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04/07/2024 | FRANCE | N°23/13416

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 04 juillet 2024, 23/13416


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024



N° 2024/402









Rôle N° RG 23/13416 N° Portalis DBVB-V-B7H-BMCOT







[O] [J] épouse [K]





C/



[D] [U] épouse [F]











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Arielle LACONI



Me Aurélie REYMOND













Décision déférée à la Cour :




Jugement du Juge de l'exécution de MARSEILLE en date du 19 Octobre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/07816.





APPELANTE



Madame [O] [J] épouse [K]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C- 13001- 2023- 007627 du 09/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridic...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024

N° 2024/402

Rôle N° RG 23/13416 N° Portalis DBVB-V-B7H-BMCOT

[O] [J] épouse [K]

C/

[D] [U] épouse [F]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Arielle LACONI

Me Aurélie REYMOND

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution de MARSEILLE en date du 19 Octobre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/07816.

APPELANTE

Madame [O] [J] épouse [K]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C- 13001- 2023- 007627 du 09/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le 28 Janvier 1973 à [Localité 4] (TUNISIE)

demeurant [Adresse 2]

représentée et assistée par Me Arielle LACONI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉE

Madame [D] [U] épouse [F],

née le 01 Juin 1941 à [Localité 3] (ALGÉRIE)

Ayant élu domicile chez le Cabinet CEPROGIM COLIN, administrateur de biens, dont le siège social est [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Aurélie REYMOND de la SELARL DUPIELET-REYMOND, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, prétentions des parties :

Selon acte sous seing privé du 20 juillet 2017, madame [F] consentait à madame [K], un bail à usage d'habitation sur un logement situé [Adresse 2].

Une ordonnance du 27 janvier 2022 du juge des référés de Marseille :

- condamnait solidairement les époux [K] au paiement de la somme provisionnelle de 4 704,71 € au titre des loyers et charges impayés,

- les autorisait à se libérer de leur dette en 24 mensualités égales et successives,

- disait qu'à défaut de paiement d'une seule échéance ou d'un terme de loyer, la totalité de la dette deviendrait exigible, la clause résolutoire reprendrait ses effets et l'expulsion des défendeurs serait ordonnée, avec paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant de 784,55 €,

- condamnait les époux [K] au paiement d'une indemnité de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure incluant les frais du commandement de payer du 29 décembre 2020.

Le 21 février 2023, madame [F] faisait délivrer à madame [K] un commandement de quitter les lieux.

Le 20 juillet 2023, madame [K] faisait assigner madame [F] devant le juge de l'exécution de Marseille aux fins d'octroi d'un délai de trois ans pour quitter les lieux.

Un jugement du 19 octobre 2023 du juge de l'exécution :

- accordait à madame [K] un délai de six mois à compter de la notification du jugement pour quitter le logement situé [Adresse 2],

- condamnait madame [K] aux dépens et au paiement d'une indemnité de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit jugement était notifié à madame [K] par lettre recommandée retournée au greffe avec la mention ' pli avisé non réclamé''. Par déclaration du 27 octobre 2023, elle formait appel du jugement précité.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 5 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé du litige, madame [K] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau,

- proroger de trois mois le délai prévu par l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution,

- en tout état de cause, lui accorder un délai de 12 mois aux fins de relogement,

- débouter madame [F] de toutes ses demandes,

- statuer ce que de droit sur les dépens comme en matière d'aide juridictionnelle.

Elle soutient avoir été confrontée au décès soudain de son mari intervenu le 31 décembre 2019 et aux démarches administratives ultérieures. Elle perçoit une pension de réversion de 120 € et des prestations sociales de 849 € mais doit assumer l'entretien de ses deux enfants de 20 ans et 17 ans pour lesquels une demande d'allocation personne handicapée est en cours.

Elle invoque une demande d'attribution de logement social du 23 juillet 2021 et une décision du 29 juin 2023 de reconnaissance de son caractère prioritaire. Elle a saisi le tribunal administratif, le 5 avril 2024 et a fait l'effort de payer régulièrement l'équivalent de son ancien loyer résiduel.

Elle conclut à l'existence de conséquences d'une exceptionnelle dureté sur le fondement de l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution et des articles L 412-3 et L 412-4 du même code, à l'absence de relogement dans des conditions normales de nature à fonder l'octroi d'un délai ne pouvant être inférieur à 12 mois pour quitter les lieux.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, madame [F] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré,

- débouter madame [K] de toutes ses demandes,

- condamner madame [K] au paiement d'une indemnité de 1 500 € pour frais irrépétibles et aux entiers dépens de l'instance.

