COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8b
ARRÊT AU FOND
DU 12 JUILLET 2024
N°2024/.
Rôle N° RG 22/13318 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKEBS
[V] [X]
C/
CAISSE DE RETRAITE ET DE PREVOYANCE DE LA [3]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Florence MASSA
- Me Julie DE VALKENAERE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Pole social du TJ de NICE en date du 09 Septembre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 22/00062.
APPELANTE
Madame [V] [X], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Florence MASSA de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Ingrid OLIVER-D'OLLONNE, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
CAISSE DE RETRAITE ET DE PREVOYANCE DE LA [3], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Julie DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE substitué par Me Elyes KSIA, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Juin 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre
Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller
Mme Isabelle PERRIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Anne BARBENES.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Juillet 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Juillet 2024
Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Le service de sûreté ferroviaire a établi le 12 mai 2021 une déclaration d'accident du travail concernant Mme [V] [X], agent de la [3], pour un fait survenu le 28 avril 2021, sur son lieu de travail habituel dans le cadre d'un 'échange informel entre l'équipe de l'agent et la hiérarchie de proximité', la lésion mentionnée étant de nature psychologique.
Le certificat médical initial daté du 30 avril 2021, mentionne un 'choc psychologique suite à une conversation avec sa hiérarchie'.
La caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] a refusé le 29 septembre 2021 la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré, en considérant que les faits évoqués ne constituent pas un fait accidentel au sens de la législation sur les accidents du travail.
Mme [V] [X] a saisi le 27 janvier 2022 un tribunal judiciaire de sa contestation de cette décision.
Par jugement en date du 9 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Nice, pôle social, après avoir déclaré le recours recevable, a:
* rejeté le recours,
* dit que la procédure d'instruction a été respectée par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3],
* débouté Mme [V] [X] de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident invoqué au 28 avril 2021,
* confirmé la décision de la commission spéciale des accidents du travail de caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] du 29 septembre 2021,
* dit sans objet la demande indemnitaire de Mme [V] [X],
* débouté Mme [V] [X] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné Mme [V] [X] à payer à la caisse de prévoyance et de retraite de la [3] la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné Mme [V] [X] aux dépens.
Mme [V] [X] a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.
Par conclusions n°2 remises par voie électronique le 30 octobre 2023, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, Mme [V] [X] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour, à titre principal, de dire qu'une décision implicite de prise en charge de l'accident du 28 avril 2021 au titre de la législation de travail est intervenue depuis le 17 août 2021.
A titre subsidiaire, elle lui demande de reconnaître le caractère professionnel de l'accident du 28 avril 2021.
'En tout état de cause', elle lui demande de:
* annuler la décision du 29 septembre 2021 refusant la prise en charge de l'accident invoqué au 28 avril 2021 au titre de la législation sur les risques professionnels,
* dire que l'accident du 28 avril 2021doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,
* condamner la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,
* débouter la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] de l'ensemble de ses demandes,
* condamner la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions responsives remises par voie électronique le 28 mai 2024, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de débouter Mme [V] [X] de l'ensemble de ses demandes.
Elle sollicite la condamnation de Mme [V] [X] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
1- sur la reconnaissance implicite du caractère professionnel à l'accident survenu le 28 avril 2021:
Pour dire, en réalité, qu'il n'y a pas eu de décision implicite de reconnaissance d'accident du travail, les premiers juges ont retenu qu'il 'résulte de dispositions internes à la Cprp que le certificat médical initial peut être déclaré irrecevable si la description du siège et de la nature des lésions n'est pas assez précise', et 'de règles propres à la caisse primaire d'assurance maladie que le professionnel de santé doit mentionner toutes les constatations nécessaires à la caractérisation de la lésion et la détermination de son origine traumatique ou morbide', et que les termes trop imprécis du certificat médical initial, ne décrivant pas le choc suite non pas à une altercation mais à une simple conversation avec sa hiérarchie dans des circonstances inconnues, rendent ce certificat médical particulièrement lacunaire et justifient la demande de la caisse de compléter le dossier, ce qui n'a pas été le cas avant le certificat médical du 26 juin 2021, transmis le 2 juillet suivant. Ils ont considéré que c'est à juste titre que la Cprp a débuté l'instruction du dossier le 5 juillet 2021 et qu'elle a statué dans le délai imparti.
