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03/07/2024 | FRANCE | N°21/13877

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 03 juillet 2024, 21/13877


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 03 JUILLET 2024



N° 2024/165







Rôle N° RG 21/13877 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIE5D







[W] [F]





C/



[P] [F]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Sabrina SETTEMBRE



Me Cécile ALBISSER

















Décisio

n déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal judiciaire de GRASSE en date du 18 Mars 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00608.





APPELANTE



Madame [W] [F]

née le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8] [Localité 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/0080...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 03 JUILLET 2024

N° 2024/165

Rôle N° RG 21/13877 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIE5D

[W] [F]

C/

[P] [F]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sabrina SETTEMBRE

Me Cécile ALBISSER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire de GRASSE en date du 18 Mars 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00608.

APPELANTE

Madame [W] [F]

née le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8] [Localité 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/008065 du 03/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représentée par Me Sabrina SETTEMBRE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [P] [F]

née le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 12], demeurant [Adresse 4] [Localité 5]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/03602 du 14/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représentée par Me Cécile ALBISSER, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 05 Juin 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Michèle JAILLET, Présidente

Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère

Mme Pascale BOYER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2024,

Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige

En 2009, [W] [F] et sa fille [P] [F] ont acquis en indivision un bien immobilier situé à [Localité 9] dont le prix a été financé par un apport personnel de 70.000 euros et un prêt souscrit par les deux acheteuses de 22.492 euros.

Le 26 septembre 2014, la mère et la fille ont acquis en indivision un appartement sis à [Localité 14], «[16] » et une cave pour un montant de 129.600 euros en principal, outre 16.050 euros de commission d'agence et de frais d'achat.

Elles ont souscrit pour le financer un prêt-relais de 56400 euros dans l'attente de la vente du bien acquis en 2009 et un emprunt immobilier souscrit par les deux indivisaires d'un montant de 74.084 euros auprès de la [11].

Les échéances du prêt étant prélevées sur un compte joint ouvert à leurs deux noms.

Par acte d'huissier de justice du 6 février 2019, [W] [F] a fait assigner [P] [F] devant le tribunal de grande instance de GRASSE afin d'obtenir le partage judiciaire de l'immeuble et l'attribution préférentielle à son profit, outre le paiement d'une indemnité d'occupation et le remboursement de créances.

Le 18 mars 2021, le tribunal judiciaire de GRASSE a, par jugement réputé contradictoire :

- ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et partage de l'indivision existant entre les parties sur un appartement et une cave située [16] à [Localité 9]

- désigné Maître [L] notaire à [Localité 17] pour procéder aux opérations

- désigné un juge commis,

- rappelé les pouvoirs et la mission du notaire commis,

- attribué préférentiellement le bien à [W] [F],

- débouté [W] [F] de sa demande de condamnation envers [P] [F] à lui payer une indemnité d'occupation,

- condamné [W] [F] à payer à [P] [F] une indemnité d'occupation de 325 euros par mois à compter du 16 juillet 2019 et jusqu'au partage effectif du bien indivis,

- débouté [W] [F] de sa demande de condamnation de [P] [F] à lui payer la somme de 885 euros en remboursement d'une indemnité d'assurance.

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit des avocats de la cause.

La décision a été signifiée par [P] [F] le 19 mai 2021.

[W] [F] a formé appel par déclaration par voie électronique du 30 septembre 2021, après a voir obtenu l'aide juridictionnelle totale le 3 septembre 2021 sur demande déposée le 12 mai 2021.

Le 5 octobre 2021, la décision d'aide juridictionnelle au bénéfice de [W] [F] a été modifiée au profit d'un nouveau conseil.

Le 14 octobre 2021, l'appelante a été avisée de la désignation d'un conseiller de la mise en état de la chambre 2-4.

Le 2 décembre 2021, la déclaration d'appel et l'avis d'avoir à signifier délivré par le greffe ont été notifiés par voie d'huissier de justice à [P] [F].

[P] [F] a constitué avocat le 27 janvier 2022.

