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04/07/2024 | FRANCE | N°23/09301

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 04 juillet 2024, 23/09301


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2



ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024



N° 2024/180









Rôle N° RG 23/09301 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLTYC



(JONCTION avec le RG 23/09477)





S.A.R.L. [Localité 12] CAFÉ DE TURIN

S.A.S. [N] DÉVELOPPEMENT

S.C.E.A. [N] & FILS

S.A.R.L. [N] DISTRIBUTION





C/





SELARL BG & ASSOCIÉS

S.C.P. BTSG²

[O] [N]

[W] [C]

S.E.L.A.R.L. [X]

S.C.P. EZAVIN -

[B]

S.A.S. CAFÉ DE TURIN





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





Me Cédric CABANES



Me Julien CHAMARRE





Me Agnès ERMENEUX



Me Philippe MILLET



Me Maud DAVAL-GUEDJ



PG





Décision déférée à la Cour :



Jugem...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024

N° 2024/180

Rôle N° RG 23/09301 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLTYC

(JONCTION avec le RG 23/09477)

S.A.R.L. [Localité 12] CAFÉ DE TURIN

S.A.S. [N] DÉVELOPPEMENT

S.C.E.A. [N] & FILS

S.A.R.L. [N] DISTRIBUTION

C/

SELARL BG & ASSOCIÉS

S.C.P. BTSG²

[O] [N]

[W] [C]

S.E.L.A.R.L. [X]

S.C.P. EZAVIN - [B]

S.A.S. CAFÉ DE TURIN

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Cédric CABANES

Me Julien CHAMARRE

Me Agnès ERMENEUX

Me Philippe MILLET

Me Maud DAVAL-GUEDJ

PG

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de Nice en date du 07 Juillet 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 2023L00557.

APPELANTES ET INTIMES

S.A.R.L. [Localité 12] CAFÉ DE TURIN

société au capital social de 1.000,00 €uros,

inscrite au Registre du Commerce & des Sociétés d'Antibes sous le n° 820 301 463, dont le siège social est sis à [Adresse 9], agissant poursuites et diligences de sa Présidente, Madame [J] [N] y domiciliée ;

représentée par Me Cédric CABANES de la SCP JEAN LECLERC,CEDRIC CABANES ET YVES-HENRI CANOVAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me François DRAGEON de la SELARL DRAGEON & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, plaidant

S.A.S. [N] DÉVELOPPEMENT

société au capital social de 697.890,00 €uros, inscrite au Registre du Commerce & des Sociétés de La Rochelle sous le n° 804 201 119, dont le siège social est sis à [Adresse 10], agissant poursuites & diligences de son Président, Monsieur [I] [N], y domicilié ;

représentée par Me Cédric CABANES de la SCP JEAN LECLERC,CEDRIC CABANES ET YVES-HENRI CANOVAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me François DRAGEON de la SELARL DRAGEON & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, plaidant

S.C.E.A. [N] & FILS

société au capital social de 116.314,99 €uros, inscrite au Registre du Commerce & des Sociétés de La Rochelle sous le n° 431 862 317, dont le siège social est sis à [Adresse 10], agissant poursuites & diligences de son gérant, Monsieur [I] [N], y domicilié ;

représentée par Me Cédric CABANES de la SCP JEAN LECLERC,CEDRIC CABANES ET YVES-HENRI CANOVAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me François DRAGEON de la SELARL DRAGEON & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, plaidant

S.A.R.L. [N] DISTRIBUTION

société au capital social de 1.000,00 €uros, inscrite au Registre du Commerce & des Sociétés de La Rochelle sous le n° 518 157 961, dont le siège social est sis [Adresse 15], agissant poursuites & diligences de ses co-gérants Monsieur [Z] [N] et Madame [J] [N], y domiciliés ;

représentée par Me Cédric CABANES de la SCP JEAN LECLERC,CEDRIC CABANES ET YVES-HENRI CANOVAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me François DRAGEON de la SELARL DRAGEON & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, plaidant

Monsieur [O] [N]

représenté par son tuteur, M. [W] [C] désigné à cette fonction par décision du JCP de MENTON statuant en matière de tutelle le 15 décembre 2022,

né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 11] (17), de nationalité Française, demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE

Monsieur [W] [C]

ès qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs désigné en qualité de tuteur de M. [O] [N], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE

INTIMEES

SELARL BG & ASSOCIÉS

prise en la personne de Maître [H] [E] es qualité d'administrateur judiciaire et de mandataire ad'hoc de la S.A.S. CAFÉ DE TURIN., demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Denis DEL RIO, avocat au barreau de NICE, plaidant