Exposé des prétentions des parties:
L'appelante argue que le certificat médical initial doit mentionner l'état de la victime et mentionner toutes les constatations qui pourraient présenter une importance pour la détermination de l'origine traumatique des lésions et que le certificat médical initial du 30 avril 2021 mentionnant un choc psychologique suite à une conversation avec la hiérarchie satisfaisait aux conditions des articles L.441-6 et R.441-10 du code de la sécurité sociale, pour soutenir que la caisse ne pouvait considérer que ce certificat ne visait pas de lésion médicale, alors qu'un choc psychologique en est une.
Elle soutient que le point de départ du délai d'instruction de la caisse étant la date de réception du certificat médical initial, soit le 4 mai 2021, et de la déclaration d'accident du travail de l'employeur, soit le 17 mai 2021, le dossier étant complet à cette seconde date, la caisse n'a pas respecté les délais d'instructions impartis par les artiches R.441-7 et R.441-8 du code de la sécurité sociale en adressant le questionnaire le 9 juillet 2021 et en refusant le 29 septembre 2021 la prise en charge, alors qu'elle bénéficiait d'une décision implicite de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident depuis le 17 août 2021.
L'intimée réplique qu'en application des articles L.441-6 et R.441-10 du code de la sécurité sociale le certificat médical initial doit mentionner l'ensemble des constatations médicales importantes, alors que le certificat médical initial daté du 30 avril 2021 ne comportait pas de lésion et que ce n'est que sur le certificat médical du 26 juin 2021, que l'assurée lui a fait parvenir le 2 juillet 2021, qu'il a été fait mention de symptômes d'un trouble de stress post traumatique, alors que le certificat médical transmis le 30 avril 2021 ne permettait pas de déterminer son état.
Elle argue que l'appelante ne peut se prévaloir d'une décision implicite de reconnaissance alors que les conditions de recevabilité du certificat médical initial ne sont pas remplies et que les délais applicables à la procédure d'instruction n'ont pas commencé à courir, et que n'ayant reçu le dossier complet qu'à partir du 5 juillet 2021, cette date constitue le point de départ de la procédure d'instruction et du délai de 30 jours. Elle ajoute avoir transmis le 9 juillet 2021 un questionnaire à son assurée, en l'informant de la date d'expiration du délai de quatre-vingt-dix jours, soit le 4 octobre 2021, pour sa décision, et avoir respecté ce délai en refusant le 29 septembre 2021 de reconnaître l'accident du travail.
Réponse de la cour:
Dans ses dispositions applicables, issues du décret 85-1353 en date du 17 décembre 1985, (l'article 100 III de la loi 2020-1576 du 14/12/2020 stipulant que les nouvelles dispositions de ce texte qui en sont issues sont applicables à compter du 1er novembre 2021) l'article L.441-6 alinéa 1 du code de la sécurité sociale disposait que le praticien établit, en double exemplaire, un certificat indiquant l'état de la victime et les conséquences de l'accident ou les suites éventuelles, en particulier la durée probable de l'incapacité de travail, si les conséquences ne sont pas exactement connues. Il adresse directement un de ces certificats à la caisse primaire et remet le second à la victime.
Selon l'article R.441-10 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue du décret 2019-854 en date du 20/08/2019, les certificats médicaux adressés à la caisse primaire d'assurance maladie par le praticien, conformément aux dispositions de l'article L.441-6 devront mentionner, indépendamment des renseignements prévus audit article, toutes les constatations qui pourraient présenter une importance pour la détermination de l'origine traumatique ou morbide des lésions.
La formule arrêtée pour ces certificats est utilisée par le praticien pour établir le certificat médical attestant la nécessité d'interrompre le travail. (...)
