2024 | FRANCE | N°22/06324

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 18 juillet 2024, 22/06324


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND



DU 18 JUILLET 2024



N°2024/



RG 22/06324

N° Portalis DBVB-V-B7G-BJKG5







[N] [Z]



C/



URSSAF-DRRTI PACA

































Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :



-Me Danielle DIDIERLAURENT, avocat au barreau de MARSEILLE



- URSSAF-DRRTI PACA<

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 04 Avril 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 16/01507.





APPELANT



Monsieur [N] [Z], demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Danielle DIDIERLAURENT, ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 18 JUILLET 2024

N°2024/

RG 22/06324

N° Portalis DBVB-V-B7G-BJKG5

[N] [Z]

C/

URSSAF-DRRTI PACA

Copie exécutoire délivrée

le 18 Juillet 2024 à :

-Me Danielle DIDIERLAURENT, avocat au barreau de MARSEILLE

- URSSAF-DRRTI PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 04 Avril 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 16/01507.

APPELANT

Monsieur [N] [Z], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Danielle DIDIERLAURENT, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

URSSAF-DRRTI PACA, demeurant [Adresse 3]

représenté par Mme [G] [T] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

Le 24 août 2015, la caisse du régime social des indépendants (RSI) a notifié à M. [Z] une mise en demeure de lui payer la somme de 3.295 euros dont 719 euros de majorations de retard au titre de la régularisation 2014 des cotisations exigibles pour son activité 'SAM' enregistrée sous le numéro de Siren [N° SIREN/SIRET 2].

Par exploit d'huisser du 2 février 2016, le RSI a signifié à M. [Z] une contrainte établie le 14 janvier 2016 aux fins de paiement de la somme de 3.295 euros dont 719 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations 2014.

Par courrier recommandé expédié le 3 février 2016, M. [Z] a formé opposition à la contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône. L'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 21 601750.

En outre, par mise en demeure du 13 octobre 2015, le RSI a réclamé à M. [Z] le paiement de la somme de 13.012 euros dont 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation 2012 des cotisations exigibles pour son activité 'SAM' enregistrée sous le numéro de Siren [N° SIREN/SIRET 2].

Le 26 octobre 2015. M. [Z] a contesté la mise en demeure devant la commission de recours amiable qui, par décision du 7 décembre 2015, a rejeté le recours.

Le 25 janvier 2016, M. [Z] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de sa contestation et l'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 21 601507.

Le 29 janvier suivant, il a de nouveau formé un recours contre la décision de la commission de recours amiable devant le tribunal des affaires de sécurité sociale et l'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 21 602297.

Par exploit d'huissier, la caisse du RSI a signifié à M. [Z] une contrainte établie le 13 avril 2016 aux fins de paiement de la somme de 13.012 euros dont 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations 2012.

M. [Z] a formé opposition par courrier recommandé du 25 mai 2016 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône et l'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 21 603985.

Par jugement rendu le 4 avril 2022, le tribunal, devenu pôle social du tribunal judiciaire de Marseille, a :

- ordonné la jonction des affaires 21601750, 21601507, 21602297 et 21603985,

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] à l'encontre de la contrainte décernée le 14 janvier 2016 pour un montant de 3.295 euros de cotisations et majorations de retard dues pour la régularisation 2014,

- annulé pour défaut de justification de la qualité du signataire ladite contrainte,

- débouté l'URSSAF PACA de sa demande en paiement de la somme de 1.994 euros en ce compris 719 euros de majorations de retard au titre des cotisations 2014 réclamées dans la contrainte annulée,

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] à l'encontre de la contrainte décernée le 13 avril 2016 pour un montant de 13.012 euros de cotisations et majorations de retard dues pour la régularisation 2012,

- annulé pour défaut de justification de la qualité du signataire ladite contrainte,

- déclaré recevable le recours formé par M. [Z] à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable du RSI rendue le 7 décembre 2015,

- débouté M. [Z] de l'ensemble de ses prétentions,

- condamné M. [Z] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 13.012 euros dont 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations pour l'année 2012, tels que réclamés par mise en demeure du 8 octobre 2015,

- laissé les dépens à la charge de M. [Z],

- dit n'y avoir lieu à orodnner l'exécution provisoire de la décision.

