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05/07/2024 | FRANCE | N°22/15701

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8b, 05 juillet 2024, 22/15701


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b



ARRÊT AU FOND

DU 05 JUILLET 2024



N°2024/.













Rôle N° RG 22/15701 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKMJ4







[V] [M]





C/



URSSAF - TI PACA

























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Eric BECKER



- URSSAF - TI PACA








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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de TOULON en date du 27 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 19/03365.





APPELANTE



Madame [V] [M], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Eric BECKER de la SELARL SOCIETE D'ETUDES JURIDIQUES ET FISCALES, avocat au barreau de DRAG...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b

ARRÊT AU FOND

DU 05 JUILLET 2024

N°2024/.

Rôle N° RG 22/15701 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKMJ4

[V] [M]

C/

URSSAF - TI PACA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Eric BECKER

- URSSAF - TI PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de TOULON en date du 27 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 19/03365.

APPELANTE

Madame [V] [M], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Eric BECKER de la SELARL SOCIETE D'ETUDES JURIDIQUES ET FISCALES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

URSSAF - TI PACA, demeurant [Adresse 1]

représenté par M. [R] [E] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Isabelle PERRIN, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Mme Isabelle PERRIN, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Anne BARBENES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Juillet 2024

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

L'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur a émis à l'encontre de Mme [V] [M] ('la cotisante'):

- une mise en demeure en date du 9 avril 2015, d'un montant de 8 193 euros dont dont 419 euros majorations de retard, relative aux cotisations exigibles au titre du 4ème trimestre 2014 et du 1er trimestre 2015,

- une mise en demeure en date du 23 décembre 2015, d'un montant de 2929 euros dont 150 euros de majorations de retard, relative aux cotisations exigibles au titre du 4ème trimestre 2015,

- une mise en demeure en date du 10 février 2016, d'un montant de 1 541 euros dont 150 euros de majorations de retard, relative aux cotisations exigibles au titre du 3ème trimestre 2015,

- une mise en demeure en date du 8 avril 2016, d'un montant de 1474 dont 75 euros de majorations de retard, relative aux cotisations exigibles au titre du 1er trimestre 2016.

Par actes d'huissier en date du 25 octobre 2019, l'Urssaf a fait signifier à la cotisante :

- une contrainte du 18 octobre 2019 d'un montant de 6250 euros dont 546 euros de majorations de retard au titre des cotisations exigibles pour le 4ème trimestre 2014, les 1er et 4ème trimestres 2015 et le 1er trimestre 2016,

- une contrainte du 18 octobre 2019 d'un montant de 1341 euros dont 150 euros de majorations de retard au titre des cotisations exigibles pour le 3ème trimestre 2015.

La cotisante a formé opposition à chacune de ces contraintes devant le pôle social du tribunal de grande instance de Toulon par courrier recommandé avec avis de réception expédié le 6 novembre 2019.

Par jugement en date du 27 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon a :

- déclaré recevable l'opposition,

- validé les contraintes pour un montant total de 7 591 euros et condamné Mme [M] à payer à l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur ladite somme émise au titre des contraintes,

- condamné Mme [M] aux dépens en ce compris notamment les frais de signification de la contrainte.

La cotisante en a interjeté appel dans des conditions de forme et de délais qui ne sont pas discutées.

Aux termes de ses conclusions parvenues au greffe le 14 février 2023, oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de ses moyens, l'appelante sollicite la réformation du jugement et demande à la cour de:

- invalider les deux contraintes en litige,

- débouter l'Urssaf de toutes ses demandes en paiement y compris les frais de signification des contraintes,

- condamner l'Urssaf aux dépens,

- débouter l'Urssaf de l'ensemble de ses demandes.

Par conclusions notifiées par voie électronique que 12 avril 2024, oralement soutenues et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé de ses moyens, l'intimé sollicite la confirmation du jugement déféré et demande à la cour de :

- dire que la prescription n'était pas acquise à la date de la signification des deux contraintes en litige,

- condamner Mme [M] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais de signification des contraintes.

MOTIFS

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en recouvrement

En cause d' appel, la cotisante, se prévalant de l'article L 244-8-1 dans sa version modifiée par la loi n°2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement pour la sécurité sociale pour 2017, qui a réduit le délai de prescription de l'action en recouvrement des cotisations et contributions sociales de cinq ans à trois ans, soutient que conformément au 3° du IV de l'article 24 de ladite loi, ces dispositions qui réduisent la durée de prescription s'appliquent à compter du 1er janvier 2017 aux créances ayant fait l'objet de mises en demeure notifiées avant cette date.