S.C.P. BTSG²

prise en la personne de Maître [G] [F], ès qualité de mandataire judiciaire de la société Café de Turin, sur décision du Tribunal de commerce de Nice en date du 09.03.2023, domicilié à [Adresse 13] ;

représentée par Me Philippe MILLET de la SELARL ANTELMI - BONCOMPAGNI - MILLET & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE substituée par Me Valentine ALBECKER, avocat au barreau de NICE, plaidant

PARTIES INTERVENANTES

S.A.S. CAFÉ DE TURIN

société par actions simplifiée (SAS), au capital social de 1.000.000,00 d'€uros, immatriculée au Registre du Commerce & des Sociétés de Nice sous le n° 401 903 539, dont le siège social est sis à [Adresse 14],

représentée par Me Julien CHAMARRE de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE, plaidant

S.E.L.A.R.L. [X]

prise en la personne de Maître [Y] [X], en qualité de mandataire ad'hoc de la Société CAFE DE TURIN, suivant ordonnance n° 2024000025 en date du 22 janvier 2024 de monsieur le Président du Tribunal de commerce de NICE, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Julien CHAMARRE de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

S.C.P. EZAVIN - [B]

Etude d'administrateurs judiciaires prise en la personne de Me [A] [B], agissant ès qualité de tuteur adjoint de M. [O] [N] selon ordonnance du Juge des Contentieux de la Protection de MENTON, statuant en qualité de juge des tutelles, rendue le 26 juin 2023, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE

EN PRESENCE DE :

Monsieur le Procureur Général près la Cour d'Appel d'Aix en Provence,

demeurant cour d'appel D'AIX EN PROVENCE, [Adresse 4]

Défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Agnès VADROT, conseillèrea fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre

Madame Muriel VASSAIL, Conseiller

Madame Agnès VADROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024,

Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La SAS CAFE DE TURIN exploite à [Localité 12] un fonds de commerce de restauration, bar et brasserie.

Elle est détenue, à concurrence de 60 %, par Monsieur [O] [N] et à concurrence de 40 % par la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN, elle-même détenue à 90 % par Madame [J] [N], fille de [O] [N] et à 10 % par Monsieur [N] lui-même.

Outre un contrôle judiciaire en suite de sa mise en examen des chefs d'abus de biens sociaux dans le cadre duquel il lui a été fait interdiction temporaire de gérer, Monsieur [O] [N] a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, puis de curatelle renforcée, convertie par jugement en date du 17 mars 2023 en mesure de tutelle avec désignation de Monsieur [W] [C] en qualité de mandataire.

A la demande de la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN, associée minoritaire, Maître [H] [E] a été désignée en qualité de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN.

Par jugement en date du 9 mars 2023, le tribunal de commerce de Nice a, sur déclaration de cessation de paiement de Maître [E], ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SAS CAFE DE TURIN.

La juridiction a désigné la SELARL BG & ASSOCIES prise en la personne de Maître [H] [E] en qualité d'administrateur avec pour mission de représenter la société, et la SCP BTSG² prise en la personne de Maître [G] [F] en qualité de mandataire judiciaire.

Le 28 mars 2023, la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN ont formé tierce opposition à cette décision.

Monsieur [O] [N], représenté par son tuteur Monsieur [W] [C] est intervenu volontairement à l'instance et a, à la barre, fait tierce opposition au jugement d'ouverture de la procédure collective de la SAS CAFE DE TURIN.

Par jugement en date du 7 juillet 2023, le tribunal de commerce de Nice a déclaré, sur le fondement de l'article 583 du code de procédure civile, l'ensemble des tierces oppositions formées irrecevables et les a déboutées de leurs demandes.

La juridiction a relevé que la SAS [N] DISTRIBUTION et la SCEA [N] & FILS, dont les créances respectives avaient été admises au passif de la procédure collective de la SAS CAFE DE TURIN, ne démontraient pas l'existence d'un préjudice propre différent de celui de la collectivité des créanciers - préjudice qu'elle fondaient sur la perte, à terme, d'un marché - dès lors que la procédure de redressement, à la différence de la procédure de liquidation, n'entraînait pas la résiliation des contrats en cours.

Elle a par ailleurs constaté que la SAS [N] DEVELOPPEMENT ne pouvait se prévaloir de la qualité d'associée et ne pouvait donc agir en son nom dans cette procédure pas davantage que la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN, qui bien qu'étant associée avait un engagement limité à ses apports et n'apportait au surplus aucun élément de nature à établir l'existence d'un préjudice personnel.

Enfin, s'agissant de Monsieur [O] [N], le tribunal de commerce a considéré que l'argument allégué, à savoir que le jugement modifiait la mission du mandataire ad hoc, ne présumait pas d'un préjudice personnel et particulier à l'égard de ce dernier qui n'était pas créancier de la SAS CAFE DE TURIN.