Aux termes de l'article R.441-7 du code de la sécurité sociale, la caisse dispose d'un délai de trente jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial prévu à l'article L. 441-6 pour soit statuer sur le caractère professionnel de l'accident, soit engager des investigations lorsqu'elle l'estime nécessaire ou lorsqu'elle a reçu des réserves motivées émises par l'employeur.
Selon l'article R.441-8 du code de la sécurité sociale,
I-Lorsque la caisse engage des investigations, elle dispose d'un délai de quatre-vingt-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident.
Dans ce cas, la caisse adresse un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident à l'employeur ainsi qu'à la victime ou ses représentants, dans le délai de trente jours francs mentionné à l'article R. 441-7 et par tout moyen conférant date certaine à sa réception. Ce questionnaire est retourné dans un délai de vingt jours francs à compter de sa date de réception. La caisse peut en outre recourir à une enquête complémentaire. En cas de décès de la victime, la caisse procède obligatoirement à une enquête, sans adresser de questionnaire préalable.
La caisse informe la victime ou ses représentants ainsi que l'employeur de la date d'expiration du délai prévu au premier alinéa lors de l'envoi du questionnaire ou, le cas échéant, lors de l'ouverture de l'enquête.
II.-A l'issue de ses investigations et au plus tard soixante-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial, la caisse met le dossier mentionné à l'article R. 441-14 à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur. Ceux-ci disposent d'un délai de dix jours francs pour le consulter et faire connaître leurs observations, qui sont annexées au dossier. Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l'employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d'observations.
La caisse informe la victime ou ses représentants et l'employeur des dates d'ouverture et de clôture de la période au cours de laquelle ils peuvent consulter le dossier ainsi que de celle au cours de laquelle ils peuvent formuler des observations, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information et au plus tard dix jours francs avant le début de la période de consultation.
Enfin, il résulte de l'article R.441-18 alinéa 2 du code de la sécurité sociale que l'absence de notification dans les délais prévus aux articles R. 441-7, R. 441-8, R. 441-16, R. 461-9 et R. 461-10 vaut reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, de la maladie, de la rechute ou de la nouvelle lésion
Il s'ensuit que:
* à réception d'une déclaration d'accident du travail et d'un certificat médical initial régulier en la forme, la seule décision que peut prendre la caisse porte sur la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré,
* le point de départ du délai qui lui est imparti pour se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident du travail est la date de réception de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial,
* ce délai est de trente jours francs à compter de la réception par la caisse de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial,
* mais il est quatre-vingt-dix jours, à compter du même point de départ, si la caisse décide de recourir à des investigations complémentaires ou si l'employeur a émis des réserves motivées, et elle doit avoir, dans le délai de 30 jours précité, notifié à la fois le recours à ce délai de quatre-vingt-dix jours, dont le point de départ est le même, et envoyé le questionnaire.
Par conséquent, si la caisse estime que le certificat médical initial qu'elle a réceptionné est insuffisamment précis, elle ne peut, sans prendre de décision sur le caractère professionnel de l'accident dans le délai de trente jours à compter de la réception de ce certificat et de la déclaration d'accident ou sans avoir pendant ce même délai envoyé le questionnaire prévu par l'article R.441-8 du code de la sécurité sociale, et notifié le délai de 90 jours, se contenter de considérer que le certificat médical initial réceptionné ne serait pas 'recevable' et n'aurait pas fait courir le délai qui lui est imparti pour décision.
Contrairement à ses allégations, la caisse n'a pas à apprécier la 'recevabilité' du certificat médical initial qui lui est adressé, qui est régulier en la forme dés lors qu'il est rempli sur l'imprimé spécifique aux AT/MP, et il est exact qu'une circulaire est dépourvue de caractère normatif.
En l'espèce, la déclaration d'accident du travail datée du 12 mai 2021, établie par un représentant de l'employeur, mentionne que le 28 avril 2021, à 15h00 sur son lieu de travail, il y a eu un 'échange informel entre l'équipe de l'agent et la hiérarchie de proximité' et que le siège des lésions de Mme [X] est 'psychologique', dont l'horaire de travail était ce jour-là de 15h00 à 22h25.