Elle en déduit que, les mises en demeure précédant les contraintes en litige ayant toutes été notifiées avant le 1er janvier 2017, les deux contraintes ont été émises postérieurement à la date d'acquisition de la prescription triennale de l'action en recouvrement.

L'intimée répond que le 1° du IV de l'article 24 de ladite loi s'applique, à compter du 1er janvier 2017, aux créances ayant fait l'objet de mises en demeure notifiées à compter du 1er janvier 2017 et qu'en vertu du 3° du IV de l'article 24 de la loi susvisée, les dispositions qui réduisent la surée de la prescription s'appliquent à compter du 1er janvier 2017 aux créances ayant fait l'objet de mises en demeure notifiées avant cette même date sans que la durée totale puisse excéder la durée de cinq années prévue par la loi antérieure.

Elle en déduit qu'en l'espèce, si la durée totale de prescription ne pouvait excéder cinq ans, les deux contraintes ont bien été signifiées avant l'acquisition du délai de prescription extinctive.

Sur quoi :

L'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception vaut mise en demeure au sens de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale et, expédiée à l'adresse effective du débiteur, interrompt valablement le cours de la prescription triennale visée à l'article L. 244-3 du même code.

Selon l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale, si la mise en demeure prévue à l'article L. 244-2 reste sans effet au terme d'un délai d'un mois, le directeur de l'organisme peut décerner une contrainte.

L'article L 244-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1827 pour le financement de la sécurité sociale de 2017 entrée en vigueur le 1er janvier 2017 disposait que l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, se prescrit par cinq ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3.

L'article L 244-8-1 du même code, créé par la loi susvisée et entré en vigueur au 1er janvier 2017, prévoit que le délai de prescription de l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, est de trois ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus aux articles L. 244-2 et L. 244-3.

L'article 24, IV, de la loi susvisée relatif aux dispositions transitoires précise, d'une part, que ses dispositions s'appliquent aux cotisations et contributions sociales au titre desquelles une mise en demeure a été notifiée à compter du 1er janvier 2017 et, d'autre part, que les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux créances ayant fait l'objet d'une mise en demeure notifiée avant cette date, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l'espèce, il résulte des pièces versées par l'Urssaf et il n'est pas contesté que les quatre mises en demeure ayant précédé l'envoi des deux contraintes en litige ont toutes été notifiées à la cotisante avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1827 pour le financement de la sécurité sociale de 2017, de sorte que la réduction de la prescription triennale était applicable à l'action en recouvrement initiée par ces mises en demeure et que la durée de totale de l'action en recouvrement- significations de contraintes comprises- ne pouvait excéder cinq ans.

Compte tenu de ces éléments, la prescription de l'action en recouvrement aurait été acquise au

- 14 mai 2020 pour la mise en demeure du 9 avril 2015 notifiée le 14 avril 2015 ;

- 21 février 2021 pour la mise en demeure du 23 décembre 2015 notifiée le 21 janvier 2016 ;

- 13 mars 2021 pour la mise en demeure du 10 février 2016 notifiée le 13 février 2016 ;

- 15 mai 2021 pour la mise en demeure du 9 avril 2016 notifiée le 15 avril 2016.

Les deux contraintes en litige émises le 18 octobre 2019 au visa de ces mises en demeure et signifiées par acte d'huissier à la cotisante le 25 octobre suivant l'ont en conséquence été avant l'acquisition de la prescription de l'action en recouvrement.

Dès lors, l'appelante est mal fondée en sa fin de non recevoir.

Sur le moyen tiré du caractère définitif de l'appel à cotisations

L'appelante, se prévalant des dispositions de l'article L 133-6 du code de la sécurité sociale, soutient qu'elle a été radiée auprès de l'Urssaf à effet du 2 février 2016 et que l'appel à cotisations émis le 24 août 2016 suite à sa radiation, qui fait apparaître un solde débiteur de cotisations de 179 euros déduction faite des cotisations provisionnelles déjà appelées, est définitif.

Elle en déduit que cet appel à cotisations, qui a tenu compte de la transmission de ses revenus pour les années 2015 et 2016 et de ses revenus d'activité de l'année 2014 déjà en possession de l'Urssaf, annule les appels à cotisations et mises en demeure antérieures.