Par déclaration en date du 12 juillet 2023, la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN ont interjeté appel du jugement rendu le 7 juillet 2023. La procédure a été enregistrée sous le N°RG 23/09301.

Par déclaration en date du 17 juillet 2023, Monsieur [O] [N] et Monsieur [W] [C] ès qualités de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, désigné en qualité de tuteur de Monsieur [O] [N], ont également fait appel de cette décision. La procédure a été enregistrée sous le N°RG 23/09477.

Par conclusions identiques d'appelantes et intimées déposées et notifiées par RPVA en date du 13 octobre 2023 dans chacune des deux procédures, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN demandent à la cour de :

- prononcer la jonction des affaires pendantes devant la cour sous les N°RG 23/09301 et 23/09477 et ordonner qu'elles soient désormais suivies, traitées et jugées sous le même numéro de rôle

- réformer entièrement la décision entreprise

- les recevoir en leur tierce opposition au jugement du tribunal de commerce de Nice en date du 9 mars 2023 prononçant l'ouverture du redressement judiciaire de la SAS CAFE DE TURIN;

En conséquence,

- annuler l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SAS CAFE DE TURIN,

- annuler le jugement du 9 mars 2023,

- ordonner les publications légales afférentes à la décision,

- maintenir Maître [H] [E] en qualité de mandataire ad hoc avec mission de convoquer les associés de la SAS CAFE DE TURIN, avec mission unique de convoquer sans délai une assemblée générale des associés de celle-ci, soit la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN prise en la personne de sa présidente Madame [J] [N] et Monsieur [O] [N] pris en la personne de son tuteur Monsieur [C] [W], afin de pourvoir au poste et au mandat de président de la société qui est vacant du fait de la décision du juge des contentieux de la protection de Menton en date du 15 décembre 2022 plaçant Monsieur [O] [N], actuel président, sous le régime incapacitant de la tutelle.

- juger que les frais et dépens seront affectés à ceux de la procédure collective.

Après avoir rappelé les dispositions des articles R.661-2 du code de commerce et de l'article 583 du code de procédure civile, les appelants soutiennent que la SCEA [N] & FILS et la SAS [N] DEVELOPPEMENT sont des tiers structurels et objectifs - l'une en production et l'autre au titre de sa détention majoritaire de la première - qui ont l'une comme l'autre un intérêt propre à contester la décision d'ouverture d'une procédure collective à l'égard de la SAS CAFE DE TURIN.

Ils exposent ainsi que la SCEA [N] & FILS, société à caractère agricole, produit et livre une très grande quantité d'huîtres à la SAS CAFE DE TURIN représentant environ 15 % de son chiffre d'affaires et qu'elle se trouvait, au jour de la déclaration de cessation des paiements, créancière de cette dernière pour environ 35 000 euros d'encours de livraison. Ils précisent qu'elle est un tiers absolu puisque son capital social est composé de 99 parts détenues par la SAS [N] DEVELOPPEMENT et d'une part détenue par Monsieur [O] [N].

Ils précisent que le seul lien qu'elle a avec la SAS CAFE DE TURIN est la présence au capital social de Monsieur [O] [N] puisque la SAS [N] DEVELOPPEMENT est détenue à 96 % par ce dernier et à 4 % par [I] [N].

S'agissant de la SARL [N] DISTRIBUTION, détenue à 51% par [J] [N] et à 49 % par [Z] [N], ils indiquent qu'elle a pour objet social la commercialisation de tous produits de la mer et de la conchyliculture autres que les huîtres et est à ce titre fournisseur important de la SAS CAFE DE TURIN (environ 13 % de son chiffre d'affaires). Ils en déduisent qu'elle est un tiers à la procédure ayant des droits propres à y faire valoir.

Enfin, ils exposent que la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN qui est associée minoritaire (40 %) de la SAS CAFE DE TURIN a été victime des agissements de Monsieur [N] et de sa compagne dont les délits (abus de biens sociaux, complicité d'abus de biens sociaux, abus de faiblesse) s'ils s'avèrent établis, lui auront causé un préjudice considérable en affaissant la valeur et la trésorerie de son entreprise. Ils soutiennent qu'elle dispose à ce titre de droits propres à faire valoir, notamment celui de la préservation de son patrimoine. Ils constatent qu'elle n'a été aucunement associée à la décision d'ouverture de la procédure collective qui va inévitablement impacter son patrimoine, et qu'à supposer la cessation des paiements établie, il n'a jamais été fait appel à elle pour le faire cesser par voie d'apports ou de recapitalisation.