Par ses premières conclusions du 9 février 2022, l'appelante demande à la cour de :

A titre principal

- REFORMER la décision entreprise le 18 mars 2021 en ce qu'elle a :

DIT que le notaire pourra si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s'adjoindre un expert choisi par les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis : Rappelle qu'à défaut, il peut procéder lui-même à l'évaluation des biens immobiliers et indemnités d'occupation ;

DEBOUTÉ Madame [W] [F] de sa demande de condamnation de Madame [P] [F] à lui payer une indemnité d'occupation,

CONDAMNE Madame [W] [F] à payer à Madame [P] [F] une indemnité d'occupation de 325€ par mois à compter du 16 juillet 2019 et jusqu'au partage effectif du bien indivis,

DEBOUTÉ Madame [W] [F] de sa demande de condamnation de Madame [P] [F] à lui payer la somme de 885€ en remboursement d'une indemnité d'assurance,

DIT n'y avoir lieu à indemnité en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit des avocats de la cause en application de l'article 699 du Code de procédure civile.

Il est demandé à la cour d'appel qu'elle réforme le jugement entrepris et qu'elle statue de la manière suivante :

- JUGER recevable la demande d'appel de Madame [W] [F] et, par conséquent,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à payer à Madame [W] [F] et donc à l'indivision [F], la somme de 61.213,44 euros qu'il conviendra d'inscrire dans les opérations de liquidation-partage,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à verser à Madame [W] [F] et donc à l'indivision [F], une indemnité d'occupation à compter du 26 septembre 2014 jusqu'à ce jour, soit la somme de 16.900 euros étant précisé que cette somme sera inscrite dans les opérations de liquidation-partage,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à payer à Madame [W] [F] et donc à l'indivision [F], la somme de 70.000 euros au titre de sa demande de remboursement d'apport personnel,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à payer à Madame [W] [F] et donc à l'indivision [F] la somme de 254 euros correspondant à sa part de crédit relatif au bien immobilier,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à payer à l'indivision [F] la somme de 885 euros au titre de l'indemnité indûment perçue par elle suite au dégât des eaux survenu en juillet 2018 et de voir inscrire aux opérations de liquidation-partage cette somme,

- JUGER que les sommes réglées par Madame '[W]' [F] seront à prendre en compte lors du partage de l'indivision et, par conséquent, dans le projet d'état liquidatif du Notaire,

- 'DIT' que le notaire pourra si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s'adjoindre un expert choisi par les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis :

- 'RAPPELLE' qu'à défaut, il peut procéder lui-même à l'évaluation des biens immobiliers et indemnités d'occupation ;

- JUGER que la mission du Notaire désigné devra être complétée en ce qu'il établira l'actif et le passif de l'indivision, les parts de chacun des co-invidisaires afin d'établir son acte de partage amiable et/ou projet d'état liquidatif en cas de désaccord entre les parties,

- 'DIT' que le notaire devra prendre en compte le paiement des crédits, taxes foncières et d'habitation, la prime d'assurance habitation, les charges ainsi que les factures d'eau et d'électricité afin d'établir son acte de partage amiable et/ou projet d'état liquidatif en cas de désaccord entre les parties,

- CONDAMNER Madame [P] [F] à payer à Maître Sabrina SETTEMBRE, conseil de Madame [W] [F], la somme de 2.500 euros HT, sur le fondement de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par ses premières conclusions du 18 mars 2022, l'intimée demande à la cour de :

A titre liminaire :

- ECARTER des débats les pièces adverses n°2 et 3 en raison de leur caractère frauduleux et mensonger ;

A titre principal :

- DEBOUTER les demandes, fins et conclusions de Madame [W] [F] sauf en ce qui concerne sa demande d'extension de mission du Notaire au calcul des comptes de l'indivision;

- CONFIRMER purement et simplement le jugement dont appel sur l'ensemble de ses chefs en ce qu'il a :

Ordonné le partage judiciaire de l'indivision composée entre Madame [W] [F] et Madame [P] [F] sur le bien immobilier composé d'un appartement et d'une cave sis [Adresse 8] « [16] » cadastré CP n°[Cadastre 6] sur la commune d'[Localité 9] ;

Désigné Maître [E] [L], Notaire à [Localité 17], [Adresse 7] pour procéder auxdites opérations ;

Dit que le bien immobilier composé d'un appartement et d'une cave sis [Adresse 8], « [16] » cadastré CP n°[Cadastre 6] sur la commune d'[Localité 9] sera attribué de manière préférentielle à Madame [W] [F] ;

Débouté Madame [W] [F] de sa demande de condamnation de Madame [P] [F] à lui payer une indemnité d'occupation ;

Condamné Madame [W] [F] à payer à Madame [P] [F] la somme de 325 € par mois à compter du 16 juillet 2019 et jusqu'au partage effectif du bien ;

Débouté Madame [W] [F] de sa demande de condamnation de Madame [P] [F] à lui payer la somme de 885 € en remboursement d'une indemnité assurance;

Y AJOUTER :

- ETENDRE la mission du Notaire sur l'établissement des comptes de l'indivision ;

- REJETER comme irrecevable la demande de Madame [W] [F] visant à

condamner Madame [P] [F] la somme de 61.213,44 euros qu'il conviendra d'inscrire dans les opérations de liquidation-partage.

