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10/07/2024 | FRANCE | N°23/11190

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 10 juillet 2024, 23/11190


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 10 JUILLET 2024



N° 2024/ 334







N° RG 23/11190



N° Portalis DBVB-V-B7H-BL2PO







[S] [L]





C/





S.N.C. [Adresse 2]



































Copie exécutoire délivrée le :





à :



Me Françoise BOULAN





Me Jean-Michel OLLIER







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 26 Juin 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/01161.





APPELANT



Monsieur [S] [L]

né le 15 Juillet 1954 à [Localité 6] (MAROC), demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Françoise BOULAN, membre de la...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 10 JUILLET 2024

N° 2024/ 334

N° RG 23/11190

N° Portalis DBVB-V-B7H-BL2PO

[S] [L]

C/

S.N.C. [Adresse 2]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Françoise BOULAN

Me Jean-Michel OLLIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 26 Juin 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/01161.

APPELANT

Monsieur [S] [L]

né le 15 Juillet 1954 à [Localité 6] (MAROC), demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Françoise BOULAN, membre de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SNC [Adresse 2]

représentée par son mandataire, la société GESTIPAR, SAS ayant son siège social sis [Adresse 4], représentée par son représentant légal domicilié ès qualités de droit au siège sis [Adresse 1]

représentée et plaidant par Me Jean-Michel OLLIER, membre de l'AARPI OLLIER JEAN MICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Philippe COULANGE, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2024, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La Société en Nom Collectif ( SNC ) des [Adresse 2] a donné à bail professionnel à M. [S] [L] des locaux professionnels situés à [Localité 5], [Adresse 2], destinés à l'exercice de sa profession d'avocat, par acte sous seing privé du 18 décembre 2009, et ce pour une durée de 9 années à compter du 1er janvier 2010 pour expirer le 31 décembre 2018.

Par acte d'huissier du 23 mars 2018, la bailleresse a notifié au locataire un congé à effet au 31 décembre 2018. A l'issue du congé, M. [L] s'est maintenu dans les lieux.

Par assignation du 27 novembre 2019, la SNC des [Adresse 2] a fait citer M. [L] devant le juge des référés du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE pour obtenir le constat de la résiliation du bail, l'expulsion du locataire et la fixation d'une indemité d'occupation.

Par ordonnance rendue le 14 septembre 2020, le juge des référés du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE a renvoyé le dossier devant le juge des référés du Tribunal Judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE, au visa de l'article 47 du Code de Procédure Civile, lequel, par ordonnance du 26 janvier 2021, a décidé qu'il n'y avait pas lieu à référé.

C'est dans ces conditions que par acte du 23 mars 2021, la SNC des [Adresse 2] a fait citer M. [L] devant le Tribunal Judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE pour obtenir le constat de la résiliation du bail et l'expulsion des locataires, la fixation d'une indemnité d'occupation et la condamnation de M. [L] au paiement de la somme de 17 023,14 € au titre de l'arriéré d'indemnité d'occupation, le somme de 5 000 € pour résistance abusive ainsi qu'une somme au titre des frais irrépétibles et les dépens.

Par jugement rendu le 26 juin 2023, le Tribunal Judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE a débouté M. [L] de ses demandes tendant à l'irrégularité du congé et à la nullité de l'assignation, de se demande de requalification du bail en bail verbal, a ordonné son expulsion, a débouté la SNC de sa demande d'astreinte, condamné M. [L] à lui payer la somme de 20 197,91 € au titre des loyers et indemnités d'occupation impayés, débouté la SNC des [Adresse 2] de sa demande de majoration de 10%, dit qu'à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'à libération des lieux, M. [L] devra payer par jour de retard, outre les charges, une indemnité d'occupation égale à deux fois le loyer quotidien, débouté M. [L] de ses demandes de condamnation de trop perçu et dit que celui-ci était prescrit en sa demande de dommages-intérêts pour la période antérieure au 18 juin 2015, condamné la SNC des [Adresse 2] à payer à M. [L] au titre de son préjudice moral entre le 18 juin 2015 et le 31 décembre 2018 la somme de 6 360 €, débouté M. [L] de sa demande de réparation du préjudice lié à l'impossibilité de sous-louer des bureaux, ordonné la compensation, débouté la SNC des [Adresse 2] de sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive et condamné le locataire au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

Par déclaration au greffe en date du 28 août 2023, M. [S] [L] a interjeté appel de cette décision.

L'affaire a fait l'objet d'une fixation à bref délai.