L'intimée, sur le fondement des articles D 633-1 et R 136-1 du code de la sécurité sociale, répond que si la radiation de la cotisante a bien été enregistrée au 2 février 2016, elle a procédé au calcul de la régularisation des cotisations dont elle devait s'acquitter dans ses suites, et que ce courrier ne mentionne aucunement qu'elle était à jour de ses cotisations. Elle ajoute qu'aucune disposition légale ou réglementaire ni décision jurisprudentielle ne prévoit qu'un appel à cotisations puisse avoir pour effet d'annuler des appels ou mises en demeure antérieures.

Sur quoi :

L'article R 131-6 du code de la sécurité sociale dispose:

En cas de cessation d'activité du travailleur indépendant non agricole :

1° La déclaration de revenu d'activité mentionnée à l'article R. 131-1 est souscrite par le cotisant, dans le délai de quatre-vingt-dix jours suivant la date d'effet de la radiation, pour chacune des périodes n'ayant pas encore donné lieu au calcul des cotisations et contributions sociales

définitives ;

2° Le cas échéant, sont acquittés par le cotisant, dans le délai de trente jours suivant la date d'envoi de l'avis d'appel établi sur la base de la déclaration mentionnée au 1° :

a) Le complément de cotisations dû au titre de la dernière année civile écoulée, à la suite de la régularisation prévue à l'article R. 131-4, déduction faite des versements déjà effectués, au titre de ce complément, durant l'année civile en cours ;

b) Le complément de cotisations dû au titre de l'année au cours de laquelle a pris effet la radiation, à la suite de la régularisation prévue à l'article R. 131-4, compte tenu des versements provisionnels déjà effectués durant l'année civile en cours ;

3° Le cas échéant, est remboursé au cotisant, dans le délai de trente jours suivant la date d'envoi de l'avis d'appel établi sur la base de la déclaration mentionnée au 1°, le trop-versé résultant de la régularisation, prévue à l'article R. 131-4, des cotisations dues au titre de l'année au cours de laquelle a pris effet la radiation, après imputation, le cas échéant, du montant du crédit sur les dettes des périodes antérieures en remontant de la plus ancienne à la plus récente.

La modification des conditions d'exercice de l'activité professionnelle ne constitue pas une cessation d'activité au sens du présent article.

Selon l'article D 633-1 du code de la sécurité sociale alors en vigueur, la cotisation mentionnée à l'article L. 633-10 est due à compter de la date à laquelle a débuté l'activité professionnelle entraînant l'assujettissement au régime d'assurance vieillesse des professions artisanales ou à celui des professions industrielles et commerciales. Elle cesse d'être due à la date à laquelle cet assujettissement prend fin.

En l'espèce, l'appel de cotisations suite à radiation du 24 août 2016 dont se prévaut l'appelante est rédigé dans les termes suivants: 'Suite à votre radiation, vous nous avez transmis vos revenus d'activité pour le années 2015 et 2016. Nous avons procédé à un calcul définitif des cotisations et contributions sociales qui font apparaître un solde débiteur de 179 euros déduction faite des cotisations provisionnelles déjà appelées. [...]'

Il en résulte que cet appel à cotisations, émis en application de l'article D 633-1 et R 131-6 du code de la sécurité sociale, ne concerne que la régularisation des cotisations et contributions opérée suite à la radiation de la cotisante pour l'année 2015 (normalement appelée le dernier trimestre 2016) et pour l'année 2016, déduction faite des cotisations provisionnelles déjà versées dont l'appelante ne justifie pas du montant.

D'une part, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, il ne résulte d'aucune disposition textuelle qu'un appel à cotisations annule de précédentes mises en demeure. D'autre part et surtout, ce courrier n'indique en aucun cas que la cotisante eût été à jour de l'ensemble des cotisations exigées à la mise en demeure, à savoir le 4ème trimestre 2014, le 1er trimestre 2015, le 3ème trimestre 2015, le 4ème trimestre 2015 et le 1er trimestre 2016.

L'appelante est en conséquence mal fondée en son moyen.

Le bien-fondé des contraintes n'étant par ailleurs pas contesté, il y a lieu de confirmer le jugement en ses dispositions soumises à la cour.

Succombante, l'appelante est condamné aux dépens d'appel et ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande en revanche de la condamner à verser à l'Urssaf la somme de 1000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Dit que l'action en recouvrement de l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur n'est pas prescrite,

Déboute Mme [V] [M] de l'intégralité de ses demandes et prétentions,

Condamne Mme [V] [M] aux dépens d'appel,

Condamne Mme [V] [M] à verser à l'Ursaaf Provence Alpes Côte d'Azur la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8b
Numéro d'arrêt : 22/15701
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;22.15701 ?
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