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04/07/2024 | FRANCE | N°23/12753

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 04 juillet 2024, 23/12753


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024



N° 2024/401









Rôle N° RG 23/12753 N° Portalis DBVB-V-B7H-BMAM7







[B] [X]

[V] [I]





C/



E.P.I.C. PAYS D'AIX HABITAT METROPOLE











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Jane AMOURIC



Me Patrick CAGNOL













Décision déférée

à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution d'AIX EN PROVENCE en date du 28 Septembre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/01888.





APPELANTS



Madame [B] [X]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-007035 du 20/10/2023 accordée par le bureau d'aide juridict...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024

N° 2024/401

Rôle N° RG 23/12753 N° Portalis DBVB-V-B7H-BMAM7

[B] [X]

[V] [I]

C/

E.P.I.C. PAYS D'AIX HABITAT METROPOLE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jane AMOURIC

Me Patrick CAGNOL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution d'AIX EN PROVENCE en date du 28 Septembre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/01888.

APPELANTS

Madame [B] [X]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-007035 du 20/10/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le 09 Juillet 1984 à [Localité 3] (83)

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

Monsieur [V] [I]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-007037 du 20/10/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

né le 13 Mars 1984 à AIX EN PROVENCE (13)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

Tous deux représentés et assistés par Me Jane AMOURIC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉ

E.P.I.C. PAYS D'AIX HABITAT MÉTROPOLE

immatriculée au RCS d'AIX EN PROVENCE sous le n° 434 071 494

prise en la personne de son Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 2]

représenté par Me Patrick CAGNOL de l'ASSOCIATION CM AVOCATS MARSEILLE, avocat au barreau de MARSEILLE,

assisté de Me Audrey CIAPPA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure et prétentions des parties :

Par jugement rendu le 22 janvier 2021 le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence a entre autres dispositions :

' constaté la résiliation de plein droit du bail liant l'Epic Pays d'Aix Habitat Métropole et Mme [B] [X], M. [V] [I], à compter du 18 février 2019 et déclaré en conséquence les intéressés sans droit ni titre ;

' ordonné leur expulsion ainsi que celle de tout occupant de leur chef, au besoin avec le concours de la force publique ;

' fixé au dernier loyer diminué de la provision pour charges et révisable aux conditions du bail, l'indemnité mensuelle d'occupation des lieux soit à la somme actuelle de 322,21 euros et a condamné in solidum Mme [X] et M. [I] au paiement de ladite indemnité jusqu'à leur départ effectif des lieux ;

' condamné solidairement les mêmes à payer à Pays d'Aix Habitat Métropole la somme de 2 942,24 euros au titre des loyers et indemnités d'occupation impayées au 23 novembre 2020, terme de novembre 2020 compris ;

' les a déboutés de leur demande de délais de paiement ;

' rejeté leurs demandes de dommages et intérêts.

Sur appel des consorts [X]-[I], la cour de ce siège, par arrêt du 18 novembre 2021, rectifié par arrêt du 8 décembre 2022, a confirmé cette décision excepté sur la condamnation solidaire au paiement de la dette locative portée à la somme de 4831,30 euros au 2 juin 2021.

En vertu de ces deux arrêts signifiés le 29 mars 2023, un commandement de quitter les lieux a été délivré le 6 avril 2023.

Par requête du 18 avril 2023 Mme [X] et M. [I] ont saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Aix en Provence pour obtenir un délai de trente six mois pour quitter les lieux, et subsidiairement un délai qui ne saurait être inférieur à six mois, demandes auxquelles Pays d'Aix Habitat Métropole s'est opposé.

Par jugement du 28 septembre 2023 le juge de l'exécution a débouté Mme [X] et M. [I] de leurs demandes, les a condamnés in solidum au paiement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris le coût du commandement de quitter les lieux, a rejeté le surplus des demandes.

Mme [X] et M. [I] ont interjeté appel de cette décision dans les quinze jours de sa notification, par déclaration du 12 octobre 2023.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 26 avril 2024, auxquelles il est expressément fait référence pour plus ample exposé de leurs moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, ils demandent à la cour de :

- les déclarer recevables et bien-fondés en leur appel,

- réformer le jugement de première instance en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes de délais, les a condamnés in solidum au paiement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris le coût du commandement de quitter les lieux,

Statuant à nouveau :

- débouter Pays d'Aix Habitat Métropole de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- juger qu'ils remplissent les conditions nécessaires à l'octroi de délais au sens des dispositions de l'article L. 412-4 du code des procédures civiles d'exécution,

- juger que leur bonne foi est établie,

- leur accorder un délai à l'expulsion d'une durée d'une année,

En tout état de cause,

- juger n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- juger que les dépens seront supportés par chacune des parties.