Les appelants, qui soutiennent ainsi que leur action est recevable, contestent l'état de cessation des paiements de la SAS CAFE DE TURIN.

Par conclusions récapitulatives et responsives déposées et notifiées au RPVA en date du 18 avril 2024 dans la procédure RG N°23/09477, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, Monsieur [O] [N] représenté par son tuteur Monsieur [W] [C] et Monsieur [W] [C] ès qualités de mandataire judiciaire à la protection des majeurs désigné en qualité de tuteur de Monsieur [O] [N], appelants et la SCP EZAVIN-[B] prise en la personne de Maître [A] [B] agissant en qualité de tuteur adjoint de Monsieur [O] [N], selon ordonnance du juge des contentieux de la protection de Menton rendue le 26 juin 2023, intervenante volontaire, demandent à la cour, au visa des articles 582 et suivants du code de procédure civile, article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, L.631-1 et L.631-19 du code de commerce de :

- prononcer la jonction des affaires pendantes devant la cour sous les numéros RG23/09301 et 23/09477,

- déclarer recevable l'appel interjeté par Monsieur [O] [N], son tuteur Monsieur [W] [C] et son tuteur adjoint la SCP EVAZIN-[B],

- les dire bien fondés en leurs demandes,

En conséquence,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice le 7 juillet 2023 sous le numéro RG 2023L00557 en toutes ses dispositions,

Et statuant de nouveau,

- recevoir Monsieur [O] [N], son tuteur Monsieur [W] [C] et son tuteur adjoint la SCP EVAZIN-[B] en leur tierce opposition à l'encontre du jugement rendu le 9 mars 2023 par le tribunal correctionnel de Nice sous le numéro RG N°2023P00113,

A titre principal,

- constater l'absence de cessation des paiements de la SAS CAFE DE TURIN,

- rétracter le jugement rendu le 09 mars 2023 par le tribunal de commerce de Nice sous le numéro de RG 2023P00113 ouvrant une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS CAFE DE TURIN en son intégralité,

- remettre les parties en l'état dans lequel elles se trouvaient avant le jugement du 09 mars 2023,

A titre subsidiaire,

- rétracter le jugement rendu le 09 mars 2023 par le tribunal de commerce de Nice sous le numéro de RG 2023P00113 ouvrant une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS CAFE DE TURIN en ce qu'il a désigné « la SELARL BG & ASSOCIES prise en la personne de Maître [H] [E] en qualité d'administrateur avec pour mission de représenter la société débitrice »,

- désigner tel administrateur judiciaire au redressement de la SAS CAFE DE TURIN avec mission de représentation en remplacement de la SELARL BG & ASSOCIES prise en la personne de Maître [H] [E],

- remettre la SELARL BG & ASSOCIES prise en la personne de Maître [H] [E] dans l'état dans lequel elle se trouvait avant le jugement du 9 mars 2023,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Monsieur [O] [N] et ses tuteurs soutiennent que ce dernier est parfaitement recevable en sa tierce opposition puisqu'il a, en sa qualité d'actionnaire majoritaire, un intérêt particulier à ce que la SAS CAFE DE TURIN soit légalement représentée dans l'exercice de ses droits propres et s'assurer que celle-ci, dont il détient le capital, soit en mesure de bénéficier d'un procès équitable et d'exercer ses droits. Or, la désignation de Maître [H] [E] en qualité d'administrateur judiciaire avec mission de représentation a mis fin à sa mission d'administrateur provisoire de la SAS CAFE DE TURIN et le caractère définitif de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Nice ne permet plus de poursuivre la désignation d'un mandataire ad hoc en charge de représenter les droits propres de la SAS CAFE DE TURIN. Cette situation a pour conséquence d'annihiler toutes les possibilités pour la SAS CAFE DE TURIN de se faire représenter en justice, de concourir à l'élaboration de son projet de plan de redressement ou encore d'exercer une voie de recours en la matière.

Sur le fond, il fait valoir que la SAS CAFE DE TURIN n'est pas en état de cessation des paiements ; qu'en tout état de cause aucun élément probant n'a été à ce jour communiqué par les organes de la procédure.

Subsidiairement, il demande à la cour, si elle considérait que cet état est établi, de réformer partiellement la décision querellée en ce qu'il a désigné la SELARL BG & ASSOCIES prise en la personne de Maître [E] en qualité d'administrateur avec pour mission de représenter la société débitrice.

