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04/07/2024 | FRANCE | N°20/03513

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 04 juillet 2024, 20/03513


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 04 JUILLET 2024



N° 2024/ 117



RG 20/03513

N° Portalis DBVB-V-B7E-BFW6V







SASU CERTICALL





C/



[K] [Z]





















Copie exécutoire délivrée le 4 juillet 2024 à :



- Me Aurelie BERENGER, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Florence DONATO, avocat au barreau de MARSEILLE



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 28 Février 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00610.





APPELANT



SASU CERTICALL, demeurant [Adresse 2]



représent...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 04 JUILLET 2024

N° 2024/ 117

RG 20/03513

N° Portalis DBVB-V-B7E-BFW6V

SASU CERTICALL

C/

[K] [Z]

Copie exécutoire délivrée le 4 juillet 2024 à :

- Me Aurelie BERENGER, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Florence DONATO, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 28 Février 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00610.

APPELANT

SASU CERTICALL, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Aurelie BERENGER de la SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Carole BESNARD BOELLE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [K] [Z], demeurant [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Florence DONATO de la SELARL ARTEMISE AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [K] [Z] a été engagée à compter du 24 septembre 2007,selon contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, en qualité de conseiller de vente statut employé groupe C, par la société Telecom Italia.

La société Certicall est venue aux droits de cette dernière et applique la convention collective nationale des télécommunications.

Au dernier état de la relation contractuelle, Mme [Z] était conseiller multimédia et sa rémunération brute mensuelle moyenne était de 2 106,36 euros.

Convoquée à un entretien préalable au licenciement pour le 30 mars 2017, Mme [Z] a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 18 avril 2017.

La salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille selon requête du 23 mars 2018, afin de contester ce licenciement et obtenir diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire.

Selon jugement du 28 février 2020, le conseil de prud'hommes a statué ainsi :

Dit que le licenciement de Mme [K] [Z] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société CERTICALL à payer à Madame [Z] les sommes suivantes :

- 18.957 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans causes réelles et sérieuses - 4.212,27 euros au titre d'indemnité de préavis

- 421,22 euros au titre des congés payés afférents

- 6. 622,14 euros au titre de l 'indemnité conventionnelle de licenciement

- 1.500 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article 700 du code de procédure civile

Rappelle, dans le cadre de l'article R1454-28 du code du travail, l'exécution provisoire de droit portant sur les condamnations relatives à l 'indemnité conventionnelle de licenciement et sur l'indemnité de préavis et des congés payés afférents ;

Ordonne l 'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile, de la condamnation au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans causes réelles et sérieuses pour un montant de 5.000 euros ;

Ordonne, sous une astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement, la remise de l 'intégralité des documents sociaux rectifiés suivants : attestation Pôle Emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte et le bulletin de salaire rectificatif établi en conformité avec la présente décision. Le Conseil de Prud'hommes de Marseille se réserve la liquidation de l'astreinte;

Ordonne le remboursement par la SAS CERTICALL aux organismes definis à l'article L1235-4 du code du travail, des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois et dit qu 'une copie certifiée conforme du présent jugement sera adressé par le greffe aux dits organismes ;

Déboute l'ensemble des parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions ;

Fixe la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois de salaire à 2106,36 euros ;

Condamne la SAS CERTICALL aux entiers dépens.

Le conseil de l'employeur a interjeté appel par déclaration du 6 mars 2020.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 20 mai 2020, la société demande à la cour de :

«INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a condamné la société CERTICALL à payer à Madame [Z] les sommes suivantes :

- 18.957 euros au titre de donnnages et intérêts pour licenciement sans causes réelles et sérieuses;

- 4.212,27 euros au titre d'indenmité de préavis et 421,22 euros au titre des congés payés afférents

- 6.622,14 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

- 1.500 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article 700 du code de procédure civile

INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a :

- Ordonné, sous une astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement, la remise de l'intégralité des documents sociaux rectifiés suivants : attestation Pôle Emploi, Certificat de travail, reçu pour solde de tout compte et le bulletin de salaire rectificatif établi en conformité avec la présente décision. Le Conseil de Prud'hommes de Marseille se réserve la liquidation de l'astreinte;

- Condamné la SAS CERTICALL aux entiers dépens ;

- Ordornné le remboursement par la SAS CERTICALL aux organismes définis à l'article L1235-4 du code du travail, des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de six mois et dit qu'une copie certifiée conforme du présent jugement sera adressé par le greffe aux dits organismes ;

- Débouté la SAS CERTICALL de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Y statuant à nouveau,

CONSTATER que le licenciement de Madame [Z] repose sur une faute grave,

En conséquence,

A titre principal

DIRE ET JUGER Madame [Z] mal fondée en ses demandes,

DEBOUTER Madame [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Si par impossible, le Conseil [SIC] devait juger le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

REDUIRE dans de larges proportions le montant de l'indemnité sollicitée,

En tout état de cause,

Condamner Madame [Z] à verser à la société CERTICALL la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

Condanmer Madame [Z] aux dépens.»

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 4 août 2020, la salariée demande à la cour de :

«CONFIRMER LE JUGEMENT ENTREPRIS EN TOUTES SES DISPOSITIONS,

Fixer le salaire mensuel moyen sur les trois derniers mois de Madame [Z] à la somme de 2 106,36 €.

Dire et juger le licenciement pour faute grave prononcée à l'encontre de Madame [Z] sans cause réelle ni sérieuse.

Constater en tout état de cause que le licenciement prononcé à l'encontre de Madame [Z] est disproportionné par rapport aux faits qui lui sont reprochés.