A l'appui de leurs demandes les appelants font valoir pour l'essentiel qu'occupant le logement depuis le mois d'août 2018, ils se sont vus priver sans explication, à compter du mois d'octobre 2019, du bénéfice de l'aide au logement et de la réduction de loyer solidaire, cette situation ayant aggravé leur situation financière et l'arriéré de loyers.

Ils invoquent des conditions de logement dégradées qu'ils ont dénoncées dès le mois de septembre 2019, et le dépôt d'une demande de logement social depuis cette même année.

Ils soutiennent réunir les conditions exigées par les dispositions des articles L.412-3 et L.412-4 du code des procédures civiles d'exécution, pour l'octroi de délais, étant reconnus travailleurs handicapés, sans emploi, sans solution de relogement, ni de soutien familial, donc dans l'incapacité de quitter les lieux dans des conditions normales.

Ils estiment que si les juridictions n'ont pas reconnu le caractère insalubre du logement donné à bail, les documents notamment d'ordre médical qu'ils produisent, prouvent l'absence d'entretien des lieux par le bailleur, affectant leur état de santé.

Ils affirment que malgré les démarches entreprises et notamment la saisine du tribunal administratif qui par ordonnance du 2 octobre 2023 a enjoint au préfet d'assurer leur relogement dans un délai de quatre mois, ce relogement n'est pas intervenu et une demande d'aide à l'exécution de ladite ordonnance a été déposée par Mme [X] le 2 avril dernier.

Ils précisent que M. [I] a été reconnu prioritaire et devant être logé en urgence et bénéficie à nouveau depuis le mois d'août 2023 de l'aide au logement et de la réduction de loyer solidaire dont il était privé depuis le mois d'octobre 2019, les mettant en mesure de s'acquitter d'un loyer. Leur dette a d'ailleurs été réduite, nonobstant des provisions sur charges indues réclamées et l'augmentation injustifiée de l'indemnité d'occupation facturée.

Ils soulignent que Pays d'Aix Habitat Métropole participe au blocage de leur situation puisqu'il n'a pas renvoyé le protocole de cohésion sociale qui permettrait le règlement de l'allocation logement non perçue depuis 2019, et invoquent le chiffre d'affaires substantiel réalisé en 2022 par cet établissement.

Par dernières écritures notifiées le 24 avril 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé complet de ses moyens, Pays d'Aix Habitat Métropole demande à la cour de :

- juger mal fondé l'appel interjeté par Mme [X] et M. [I],

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- débouter Mme [X] et M. [I] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- juger que ceux-ci ne remplissent pas les conditions nécessaires à l'octroi de délais au sens des dispositions de l'article L.412-4 du code des procédures civiles d'exécution,

- juger qu'ils ne sont pas de bonne foi,

- juger qu'ils ont déjà bénéficié de longs délais pour se reloger et quitter les lieux,

- les condamner in solidum au paiement d'une indemnité de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, de première instance et d'appel, distraits au profit de maître Cagnol.

A cet effet, l'intimé fait valoir en substance que les appelants ne remplissent pas les conditions légales justifiant qu'il soit sursis à l'expulsion dès lors qu'ils soutiennent depuis de nombreuses années que le logement loué n'est pas décent alors que cette assertion a été écartée par décisions de justice qui ont rejeté leurs demandes indemnitaires. Depuis le début du bail ils n'ont quasiment versé aucun loyer et faute de répondre à la mise en place d'un plan d'apurement, les aides au logement ont été logiquement suspendues en 2019. La dette se chiffre au 22 mars 2024 à la somme de 6 916,68 euros, leur dernier règlement remontant à plus de trois ans.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants il a été répondu à leur courrier du 22 mars comportant en entête que son objet était un plan d'apurement mais dont le contenu correspondait en réalité à une contestation de la dette.

L'intimé affirme que l'indemnité d'occupation réclamée, révisable aux conditions du bail, ainsi que mentionné aux titres exécutoires, a été régulièrement calculée. Mme [X] et M. [I] ne l'ont jamais réglée en sorte que le protocole de cohésion sociale qu'ils lui reprochent de ne pas leur avoir adressé, ne pouvait être mis en place.