En tout état de cause :

- REJETER comme infondée la demande de Madame [W] [F] visant à condamner Madame [P] [F] la somme de 61.213,44 euros qu'il conviendra d'inscrire dans les opérations de liquidation-partage.

A titre reconventionnel :

- CONDAMNER Madame [W] [F] au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER Madame [W] [F] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions du 30 décembre 2022, l'appelante maintient ses prétentions et ajoute les demandes suivantes :

- REJETER la demande d'écarter ses pièces 2 et 3,

- REJETER les demandes de l'intimée

- DEBOUTER l'intimée de ses demandes au titre des frais irrépétibles de procédure et des dépens.

Le 27 avril 2023, le conseil d'[P] [F] a répondu au conseiller de la mise en état que le notaire commis n'avait pu mener à bien sa mission en raison du refus de [W] [F] de faire visiter le bien indivis et d'accepter un partage.

En cours de procédure, le 25 août 2023, [W] [F] a saisi le juge des tutelles d'une demande de protection en faveur de sa fille.

Le 23 février 2024, le juge des tutelles du tribunal judiciaire de NIMES a dit n'y avoir lieu à ouverture d'une mesure de protection en faveur d'[P] [F].

Le greffe a avisé les parties le 18 janvier 2024 de la fixation de l'audience de plaidoiries à la date du 5 juin 2024.

Par ses dernières conclusions du 10 avril 2024, l'intimée maintient ses prétentions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mai 2024.

Motifs de la décision

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Ne constituent pas, par conséquent, des prétentions au sens de l'article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' ou encore à 'prendre acte' de sorte que la cour n'a pas à y répondre.

Il n'y a donc pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation'.

En application de cet article, la cour n'est saisie que des prétentions figurant dans le dispositif des conclusions des parties.

Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.

En l'espèce, le jugement n'est pas critiqué pour ce qui l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision, la désignation du notaire et sa mission à l'exception de l'évaluation des biens et du complément sollicité, la désignation du juge commis, l'attribution préférentielle du bien indivis à [W] [F].

Ces chefs sont désormais définitifs.

En revanche, alors qu'il est noté en en-tête que les deux parties sont représentées par des avocats devant le tribunal judiciaire de GRASSE, cette juridiction a qualifié sa décision de 'réputée contradictoire'.

Dans la mesure où cette qualification n'est fondée sur aucune motivation, il s'agit manifestement d'une erreur matérielle que la cour a le pouvoir de réparer.

Il convient, en conséquence, en application des dispositions de l'article 462 du code de procédure civile, d'ordonner la rectification de la décision déférée en ce qui concerne sa qualification en remplaçant les mots 'réputée contradictoire' par les mots 'contradictoire'

Sur la demande d'écarter des débats les pièces 2 et 3 de l'appelante

L'intimée soutient que le courrier produit en pièce 2 qui lui est attribué par lequel elle proposerait de céder gratuitement à sa mère la majorité de sa part indivise du bien a été écrit par sa mère qui a imité son écriture. Elle précise que sa mère a déjà commis de tels faits pour lesquels elle a porté plainte.

Elle indique qu'à la date du courrier, il existait des relations très conflictuelles entre elles depuis l'année 2017.

Si la pièce 2 devait être prise en compte, elle sollicite une expertise graphologique.

Elle sollicite aussi que soit écartée la plainte du mois de novembre 2018 qui reproduit des déclarations de [W] [F] qui sont fausses relativement à des violences qu'elle aurait subies de la part de sa fille et de son compagnon.

Elle rappelle que sa mère a tenté à deux reprises sans succès d'obtenir son placement sous tutelle en 2018 et en 2023 afin de conserver une emprise sur elle et de s'accaparer son petit-fils.

Elle rappelle les fragilités psychiatriques de sa mère qui met en oeuvre de procédures judiciaires dans le seul but de lui nuire.