Par courrier recommandé expédié le 28 avril 2022, M. [Z] a interjeté appel du jugement.

A l'audience du 23 novembre 2023, l'appelant a repris oralement les conclusions communiquées à la partie adverse le 15 juillet 2022. Il a demandé à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la jonction des affaires, déclaré recevables les oppositions formées contre les contraintes et le recours formé contre la décision de la commission de recours amiable, annulé pour défaut de justification de la qualité du signataire les contraintes signifiées les 2 février 2016 et 11 mai 2016, débouté l'URSSAF PACA de sa demande en paiement de la somme de 1994 euros au titre de la régularisation des cotisations de l'année 2014, et laissé les frais de signification à la charge de l'URSSAF PACA,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a :

- débouté de ses prétentions,

- a fait droit à la demande reconventionnelle de l'URSSAF PACA en paiement de la somme de 13.012 euros au titre de la régularisation des cotisations pour l'année 2012,

- et a laissé les dépens à sa charge,

- débouter l'URSSAF PACA de sa demande en paiement de la somme de 13.012 euros au titre de la régularisaion des cotisations pour l'année 2012,

- prononcer la décharge du réhaussement de cotisations notifié à M. [Z] le 3 avril 2015 sur les revenus 2010, 2011 et 2012 et régularisations subséquentes,

- subsidiairement, ordonner à l'URSSAF de déterminer et démontrer les bases de revenus imposables sur les années 2010, 2011 et 2012 après dégrèvement des redressements fiscaux prononcés, et ordonnner la correction des revenus selon dégrèvements fiscaux pour les années 2010, 2011 et 2012 et régularisation subséquente sur les années 2013, 2014 et 2015,

- en tout état de cause, condamner l'URSSAF à lui verser 3.500 euros à titre de frais irrépétibles et au paiement des dépens et frais de signification, avec distraction au profit de Maître Didierlaurent.

L'URSSAF n'a pas comparu.

Par arrêt avant-dire droit rendu le 11 janvier 2024, la cour a ordonné la réouverture des débats aux fins de convocation de l'URSSAF PACA à l'audience et de permettre à la partie initimée de conclure, et a sursis à statuer sur les demandes de l'appelant, les frais et les dépens.

A l'audience du 23 mai 2024, l'appelant reprend les conclusions déposées à la précédente audience et communiquées à l'URSSAF par courrier daté du 29 janvier 2024, ainsi que les prétentions ci-dessus exposées.

Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait d'abord valoir que les premiers juges ont inversé la charge de la preuve en fondant leur décision sur le fait qu'il n'avait pas démontré que les dégrèvements accordés par l'administration fiscale sont la conséquence d'une diminution de ses revenus industriels et commerciaux professionnels déclarés. Il considère que le montant des cotisations réclamées ne pouvait pas être correct puisqu'il a été calculé avant l'avis de dégrèvement du 13 janvier 2016. Il indique que son revenu d'activité professionnelle a été déterminé par l'administration fiscale lors de la vérification de sa comptabilité et qu'il se retrouve dans l'impossibilité de connaître le revenu définitif qui résulte du dégrèvement, l'administration fiscale ne répondant pas à ses courriers en ce sens, de sorte que sa seule issue est d'apporter un commencement de preuve. Il considère qu'il appartenait à l'URSSAF de démontrer que le revenu de 32.929 euros sur lequel elle a calculé la régularisation des cotisations de l'année 2012 était définitif en se le faisant confirmer par l'administration fiscale et que les premiers juges auraient dû l'enjoindre d'user de son droit de communication avec l'administration.

