COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-4
ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 4 JUILLET 2024
N°2024/
Rôle N° RG 23/04522 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLA3N
Joint au RG 23/5162
[E] [Y]
C/
[Z] [I]
[V] [D] [S] divorcée [I]
[P] [A] [G]
[C] [F]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Alice CABRERA
Me Roselyne SIMON-THIBAUD
Arrêt en date du 4 Juillet 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 08 Février 2023, 3ème chambre civile, qui a cassé et annulé l'arrêt RG N° 18/07819 Minute 2021/036 rendu le 11 Février 2021 par la cour d'appel d' AIX-EN-PROVENCE (Chambre 1.3).
DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION
Monsieur [E] [Y],Ayant la qualité d'intimé dans le dossier joint RG 23/5162, né le 18 Décembre 1955 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
assisté par Me Alice CABRERA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION
Monsieur [Z] [I], ayant la qualité d'appelant dans le dossier joint RG 23/5162, né le 24 Juillet 1948 à [Localité 7] (PORTUGAL), demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par, Me Chantal TEBOUL ASTRUC, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Martine BELAIN, avocat au barreau de PARIS
Madame [V] [D] [S] divorcée [I], ayant la qualité d'appelant dans le dossier joint RG 23/5162, née le 16 Janvier 1947 à [Localité 7] (PORTUGAL), demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Jérôme LACROUTS de la SELARL JEROME LACROUTS AVOCATS, avocat au barreau de NICE, Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par Me Chantal TEBOUL ASTRUC, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Martine BELAIN, avocat au barreau de PARIS
Monsieur [P] [A] [G], demeurant [Adresse 8] PORTUGAL
non comparant, non représenté
Monsieur [C] [F] Me [C] [F], pris en sa qualité de liquidateur de M. [P] [A] [G], demeurant [Adresse 4]
non comparant, non représenté
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 Avril 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, madame Inès BONAFOS, Présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Inès BONAFOS, Présidente
Mme Véronique MÖLLER, Conseillère
M. Adrian CANDAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Patricia CARTHIEUX.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2024, puis avisées par message le 20 Juin 2024, que la décision était prorogée au 4 Juillet 2024.
ARRÊT
FAITS ET PROCÉDURE
En 1997, monsieur [E] [Y] a entrepris la construction d'une villa sur le terrain dont il est propriétaire à [Adresse 6].
Il a signé un marché de travaux avec la société [A] [G].
Aucune souscription d'assurance obligatoire dommages-ouvrages (DO) n'est intervenue.
[E] [Y] s'est plaint du retard du chantier et de divers désordres, il a assigné monsieur [A] [G] en référé aux fins d'expertise.
Par acte du 1 avril 1998, il a également assigné monsieur [I], qui avait réalisé les travaux. Une expertise a été ordonnée par le juge des référés le 19 mai 1998.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 26 janvier 2000.
Le 17 février 2000, monsieur [Y] a déposé plainte avec constitution de partie civile à l'encontre de monsieur [Z] [I] et madame [V] [B] épouse [I] pour escroquerie, faux et usage de faux en exposant que l'entreprise [A] [G] est une entreprise fictive masquant les activités des époux [I], et que le marché de travaux a été signé en réalité par monsieur [I] et les travaux réalisés par celui-ci.
Le 2 mars 2000, monsieur [Y] a notifié à monsieur [I] et madame [S] une inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire.
Par arrêt du 23 mars 2011, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré monsieur [I] coupable des faits de faux et d'usage de faux et l'a condamné à payer à monsieur [Y] des dommages et intérêts de 35 000 euros en réparation du préjudice subi par monsieur [Y] du fait des infractions. Cette condamnation a été confirmée définitivement par l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 16 mai 2012.
Sur le plan civil, par acte du 9 mars 2000, monsieur [P] [A] [G] a fait assigner monsieur [E] [Y] en paiement d'un solde de marché.
Le 19 janvier 2001, monsieur [Y] a assigné monsieur et madame [I] devant le tribunal de grande instance de Grasse en intervention forcée à la procédure précitée.
Les procédures ont été jointes.
Monsieur [P] [A] [G] a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire selon jugement du 5 septembre 2003, et par acte en date du 29 mai 2009, monsieur [E] [Y] a appelé en cause Maître [F], liquidateur judiciaire.
La procédure de liquidation judiciaire a été clôturée le 31 mars 2015.
Par ordonnance du 8 février 2013, le juge de la mise en état a ordonné un complément d'expertise afin de déterminer si la construction est conforme aux normes parasismiques applicables en 1998.
Par arrêt en date du 19 mars 2015 la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé l'ordonnance, en considérant que les investigations antérieurement réalisées actaient déjà l'absence de réalisation d'étude béton armé et l'absence de respect des normes parasismiques.
Par jugement en date du 20 avril 2018, le Tribunal de grande instance de GRASSE a :
- DECLARE recevables les demandes dirigées contre monsieur [U] [I] ;
- DECLARE recevables les demandes dirigées contre madame [V] [B] épouse [I] ;
- CONDAMNE monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] la somme de 1.061.566,10 euros en réparation de son préjudice matériel ;
- CONDAMNE monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] la somme de 300.000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,
- CONDAMNE monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] la somme de 20.000 euros en réparation de son préjudice moral
- DEBOUTE monsieur [E] [Y] du surplus de ses demandes ;
- DEBOUTE monsieur [U] [I] et madame [V] [B] épouse [I] de leurs demandes reconventionnelles
- REJETTE toute prétention plus ample ou contraire,
- CONDAMNE monsieur [Z] [I] aux frais et entiers dépens de l'espèce, en ce compris frais d'expertise judiciaires d'huissier de Justice, et frais hypothécaires, dont distraction faite au profit de Me CABRERA et Me [V], qui en ont fait la demande
- CONDAMNE monsieur [Z] [I] à verser à monsieur [E] [Y] la somme de 9000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- REJETTE toute autre demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.
Par arrêt en date du 11 février 2021, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a :
- Confirmé le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant du préjudice de jouissance et du préjudice moral ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
- Condamné monsieur [Z] [I] à payer la somme de 450 000 euros à monsieur [E] [Y] en réparation de son préjudice de jouissance subi jusqu'à ce jour, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
- Condamné monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y], en réparation de son préjudice de jouissance à compter de ce jour, la somme de 2 500 euros par mois jusqu'à parfait paiement des sommes allouées en réparation du préjudice matériel subi par monsieur [E] [Y], avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance le dernier jour de chaque mois
- Condamné monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour
- Dit que la condamnation de monsieur [Z] [I] prononcée par le jugement déféré en réparation du préjudice matériel de monsieur [E] [Y] sera revalorisée suivant l'indice BTOI entre le mois de février 2016, date des devis et la date du jugement avec comme indice de base l'indice BT0I du mois de février 2016 et comme indice multiplicateur celui en vigueur à la date du jugement et dit que la somme de 1 061 566,10 euros revalorisée portera intérêts au taux légal à compter du jugement déféré,
- Condamné monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] la somme de
8 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
- Rejeté les autres demandes à ce titre ;
- Condamné monsieur [Z] [I] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par arrêt en date du 8 février 2023, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rendu la décision suivante :
- CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :
Déclare recevables les demandes dirigées contre monsieur [I] ;
Condamne monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 1 061 566,10 euros en réparation de son préjudice matériel ;
Condamne monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 450 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance subi, avec intérêts au taux légal ;
Condamne monsieur [I] à payer à monsieur [Y], en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 2 500 euros par mois jusqu'à parfait paiement des sommes allouées en réparation du préjudice matériel subi par monsieur [Y], avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance le dernier jour de chaque mois ;
Condamne monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal ;
Dit que la condamnation de monsieur [I] prononcée en réparation du préjudice matériel de M. [Y] sera revalorisée suivant l'indice BT01 entre le mois de février 2016, date des devis et la date du jugement avec comme indice de base l'indice BT01 du mois de février 2016 et comme indice multiplicateur celui en vigueur à la date du jugement et dit que la somme de 1 061 566,10 euros revalorisée portera intérêts au taux légal à compter du jugement ;
L'arrêt rendu le 11 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne monsieur [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé
Par déclaration au greffe en date du 27 mars 2023, monsieur [E] [Y] (N° RG 23/4522) a saisi la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en qualité de juridiction de renvoi après arrêt de la Cour de cassation en date du 8 février 2023 qui a CASSE ET ANNULE partiellement le précédent arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence. :
Par déclaration de saisine en date du 11 avril 2023 (N° RG 23/05162), monsieur [Z] [I] et madame [V] [D] [S] ont saisi la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en qualité de juridiction de renvoi après arrêt de la Cour de cassation en date du 8 février 2023 qui a CASSE ET ANNULE partiellement le précédent arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Par ordonnance en date 23 novembre 2023, la Président de la chambre 1-4 en charge de la mise en état de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a ordonné la jonction des instances N° RG 23/05162 et N° RG 23/4522, sous le RG unique RG 23/4522.