Elle indique qu'elle n'a pas eu connaissance de la procédure en paiement de charges initiée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble indivis ayant donné lieu à un jugement de condamnation le 22 février 2024 car sa mère a fait croire qu'elle la représentait.

L'appelante soutient que la plainte pénale déposée pour faux à son encontre, qui a été classée sans suite ne constitue pas une preuve de la fausseté de ces pièces.

Elle atteste de leur véracité.

L'article 287 du code de procédure civile : 'Si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres.'

La pièce 2 de l'appelante est constituée d'un courrier manuscrit attribué à [P] [F] datée du 13 décembre 2017 adressé à un notaire mentionnant son intention de céder gratuitement à sa mère sa part indivise en gardant 10 %.

La signature apposée sur ce document ne correspond pas du tout à celles portées par [P] [F] sur l'acte notarié d'achat de l'appartement en 2014 et les procès-verbaux d'audition par la police d'[Localité 9] et la gendarmerie de [Localité 15] produites par [P] [F] dans le cadre de la procédure.

Elle sera donc écartée des débats.

La pièce 3 de l'appelante est la copie d'un procès-verbal d'audition de [W] [F] par un policier du commissariat de police d'[Localité 9] du 27 novembre 2018 dénonçant des violences à son encontre de la part d'[P] [F] et son compagnon.

L'intimée ne conteste pas la validité du document mais la réalité des faits dénoncés.

Il n'y a pas lieu d'écarter des débats cette pièce dont la cour appréciera l'étendue de la force probante concernant les faits dénoncés qui ne constituent pas l'objet du litige.

Sur les demandes de l'extension de la mission du notaire

Elle inclut aussi la demande de l'appelante de 'JUGER que les sommes réglées par Madame [W] [F] seront à prendre en compte lors du partage de l'indivision et, par conséquent, dans le projet d'état liquidatif du Notaire',

L'appelante a visé dans sa déclaration d'appel le chef du jugement donnant mission au notaire d'évaluer les biens et, au besoin, de recourir à un expert pour ce faire.

Cependant, elle sollicite dans ses conclusions que cette mission soit mentionnée et elle demande qu'elle soit complétée par un chef de mission consistant à établir la consistance de l'actif et du passif de l'indivision.

L'intimée sollicite également que la mission du notaire soit étendue à l'établissement des comptes de l'indivision.

Il convient de faire droit à cette demande dans la mesure où ces chefs de mission ne figure pas spécifiquement dans le dispositif de la décision bien qu'ils fassent partie du préalable nécessaire à l'établissement d'un projet d'état liquidatif.

Il n'est pas nécessaire de réformer la décision de première instance mais seulement de la compléter en y ajoutant la mission de déterminer l'actif et le passif de l'indivision et d'établir les comptes de l'indivision.

Sur la question de la recevabilité des demandes

La demande de l'appelante au titre de la somme de 61213 euros.

L'intimée soutient qu'il s'agit d'une prétention nouvelle en appel qui n'a pas été soumise au juge de première instance.

L'appelante n'a pas répondu à la question de l'irrecevabilité de cette prétention.

Elle formule la demande en paiement de cette somme à son profit 'et donc au profit de l'indivision' au titre des dépenses qu'elle aurait exposées au-delà de sa part dans le bien indivis pour sa conservation et son entretien depuis 2014, pour le paiement des frais d'agence lors de l'acquisition et du coût du prêt-relais.

Ces demandes ne figuraient pas dans les dernières conclusions de [W] [F] en première instance.

Elles ne sont pas rendues nécessaires par l'évolution du litige depuis que le jugement a été rendu et elles ne constituent pas une réponse aux demandes adverses puisqu'elles figuraient dans les premières conclusions de l'appelante.

Elles sont donc nouvelles au stade de l'appel au sens de l'article 564 du code de procédure civile et donc irrecevables.

Au surplus, il appartient à [W] [F] de faire valoir devant le notaire commis en produisant les justificatifs nécessaires les créances dont elle disposerait envers l'indivision au titre des dépenses faites pour la conservation de l'immeuble ou son entretien.

La demande de remboursement de l'apport personnel de 70.000 euros

L'intimé soutient que cette somme ne figurait pas dans les prétentions de [W] [F] traitées en première instance car elle n'était pas mentionnée dans le dispositif des conclusions.