Cette déclaration ne mentionne pas de réserves, mais il est justifié que l'employeur a accompagné l'envoi par lettre recommandée avec avis de réception de cette déclaration d'accident du travail, d'un courrier de réserves, dont la caisse a accusé réception le 17 mai 2021.
Le certificat médical initial, établi par un médecin généraliste sur le formulaire Cerfa des AT/MP, est daté du 30 avril 2021. Il mentionne uniquement au titre des 'constatations détaillées' : 'choc psychologique, suite à une conversation avec sa hierrarchie'.
Il prescrit un arrêt de travail jusqu'au 9 mai 2021.
Bien que le terme de 'choc psychologique' puisse paraître insuffisant à caractériser une lésion pour autant la prescription par ce même certificat d'un arrêt de travail est de nature à en corroborer l'existence.
Il s'ensuit qu'à la date du 17 mai 2021, la caisse gestionnaire a été effectivement en possession la fois de la déclaration d'accident du travail datée du 12 mai 2021, des réserves de l'employeur et du certificat médical initial daté du 30 avril 2021.
Le point de départ du délai imparti à cette caisse pour se prononcer sur le caractère professionnel de l'accident situé au 28 avril 2021, est par conséquent le 17 mai 2021.
La caisse devait donc, si elle entendait procéder à des investigations complémentaires, fût-ce pour obtenir des précisions médicales complémentaires sur la lésion, procéder avant le 17 juin 2021 à l'envoi du questionnaire et notifier dans le même temps le délai de quatre-vingt-dix jours pour prise de décision.
Par courrier daté du 19 mai 2021 ayant pour objet 'certificat médical irrecevable' la caisse a écrit à l'assurée que l'accident du travail se définit comme une lésion de l'organisme constatée médicalement dans un temps voisin des faits et que le certificat médical initial établi le 30/04/2021 ne comporte pas de lésion, et qu'en l'absence de retour par l'assurée d'un nouveau certificat médical initial, 'le dossier sera susceptible d'un classement sans suite'.
Si ce courrier a été envoyé dans les trente jours de la réception de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial pour autant il ne mentionne nullement le délai de quatre-vingt-dix jours pour prise de décision de la caisse.
De plus, ce n'est qu'après réception d'un troisième certificat médical, daté du 26/06/2021, établi sur papier à entête d'un médecin psychiatre, mentionnant que l'assurée 'présente tous les symptômes d'un trouble de stress post-traumatique', que la caisse a adressé par courrier daté du 9 juillet 2021 à l'assurée un questionnaire à remplir, en lui indiquant qu'elle 'engage des investigations' et 'dispose d'un délai de 90 jours francs à compter de la réception de son dossier pour rendre sa décision, soit du 5 juillet 2021 au plus tard le 4 octobre 2021".
Ce courrier de la caisse du 9 juillet 2021 a donc été envoyé alors que le délai de trente jours francs qui avait commencé à courir le 17 mai 2021 était expiré.
Or l'absence de notification dans le délai de trente jours francs ayant commencé à courir le 17 mai 2021, par la caisse, d'une décision sur la prise en charge ou de l'envoi d'un questionnaire ainsi que de la notification du recours au délai de quatre-vingt-dix jours, vaut reconnaissance du caractère professionnel de l'accident à l'accident survenu le 28 avril 2021 à Mme [X].
La caisse n'ayant dans les délais de trente jours à compter du 17 mai 2021 ni notifié le recours au délai de quatre-vingt-dix jours, ni envoyé le questionnaire, la poursuite de l'instruction du dossier au-delà du 17 juin 2021 est irrégulière, la reconnaissance implicite du caractère professionnel à l'accident du 28 avril 2021 étant à compter de cette date acquise à l'assurée.
Par infirmation du jugement entrepris, la cour dit que le caractère d'accident du travail à l'accident survenu le 28 avril 2021 à Mme [V] [X] est implicitement reconnu.