Par conclusions déposées et notifiées par le RPVA en date du 10 novembre 2023, dans la procédure RG n°23/09301, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SCP BTSG2 prise en la personne de Maître [G] [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS NICE CAFE DE TURIN demande à la cour, au visa des articles 122 et suivants et 583 du code de procédure civile, L.631-1 et R.661-2 du code de commerce, de :

- confirmer le jugement rendu le 7 juillet 2023 par le tribunal de commerce de Nice en toutes ses dispositions,

En conséquence,

- déclarer irrecevables les tierces oppositions formées par la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN pour défaut d'intérêt à agir,

- confirmer le jugement rendu le 9 mars 2023 par le tribunal de commerce de Nice prononçant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SAS CAFE DE TURIN,

- condamner solidairement la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

La SCP BTSG² ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS NICE CAFE DE TURIN soutient au visa de l'article 583 alinéa 2 du code de procédure civile et de la jurisprudence constante en la matière, que la SCEA [N] & FILS et la SARL [N] DISTRIBUTION, qui sont créancières de la SAS CAFE DE TURIN, ne démontrent pas l'existence d'un préjudice propre causé par le jugement d'ouverture qui serait différent de celui de la collectivité des autres créanciers. Elle sollicite donc la confirmation du jugement entrepris qui a déclaré leur tierce opposition irrecevable.

S'agissant de la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCP BTSG2 es qualité fait valoir qu'elle ne justifie ni d'une qualité de créancière, ni d'une qualité d'associée, son capital social étant détenu à 96 % par [O] [N] et à 4 % par [I] [N]. Elle ajoute que le fait qu'elle soit associée majoritaire de la SCEA [N] & FILS ne lui confère pas d'intérêt propre. Elle sollicite donc la confirmation du jugement entrepris qui a déclaré sa tierce opposition irrecevable.

Enfin, elle conteste l'argumentaire de la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN, relevant que les agissements délictueux de Monsieur [O] [N], commis préalablement à l'ouverture de la procédure collective, sont inopérants sur la recevabilité de la tierce opposition et les conditions d'ouverture du redressement. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN ne rentre pas dans les critères posés par la jurisprudence qui admet la tierce opposition des associés de sociétés pour lesquelles la responsabilité de l'associé n'est pas limitée, ce qui n'est pas son cas.

Elle sollicite donc la confirmation du jugement entrepris qui a déclaré sa tierce opposition irrecevable.

La SCP BTSG² ès qualités fait valoir que l'état de cessation des paiements de la SAS CAFE DE TURIN est caractérisé.

Par conclusions déposées et notifiées par le RPVA en date du 10 novembre 2023, dans la procédure RG n°23/09477, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SCP BTSG² prise en la personne de Maître [G] [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS NICE CAFE DE TURIN, demande à la cour, au visa des articles 122 et suivants et 583 du code de procédure civile, L.631-1 et R.661-2 du code de commerce, de :

- confirmer le jugement rendu le 7 juillet 2023 par le tribunal de commerce de Nice en toutes ses dispositions,

En conséquence,

- débouter Monsieur [O] [N] et ses tuteurs de leur demande de recevabilité de tiers opposant, le recours n'ayant pas été formé dans le délai de 10 jours du jugement d'ouverture,

- confirmer le jugement rendu le 9 mars 2023 par le tribunal de commerce de Nice prononçant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SAS CAFE DE TURIN,

- condamner Monsieur [O] [N] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

La SCP BTSG² ès qualités expose qu'en application des dispositions de l'article R.661-2 du code de commerce, la tierce opposition au jugement d'ouverture doit être formée par déclaration au greffe dans un délai de 10 jours à compter du prononcé de la décision.

Elle relève qu'en l'espèce, Monsieur [O] [N] et son tuteur sont intervenus volontairement à la procédure à l'audience qui s'est tenue le 5 mai 2023, soit postérieurement au délai de 10 jours prévu par la loi, le jugement d'ouverture de la procédure collective ayant été rendu le 9 mars 2023. Elle en déduit que Monsieur [O] [N] et son tuteur ne pourront qu'être déclarés irrecevables en leur demande.

Au fond, elle fait valoir que ces derniers ne démontrent pas l'absence caractérisée de cessation des paiements qu'ils invoquent.