Par conclusions du 11 avril 2024, monsieur [E] [Y] sollicite voir :
Vu le jugement rendu en date du 20 avril 2018 par le Tribunal de Grande Instance de GRASSE;
Vu l'article 1147 du Code Civil, (nouvel article 1231-1)
Vu les articles 1382 et 1383 du Code Civil (nouveaux articles 1240 et 1241)
Vu l'article 305 du code de procédure civile,
Vu l'article 1343-2 du Code civil, Vu les jurisprudences,
Vu l'arrêt de la Cour d'Appel d'Aix en Provence du 23 mars 2011,
Vu le rapport [F],
Vu le rapport MASCARELL1,
Vu l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix en Provence du 19 mars 2015,
Vu les pièces du dossier :
- CONSTATER le désistement partiel de monsieur [Y] à l'encontre de monsieur [P] [A] [G], et monsieur [C] [F], en qualité de liquidateur ;
- JUGER que la procédure actuellement pendante se poursuit à l'encontre de monsieur [Z] [I] et madame [V] [B]
Ensuite,
- RECEVOIR monsieur [Y] en son appel, le déclarer bien fondé ;
- DEBOUTER monsieur [I] et madame [B] de leur appel, de leur appel incident et de l'ensemble de leurs demandes ;
- DEBOUTER monsieur [I] et madame [B] de leur demande AVANT DIRE DROIT de voir ordonner une expertise judiciaire ;
A titre liminaire sur l'incident de faux :
- DECLARER monsieur [I] irrecevable et mal fondé à arguer de faux tout écrit imputé par monsieur [Y] à monsieur [X] en date des 26 octobre, 3 et 7 novembre 1998, ainsi que tout autre écrit de ce dernier ;
- DEBOUTER monsieur [I] de sa demande tendant à voir écarter des débats la pièces 30-6 visée par monsieur [Y] ;
- CONDAMNER monsieur [I] sur le fondement de l'article 305 du Code de procédure civile.
Sur le fond :
- CONFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a :
. DECLARE recevables les demandes dirigées contre monsieur [I]
. CONDAMNE monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 1 061 566, 10 euros en réparation de son préjudice matériel
. CONDAMNE monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 9.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
. CONDAMNE monsieur [I] aux frais et entiers dépens de l'espèce, en ce compris frais d'expertise judiciaire, d'huissier de justice et frais hypothécaires.
. DEBOUTE monsieur [I] de l'ensemble de ses demandes.
. ORDONNE l'exécution provisoire de la décision
- INFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a :
. CONDAMNE monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 300.000,00 euros en réparation de son préjudice de jouissance
. CONDAMNE monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 20.000,00 euros en réparation de son préjudice moral
. DEBOUTE monsieur [Y] de ses demandes au titre de son préjudice locatif
En conséquence :
- JUGER que l'assignation en intervention forcée en date du 19/01/2001 mentionne les malfaçons affectant le bien de monsieur [Y] (non-conformité parasismique et béton armé) et les conséquences nécessaires à faire cesser le dommage (destruction de l'ouvrage) en recherchant la responsabilité de monsieur de [I]
- JUGER qu'en conséquence cette assignation en intervention forcée en date du 19 janvier 2001 constitue une demande en justice dirigée contre monsieur [I] de nature à interrompre la prescription
- JUGER que la dénonciation d'une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire interrompt également la prescription et ainsi que la dénonce d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire aux époux [I] en date du 2 mars 2000 constitue une demande en justice ayant interrompu la prescription le 19 novembre 2004
- JUGER que les conclusions notifiées dans les intérêts de monsieur [Y] en date du 19 novembre 2012 constituent des demandes à l'encontre de monsieur [I] formulées moins de 10 ans après l'extinction de l'instance relative à la procédure conservatoire intervenue en date du 19 novembre 2004
- JUGER au surplus que la plainte avec constitution de partie civile en date du 17 février 2000 a légalement suspendu la procédure civile entre le 17 février 2000 et le 5 mars 2007 et que le délai de prescription qui était intact à la date du 17 février 2000 a repris ses effets le 6 mars 2007 faisant courir un nouveau délai de dix ans jusqu'au 6 mars 2017
Subsidiairement sur le délai de prescription applicable :
- JUGER que la prescription trentenaire aux actions en responsabilité contractuelle est applicable aux litiges nés avant la loi du 17 juin 2008.
Dès lors,
- JUGER que l'ensemble des demandes formulées à l'encontre de monsieur [I] par Monsieur [Y] est recevable en l'absence d'acquisition de prescription
- JUGER que la condamnation de monsieur [Z] [I] prononcée par le jugement déféré en réparation du préjudice matériel de monsieur [Y] sera revalorisée suivant l'indice BT01 entre le mois de février 2016, date des devis, et la date du jugement avec comme indice de base l'indice BT01 du mois de février 2016 et comme indice multiplicateur celui en vigueur à la date du jugement et dire que la somme de 1 061 566,10 euros revalorisée portera intérêts au taux légal à compter du jugement déféré
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 106 156,61 euros en réparation du surcoût prévisionnel et certain de son préjudice matériel lié à la nouvelle règlementation environnementale RE 2020 et dire que cette somme de 106 156,61 euros portera intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2022, date d'application de la règlementation RE 2020
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 127 387,93 euros en réparation du surcoût prévisionnel et certain de son préjudice matériel lié aux honoraires de mission d'architecte et dire que cette somme de 127 387,93 euros portera intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à venir.
- JUGER que le préjudice de jouissance subi par monsieur [Y] a pour jour de naissance la date du 1er août 1997 à laquelle il aurait dû contractuellement pouvoir jouir de la construction et JUGER que le préjudice perdurera jusqu'à l'achèvement des travaux de reconstruction de l'ouvrage litigieux
- JUGER que le préjudice de jouissance subi par monsieur [Y] entre le 1er août 1997 et le 31 décembre 2023 est financièrement déterminé sur la base d'un rapport d'évaluation établi par un expert en évaluations immobilières près la Cour d'Appel d'Aix en Provence.