L'appelant fait également valoir que l'URSSAF a manqué à son obligation de loyauté en n'usant pas de son droit de communciation auprès de la 5ème brigade de vérification de la DGFP pour s'enquérir du nouveau revenu professionnel à prendre en compte pour le calcul des cotisations suite à l'avis de dégrèvement émis un an après la notification de réhaussement. Il considère que le manquement de l'URSSAF à son obligation de loyauté lui a causé un grave préjudice moral et matériel et que les premiers juges n'auraient pas dû le débouter de sa demande en dommages et intérêts.

En outre, il fait valoir que l'annulation de la contrainte décernée le 13 avril 2016, par les premiers juges aurait dû les conduire à annuler la décision de la commission de recours amiable rendue le 7 décembre 2015, dans la mesure où l'annulation a un effet rétroactif qui fait que le cotisant ne pouvait valablement former opposition, ni introduire un recours devant la commission de recours amiable. Il en conclut que la décision de la commission de recours amiable doit être également annulée pour vice de forme et que les juges ne pouvaient pas considérer être saisis du recours contre cette décision.

Sur le fond, il rappelle les dispositions de l'article L.131-6 du code de la sécurité sociale et sa réclamation avec demande de sursis au paiement auprès de l'administration fiscale suite à la notification de son redressement pour faire valoir que le revenu professionnel pris en compte pour le calcul des cotisations n'avait pas le caractère définitif exigé par la loi. Il ajoute que si l'URSSAF a pris pour base de calcul le revenu professionnel notifié par l'administration fiscale

et donnant lieu à des avis d'imposition supplémentaire, en revanche, elle n'a pas pris en compte les avis de dégrèvement rendus par l'administration fiscale suite à sa réclamation.

Il produit les avis de dégrèvement rendus le 13 janvier 2016 par l'administration fiscale desquels il ressort :

- pour l'année 2010, un dégrèvement de 8.737 euros comprenant 5.791 euros de dégrèvement portant sur les droits et 2.946 euros portant sur les pénalités,

- pour l'année 2011,un dégrèvement de 8.193 euros comprenant 5.428 euros de dégrèvement portant sur les droits et 2.765 euros portant sur les pénalités,

- pour l'année 2012, un dégrèvement de 7.099 euros comprenant 4.999 euros de dégrèvement portant sur les droits et 2.100 euros portant sur les pénalités,de sorte qu'il ne peut être considéré que les dégrèvements n'ont porté que sur les majorations et les pénalités, mais également sur les revenus industriels et commerciaux professionnels ayant servi de base au calcul du réhaussement des cotisations notifié dans le courant de l'année 2015.

Il explique qu'il a contesté devant l'administration fiscale, le supplément d'imposition pour des motifs tenant à la contestation de la méthode de reconstitution du bénéfice industriel et commercial, ainsi qu'à l'invraissemblance des tarifs et kilométrages retenus et qu'il a également contesté devant l'URSSAF la notification du réhaussement des cotisations sociales qui n'aurait pas dû intervenir avant la réponse de l'administration fiscale à son recours. Il se prévaut des avis de dégrèvement de l'administration fiscale suite à sa réclamation pour démontrer que la créance de l'URSSAF n'est pas justifiée et qu'il n'a pas à être condamné à en payer le montant réclamé.

Il se fonde encore sur les dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, pour faire valoir que les échanges entre l'organisme de sécurité sociale et le cotisant doivent se faire sous forme d'observations ou de notification et qu'une période contradictoire doit être respectée, sous peine d'irrégularité viciant la procédure et ayant pour effet de rendre nulle la mise en demeure et l'ensemble de la procédure de recouvrement. Il considère que ces formalités susbstancielles n'ont pas été respectées par la caisse du RSI qui, suite à la notification de cotisations supplémentaires de 12.589 euros en laissant un délai de 30 jours pour formuler ses observations, n'a répliqué à ses observations du 28 avril 2015, que tardivement le 17 juin suivant sans indiquer la qualité du signataire, ni motiver la position de l'organisme.

Enfin, il considère qu'en omettant de préciser les bases, taux et assiette de calculs retenues et appliquées dans ses conclusions, l'URSSAF ne satisfait pas à son obligation de justification du principe et du montant de sa créance.