M. [L] demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et dire que le courrier de l'intimée du 23 janvier 2017 vaut renonciation tacite de se prévaloir de la prescription, de dire que le congé du 23 mars est invalide, de diminuer le montant de l'indemnité d'occupation, de dire que le propriétaire ne peut plus réclamer la taxe foncière, de condamner la SNC des [Adresse 2] à lui payer la somme de 25 200 € au titre du préjudice moral et de jouissance pendant toute la durée du bail, la somme de 168 000 € pour préjudice de trésorerie, et à défaut de 144 000 € pour perte de chance, de la somme de 5 000 € pour dissimulation de la présence de plomb et d'amiante lors de la signature du bail.

Il sollicite l'allocation de la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et la condamnation de l'intimée aux dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de son recours, il fait valoir :

- que la délivrance d'un congé par le bailleur représenté par son mandataire dépourvu de mandat spécial constitue une irrégularité de fond.

- que le propriétaire aurait renoncé à la prescription de l'action en réparation de son préjudice pour la période antérieure au 18 juin 2015.

- que le bailleur aurait renoncé au bénéfice du congé.

- qu'il a subi des troubles de jouissance et un ' préjudice de trésorerie ' n'ayant pu louer comme il le souhaitait les bureaux demeurés libres en raison du mauvais état de l'immeuble.

- que le bail a survécu et que le bailleur a supporté les frais de déménagement des occupants de l'immeuble.

La SNC des [Adresse 2] conclut au principal à la confirmation du jugement déféré mais à sa réformation en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de majoration des loyers dus de 10%, déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, condamnée à payer à M. [L] la somme de 6 360 € au titre de son préjudice moral, d'image et de jouissance entre le 18 juin 2015 et le 31 décembre 2018.

Elle réclame la condamnation de M. [L] à lui payer la somme de 68 177,13 € arrêtée au 5 novembre 2023 au titre des loyers et indemnités d'occupation, avec majoration de 10 % contractuellement prévue et la somme de 5 000 € pour résistance abusive.

Elle sollicite l'allocation de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle soutient :

- que M. [L] est dépourvu de titre d'occupation depuis le 1er janvier 2019, le bail ayant pris fin du fait du congé régulièrement délivré le 31 décembre 2018.

- que le locataire doit assumer l'entièreté du passif.

- que les préjudices qu'il invoque ne sont nullement démontrés.

- que la résistance abusive de l'appelant est établie et doit ouvrir des dommages-intérêts.

L'ordonnance de clôture a été rendue le jour de l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'avant débats, la SNC des [Adresse 2] a soulevé l'irrecevabilité des dernières conclusions et pièces notifiées par M. [L] le lundi 13 mai 2024, veille de l'audience, malgré le renvoi du dossier la fois précédente, pour des conclusions notifiées par l'appelant le matin même de l'audience;

Que M. [L] fait observer que ses toutes dernières conclusions contiennent de simples rappels légistlatifs et ne nécessitent pas forcément de réponse;

Mais attendu que le fait que l'affaire soit évoquée dans le cadre d'une procédure à bref délai ne dispense pas l'appelant de respecter le principe du contradictoire qui commande de laisser à son adversaire un délai suffisant pour lui permettre de répliquer s'il le souhaite;

Que les dernières conclusions notifiées par RPVA par M. [L] le lundi 13 mai 2024 alors que l'audience s'est tenue le mardi 14 mai à 9 heures 15 ne permettent pas de laisser à la SNC des [Adresse 2] un délai suffisant pour examiner les conclusions nouvelles qui contiennent 5 pages de plus que celles du 2 avril 2024 et cela d'autant plus qu'à l'audience précédente, un renvoi du dossier avait été décidé pour permettre aux parties de se mettre en état;

Qu'il n'y avait donc pas lieu pour M. [L] de notifier de nouvelles conclusions et de nouvelles pièces le 13 mai 2024, veille de l'audience, et que celles-ci doivent en conséquence être déclarées irrecevables;

Attendu qu'à l'audience du 14 mai 2014, M. [L] indique renoncer à tous ses moyens tenant à la nullité de la procédure, souhaitant concentrer son argumentation sur le moyen tendant à voir constater l'invalidité du congé pour défaut de mandat spécial donné au gestionnaire pour délivrer ce congé;

Qu'il convient de lui en donner acte et de faire inscrire cette nouvelle position au plumitif d'audience, la procédure étant écrite;

Attendu que M. [S] [L] soulève en effet l'irrégularité du congé au motif qu'il aurait été signifié par l'intermédiaire du mandataire du bailleur sans que celui-ci ait reçu de mandat spécial;

Qu'il ajoute qu'il s'agirait d'une nullité de fond pouvant être invoquée en tout état de la procédure et conclut à l'invalidité du congé;