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 1.153.144,10 euros au titre du préjudice de jouissance sur la période du 1er août 1997 au 31 décembre 2023, somme à parfaire de 4 391,72 euros par mois à compter du 1er janvier 2024 et jusqu'à l'arrêt à intervenir, le tout actualisé, en fonction de chaque montant de loyers annuels déterminés sur la base du rapport d'évaluation de madame [J], jusqu'à la date de l'arrêt à venir et portant intérêt au taux légal à compter dudit arrêt.
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 4.391,72 euros par mois au titre du préjudice de jouissance à compter de l'arrêt jusqu'à parfait apurement des sommes allouées en réparation du préjudice matériel subi par monsieur [Y], avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance le dernier jour de chaque mois
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme forfaitaire de 92.226,12 euros (4 391,72 euros x 21 mois) réparant, à minima, le préjudice de jouissance prévisible et certain causé par le délai minimum incompressible de 21 mois qui surviendra entre la date de règlement intégral du préjudice matériel et la date de réception de l'ouvrage reconstruit, cette somme portant intérêts à taux légal à compter de l'arrêt à intervenir
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] la somme de 162.218,95 euros au titre de la perte de chance de pratiquer une gestion de son patrimoine en « bon père de famille» et d'acquérir un bien immobilier en raison de la perte financière liée aux dépenses locatives qu'il a été contraint d'engager, cette somme portant intérêts à taux légal à compter de l'arrêt à intervenir
- CONDAMNER monsieur [I] à payer à monsieur [Y] au titre du préjudice moral, la somme de 100 000 euros qui portera intérêts à taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ainsi que la somme supplémentaire de 300 euros par mois depuis l'arrêt à venir et jusqu'au règlement total de ses condamnations.
- DIRE ET JUGER que l'ensemble des sommes ci-dessus sera capitalisé par anatocisme conformément aux articles 1343 et suivants du code civil.
En tout état :
- CONDAMNER, monsieur [I] à verser la somme de 20.000 euros à monsieur [Y] en application de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel initiale, la présente procédure d'appel de renvoi et la procédure d'incident.
- CONDAMNER monsieur [I] aux entiers dépens de la procédure d'appel initiale, de la présente procédure d'appel de renvoi et la procédure d'incident de l'appel, conformément à l'article 639 du Code de Procédure Civile, en ce compris les frais des mesures conservatoires initiées par le requérant en garantie de sa créance
Sur l'absence de prescription de l'action :
Il découle des articles 2244 et 2270 du code civil dans leur rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 que l'action en responsabilité contractuelle contre les constructeurs se prescrit par dix ans à compter de la réception des ouvrages ou à compter, en l'absence de réception, de la manifestation du dommage. En l'espèce les désordres constructifs affectant l'ouvrage ont été constatés le 9 mars 1998, date doit être retenue comme point de départ de la prescription extinctive de 10 ans. Plusieurs actes interruptifs de prescription sont intervenus :
- L'assignation en référé en date du 1 avril 1998 a interrompu la prescription jusqu'au 13 mai 1998 date de l'ordonnance. Une nouvelle ordonnance de référé en date du 18 novembre 1998, venant en complément de l'ordonnance du 13 mai a de nouveau interrompu le délai de prescription, faisant courir un nouveau délai de dix ans jusqu'au 18 novembre 2008.
- Monsieur [Y] a fait délivrer aux époux [I] une assignation en intervention forcée en date du 19 janvier 2001 pour les voir intervenir dans la procédure initiée par assignation du 9 Mars 2000 de monsieur [A] [G]. La lecture de l'acte de saisine en date du 19 janvier 2001 permet de constater irréfutablement qu'une demande portant sur la démolition-reconstruction était bien dirigée contre monsieur [I], depuis l'origine. L'interruption de la prescription est donc toujours acquise. Dès lors, la Cour de renvoi reconnaitra l'effet interruptif de l'assignation du 19 janvier 2001, déclarera l'action non prescrite et jugera recevables les demandes de monsieur [Y] à l'encontre de monsieur [I].
- Au surplus la prescription a également été interrompue par plusieurs autres actes :
D'une part, par la dénonciation de l'inscription d'hypothèque provisoire sur les biens des époux [I] En effet en vertu de l'article 71 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, la dénonciation d'une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire interrompt également la prescription.
D'autre part, la prescription a également été interrompue par la plainte avec constitution de partie civile du 17 février 2000. En effet l'ancien article 4 du Code de procédure pénale imposait à la juridiction civile d'attendre que le juge pénal se prononce sur l'action publique avant de se prononcer elle-même.
Il apparait que légalement la procédure civile a bénéficié d'une mesure de sursis à statuer automatique entre le 17 février 2000 et le 16 mai 2012 sans qu'aucune décision de sursis n'ait besoin d'intervenir. Le délai de prescription qui était intact à la date du 17 février 2000 a donc repris ses effets le 16 mai 2012 faisant courir un nouveau délai de dix ans jusqu'au 16 mai 2022.
- En tout état et s'il était encore nécessaire de convaincre, il sera rappelé que monsieur [Y] a toujours soutenu et continue de soutenir l'opposabilité de la prescription trentenaire aux actions en responsabilité contractuelle applicable aux litiges nés avant la loi du 17 juin 2008.
Sur l'incident de faux soulevé par Monsieur [I] qui sollicite que soient écartée des débats différents écrits émanant de M. [X] :
- Il est relevé que monsieur [I] soulève en 2023 un incident de faux concernant des documents établis en 1998/1999 alors que la procédure est initiée depuis 26 ans.
- Par une attestation en date du 12 octobre 2020, monsieur [X] soutient avoir rompu ses liens avec monsieur [Y] le 17 septembre 1998, et avoir changé son logo en décembre 1999, et que dès lors tous les documents produits au débat utilisant ce logo avant décembre 1999 sont des faux. Il s'agit d'un mensonge manifeste, il existait des liens financiers et politiques entre monsieur [X] et les consorts [I] depuis mars 2000, qui laissent présumer le caractère fallacieux de ces affirmations. Par ailleurs monsieur [X] a continué à assister en qualité de conseil technique monsieur [Y], postérieurement à la date où il prétend avoir rompu sa relation avec ce dernier.
- Enfin il ressort d'un courrier en date du 18 août 1998 revêtu du fameux logo, que celui-ci prétendument crée en décembre 1999 a été utilisé dès 1998 par monsieur [X]. Monsieur [I] ne peut aujourd'hui prétendre que ce document est un faux alors qu'il en a lui-même produit une copie ainsi que de la preuve de dépôt en recommandé AR dans ses pièces. Au surplus, il est manifeste que la mention manuscrite apposée par monsieur [X] dans le courrier contesté en date du 18 Août 1998, est identique à celle de son courrier non contesté en date du 14 août 1998.
Pour réfuter ces arguments, les consorts [I] soutenu par monsieur [X] ont au cours de la procédure d'appel modifiés leur version, et soutiennent désormais que monsieur [X] aurait réalisé des ébauches de son futur logo dès 1998, et que monsieur [Y] aurait subtilisé une esquisse pour réaliser des faux. Cette version est invraisemblable.
Sur le bien fondé des demandes de monsieur [Y] concernant la responsabilité de Monsieur [I] :
Il ressort des éléments du dossier et notamment de la procédure pénale engagée à son encontre, que monsieur [I] par ses agissements et son implication personnelle, depuis l'établissement du marché de travaux jusqu'aux opérations d'expertise-judiciaire, a démontré sa véritable qualité d'entrepreneur dans la construction de monsieur [Y].