L'appelante n'a pas répondu concernant cette prétention.

Le premier juge a, en effet, mentionné qu'il n'était pas saisi de la demande de ce chef car elle n'était pas reprise dans le dispositif des conclusions de [W] [F].

La demande de [W] [F] devant la cour de condamner [P] [F] à lui verser cette somme est donc nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile. En application de ce texte, elle sera déclarée irrecevable.

Sur la demande de l'appelante au titre du paiement du prêt immobilier

Elle sollicite que [P] [F] soit condamnée à verser la somme de 254 euros par mois correspondant à la part qui doit être mise à sa charge dans les mensualités du prêt immobilier souscrit en 2014.

Cette prétention est nouvelle en appel alors que les faits qui la fondent existaient à la date de la procédure de première instance.

Elle sera déclarée irrecevable au stade de l'appel en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.

Sur la demande d'indemnité d'occupation de l'appelante

L'appelante soutient que sa fille a joui privativement du bien indivis du mois de septembre 2014 au mois de février 2019.

Elle précise qu'elle-même vivait à [Localité 12] pendant cette période.

Elle invoque une valeur locative de 650 euros par mois.

L'intimée soutient qu'elle a vécu avec sa mère successivement dans chacun des biens acquis en indivision jusqu'à son départ au mois de décembre 2017 pour vivre avec un nouveau compagnon à [Localité 15] après la dégradation des relations avec sa mère.

Elle réplique que les pièces produites ne sont pas probantes car il s'agit de courriers qui lui ont été envoyés à l'adresse du bien indivis par des tiers avant que son changement d'adresse soit enregistré.

Elle soutient que sa mère conserve un logement social à [Localité 12] mais réside en réalité dans le bien indivis ainsi que le prouvent les mains courantes déposées à [Localité 9], les relevés bancaires, les courriers administratifs reçus.

Elle en déduit que ces éléments prouvent, à tout le moins, que sa mère a toujours eu accès à l'appartement indivis.

L'article 815-9 du code civil prévoit que chaque indivisaire peut user et jouir du bien dans la mesure compatible avec les droits des autres indivisaires et que l'indivisaire qui jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Il appartient à celui qui invoque l'occupation exclusive de la prouver.

Dans le corps de ses conclusions, [W] [F] expose que la somme de 16900 euros correspond à la période du mois de septembre 2014 au mois de février 2019, soit 54 mois.

Cette somme représente la moitié de l'indemnité d'occupation calculée pendant 54 mois sur la base de 650 euros par mois.

[P] [F] produit des courriers de POLE EMPLOI adressés à [W] [F] en date du 4 avril 2017 faisant état d'une demande d'allocations et d'une recherche dans le libre service à [Localité 9].

Dans les mains courantes déposées par [W] [F] auprès du commissariat d'[Localité 9] [Localité 14] les 28 août 2017 et 14 décembre 2017, elle a indiqué demeurer à l'adresse du bien indivis et y héberger sa fille et son petit-fils.

Dans le procès-verbal de recueil de sa plainte le 27 novembre 2018 auprès du commissariat d'[Localité 9], [W] [F] indique demeurer à l'adresse du bien indivis.

Dans le courrier par lettre recommandée du 17 décembre 2018 dans lequel elle sollicite le partage amiable, [W] [F] se domicilie, sur la preuve de dépôt, à l'adresse du bien indivis à [Localité 9].

Par ailleurs, elle envoie le courrier à sa fille demeurant à [Localité 15].

Alors que [W] [F] affirme avoir toujours eu son domicile à [Localité 12], elle s'est domiciliée elle-même à plusieurs reprises dans des déclarations aux policiers ou dans des courriers à l'adresse du bien indivis en 2017.

L'attestation d'assurance d'un appartement à [Localité 12] de 2014 à 2022 ne permet pas d'apporter la preuve qu'elle y demeurait pendant cette période.

La facture de consommation d'[13] datée du 12 septembre 2021 a été envoyée à l'adresse de [Localité 12] mais concerne la consommation du bien indivis.

[P] [F] établit, par les pièces produites, qu'à compter du mois de décembre 2017 elle demeurait à [Localité 15] avec son compagnon.

Il ressort de ces pièces, que, contrairement à ses affirmations, [W] [F] a vécu dans le bien indivis avec sa fille, ainsi que celle-ci le relate devant les policiers et les gendarmes, depuis l'acquisition de ce bien jusqu'au mois de décembre 2017.