En conséquence,

Condamner la société CERTICALL au paiement de :

- l'indemnité conventionnelle de licenciement, soit la somme de 6 622,14 €,

- l'indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 4 212,72 €,

- l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 421-27 €,

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 18 957,24 €,

- article 700 du Code de Procédure Civile : 2 500 €,

- intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts.

Dire et juger que la société CERTICALL sera condamnée aux entiers dépens.

Ordonner la rectification des attestations Pôle Emploi, certificat de travail et les bulletins de paie sous astreinte journalière de 50 € par jour de retard par document à compter de la notification de la décision à intervenir. »

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur le bien fondé du licenciement

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il était reproché à Mme [Z] :

-son absence le 13 mars 2017 à son poste de travail et l'absence de transmission dans les délais requis d'un justificatif,

- de nombreux dépassements de pause personnelle,

alors que son dossier disciplinaire comportait plusieurs rappels en matière d'écarts liés à l'assiduité notamment concernant les pauses : le 05/10/2015, un avertissement , le 4 février 2016 une mise à pied disciplinaire d'un jour, et le 9 décembre 2016, un nouvel avertissement.

La société invoque la désorganisation occasionnée par les retards de Mme [Z], lesquels ont persisté après l'entretien préalable au licenciement.

Elle considère que la faute de la salariée est caractérisée dès lors qu'elle n'a pas remis de justificatif de son absence dans un délai de 48h, violant ainsi l'article 4 du règlement intérieur et qu'en tout état de cause, le document transmis ne permettait pas de justifier une absence complète d'une journée.

La salariée indique avoir le 13 mars 2017 prévenu son supérieur hiérarchique dès 7h qu'elle n'était pas en mesure de sortir de son garage en raison d'une panne de courant et indique avoir tout fait pour obtenir un justificatif de la copropriété en ce sens, lequel a été remis le jour de l'entretien préalable, soit avant le licenciement.

Concernant le 2ème grief, elle invoque un non fonctionnement de l'outil de décompte du temps CISCO signalé lors de l'entretien préalable au licenciement mais également à sa hiérarchie.

C'est par des motifs exacts et pertinents adoptés par la cour que les premiers juges ont considéré d'une part, que l'absence du 13 mars 2017 ne pouvait être retenue comme une faute, la salariée ayant été confrontée à une situation de force majeure et d'autre part, que les retards cumulés de 14 minutes sur une période de trois mois ne constituaient pas une faute suffisamment sérieuse pour justifier la rupture.

La cour ajoute que :

- le mail adressé par Mme [Z] au service des ressources humaines en réponse à la mise en demeure du 23 mars 2017 de fournir un justificatif concernant son absence du 13 mars (pièce 17) était suffisamment explicite sur plusieurs points : dès 7h appel à la vigie pour prévenir de la coupure d'électricité l'empêchant de sortir de son garage, intervention d'une société en fin d'après-midi, ce qui explique son absence sur la journée entière, demande d'un justificatif à la copropriété laquelle lui oppose un délai d'atteinte de 21 jours,

- même si la lettre de la copropriété (pièce 5) ne cite pas de date, et a été remise dans un délai supérieur à celui du règlement intérieur, la salariée justifie par sa pièce 19 ne l'avoir reçue que le 29 mars ; elle a pu la présenter le lendemain lors de l'entretien préalable, venant confirmer ses explications sur l'arrêt de l'ascenseur et le blocage de la porte automatique des garages, et donc les circonstances l'ayant conduite à être absente ce jour-là (enfant en bas-âge, pas de transport possible depuis [Localité 3] jusqu'à son travail),

- tous les éléments avancés par Mme [Z] sont corroborés par des pièces : attestation de son supérieur hiérarchique, témoignages de voisines, lettre Enedis (pièces 10 à 13).

En conséquence, l'employeur ne justifie pas d'une faute imputable à la salariée pour l'absence reprochée et nonobstant le passé disciplinaire de Mme [Z] concernant des dépassements de pause, les écarts constatés n'étaient que de quelques minutes et il y a lieu de constater que la désorganisation invoquée n'est pas mentionnée dans la lettre de licenciement, de sorte qu'à eux seuls, ils ne pouvaient justifier le licenciement, cette sanction étant disproportionnée au regard de l'échelle des sanctions figurant au règlement intérieur.

Dès lors, la décision doit être confirmée en ce qu'elle a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement

C'est par une juste appréciation de la cause que les premiers juges ont fixé l'indemnisation de la salariée pour la perte de son emploi, au regard de son ancienneté de dix ans.

Les dispositions de la décision concernant les indemnités de rupture doivent être confirmées sauf à rectifier l'erreur matérielle sur l'indemnité compensatrice de préavis et l'incidence de congés payés.

Il convient de compléter la décision quant aux intérêts au taux légal sur les créances salariales et leur capitalisation et il n'y a pas lieu de modifier la décision quant aux autres mesures ordonnées.

Sur les frais et dépens

La société appelante succombant au principal doit s'acquitter des dépens d'appel, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre, payer à Mme [Z] la somme supplémentaire de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré SAUF s'agissant du montant de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents,

Statuant des chefs infirmés et Y ajoutant,

Condamne la société Certicall à payer à Mme [K] [Z] la somme de 4 212,72 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 421,27 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les intérêts au taux légal sur les créances salariales allouées par le conseil de prud'hommes et la cour doivent courir à compter du 28/03/2018,

Ordonne leur capitalisation à condition qu'ils soient dûs au moins pour une année entière,

Condamne la société Certicall à payer à Mme [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Certicall aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 20/03513
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;20.03513 ?
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