Ainsi monsieur [I] devra donc être déclaré responsable, es qualité d'entrepreneur, de l'ensemble des préjudices subi par Monsieur [Y].
Tenu des obligations contractuelles prévues aux termes du marché de travaux en date du 1 er mars 1997 , monsieur [I] , avait notamment à sa charge les plans d'exécution de l'ouvrage à réaliser et le respect « rigoureux » des règles antisismiques. Or c'est bien parce que Monsieur [I] n'a pas respecté ses obligations contractuelles et n'a pas fait établir de plans d'exécutions ni d'études de la structure que l'ouvrage ne répond pas aux normes parasismiques aujourd'hui.
Monsieur [I] a failli à son obligation de résultat lui imposant de remettre dans les délais, un ouvrage conforme à ce qui était convenu et exempt de tout vice ainsi qu'une attestation de conformité parasismique prouvant que l'ouvrage répondait bien aux normes parasismiques.
Ainsi, le défaut de conformité de l'ouvrage aux règles parasismiques ayant été démontré par l'expert judiciaire et compte tenu de l'impossibilité de réaliser de simples travaux de reprises ponctuelles, la mise en conformité parasismique suppose la démolition de la maison ce qui sans conteste la rend impropre à sa destination.
La Cour de cassation considère en effet que le dommage consistant dans la non-conformité d'un ouvrage aux règles parasismiques obligatoires dans la région où se trouve une maison est un facteur certain de risque de perte par séisme, compromet sa solidité et la rend impropre à sa destination. (Cass. 3 ème civ., 11 mai 2011, n° 10-11713).
Sur les préjudices subis par Monsieur [Y] :
Monsieur [I] a été condamné en première instance à réparer le préjudice matériel de Monsieur [Y] par paiement de la somme de 1061 566,10 euros (988 074,83 € pour la démolition reconstruction + 73 491,30 € pour les travaux non exécutés)
Monsieur [Y] s'en remet à l'appréciation de ce jugement et sollicite de la Cour de Céans une décision identique en y ajoutant cependant le surcoût engendré par la nouvelle règlementation environnementale obligatoire depuis le 1er janvier 2022 (+10%, soit la somme de 106 156,61 euros) ainsi que le surcoût lié à la mission d'architecte pour les autorisations administratives et le suivi du chantier ( + 127 387,93 euros).
Concernant le préjudice de jouissance, il aurait dû en jouir du bien à sa guise à compter du 1er août 1997. Aux termes de son rapport en date du 29 novembre 2018, l'expert madame [J] a chiffré le montant des loyers du 1er août 1997 au 31 décembre 2018 à la somme de 902 943,38 € , somme qu'il faudra actualisée à la somme de 1 153 144,10 euros au terme de l'année 2023 , à laquelle il convient de rajouter pour la période du 1er janvier 2024 et jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir une somme de 4 391,72 euros par mois correspondant à la dernière valeur locative mensuelle établie,
Ensuite, pendant 16 ans, d'août 1997 à mai 2013, monsieur [Y] a acquitté en pure perte des loyers pour un montant total hors charges de 162.218,95 euros. Le requérant sollicite cette somme de 162.218,95 euros en réparation du préjudice causé par ces dépenses locatives, précisant qu'il s'agissait de réparer la perte de chance d'acquérir un bien immobilier dont il serait propriétaire.
Enfin monsieur [Y] a subi un préjudice moral lié à la gravité des manquement contractuels de Monsieur [I] ainsi qu'à ces man'uvres fallacieuses tant pour échapper à sa condamnation que pour organiser son insolvabilité. Monsieur [Y] a ainsi été contraint d'habiter un ouvrage dangereux et insalubre à partir de 2013. Sa vie familiale, professionnelle et personnelle a été lourdement impactée par cette procédure. Son préjudice moral ne saurait être inférieur à 100 000,00 euros.
En réponse aux arguments de monsieur [I]
- Concernant les arguments techniques visant à établir que la non-conformité parasismique n'est pas établie : la preuve du défaut de conformité parasismique a été apportée par l'expert monsieur [F] à propos du joint parasismique non réalisé, il a par ailleurs expliqué très précisément les raisons imposant la démolition de l'ouvrage. Concernant l'absence de recours à des sondages pour attester de non-conformité, monsieur [Y] soutient qu'il n'est pas démontré qu'il soit possible de procéder à de telles investigations.
- Concernant la prétendue responsabilité de monsieur [Y] : Contrairement à ce qu'allègue monsieur [I], monsieur [Y] est un profane de la construction. Par ailleurs le fait de ne pas avoir choisi de recourir à un maître d''uvre ne constitue pas un acte d'immixtion fautif. L'entrepreneur qui estime que le concours d'un maître d''uvre est nécessaire doit en aviser le maître de l'ouvrage, ce que n'a jamais fait monsieur [I]. Ce dernier ne peut davantage reprocher à monsieur [Y] ne peut pas avoir souscrit de DO, alors qu'il lui a lui-même conseillé de ne pas le faire. Enfin monsieur [Y] n'est pas non plus responsable de la durée de la procédure, toutes les actions diligentées étant nécessaires.
- Concernant la prétendue absence de préjudices de monsieur [Y], ce dernier peut prétendre à l'indemnisation de son préjudice intégral dont il démontre le principe et le quantum.
Concernant le rapport [T] fourni par monsieur [I] afin de soutenir sa version des faits, ce dernier est non contradictoire et manifestement mensonger.
Par conclusions du 10 Avril 2024 monsieur [Z] [I] sollicite voir :
Vu les dispositions légales invoquées, notamment les articles I134, 1147, 1792 et ss, 2241, 2244, 2270 du code civil dans leur version applicable at la cause, l'article 4 du code de procédure pénale, les articles 56, 122 et 700 du code de procédure civile, l'article L 242-I du code des assurances
Vu la jurisprudence applicable à l'espèce,
Vu les pièces versées aux débats dont l'arrêt de la Cour de cassation du 8 février 2023
- CONSTATER le désistement partiel des concluants à l'égard de Monsieur [A] et de Me [F] es qualité de liquidateur de Monsieur [A] uniquement
- Recevant Monsieur [I] et Madame [B] divorcée [I] en leurs demandes, fins et conclusions,
Y faisant droit,
A - En ce qui concerne Madame [B] divorcée [I]
- JUGER que par suite du jugement du 20 avril 2018 et de l'Arrêt dc la présente Cour du 11 février 2021, non casse en ce qui concerne le rejet des demandes formées par elle et dirigées à son encontre, il ne subsiste plus aucune instance entre elle et Monsieur [Y].
B - En ce qui concerne Monsieur [Z] [I]
A titre liminaire sur l'incident de faux :
Vu les articles 287 et suivants du code de procédure civile
Vu le rapport d'expertise produit en pièce 92 et ses annexes
- DECLARER Monsieur [I] recevable et bien-fondé à arguer de faux tout écrit impute par Monsieur [Y] à Monsieur [X] en date des 3 novembre, 7 Novembre et 26 octobre 1998
- ORDONNER le rejet des débats de ces écrits et notamment dès à présent la pièce 30-6 citée par Monsieur [Y] dans ses conclusions du 15 mai 2023.