Par conclusions identiques déposées et notifiées par le RPVA en date du 17 avril 2024 dans chacune des deux procédures, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SELARL BG & ASSOCIES représentée par Maître [H] [E] ès qualités d'administrateur judiciaire et de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN, demande à la cour, au visa des articles L.631-4 du code de commerce, 514, 583 et 700 du code de procédure civile, de :

A titre principal :

- faire droit à la demande de jonction des affaire pendantes devant la cour de céans sous les N°RG 23/09301 et N°RG 23/09477 présentées par les parties appelantes,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Nice en date du 7 juillet 2023 n°2023L00557 par devant elle déféré,

- débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION, la SAS NICE CAFE DE TURIN, Monsieur [O] [N] représenté par son tuteur en exercice Monsieur [W] [C] et la SCP EZAVIN [B],

A titre subsidiaire et si par extraordinaire la cour de céans venait à infirmer le jugement du 7 juillet 2023 n°2023L00557 par devant elle déféré,

- désigner Maître [H] [E] en qualité d'administrateur provisoire de la SAS CAFE DE TURIN avec pour mission de gérer et administrer la SAS CAFE DE TURIN,

En tout état de cause,

- condamner solidairement la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION, la SAS NICE CAFE DE TURIN, Monsieur [O] [N] représenté par son tuteur en exercice Monsieur [W] [C] et la SCP EZAVIN [B] solidairement à verser à la SAS CAFE DE TURIN la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Après avoir rappelé des éléments de contexte, dont notamment l'existence d'un contrôle fiscal en cours depuis la fin de l'année 2022, la SELARL BG & ASSOCIES ès qualités conclut au visa de l'article 583 du code de procédure civile à l'irrecevabilité de la tierce opposition des sociétés appelantes.

Elle soutient ainsi que le fait que ses actionnaires soient les mêmes personnes physiques que ceux de la SAS CAFE DE TURIN ne confère pas à la SAS [N] DEVELOPPEMENT la qualité d'associée. Elle en déduit que n'ayant ni la qualité d'associée ni celle de créancière à la procédure collective, elle n'a pas qualité à agir en son nom.

Elle expose que la SCEA [N] & FILS et la SARL [N] DISTRIBUTION, dont la qualité de créancières n'est pas contestée puisque leurs créances ont été admises au passif de la procédure collective, ne démontrent pas l'existence d'un intérêt propre différent de celui de la collectivité des créanciers, lequel ne saurait être caractérisé par la possible perte d'un marché dès lors qu'en matière de redressement judiciaire il n'y a pas de résiliation des contrats.

Elle rappelle qu'un associé ne peut faire tierce opposition que si son engagement au sein de la société n'est pas limité à ses apports, et que tel n'est pas le cas de la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN, qui est un actionnaire minoritaire de la SAS CAFE DE TURIN et dont la responsabilité se limite à son apport. Elle ajoute qu'il n'est en outre rapporté aucun élément démontrant l'existence d'un préjudice personnel lié au redressement judiciaire.

Enfin, elle expose que Monsieur [N] n'est pas un créancier et ne peut faire valoir un intérêt propre à agir.

Elle affirme que l'état de cessation des paiements est caractérisé ; qu'à ce jour le montant des créances déclarées et admises au passif de la SAS CAFE DE TURIN est de plus de 1 700 000 euros, sur un montant total de 6 985 200,32 euros (essentiellement PRS et URSSAF).

Par conclusions d'intervention volontaire déposées et notifiées par le RPVA en date du 17 avril 2024, dans la procédure RG n°23/09301, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN et la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN, demandent à la cour, au visa des articles 554 et 905-2 du code de procédure civile, de :

- recevoir leur intervention volontaire en cause d'appel,

- leur donner acte de ce qu'elles s'en rapportent à justice quant aux mérites de l'appel formé par la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION et la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Elles indiquent que par ordonnance n°2024O 00025 en date du 22 janvier 2024, le Président du tribunal de commerce de Nice a désigné « la SELARL [X] Mandataires judiciaires, représentée par Me [Y] [X], [Adresse 5] en qualité de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN [Adresse 6] - RCS 401 903 539 avec mission de représenter les droits propres de la société dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire prononcé en date du 9 mars 2023 » ; que dans ces conditions la SELARL [X] représentée par Maître [Y] [X] et la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] ès qualités de mandataire ad hoc ont intérêt à intervenir volontairement en cause d'appel, dans le cadre de la présente procédure.

Elles concluent à l'irrecevabilité des tierces opposition formées.

Elles rappellent que pour que la tierce opposition soit recevable, le tiers opposant créancier doit faire la démonstration d'un intérêt propre différent de celui de la collectivité des créanciers ; que l'argument développé par les sociétés [N] & FILS et [N] DISTRIBUTION qui revendiquent un intérêt propre au motif que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire risquerait à terme de leur faire perdre un marché est inopérant dès lors que cette procédure n'entraîne pas la résiliation des contrats.

Elles constatent que la SAS [N] DEVELOPPEMENT n'est ni créancière ni associée de la SAS CAFE DE TURIN. Elle soutient que le fait qu'elle soit associée majoritaire de la SCEA [N] & FILS ne lui confère pas d'intérêt propre à agir.