La cour venant de juger que l'appelante bénéficie d'une décision implicite de reconnaissance de l'accident du travail antérieure, la décision de refus de prise en charge du 29 septembre 2021 est nulle.
2- sur la demande en dommages et intérêts pour 'procédure' abusive:
Exposé des moyens des parties:
L'appelante argue que la caisse disposait depuis le 17 mai 2021 du dossier complet à instruire, que pour un motif fallacieux, à savoir la prétendue absence de mention de lésion sur le certificat médical initial a retardé l'instruction du dossier au 5 juillet, que malgré l'avis favorable de son médecin-conseil la caisse a refusé la prise en charge de son accident du travail le 29 septembre 2021, cinq mois après son accident du travail, et qu'il a fallu l'intervention de délégués du personnel pour que sa situation soit régularisée par son employeur, ayant été privée de rémunération, pour soutenir que par la faute de la caisse elle a subi un préjudice financier et également un préjudice moral, son état de santé s'étant dégradé.
L'intimée réplique que la preuve n'est pas rapportée de la faute qui lui est imputée comme du préjudice allégué ni d'un lien de causalité. Elle argue également que la déclaration d'accident du travail peut être effectuée par l'assurée et que les griefs développés à l'égard de son employeur concernant le paiement de son salaire ne relèvent pas de la juridiction du contentieux de la sécurité sociale.
Réponse de la cour:
L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, et l'article 1241 du même code ajoute que chacun est responsable du dommage qu'il ait causé non seulement par son fait mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
L'article 9 du code de procédure civile fait obligation à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Il incombe dès lors à celui qui invoque un préjudice de rapporter la preuve:
* de l'existence d'un préjudice,
* d'une faute commise par la personne à laquelle il l'impute,
* du lien de causalité entre cette faute et ce préjudice.
La cour vient de juger que la caisse n'ayant pas respecté les délais et modalités d'instruction de liés à la déclaration d'accident du travail, il y a décision implicite de reconnaissance du caractère professionnel, et qu'elle ne pouvait ultérieurement prendre une décision de refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle.
L'erreur de la caisse dans l'instruction du dossier de l'assurée est établie. Elle a généré la fois la méconnaissance des conséquences du bénéfice de la reconnaissance implicite du caractère professionnel de l'accident, dont la privation des indemnités journalières y afférentes, une décision irrégulière de refus de prise en charge cinq mois après la survenance du fait accidentel.
Par contre, les conséquences qui en ont été tirées par l'employeur ne sont pas imputables à la caisse.
Par ailleurs les certificats médicaux (pièces 48 et 49) qui font ressortir des consultations gynécologiques en lien avec 'une situation de surmenage en novembre 2021", sont inopérants à établir un lien entre l'erreur commise dans l'instruction du dossier d'accident du travail et l'évolution de la grossesse de l'assurée.
Par conséquent le préjudice moral qui a pu découler de l'erreur de la caisse se limite aux tracas inhérents à la procédure judiciaire que l'assurée a dû entreprendre.
Compte tenu de ces éléments, la cour fixe l'indemnisation du préjudice économique et moral à la somme de 1 000 euros au paiement de laquelle la caisse doit être condamnée.
Succombant en cause d'appel, la caisse doit être condamnée aux dépens et ne peut par conséquent solliciter utilement le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [X] les frais qu'elle a été contrainte d'exposer pour sa défense, ce qui conduit la cour à lui allouer sur le fondement des dispositions précitées la somme de 2 500 euros.
PAR CES MOTIFS,
- Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
- Dit que le caractère d'accident du travail à l'accident survenu le 28 avril 2021 à Mme [V] [X] est implicitement reconnu à la date du 17 juin 2021,
- Dit nulle la décision de refus de prise en charge du 29 septembre 2021,
- Déboute la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] de l'intégralité de ses prétentions et demandes,
- Condamne la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] à payer à Mme [V] [X] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- Condamne la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] à payer à Mme [V] [X] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Déboute Mme [V] [X] du surplus de ses demandes et prétentions,
- Condamne la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la [3] aux dépens.
Le Greffier Le Greffier