L'URSSAF PACA reprend les conclusions communiquées à la cour le 21 mai 2024. Elle demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- débouté M. [Z] de l'ensemble de ses prétentions,

- condamné M. [Z] à lui payer la somme de 13.012 euros en ce compris 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations pour l'année 2012, tel que réclamé par mise en demeure du 8 octobre 2015,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] le 3 février 2016 à l'encontre de la contrainte d'un montant de 3.295 euros en ce comprsi les majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations pour l'année 2014 signifiée par exploit d'huissier du 2 février 2016,

- annulé pour défaut de justification de la qualité du signataire de ladite contrainte,

- déclaré recevable l'opposition formée par M. [Z] le 25 mai 2016 à l'encontre de la contrainte d'un montant de 13.012 euros en ce compris 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations pour l'année 2012 et signifiée par exploit d'huissier du 11 mai 2016,

- annulé pour défaut de justification de la qualité du signataire ladite contrainte,

- déclarer irrecevable le recours formé par M. [Z] à l'encontre de la contrainte émise le 14 janvier 2016 et signifiée le 2 février 2016 pour forclusion,

- déclarer irrecevable le recours formé par M. [Z] à l'encontre de la contrainte émise le 13 avril 2016 et signifiée le 11 mai 2016,

- valider la contrainte émise le 13 avril 2016 et signifiée le 11 mai 2016 pour un montant de 12.346 euros en principal, 666 euros de majorations de retard, soit un total de 13.012 euros au titre de la régularisation des cotisations 2012,

- dire que M. [Z] est redevable de la somme de 13.012 euros au titre de la régularisation des cotisations 2012, dont 12.346 euros en principal et 666 euros en majorations de retard, au titre de la mise en demeure du 8 octobre 2015,

- condamner M. [Z] aux frais de signification des contraintes et de tous actes de procédure nécessaires à leur exécution,

- condamner M. [Z] à lui payer 1.000 euros à titre de frais irrépétibles.

Au soutien de ses prétentions, l'URSSAF rappelle que les cotisations sociales sont calculées en deux temps : à titre provisionnel en pourcentage du revenu d'activité de l'avant-dernière année, puis à titre définitif l'année suivante sur le revenu d'activité réalisé l'année précédente et indique avoir calculé les cotisations 2012 sur la base des revenus définitifs transmis par le service des impôts à savoir : 32.929 euros de revenus et 104 euros de charges sociales. Elle détaille l'assiette des cotisations provisionnelles, le taux applicable, l'assiette des cotisations définitives, le taux applicable, le montant des cotisations définitives 2012 et le montant de la régularisation 2011 appelée en 2012 pour justifier le montant de la régularisation des cotisations 2012 retenu à hauteur de 13.986 euros. Elle explique que M. [Z] ayant effectué un paiement de 268 euros le 6 août 2012, il n'est plus redevable que de 12.346 euros en principal. Elle rappelle que les majorations de retard prévues à l'article R.243-18 du code de la sécurité sociale sélève à 666 euros, de sorte que la somme réclamée à hauteur de 13.012 euros est bien-fondée selon elle.

Elle considère que les cotisations sociales, qui sont assises sur le revenu d'activité non salarié, retenu pour le calcul de l'impôt, sont assises, en cas de redressement fiscal, sur le revenu résultant du redressement quand bien même il est contesté, dans la mesure où le recours exercé devant la juridiction administrative n'a pas d'effet suspensif. Elle fait valoir que pour garantir ses droits l'organisme a obligation d'en notifier le montant par mise en demeure, puis par contrainte,au cotisant, même s'il y a lieu de différer le recouvrement des cotisations sociales jusqu'à ce que le redressement présente un caractère définitif.

Elle soulève la forclusion de l'opposition à la contrainte émise le 14 janvier 2016 signifiée le 2 février 2016 au motif que M. [Z] aurait formé opposition au delà du délai imparti, le 20 mai 2016.

Elle réfute la nullité des contraintes signées par M. [K] et Mme [Y] aux motifs que ces derniers ont la qualité de directeur délégataire qui n'a pas besoin de justifier d'un pouvoir spécial pour signer les contraintes et qu'elle produit, en appel, les délégations de pouvoir permettant de vérifier la régularité des contraintes.