Elles relèvent enfin que les agissements de Monsieur [O] [N], préalablement à l'ouverture du redressement, ne sauraient justifier la tierce opposition de la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN qui est un actionnaire minoritaire de la SAS CAFE DE TURIN. 

Par conclusions d'intervention volontaire déposées et notifiées par RPVA en date du 17 avril 2024, dans la procédure RG n°23/09477, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN et la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN, demandent à la cour, au visa des articles 554 et 905-2 du code de procédure civile, de :

- recevoir leur intervention volontaire en cause d'appel,

- leur donner acte de ce qu'elles s'en rapportent à justice quant aux mérites de l'appel formé,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Elles indiquent que par ordonnance n°2024O 00025 en date du 22 janvier 2024, le Président du tribunal de commerce de Nice a désigné « la SELARL [X] Mandataires judiciaires, représentée par Me [Y] [X], [Adresse 5] en qualité de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN [Adresse 6] RCS 401 903 539 avec mission de représenter les droits propres de la société dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire prononcé en date du 9 mars 2023 » ; que dans ces conditions la SELARL [X] représentée par Maître [Y] [X] et la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] ès qualités de mandataire ad hoc ont bien évidemment intérêt à intervenir volontairement en cause d'appel dans le cadre de la présente procédure.

Après avoir rappelé les dispositions des articles 583 du code de procédure civile et R.661-2 du code de commerce, elles exposent que la tierce opposition doit être formée contre les décisions rendues en matière de redressement judiciaire dans un délai de 10 jours à compter de la publication au BODACC et doit être faite par déclaration au greffe. Elles soutiennent qu'en l'espèce, cette exigence, qui constitue une fin de non- recevoir qui peut être invoquée en tout état de cause, n'a pas été respectée.

Elles ajoutent qu'en tout état de cause c'est à juste titre que le tribunal de commerce a retenu que le fait du changement de mission du mandataire ne présumait pas d'un préjudice personnel et particulier à l'encontre de Monsieur [O] [N] lequel n'est par ailleurs pas créancier de la SAS CAFE DE TURIN.

La SCP EZAVIN [B] prise en la personne de Maître [A] [B] désignée en qualité de tuteur adjoint de Monsieur [O] [N] selon ordonnance du juge des contentieux de la protection de Menton en date du 23 juin 2023 est intervenue volontairement à la procédure RG 23/09477 .

Par avis en date du 16 avril 2024, le ministère public indique ne pas s'opposer à la jonction des procédures RG23/09477 et RG23/09301 et conclut à la confirmation de la décision entreprise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Il appert que la jonction des deux procédures procède d'une bonne administration de la justice dans la mesure où il s'agit de traiter deux appels formés à l'encontre de la même décision.

En conséquence la procédure n°23/09477 sera jointe à la procédure 23/09301 sous le numéro de rôle unique RG 23/09301.

2/ Leur qualité et leur intérêt à agir n'étant pas contestés il y a lieu de recevoir en leur intervention volontaire la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X], ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN, et la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN.

3/ Il résulte de la combinaison des articles L.661-2 du code de commerce et 583 alinéa 2 du code de procédure civile que la tierce opposition est ouverte à l'encontre du jugement statuant sur l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire à tout créancier invoquant des moyens qui lui sont propres et distincts de l'intérêt collectif ou qui établit que la décision a été rendue en fraude de ses droits.

Il est constant et non contesté que les sociétés [N] & FILS et [N] DISTRIBUTION sont créancières de la SAS CAFE DE TURIN. Il leur appartient à ce titre de démontrer l'existence d'un préjudice différent de celui de la collectivité des créanciers.

Les sociétés [N] & FILS et [N] DISTRIBUTION, qui invoquent un risque de perte de marchés constituant respectivement 15 % et 13 % de leur chiffre d'affaires, ne démontrent aucunement l'existence d'un préjudice propre causé par le jugement d'ouverture, qui serait distinct de celui pouvant être invoqué par la collectivité des créanciers, et ce d'autant plus que, comme l'a relevé à juste titre le tribunal de commerce, la procédure de redressement judiciaire n'entraîne pas résiliation des contrats en cours.

Il s'en suit que c'est par une exacte appréciation que le tribunal de commerce de Nice a jugé irrecevable la tierce opposition des sociétés [N] & FILS et [N] DISTRIBUTION.

La SAS [N] DEVELOPPEMENT, dont il n'est pas contesté qu'elle n'était pas créancière de la SAS CAFE DE TURIN, ni partie ou représentée au jugement qu'elle attaque, soutient qu'elle aurait un intérêt personnel à agir au motif qu'elle est associée majoritaire de la SCEA [N] & FILS laquelle risque, du fait de la décision de redressement judiciaire, de perdre un marché représentant environ 15 % de son chiffre d'affaires.