Par ailleurs l'allocation pour le logement dont bénéficie à nouveau M. [I] depuis le mois d'août 2023 ne permettra pas pour l'avenir de couvrir le montant de l'indemnité d'occupation.

S'agissant des charges locatives, Pays d'Aix Habitat Métropole signale que l'action collective des locataires, à laquelle Mme [X] et M. [I] n'étaient pas associés, a fait l'objet d'une décision de rejet au mois de décembre 2021.

L'intimé relève encore qu'aptes à travailler, puisque reconnus travailleurs handicapés, Mme [X] et M. [I] n'ont effectué aucune démarche pour trouver un emploi.

Leurs démarches en vue d'un relogement ont été effectuées tardivement contrairement à ce qu'ils prétendent sans justification.

Enfin, ils ont de fait et par leur attitude dilatoire, bénéficié d'un délai de près de trois ans pour quitter les lieux et la circonstance que le préfet a été condamné à assurer leur relogement avant le mois de février 2024, ne constitue pas un motif prévu par l'article L.412-4 du code des procédures civiles d'exécution pour l'octroi d'un délai supplémentaire.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close par ordonnance du 30 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les articles L 412-3 et L 412-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 immédiatement applicable aux instance en cours, autorisent le juge de l'exécution à accorder des délais pour une durée en aucun cas inférieure à un mois ni supérieure à un an, aux occupants de locaux d'habitation dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.

L'article L412-4 précité prévoit que pour la fixation de ces délais il est tenu compte des éléments suivants :

- la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations,

- les situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux,

- les circonstances atmosphériques,

- les diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement,

- le droit à un logement décent et indépendant,

- les délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L441-2-3 et L441-2-2-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

Certes la situation de santé des appelants, reconnus travailleurs handicapés, ainsi que la faiblesse de leurs revenus constitués du revenu de solidarité active, compliquent leurs recherches de relogement, mais ces démarches ont tardé . Il n'est en effet pas justifié de diligences qui auraient été entamées en 2019 en vue d'un relogement. C'est postérieurement à l'arrêt confirmatif du 18 novembre 2021 que Mme [X] et M. [I] ont présenté leur recours pour faire valoir leur droit au logement, recours qui a été suivi de décisions de la commission amiable du 28 avril 2022 et 23 février 2023 les déclarant prioritaires et devant être relogés en urgence.

En outre, ils ont de fait bénéficié des plus larges délais depuis l'expiration de bail, le 18 février 2019 constatée par jugement du 22 janvier 2021 confirmé par arrêt du 18 novembre 2021 devenu irrévocable, ce sans contrepartie financière puisqu'ils n'ont effectué aucun règlement depuis trois ans ;

Leur bonne volonté dans l'exécution de leurs obligations, élément indispensable à l'octroi du sursis à l'expulsion, est en effet inexistante ainsi qu'il ressort des écritures et décomptes produits par l'intimé, qui démontrent que les impayés ont débuté peu après l'entrée dans les lieux au mois d'août 2018 et que Mme [X] et M. [I] ne se sont acquittés depuis cette date que de la seule somme de 203,74 euros, le dernier paiement remontant à l'année 2021 en sorte que la dette s'élève désormais à près de 7000 euros ;

D'autre part, le prétendu caractère insalubre du logement a été écarté par les décisions judiciaires précitées que le juge de l'exécution et la cour statuant à sa suite, ne peuvent remettre en cause ;

En tout état de cause l'état dégradé allégué de ce logement ne constitue pas un des critères légaux d'octroi de délais paradoxalement réclamés par Mme [X] et M. [I] pour demeurer dans des lieux dont ils soutiennent pourtant l'insalubrité préjudiciable à leur santé ;

Il s'ensuit la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Succombant dans leur recours les appelants supporteront les dépens d'appel et seront tenus de verser à l'intimé une indemnité complémentaire de 800 euros au titre de ces frais non répétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE in solidum Mme [B] [X] et M. [V] [I] à payer à l'Epic Pays d'Aix Habitat Métropole la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [B] [X] et M. [V] [I] in solidum aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct des frais dont il aura fait l'avance sans avoir reçu provision préalable au profit de maître Cagnol, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-9
Numéro d'arrêt : 23/12753
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.12753 ?
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