Elle ajoute que la contrainte émise le 14 janvier 2016 faisant référence à une mise en demeure qui n'a pas été contestée devant la commission de recours amiable et indiquant la nature, la cause, le montant des cotisations et la période concernée, est régulièrement motivée.

Enfin, elle indique que la juridiction n'est pas compétente pour accorder des délais de paiement.

Il convient de se reporter aux écritures oralement reprises par les parties à l'audience pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

1- Sur la recevabilité des oppositions à contraintes

L'article R.133-3 du code de la sécurité sociale dispose que le débiteur peut former opposition à la contrainte par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat du tribunal compétent dans les quinze jours à compter de la signification.

1.1 - Sur la recevabilité de l'opposition à la contrainte émise le 14 janvier 2016 relative à la régularisation des cotisations 2014

En l'espèce, il résulte de l'exploit d'huissier produit, que la contrainte émise le 14 janvier 2016 pour un montant de 3.295 euros au titre de la régularisation des cotisations 2014 a été signifiée à M. [Z] le 2 février 2016.

Or, selon les mentions du jugement critiqué, qui valent jusqu'à inscription de faux, le tribunal des affaires de sécurité sociale a été saisi d'une opposition à cette contrainte par courrier recommandé de M. [Z] adressé le 3 février 2016.

Le recours formé au mois de mai 2016 par M. [Z], dont se prévaut l'URSSAF, concerne la contrainte émise le 13 avril 2016 relative à la régularisation des cotisations 2012.

Il s'en suit que l'opposition à la contrainte émise le 14 janvier 2016 et signifiée le 2 février 2016 a bien été formée le 3 février 2016, dans le délai requis de quinze jours suivant la signification, et doit être déclarée recevable.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

1.2 - Sur la recevabilité de l'opposition à la contrainte émise le 13 avril 2016 concernant la régularisation des cotisations 2012

L'URSSAF sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré l'opposition à la contrainte émise le 13 avril 2016 recevable, sans énoncer aucun moyen au soutien de sa prétention.

L'opposition ayant été formée par courrier recommandé adressé le 25 mai 2016 au tribunal, pour contester la contrainte signifiée par exploit d'huissier le onze mai précédent, elle a été réalisée dans le délai imparti de quinze jours suivant signification et doit être déclarée recevable.

Le jugement sera également confirmé sur ce point.

2 - Sur la nullité des contraintes pour défaut de qualité du signataire

L'article L.244-9 du code de la sécurité sociale dispose que la contrainte est décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale.

Comme l'ont parfaitement rappelé les premiers juges, il est constant que la contrainte doit être signée par le directeur de l'organisme de sécurité sociale ou son délégataire de sorte qu'en cas de litige, le tribunal doit vérifier la qualité du signataire et notamment que le signataire de la contrainte est titulaire d'une délégation du directeur de l'URSSAF.

Si en première instance, le seul examen des contraintes n'a pas permis aux juges de vérifier que l'auteur de la contrainte était le directeur de l'organisme ou son délégataire, en revanche, en cause d'appel, l'URSSAF produit deux délégations de pouvoir desquelles il ressort que M. [K], signataire de la contrainte émise le 14 janvier 2016, et Mme [Y], signataire de la contrainte émise le 13 avril 2016, ont tous deux qualité de directeur et se sont vus donner délégation du directeur général de la caisse nationale du régime social des indépendants, pour 'délivrer, signer et notifier les contraintes des articles L. 244-9, R.133-3 et R.612-11 du code de la sécurité sociale' à compter, respectivement, du 1er janvier 2016 et du 1er mars 2016.

Il est donc établi que le signataire de chacune des contraintes annulées en première instance avait qualité pour la signer.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a annulé la contrainte émise le 14 janvier 2016 relative à la régularisation des cotisations 2014 et la contrainte émise le 13 avril 2016 relative à la régularisation des cotisations 2012 et chacune sera déclarée régulière.