Le fait que la SAS [N] DEVELOPPEMENT soit un associé majoritaire de la SCEA [N] & FILS ' laquelle n'a pas démontré avoir en sa qualité de créancière un intérêt personnel à agir - n'a aucune incidence sur la recevabilité de son action en l'absence de démonstration d'un intérêt différent de celui de la communauté des créanciers.

Il s'en déduit que c'est à juste titre que le tribunal de commerce de Nice a jugé irrecevable la tierce opposition de la SAS [N] DEVELOPPEMENT.

La SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN revendique quant à elle, en sa qualité d'associée minoritaire de la SAS CAFE DE TURIN, l'existence de droits propres à faire valoir et notamment, celui de la préservation de son patrimoine, précisant, outre le fait qu'elle a été victime des agissements de Monsieur [N], qu'elle n'a jamais été associée de quelque manière que ce soit à la décision d'ouverture de la procédure collective, pas davantage qu'elle n'a été sollicitée pour procéder à un apport en compte courant ou une recapitalisation.

Il est établi que la SAS CAFE DE TURIN est détenue à concurrence de 40 % par la SAS [Localité 12] CAFE DE TURIN.

Il résulte de l'article 583 du code de procédure civile et de son interprétation jurisprudentielle que si l'associé est en principe représenté dans les litiges opposant la société à des tiers par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s'il invoque un moyen qui lui est propre, lequel peut exister quelque soit son degré de responsabilité.

En l'espèce la SAS CAFE DE TURIN ne démontre pas que la décision ayant ouvert la procédure collective, qu'elle entend contester par le biais de la tierce opposition, aurait pour elle des conséquences patrimoniales propres différentes de celles des autres créanciers.

Sa tierce opposition est également irrecevable.

4/ Il résulte des dispositions de l'article R.661-2 du code de commerce, qu'en matière de redressement judiciaire, la tierce opposition doit être formée par déclaration au greffe dans le délai de 10 jours à compter de la publication au BODACC.

Il s'évince du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice en date 7 juillet 2023 que le tuteur de Monsieur [O] [N] a fait tierce opposition du jugement du 9 mars 2023, publié au BODACC le 19 mars 2023, à la barre, lors de l'audience du 5 mai 2023, non régularisée par une déclaration au greffe dans les forme et délai prescrits à l'article R.661-2 du code de commerce.

Il appert en conséquence que la tierce opposition n'a pas été formée dans le respect des dispositions légales susvisées, ce qui constitue une fin de non- recevoir qui peut être invoquée en tout état de cause et sans avoir à justifier d'un préjudice.

Le jugement sera en conséquence confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a déclaré irrecevable la tierce opposition formée par Monsieur [O] [N] et Monsieur [W] [C] son tuteur.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les appelants qui succombent seront condamnés aux dépens.

Au vu des circonstances de l'espèce, il serait inéquitable de laisser supporter à la SELARL BG & ASSOCIES es qualité d'administrateur judiciaire et de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN l'intégralité des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

La SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION, la SAS NICE CAFE DE TURIN, Monsieur [O] [N], Monsieur [W] [C] et la SCP EZAVIN-[B] seront condamnés à lui verser la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Aucune considération d'équité n'impose de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au bénéfice de la SCP BTSG2 prise en la personne de Maître [G] [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS NICE CAFE DE TURIN.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe

ORDONNE la jonction de la procédure n°23/09477 à la procédure 23/09301 sous le numéro de rôle unique RG 23/09301 ;

REÇOIT en leur intervention volontaire la SAS CAFE DE TURIN représentée par la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X], ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN, et la SELARL [X] prise en la personne de Maître [Y] [X] ès qualités de mandataire ad hoc de la société CAFE DE TURIN ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice rendu le 7 juillet 2023, par substitution de motifs s'agissant de l'irrecevabilité de la tierce opposition de Monsieur [O] [N] ;

CONDAMNE la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION, la SAS NICE CAFE DE TURIN, Monsieur [O] [N], Monsieur [W] [C] et la SCP EZAVIN-[B] à payer à la SELARL BG & ASSOCIES ès qualités d'administrateur judiciaire et de mandataire ad hoc de la SAS CAFE DE TURIN la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SCP BTSG² prise en la personne de Maître [G] [F] ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS NICE CAFE DE TURIN de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la SAS [N] DEVELOPPEMENT, la SCEA [N] & FILS, la SARL [N] DISTRIBUTION, la SAS NICE CAFE DE TURIN, Monsieur [O] [N], Monsieur [W] [C] et la SCP EZAVIN-[B] aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-2
Numéro d'arrêt : 23/09301
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.09301 ?
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