SUR LE FOND :
INFIRMER le jugement du 20 avril 2018, en ce qu'il a :
- Déclaré recevables les demandes dirigées contre [Z] [I] ;
- Condamné [Z] [I] à payer à Monsieur [Y] la somme dc 1.061 .566, l0€ en réparation de son préjudice matériel ;
- Condamné [Z] [I] à payer à Monsieur [E] [Y] la somme de 300.000 € en réparation de son préjudice de jouissance ;
- Condamné [Z] [I] à payer à Monsieur [E] [Y] la somme de 20.000 € en réparation de son préjudice moral ;
- Débouté [Z] [I] et [V] [B] épouse [I] de leurs demandes reconventionnelles;
- Rejeté toutes prétentions plus amples ou contraires ;
- Condamné [Z] [I] aux frais et entiers dépens de l'espèce, en ce compris frais d'expertise judiciaire, d'Huissiers de Justice et frais d'hypothèque dont distraction au profit de Maitre CABREIRA et de Maitre [V] qui en ont fait la demande ;
- Condamné [Z] [I] à verser à [E] [Y] la somme de 9.000 (=1 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Rejeté toutes autres demandes au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Ordonné l'exécution provisoire de cette décision.
Statuant à nouveau,
- DECLARER irrecevables les demandes dirigées contre Monsieur [I].
A titre subsidiaire, pour le cas où par extraordinaire, la Cour ne ferait pas droit à cette contestation,
- DEBOUTER Monsieur [Y] de l'intégralité de ses demandes comme non fondées ni justi'ées, si ce n'est particulièrement abusives tant sur le plan matériel que sur le plan immatériel.
- CONDAMNER Monsieur [Y] e verser 231 Monsieur [I] la somme de 20.000 € en application dc l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- LE CONDAMNER aux entiers dépens de la procédure d'appel et de la procédure de première instance, en ce compris les frais d'expertise et les frais des mesures conservatoires initiées par Monsieur [Y] et leur mainlevée.
A TITRE EXTREME MENT SUBSIDIAIRE si la Cour devait admettre le principe d'une remise en état matérielle de la Villa de Monsieur [Y] et d'une indemnisation de celui-ci imputables à Monsieur [I] :
Avant dire droit, sur la nature et le quantum des réparations tant matérielles qu'immatérielles :
- ORDONNER une expertise judiciaire en désignant tel Expert, de préférence Ingénieur Structure/Beton avec spécialisation parasismique, qui pourra se faire assister de tout spécialisé de son choix, avec pour mission de :
1/ Se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission
2-/ Se rendre sur les lieux [Adresse 1] et procéder à toutes constatations utiles
3-/ Faire vérifier au moyen de radiographies de structure à rayons X ou Gamma : la non-conformité alléguée de l'ouvrage aux normes parasismiques, la réalité des aciers mis en place à la construction et leur con'guration
4-/ Dans l'hypothèse où ces radiographies de l'ouvrage démontreraient que les aciers mis en place au regard des règles PSMI 92 ne seraient pas conformes ou suffisants : Décrire les travaux de reprise nécessaires et procéder à l'évaluation de leur coût au moyen de devis fournis par les parties / Déterminer la durée prévisible desdits travaux ainsi que les préjudices accessoires qu'ils pourraient entrainer tels que privation ou limitation de jouissance
5-/ Procéder à une estimation de la valeur foncière et locative de la Villa au cours des années écoulées depuis 1998, en tenant compte de la conformité ou non des ouvrages qui sera préalablement techniquement constatée
6- /Evaluer, le cas échéant, les troubles de jouissance subis depuis 1998 du fait des désordres constatés.
- Dire que l'expert déposera son rapport en un exemplaire original sur support papier et numérique au format PDF au greffe du contrôle des expertises de la présente Cour dans le délai de six mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicite en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d'un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présente aux parties).
- Dire que l'expert devra, des réceptions de l'avis de versement de la provision a valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procèdera à une lecture contradictoire dc sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et que l'issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge charge du contrôle.
- Dire que l'expert devra adresser aux parties une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble des constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la présente juridiction.
- Dire que l'expert devra 'xer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile.
- Désigner le magistrat charge du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents.
- Dire que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution dc sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile.
- Fixer à telle somme la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, et le délai de consignation.
- Dire qu'en déposant son rapport, l'expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération définitive.
Sur l'irrecevabilité des demandes de monsieur [Y] en raison de la prescription
- A titre liminaire, la présente Cour ne peut en aucun cas suivre la thèse de monsieur [Y], même présentée subsidiairement, selon laquelle il y aurait lieu à l'application d'une prescription trentenaire de droit commun sur le fondement des articles 2244 et 2270 du Code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2008-561 du 17 Juin 2008. En effet la Cour de cassation juge que l'action en responsabilité de droit commun ne peut permettre d'échapper à l'application des dispositions limitant la durée de l'action contre le constructeur à une prescription décennale (Civ3, 8 Février 2023)
- Sur les interruptions alléguées de la prescription décennale
- Si monsieur [Y] a mis en cause monsieur [I] dans le cadre de l'assignation délivrée le 1er avril 1998, aux fins d'expertise judiciaire, il n'a jamais formulé la moindre demande à l'encontre de monsieur [I], cet acte n'a donc pas d'effet interruptif de prescription à son égard. A supposer que la prescription ait été interrompue par cette assignation du 1er avril 1998, elle ne l'a été que jusqu'au 13 mai 1998, date de l'ordonnance désignant l'expert Judiciaire.
- S'il invoque avoir délivré à monsieur [I] une assignation en intervention forcée le 19 janvier 2001 force est de constater qu'elle ne comporte pas de désignation précise des désordres, objet de l'action, de sorte qu'elle n'a pas eu pour effet d'interrompre la prescription décennale.
- La dénonciation le 2 mars 2000 de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur les biens des époux [I] a eu un effet interruptif de prescription, conformément à jurisprudence. Néanmoins, contrairement à ce que monsieur [Y] soutient sans aucun fondement, l'action en mainlevée de cette hypothèque engagée le 9 mars 2000 n'a pas été de nature à interrompre la prescription jusqu'au prononcé d'un arrêt d'appel du 22 octobre 2003 rejetant définitivement cette demande. En effet, cette a été exercée par les époux [I] et non par monsieur [Y] qui se prévaut de son effet interruptif. Au surplus, l'action en « mainlevée d'hypothèque » a un objet tout à fait distinct, éloigné et étranger par rapport à une demande de réparation de désordres formée à l'encontre du constructeur sur le fondement de l'article 1792 et s du code civil.
- La plainte avec constitution de partie civile du 17 Février 2000 n'a pas davantage au d'effet interruptif. D'une part il y a une différence d'objet entre les demandes présentées dans le cadre de l'action pénale et dans le cadre de l'action civile. D'autre part, aucune décision de sursis à statuer au visa de l'article 4 de Code procédure pénale n'est intervenue.
- C'est seulement dans ses conclusions d'incidents signifiées les 19 novembre 2012 et 9 Janvier 2013 que monsieur [Y] a énoncé pour la première fois ses demandes à l'égard de monsieur [I]. Or, à cette date, la prescription décennale était déjà acquise, faute d'acte interruptif de prescription à l'initiative de monsieur [Y] entre la dénonciation d'inscription d'hypothèque provisoire du 2 mars 2000 et les conclusions d'incident du 19 novembre 2012.
Sur l'incident de faux :
Monsieur [Y] s'est prévalu précédemment et se prévaut encore dans le cadre de la présente instance d'écrits attribues à monsieur [X], notamment de courriers dactylographies dont la signature est imputée à celui-ci, en date des 3 novembre 1998, 7 novembre 1998 et 26 octobre 1998. Ces documents ont fait l'objet d'une expertise graphologique, qui a conclu que l'entête utilisée dans ces documents ne correspondait à celui de société de monsieur [X] à la même époque, et résultait manifestement d'un montage. Et que par ailleurs toutes réserves devaient être faites sur l'authenticité des signatures imputées à monsieur [X].