3- Sur la demande en paiement de la régularisation des cotisations 2012 présentée par l'URSSAF

A titre liminaire, il convient de remarquer que l'appelante ne discute pas en cause d'appel ni la motivation de la contrainte émise le 13 avril 2016, ni la motivation de la lettre de mise en demeure préalable du 8 octobre 2015.

Le débat porte uniquement sur l'assiette de calcul des cotisations sociales définitives pour 2012.

L'article L.131-6-2 du code de la sécurité sociale dispose que les cotisations des travailleurs indépendants non agricoles sont calculées à titre provisionnel sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année et que lorsque le revenu d'activité de l'année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l'objet d'une régularisation sur la base de ce revenu.

Il ressort de la notification suite a redressement fiscal, du RSI à M. [Z], par courrier du 3 avril 2015, que compte tenu du signalement par l'administration fiscale que le montant de ses revenus professionnels non salariés retenu au titre de l'année 2012 s'élevait à 32.929 euros, il lui était réclamé un complément de cotisations, calculé sur la base de ce revenu revu à la hausse, d'un montant de 12.589 euros.

Contrairement à ce qu'affirme l'appelant dans ses conclusions, les premiers juges n'ont pas inversé la charge de la preuve et en application de l'article 9 du code de procédure civile, il appartient à M. [Z], qui conteste la base de calcul des cotisations réclamées par la caisse du RSI, de rapporter la preuve de son caractère erroné.

Il ressort de l'avis d'impôts sur les revenus 2012, établi le 28 avril 2015, que les revenus industriels et commerciaux professionnels déclarés de [Z] s'élèvent à 32.929 euros conformément à ce qui a été retenu comme base de calcul des cotisations pour la régularisation 2012 par la caisse du RSI.

M. [Z] justifie avoir contesté la reconstitution de ses revenus opérée par l'administration fiscale sur la période de 2010 à 2012, par courrier recommandé adressé à la direction générale des Finances publiques de la région PACA le 29 mai 2015 et avoir obtenu un dégrèvement par avis de l'inspecteur principal des finances publiques en date du 13 janvier 2016.

Mais, comme l'ont pertinemment fait remarquer les premiers juges, l'avis de dégrèvement porte sur le montant de l'impôt sans donner aucun élément d'information sur l'origine du dégrèvement, notamment sur un éventuel nouveau montant de revenus d'activité. Ainsi, il est mentionné pour l'année 2012 : le montant de l'impôt initial (10.693 euros), le montant du dégrèvement accordé (7.099 euros) et le montant de l'impôt rectifié ( 3.594 euros).

En outre, il ressort de l'avis d'imposition supplémentaire notifié le 15 janvier 2016 suite à l'avis de dégrévèment, également produit par M. [Z], qu'il a bénéficié d'un dégrèvement sur ses droits de 4.999 euros et sur les pénalités de 2.100 euros pour l'année 2012. Mais là encore, cet avis ne précise pas si la réduction des impôts accordée par l'administration fiscale est fondée sur une modification des revenus industriels et commerciaux déclarés de l'intéressé pour cette même année.

M. [Z] produit la contestation élevée devant l'administration fiscale le 27 mai 2015 à la suite de laquelle il a obtenu le dégrèvement des droits et des pénalités. Sa lecture permet de vérifier qu'il a contesté la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires imposable et l'application de la majoration de 40% à titre de pénalité pour manquement délibéré lors de la vérification de sa comptabilité.

Mais rien ne permet de vérifier que l'administration fiscale a accordé le dégrèvement en suivant le raisonnement développé par M. [Z] dans sa contestation relative à la reconstitution de son chiffre d'affaires, de sorte qu'elle aurait revu à la baisse les revenus industriels et commerciaux déclarés en avril 2015, plutôt qu'en diminuant le montant imposable sans rectification des revenus déclarés.