Mais attendu que le congé délivré respecte parfaitement les prescriptions légales puisqu'il désigne bien le nom du bailleur et celui de son mandataire, que la nécessité du mandat spécial n'existe que pour protéger le bailleur qui n'a jamais contesté la nécessité de délivrer le congé et qui seul peut reprocher au mandataire d'avoir agi sans autorisation expresse, qu'à réception du congé M. [L] n'en a pas contesté le bien fondé, que celui-ci n'établit l'existence d'aucun grief;

Qu'il convient en conséquence de déclarer le congé délivré le 23 mars 2018 pour une date d'effet au 31 décembre 2018 parfaitement valide;

Attendu que M. [L] prétend encore que le bailleur aurait renoncé au bénéfice du congé au seul motif que la société mandataire aurait continué à utiliser le terme de ' locataire ' et aurait évoqué des ' loyers ' dans des courriers adressés à celui-ci en date du 30 octobre 2019, 3 avril 2020 et du 9 juin 2020 et donc postérieurement à la date d'échéance du bail le 31 décembre 2018;

Que cette petite erreur de vocabulaire du mandataire ne saurait permettre sérieusement de déduire que la SNC des [Adresse 2] aurait entendu renoncer au bénéfice du congé qu'elle avait pris soin de faire délivrer en temps utile;

Que c'est donc à juste titre que le premier juge a retenu que M. [S] [L] est devenu occupant sans droit ni titre des locaux qui lui ont été loués jusqu'au 31 décembre 2018 à compter du 1er janvier 2019;

Attendu que le contrat de bail prévoyait expressément qu'en cas de maintien dans les lieux après la résiliation, l'indemnité d'occupation serait du double du dernier loyer;

Que cette stipulation, voulue par les parties, ne disparaît pas évidemment au seul motif que le bail serait résilié sans quoi elle n'aurait aucune raison d'être;

Qu'il n'est d'ailleurs pas anormal que l'indemnité d'occupation soit d'un montant supérieur à celui du loyer, puisque dans ce cas le propriétaire subit une occupation illicite qui lui porte évidemment préjudice;

Que c'est de façon exacte que le Tribunal a appliqué cette disposition qui n'est pas manifestement excessive et a écarté la majoration de 10 % qui ne peut s'appliquer qu'en cas de retard dans le paiement des loyers et non une fois le bail résilié;

Que l'expulsion du locataire a été à juste titre ordonnée par le premier juge;

Attendu que s'agissant des demandes indemnitaires présentées par M. [S] [L] celles-ci sont pour la plupart infondées, faute de démontrer la réalité d'un préjudice ( préjudice de trésorerie, préjudice d'image ) à l'exception toutefois de la demande au titre du préjudice de jouissance en raison du très mauvais état des parties communes de l'immeuble et de la défectuosité avérée de certains équipements tels que l'interphone ou l'ouvre porte;

Que les nombreux courriers de réclamations de l'intéressé et le constat d'huissier dressé le 26 juin 2018 à la demande du preneur établissent le mauvais état d'entretien ( nez de marches abimées, plafond effondré près des boites aux lettres, ascenseur vétuste et sale, murs ' décroutés ' présentant des fissures, crépi dégradé ) de ces parties communes;

Que le premier juge a justement retenu que les réclamations relatives au mauvais entretien des parties communes, qui ont été présentées dans des conclusions signifiées le 18 juin 2020, étaient prescrites pour celles antérieures au 18 juin 2015;

Que le préjudice de jouissance subi par M. [L] a été exactement évalué par le Tribunal;

Que s'agissant du défaut d'établissement d'un diagnostic ' amiante ', il était loisible à M. [L] de réclamer ce document à son bailleur préalablement à son entrée dans les lieuxet à la signature du contrat de bail;

Que la perte de chance de louer ses locaux à des avocats n'est pas démontrée car cette absence de candidats peut également résulter d'autres facteurs non imputables à la SNC des [Adresse 2] comme par exemple le montant excessif du sous-loyer réclamé;

Attendu que c'est également à bon droit que le premier juge a estimé que la résistance abusive du preneur n'était pas établie et a débouté la SNC des [Adresse 2] de sa demande de dommages-intérêts de ce chef;

Qu'il y a lieu en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 juin 2023 par le Tribunal Judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE;

Attendu qu'il sera alloué à l'intimée, qui a dû mettre avocat à la barre pour assurer sa représentation en justice, la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

Attendu que M. [L], qui succombe à titre principal, supportera les dépens d'appel;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

DECLARE irrecevables les conclusions et pièces notifiées par M. [S] [L] le 13 mai 2024, veille de l'audience;

DONNE ACTE à M. [S] [L] de ce qu'il renonce à ses arguments tendant à la nullité de la procédure;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 juin 2023 par le Tribunal Judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE;

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [S] [L] à payer à la SNC des [Adresse 2] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

LE CONDAMNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 23/11190
Date de la décision : 10/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-10;23.11190 ?
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