Notamment, monsieur [X] a lui-même attesté qu'il contestait avoir établi les courriers/attestations dont s'agit portant un logo qu'il n'utilisait pas pendant la période concernée, et alors qu'il avait cessé de voir monsieur [Y] depuis le 17 septembre 1998.
En conséquence de tout ce qui précède, et en application des articles 287 et suivants du code de procédure civile, monsieur [I] est recevable et bien-fondé à arguer de faux les écrits imputés à monsieur [X] en date des 3 novembre, 7 novembre et 26 octobre 1998
A titre infiniment subsidiaire sur le rejet des demandes au fond formées par monsieur [Y]
- Monsieur [Y] est un professionnel de l'immobilier, il doit supporter une part de responsabilité non négligeable dans le non achèvement du chantier et l'imperfection des travaux réalisés en ce qu'il a choisi de ne pas avoir recours à un maître d''uvre et de ne pas souscrire une assurance dommage ouvrage. Par ailleurs en souhaitant jouer lui-même le rôle de maitre d''uvre, il n'a pas assuré la coordination des différents ouvrages confiés à des entreprises distincts.
- La non-conformité des ouvrages imputée à monsieur [I] n'est pas incontestablement établie.
- S'agissant de l'absence d'étude géotechnique, elle était à la charge du maître d'ouvrage monsieur [Y] et non à celle de monsieur [I]
- Monsieur [Y], qui prétend opposer à monsieur [I] l'absence de conformité de l'ouvrage aux normes antisismiques et la nécessité de démolir pour reconstruire n'apporte pas la preuve incontestable ni de cette non-conformité, ni de la nécessité de démolir pour reconstruire entièrement l'ouvrage.
' La solidité du béton ainsi que celle du ferraillage a été jugée satisfaisante par l'expertise [F] suite à l'examen de la structure
' Seuls des sondages destructeurs peuvent permettre de vérifier la conformité des ouvrages aux normes parasismiques, or ceux-ci n'ont jamais été réalisés
' Monsieur [Y] ne peut sérieusement soutenir que la propriété serait impropre à sa destination, alors qu'il a fait construire sur celle-ci, après modifications successives, une piscine dont l'emprise porte sur la moitié du terrain
Le rapport de monsieur [T] ingénieur structure, atteste de l'absence de nécessité de démolir l'ouvrage en l'absence de réalisation de sondage. En effet les non-conformités alléguées par monsieur [Y], en l'absence notamment de sondages, ne sont pas du tout démontrée. Par ailleurs monsieur [T] conteste les conclusions de l'expert [F] concernant l'absence de joint sismique. Pour celui-ci les dimensions de l'ouvrage n'obligent pas d'avoir recours à un joint de dilatation.
En conséquence, à supposer que la Villa doive supporter des réparations, il n'est pas démontré que la solution de démolition/reconstruction intégrale requise par monsieur [Y] soit à exécuter. Il existe des solutions alternatives consistant notamment à renforcer les structures en béton armé par le collage de plats carbone tel qu'exécuté en zones sismiques. Or la jurisprudence considère que doit systématiquement être recherché s'il existe ou non des solutions techniques alternatives à la démolition, et ce n'est que si les désordres ou les non-conformités sont suffisamment graves et irréparables qu'elle pourra être ordonnée.
- A titre surabondant le quantum des demandes d'indemnisation résultant des devis MAURO invoqués par monsieur [Y] est également contesté par le rapport de EXECO, économiste de la construction. Comme le fait valoir cet économiste de la construction, non seulement les devis MAURO invoqués et produits par monsieur [Y] ne sont pas exploitables comme comportant dc nombreuses erreurs et surévaluations, mais en outre, ils ne peuvent être retenus pour la base d'une indemnisation matérielle sans qu'il soit procédé à des investigations, sur place, qui n'ont pas été exécutées.
- Concernant les préjudices immatériels, d'une part monsieur [Y] ne peut solliciter à l'indemnisation d'un préjudice de jouissance et d'un préjudice locatif qui constituent la réparation d'un même préjudice. D'autre part la privation de jouissance pendant toute la durée alléguée n'est pas démontrée, monsieur [Y] n'ayant jamais cessé d'avoir la jouissance de ce bien.
- Concernant l'indemnisation de son préjudice moral, c'est monsieur [Y] et non pas monsieur [I] qui a multiplié les procédures, la durée de la procédure lui est donc imputable. Par ailleurs, dans le cadre de la procédure pénale, monsieur [Y] a déjà été indemnisé à hauteur de 35.000 € du seul fait que monsieur [I] ait signé le marché de travaux pour compte de son neveu [A] [G].
- Si, par extraordinaire, la Cour devait admettre le principe d'une remise en état matérielle de la Villa de monsieur [Y] et d'une indemnisation de celui-ci imputables à monsieur [I], elle ne pourra manquer d'ordonner une expertise complémentaire avant dire droit.
Monsieur [A] [G] [P] et monsieur [F] [C] n'ont pas constitué avocat.
Les parties ont été destinataires d'un avis de fixation de l'affaire à l'audience du 16 avril 2024 à laquelle elles ont été entendues en leurs observations.
MOTIVATION
Sur le désistement des demandes dirigées contre monsieur [A] [G] [P] et monsieur [F] [C] :
Dans ses dernières conclusions, monsieur [Y] se désiste de ses demandes initialement dirigées contre monsieur [A] [G] [P] et monsieur [F] [C].
Dans ses dernières conclusions, monsieur [I] et madame [B] se désistent également de toutes demandes dirigées à l'encontre de monsieur [A] [G] [P] et monsieur [F] [C].
Par voie de conséquence, il y a lieu de constater le désistement de toutes les demandes dirigées à l'encontre de monsieur [A] [G] [P] et monsieur [F] [C].
Sur la prescription
La cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt de la cour d'appel en date du 11 février 2021 au visa des articles 2244 et 2270 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 qui disposent :
Article 2244 : Une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompent la prescription ainsi que les délais pour agir.
Article 2270 : Toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article.
Considérant qu'une assignation en justice ne peut interrompre la prescription qu'en ce qui concerne le droit que son auteur entend exercer et ne peut, dès lors, interrompre la prescription de l'action en réparation de désordres qui n'y sont pas mentionnés, la cour de cassation reproche à la cour d'appel de ne pas avoir recherché, comme il le lui était demandé, si, dans son assignation du 19 janvier 2001, monsieur [Y] demandait l'indemnisation des préjudices qui faisaient l'objet du litige et sans constater, à défaut, que les demandes avaient été formées moins de dix ans après la notification de la mesure conservatoire.
Monsieur [I] fait valoir que toute personne dont la responsabilité peut être engagée en application des articles 1792 à 1792-4 du code civil est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle en vertu des articles 1792 à 1792-2 après dix ans à compter de la réception des travaux ou à l'expiration du délai visé par l'article 1792-3 du code civil, que monsieur [Y] ne justifie pas d'actes interruptifs de prescription qui lui soient spécifiquement adressés et comportant des demandes visant expressément les désordres objet du litige, alors qu'il a formulé ses demandes dirigées contre monsieur [I] par conclusions signifiées le 19 novembre 2012.