Au contraire, comme l'ont justement indiqué les premiers juges, il ressort de la propre reconstitution de ses revenus par M. [Z], dans sa réclamation auprès de la direction des Finances publiques le 27 mai 2015, qu'il retient le montant de 39.919 euros pour l'année 2012, soit un montant plus élevé que celui retenu par l'URSSAF, de 32.929 euros, pour calculer les cotisations sociales définitives de cette même année.

C'est en vain que M. [Z] invoque le manquement à son obligation de loyauté de la part de l'organisme de sécurité social, dès lors que celui-ci a notifié les motifs de sa décision de réclamer des cotisations complémentaires dans son courrier du 3 avril 2015, qu'il n'est pas discuté que la mise en demeure litigieuse comporte toutes les mentions nécessaires pour permettre au débiteur de connaître la cause, la nature et l'étendue de ses obligations, que M. [Z] a pu discuter la base de calcul retenue par l'organisme devant la commission de recours amiable et user des voies de recours juridictionnel.

De même, c'est en vain que M. [Z] se prévaut de l'annulation de la contrainte décernée à la suite de la mise en demeure litigieuse pour faire valoir que la juridiction ne serait pas saisie de la contestation de celle-ci, puisque l'annulation de la contrainte subséquente à la mise en demeure n'a pas pour effet d'annuler la mise en demeure qui lui est préalable. De surcroît, nonobstant l'annulation de la contrainte, les premiers juges demeuraient de toutes façons saisis de la demande reconventionnelle de l'URSSAF tendant à la condamnation de M. [Z] au paiement des cotisations réclamées sur le fondement de la mise en demeure.

Contrairement à ce qu'affirme l'appelant dans ses conclusions, dès lors que l'organisme de sécurité sociale a eu connaissance, par signalement de l'administration fiscale en 2015, de la fixation des revenus de M. [Z] à hauteur de 32.929 euros pour l'année 2012, il était en droit de calculer la régularisation des cotisations pour cette année sur ce revenu finalement déclaré. Le caractère définitif du revenu déclaré au sens de l'article L.131-6-2 du code de la sécurité sociale n'est pas subordonné à l'absence de contestation de celui-ci devant l'administration fiscale mais à la déclaration de revenus pour l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues.

Or, il n'est pas démontré que le montant des revenus industriels et commerciaux professionnels déclaré au titre de l'année 2012, ait été rectifié suite à la contestation élevée par M. [Z] devant l'administration fiscale.

Enfin, les dispositions de l'article L.243-59 du code de la sécurité sociale invoquées par l'appelant, relatives à la procédure de redressement, n'ont pas vocation à s'appliquer en l'espèce.

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les prétentions de M. [Z]

et l'ont condamné à payer à l'URSSAF PACA la somme de 13.012 euros dont 666 euros de majorations de retard au titre de la régularisation des cotisations pour 2012.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

4 - sur les frais et les dépens

M. [Z], succombant à l'instance, sera condamné à payer les dépens de l'appel, comprenant les frais de signification des contraintes et de tous actes de procédure nécessaires à leur exécution, en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du même code, M. [Z] sera condamné à payer à l'URSSAF PACA la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles et il sera débouté de sa propre demande présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a annulé les contraintes émises le 14 janvier 2016 concernant la régularisation des cotisations 2014 et 13 avril 2016 concernant la régularisation 2012,

Statuant à nouveau,

Déclare régulières les contraintes émises le 14 janvier 2016 concernant la régularisation des cotisations 2014 et le 13 avril 2016 concernant la régularisation 2012,

Valide la contrainte émise le 13 avril 2016 et signifiée le 11 mai 2016 pour un montant de 12.346 euros en principal, 666 euros de majorations de retard, soit un total de 13.012 euros au titre de la régularisation des cotisations 2012,

Condamne au besoin M.[Z] au paiement de la somme de 13.126 euros au titre de la contrainte du 13/04/2016 et la somme de 3295 euros au titre de la contrainte du 14/01/2016,

Déboute M. [Z] de sa demande en frais irrépétibles,

Condamne M. [Z] au paiement des dépens de l'appel comprenant les frais de signification des contraintes et de tous actes de procédure nécessaires à leur exécution.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/06324
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.06324 ?
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