Elle fonde sa demande de confirmation sur :

- le défaut de paiement du loyer résiduel depuis mai 2023 de sorte que la dette locative ne cesse de s'aggraver et est désormais de 7 973 €,

- le relogement de madame [K] doit intervenir dans des conditions normales à bref délai en l'état d'une décision DALO du 29 juin 2023 ayant reconnu le caractère prioritaire de son relogement, lequel va donc intervenir prochainement. De plus, elle a déjà bénéficié d'un délai de fait important depuis l'ordonnance de référé du 27 janvier 2022,

- sa situation personnelle au motif qu'elle est âgée de 82 ans et a besoin de revenus locatifs réguliers et spontanés mérite d'être prise en compte.

L'instruction de l'affaire était close par ordonnance du 30 avril 2024.

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

Selon l'article R 412- 4 du code des procédures civiles d'exécution, à compter de la signification du commandement d'avoir à libérer les locaux, toute demande de délais formée en application des articles L 412-2 et L 412-6 est portée devant le juge de l'exécution du lieu de situation de l'immeuble.

- Sur la demande de délai fondée sur l'article L 412-2 du code des procédures civiles d'exécution,

L'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement sans préjudice des dispositions des articles L 412-3 à L 412-7.

L'article L 412-2 du code précité dispose que lorsque l'expulsion aurait pour la personne concernée des conséquences d'une exceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l'année considérée ou des circonstances atmosphériques, le délai prévu à l'article L 412-1 peut être prorogé par le juge pour une durée n'excédant pas trois mois.

En l'espèce, le commandement de quitter les lieux délivré le 21 février 2023 laissait donc à madame [K] un délai jusqu'au 21 avril 2023 pour libérer le logement. La demande de madame [K] fondée sur l'article L 412-2 avait pour objet de proroger au plus tard jusqu'au 21 juillet 2023, le délai pour libérer le logement. Ainsi, au jour des débats du 5 octobre 2023 devant le premier juge et du prononcé du jugement du 19 octobre 2023, la demande de prorogation du délai pour une durée maximum de trois mois était devenue sans objet.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé par substitution de motif en ce qu'il a rejeté la demande de prorogation du délai de deux mois fondée sur l'article L 412-2 du code des procédures civiles d'exécution.

- Sur la demande de délai pour quitter les lieux fondée sur les articles L 412-3 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

L'article L 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, dans ses dispositions issues de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 d'application immédiate aux procédures en cours, énonce que le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.

Le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.

Cette disposition n'est pas applicable lorsque le propriétaire exerce son droit de reprise dans les conditions prévues à l'article 19 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement, lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L. 442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire ou lorsque ce dernier est de mauvaise foi.

Les deux premiers alinéas du présent article ne s'appliquent pas lorsque les occupants dont l'expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux à l'aide de man'uvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

L'article L 412-4 du même code, dans ses dispositions issues de la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 d'application immédiate aux procédures en cours, énonce que la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

En l'espèce, l'attestation du référent social Afor du 29 mars 2024 établit que madame [K] est veuve depuis le 31 décembre 2019, son mari est mort d'une crise cardiaque. Elle a toujours été femme au foyer et prend en charge ses deux enfants de 19 et 17 ans, dont l'un est handicapé. Ses ressources mensuelles sont limitées aux prestations sociales de 794 € par mois outre une pension de réversion de 120 €. Si elle procède à des versements partiels, elle n'est pas en capacité de payer une indemnité d'occupation de 807,55 € par mois.

Elle justifie avoir fait une demande d'attribution de logement social, le 23 juillet 2021, puis avoir obtenu une décision du 17 juillet 2023 de reconnaissance du caractère prioritaire de son relogement. En l'absence de proposition d'attribution, elle a saisi le tribunal administratif, le 5 avril 2024 aux fins d'attribution sous astreinte d'un logement décent.

Madame [F] est âgée de 83 ans et n'a pu procéder à l'exécution de l'ordonnance de référé du 17 janvier 2022. Elle est en droit de percevoir un revenu locatif régulier. Elle supporte, malgré les versements partiels de madame [K], une dette de 9 710,44 € ( dont 1548 € au titre des frais de procédure ) au 7 mars 2024.

Par conséquent, la décision du premier juge d'octroi à madame [K] d'un délai pour quitter les lieux d'un quantum limité à six mois doit être confirmée.

L'équité ne commande pas d'allouer à l'intimée de frais irrépétibles au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [K], partie perdante, supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant après débats en audience publique et en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à mise en oeuvre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE madame [O] [J] veuve [K] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-9
Numéro d'arrêt : 23/13416
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.13416 ?
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