Il relève que l'assignation en date du 1er avril 1998 ne comporte aucune demande dirigée à son encontre , que l'ordonnance de référé du 18/11/2018 est une extension de mission de l'expert, que l'assignation en intervention forcée en date du 19 janvier 2001 ne comporte pas de désignation précise des désordres , a pour objet le litige engagé par monsieur [A] [G] par assignation du 09 mars 2000 afin d'obtenir paiement du solde du chantier et ne formule aucune demande à l'égard de monsieur [I], que l'action en mainlevée d'hypothèque suite à la dénonce du 2 mars 2000 a été engagée à l'initiative de monsieur [I] et non de monsieur [Y] et n'a pas pour objet une demande de réparation des désordres, que l'action pénale suite à la plainte avec constitution de partie civile du 17 février 2000 avait un objet différent du présent litige, que le sursis à statuer n'a pas été prononcé et que radiée le 1er juin 2007 en raison d'un défaut de diligence de monsieur [Y], l'instance a été enrôlée par conclusions signifiées le 29 mai 2009, que ce n'est que par conclusions des 19/11/2012 et 09/01/2013, que monsieur [Y] a saisi le juge de la Mise en Etat d'une demande d'expertise complémentaire et de condamnation de monsieur [I] au paiement d'une indemnité provisionnelle soit plus de 10 ans postérieurement à la dénonciation d'inscription d'hypothèque le 02 mars 2000.
Monsieur [Y] fait valoir que sont interruptifs de prescription :
-L'assignation en référé délivrée le 1er avril 1998 à monsieur [I] et monsieur [A] [G],
-L'ordonnance de référé du 18/11/2018 qui a fait courir un nouveau délai de 10 ans jusqu'au 18/11/2008
-L'assignation en intervention forcée du 19 janvier 2021 à la procédure initiée par monsieur [A] [G] par assignation du 09/03/2000 rappelant la mission de l'expert désigné par le juge des référés et reprenant des extraits des conclusions de ce dernier, faisant état de la plainte pénale déposée le 17 février 2000 et de la dénonce d'hypothèque judiciaire en date du 02 mars 2000 et comportant en pièces jointes les actes cités,
-La dénonce de la prise d'hypothèque judiciaire du 02 mars 2000 dont les effets se sont prolongés jusqu'au terme de l'instance en contestation par arrêt du 22/10/2003
-la plainte avec constitution de partie civile du 17 février 2000 ayant pour objet de définir le lien contractuel entre les parties, pour effet le sursis à statue sur l'action civile puis pour terme une condamnation définitive de monsieur [I] par arrêt de la cour de cassation du 16/05/2012.
Enfin, les actions en responsabilité de droit commun dirigées contre les constructeurs introduits avant le 17 juin 2008 restent soumises à la prescription trentenaire.
*****
Il résulte des pièces produites que le marché de travaux a été signé le 01/03/1997 avec l'entreprise [A] [G] à laquelle monsieur [I] s'est substitué.
Ce marché a pour objet la construction d'une maison et d'une clôture maçonnée livrables le 31 juillet 1997, cette obligation étant sanctionnée par des pénalités de retard de 1/1000e du montant du marché par jour calendaire plafonnées à 1/10e du prix du marché.
Inversement, les retards de paiements du maître d'ouvrage sont sanctionnés par des intérêts de retard à hauteur du taux des obligations augmenté de 2,5 points.
La résiliation peut être prononcée par le maître d'ouvrage en cas d'abandon de chantier après mise en demeure.
Le lot maçonnerie générale inclut spécifiquement l'obligation pour l'entrepreneur :
-de réaliser des tranchées pour béton de fondations de 60X40 selon plan de béton armé.
- de faire procéder aux calculs BA sont à la charge de l'entreprise
- le respect des règles antisismiques.
-une étude BA pour éviter dans le séjour tous poteau à l'exception des contraintes relative à la construction de l'escalier
Le 03/10/1997, monsieur [Y] mettait l'entreprise contractante en demeure d'exécuter les travaux convenus et faisait des recommandations sur la qualité du béton de la dalle flottante du RDC devant être coulée ;
Le 23 décembre 1997 une nouvelle mise en demeure était adressée à l'entreprise contractante par le maître d'ouvrage.
Un courrier en date du 27 janvier 1998 établit clairement que monsieur [Y] exerce les prérogatives de maître d''uvre.
Un procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 janvier 1998 liste les inachèvements et désordres apparents du lot maçonnerie et fait état d'empiètements de travaux réalisés sur une propriété voisine.
Une mise en demeure est adressée à l'entreprise le 05 mars 1998 mentionnant le refus de réception des travaux par le maître d'ouvrage, des inachèvements et des refus de paiement de situations en raison de facturation de travaux non encore réalisés et des pénalités de retard dues
Il est constant que dans le cadre des relations contractuelles entre le maître d'ouvrage et le constructeur, les prescriptions applicables à l'inexécution de ses obligations par celui-ci sont celles prévues par les articles 1792 et suivants du code civil et à titre subsidiaire la prescription contractuelle de droit commun s'agissant de responsabilité n'entrant pas dans le domaine de celles définies par les articles 1792 et suivant du code civil.
Les parties ne contestent pas le point de départ du délai de prescription retenu par le premier juge soit la date du 09 mars 1998, bien que l'interruption des travaux et la présence de désordres apparents résultent d'un procès-verbal de constat d'huissier en date des 17 et 25 mars 1998 et que monsieur [Y] ait notifié le 25 mars 1998 la résiliation du marché.
Il est produit une assignation en référé-expertise en date du 01/04/1998 délivrée à l'initiative de monsieur [Y] à monsieur [I], monsieur [G] [A] et l'assureur AXA dont il n'est pas contesté la date de signification bien que le PV ne soit pas produit.
L'arrêt de la cour de cassation ne critique pas celui de la cour d'appel en date du 11/02/2021 déféré en ce qu'il retient cet acte comme interruptif de prescription jusqu'au 13 mai 1998, date de l'ordonnance de référé qui ordonne la mesure d'instruction par référence aux listes jointes, à un rapport de monsieur [O] aux constats d'huissiers.
La cour de cassation ne critique pas davantage l'arrêt de la cour d'appel en date du 11/02/2021 en ce qu'il retient comme interruptif de prescription la dénonciation de prise d'hypothèque judiciaire du 02 mars 2000.
La discussion porte sur le caractère interruptif de l'assignation au fond en intervention forcée en date du 19 janvier 2001 délivrée par monsieur [Y] à monsieur [I] dans le cadre du litige l'opposant à monsieur [A] [G].
Il est reproché à la cour d'appel de ne pas avoir recherché si dans son assignation du 19 janvier 2001, monsieur [Y] demandait l'indemnisation des préjudices qui faisaient l'objet du litige et, à défaut de ne pas avoir constaté que les demandes avaient été formées moins de dix ans après la notification de la mesure conservatoire.
Par acte du 19 janvier 2001 monsieur [Y] a assigné monsieur [I] et son épouse afin qu'ils interviennent dans le litige en cours avec monsieur [A] [G] suite à la délivrance par celui-ci à monsieur [Y] d'une assignation en date du 9 mars 2000.
Cet acte introductif d'instance joint à celui du 19 janvier 2001 est délivré au visa de l'article 1134 du code civil et réclame paiement d'un solde allégué du prix des travaux d'un montant de 255 462,20 francs en faisant état d'un compte de travaux indiquant que le montant initial dû à l'entreprise est de 1 165 331,28 francs et qu'il a été versé par le maître d'ouvrage une somme de 909 869,08 francs.
L'ordonnance du juge de la Mise en Etat du 08/02/2013 rendue suite à une demande de remise au rôle de l'affaire radiée par conclusions du 29 mai 2009 de monsieur [Y], confirme que la procédure à laquelle les époux [I] ont été sommés d'intervenir a pour origine une assignation de monsieur [Y] par monsieur [A] [G] en paiement du solde du prix du chantier, que monsieur [Y] demande le sursis à statuer en raison de l'instance pénale en cours, puis une expertise et une indemnité provisionnelle.
Cette ordonnance réfute la contestation sérieuse des effets de la prescription des époux [I] aux motifs qu'en l'absence de fondement juridique de la demande de monsieur [Y], il y a lieu de se référer à la responsabilité contractuelle de droit commun et qu'au regard des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, l'action n'est pas prescrite, le délai expirant le 19 juin 2013 ;
Mais à la date où le juge de la mise en Etat statue, il n'est pas compétent pour connaître des fins de non-recevoir et il y a lieu de se référer à la décision du tribunal sur ce point.
Le tribunal a retenu au visa de l'article 122 du code de procédure civile, l'article 2219 (et suivants), 2241 et 1792-4-1 du code civil et des dispositions transitoires de la loi du 17/06/2008 que l'action en responsabilité contractuelle contre les constructeurs se prescrit par dix ans à compter de la réception des ouvrages, ou à compter, en l'absence de réception, de la manifestation du dommage, que l'action dirigée contre monsieur [Z] [I] n'est pas prescrite considérant :
- que les désordres ont été constatés le 09/03/1998, date du prétendu abandon de chantier,
-qu'une assignation en référé délivrée le 01/04/1998 a donné lieu à une ordonnance en date du 13/05/1998 ayant eu pour effet d'interrompre les délais de prescription jusqu'au 13/05/1998,
-que le délai de prescription a été suspendu jusqu'à la date du dépôt du rapport d'expertise le 26/01/2000,
- qu'une assignation au fond a été adressée 19/01/2001 par monsieur [E] [Y] à monsieur [Z] [I] ;
Toutefois, l'assignation au fond du 19 janvier 2001 ne formule aucune demande à l'encontre des époux [I] autre que d'intervenir à la procédure n°00/1839 ; il est sollicité le sursis à statuer sur l'action exercée devant la juridiction civile dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant la juridiction pénale, juridiction civile dont il n'est pas établi qu'à ce stade du litige elle ait été saisie d'une demande en réparation des désordres y compris à titre reconventionnel dans le cadre de l' instance en paiement du solde de compte de travaux sur le fondement de l'article 1134 du code civil , instance qui au surplus ne tend pas au même but, dont l'objet et la fin sont différents .
Les conclusions en réponse de monsieur [Y] en date du 07 février 2001 ne formulent d'ailleurs dans le dispositif aucune demande dirigée contre les époux [I] même si elles font état dans la discussion de leur implication au litige : les demandes sont dirigées contre monsieur [A] [G] qualifié de « prête nom ».
Les instances ont été jointes sous le n°00/1839.
Aucune pièce n'établit qu'à ce stade de la procédure monsieur [Y] avait formulé une demande en réparation des préjudices résultant des inachèvements et malfaçons des travaux objet du litige préalablement aux conclusions d'incident en réponse signifiées les 19 novembre 2012 et 9 janvier 2013 sollicitant un complément d'expertise , une indemnité provisionnelle de 50 000€ sur la réparation des préjudices immatériels et locatifs, une indemnité provisionnelle de 30 000€ à valoir sur le préjudice matériel et une indemnité provisionnelle de 20 000€ au titre des frais d'investigations complémentaires.
S'agissant de l'incidence de la procédure pénale, il n'est pas contesté que monsieur [Y] a déposé une plainte le 17 février 2000 et s'est constitué partie civile soit préalablement à la délivrance de l'assignation en intervention forcée précitée.
Par arrêt du 26 juin 2008, la chambre de l'instruction a prononcé un non-lieu à l'égard de madame [I] des chefs de faux et usage de faux, escroquerie, un non-lieu à l'égard de monsieur [I] des chefs de menaces de mort, d'exécution de travaux sans obtention préalablement de garantie d'achèvement et de vol.
Elle a ordonné un supplément d'information à l'égard de monsieur [I] des chefs de falsification du marché de travaux en apposant sa signature au lieu et place de celle de l'entreprise [A] [G] dans le but de tromper son cocontractant monsieur [Y] et d'usage du marché de travaux falsifié pour obtenir la direction du chantier au nom d'une entreprise dont il n'est pas dirigeant.
Il a été formulé devant la juridiction pénale une demande en réparation des préjudices résultant des désordres aux travaux livrés dans le cadre de la convention des parties au plus tard le 10 mai 2010 devant le tribunal correctionnel puis par mémoire en date du 19 janvier 2011comme le confirme l'arrêt de la cour correctionnelle du 23 mars 2011.
Mais cet arrêt alloue à monsieur [Y] une somme de 35 000€ en réparation du préjudice résultant directement des infractions soit le surcroît de difficultés pour établir les faits contestés et l'identité de son cocontractant mais rejette le surplus de la demande au titre de l'exécution de la convention des parties en précisant qu'il n'appartient pas à la juridiction correctionnelle de se prononcer sur les données contractuels du litige pendant devant la juridiction civile saisie de la dette alléguée par l'entrepreneur et d'une demande en intervention forcée contre les époux [I], que le préjudice résultant des faits d'escroquerie ne peut être articulé avec les dommages subis du fait de la construction.
Cet arrêt confirme qu'un sursis à statuer constitutif d'une interruption de l'instance et de la prescription en application de l'article 4 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable en l'espèce n'est pas fondé, la solution du litige contractuel relatif à l'inexécution de ses obligations constructives par monsieur [I] ne dépendant pas de l'issue de la procédure pénale pour faux et usage, escroquerie et il n'est produit d'ailleurs aucune décision de sursis à statuer de la juridiction civile en considération de la plainte déposée.
Par voie de conséquence à défaut de rapporter la preuve d'un acte interruptif de prescription de l'action en réparation des préjudices résultant des désordres dont est atteinte la villa entre la date de la dénonciation de la prise d'hypothèque judiciaire et les demandes formulées par conclusions d'incident en réponse précitées, la demande de monsieur [Y] est irrecevable comme prescrite et il y a lieu de réformer le jugement de première instance de ce chef.
Il en résulte que « l'incident de faux » -en fait de vérification d'écriture- accessoire à l'action principale est devenu sans objet du fait de l'irrecevabilité de la demande de monsieur [Y].
Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Partie perdante monsieur [E] [Y] ne peut solliciter le bénéfice d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En considération des circonstances de l'espèce, des difficultés occasionnées par les conditions de signature du contrat à l'initiative de monsieur [I] et de la nature de la décision prononcée à l'issue de la procédure, il n'est pas inéquitable de laisser à monsieur [I] la charge de ses dépens et de ne pas faire à son bénéfice application de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour le surplus, monsieur [Y] conservera la charge des dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 20 avril 2018 en ce qu'il déclare les demandes de monsieur [E] [Y] dirigées contre monsieur [Z] [I] recevables et condamne monsieur [Z] [I] à payer à monsieur [E] [Y] :
-la somme de 1 061 566,10 euros en réparation du préjudice matériel,
-la somme de 300 000 euros en réparation du préjudice de jouissance avec intérêt légal,
-la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral avec intérêt légal,
-la somme de 9000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
-les frais et dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, d'huissier de justice et les frais hypothécaires, dont distraction au profit de Me CABRERA et Me [V]
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,
DIT irrecevables comme prescrites les demandes formulées par monsieur [E] [Y] dirigées contre monsieur [Z] [I].
DIT sans objet la procédure de vérification d'écriture.
REJETTE les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit des avocats qui en ont fait l'avance.
Prononcé par mise à disposition au greffe le 4 Juillet 2024
Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et M. Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,