En l'absence de preuve d'une occupation exclusive par [P] [F] du bien indivis, il convient de confirmer la décision de rejet du premier juge.

Sur l'indemnité d'occupation au profit d'[P] [F]

L'appelante a formé appel du chef du jugement l'ayant condamné à verser à sa fille une indemnité d'occupation.

Elle sollicite la réformation de ce chef et le rejet de cette demande.

L'intimée soutient que sa mère occupe exclusivement l'appartement depuis le mois de janvier 2018 et qu'un constat d'huissier de justice de 2019 le prouve.

Elle en déduit qu'elle est débitrice d'une indemnité d'occupation au profit de l'indivision à compter de la date du constat.

[P] [F] produit un constat d'huissier de justice dont il ressort que les clés qu'elle détient ne permettent pas d'ouvrir l'appartement indivis.

La facture de consommation électrique du 12 septembre 2021 produite par [W] [F] établit que ce logement est habité à cette date.

Il est établi par [P] [F] qu'elle ne demeure plus dans le bien indivis depuis le mois de décembre 2017.

Il convient de déduire de ces éléments une occupation exclusive par [W] [F] du studio indivis et son obligation à régler une indemnité d'occupation d'un montant de 650 euros par mois, selon la valeur locative qu'elle a elle-même fixée. Elle en est redevable à compter du mois de juillet 2019 jusqu'au jour du partage ou de la vente du bien.

Cependant, l'indemnité d'occupation n'est pas due aux autres indivisaires mais à l'indivision et entre dans les comptes à faire en tant que revenus de l'indivision. Elle ne peut faire l'objet d'une condamnation à paiement au profit de l'indivisaire non occupant.

Il convient, en conséquence, de réformer la décision du juge de première instance ayant fait droit à la demande en paiement de cette indemnité, constituée de la moitié de la valeur locative, à [P] [F].

La demande de ce chef sera rejetée.

Sur la demande de [W] [F] au titre de l'indemnité d'assurance

L'appelante soutient qu'[P] [F] a perçu l'indemnité versée par l'assurance du bien à la suite d'un dégât des eaux du mois de juillet 2018 alors qu'elle devait profiter à l'indivision.

L'intimée réplique que cette dépense fait partie des comptes de l'indivision.

Elle indique qu'elle a perçu uniquement 531 euros et que le chèque reçu de l'assureur a été encaissé sur le compte de l'indivision.

Elle rappelle que sa mère avait tenté d'en obtenir le versement à son profit en imitant sa signature.

Elle conclut que sa mère ne prouve pas le versement de 885 euros sur un compte personnel.

Il ressort de la pièce 14 de l'appelante et de la pièce 12 de l'intimée que l'assureur [10] a écrit à [P] [F], le 20 août 2018 et le 3 septembre 2018, pour lui remettre des chèques de 330 euros et 531 euros, en règlement de l'indemnité due en réparation du sinistre dégât des eaux de l'appartement indivis du 27 août 2017.

Le relevé du compte joint entre les indivisaires contient, au 13 septembre 2018, la remise du chèque de 531 euros.

Le compte de destination de la somme de 330 euros n'est pas connu à travers les pièces produites.

Il n'est donc pas établi qu'[P] [F] a profité des fonds destinés à l'indivision.

L'appelante prétend justifier, par la pièce 7, qu'elle a réglé le montant des travaux. Cependant, cette pièce est constituée d'un devis daté du 27 juillet 2018, d'une attestation d'assurance habitation par [10] du 26 décembre 2018 et d'un document intitulé 'Encaissements' contenant des caractères illisibles.

Les signatures et la mention d'un règlement en main propre apposées sur le devis par une main inconnue, ne suffisent pas à établir que [W] [F] a réglé cette somme sur ses fonds personnels.

Il convient, en conséquence, de confirmer la décision de rejet de cette demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et en ce qu'il a rejeté les demandes au titre des frais irrépétibles de procédure.

L'appelante succombant en son appel, elle supportera les dépens de cette instance..

Il est inéquitable de laisser à la charge de [P] [F] les frais exposés et non compris dans les dépens.

[W] [F] sera condamnée à lui régler la somme de 3000 euros à ce titre.

La demande de ce chef de [W] [F] sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant après débats publics par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort :

Ordonne la rectification pour erreur matérielle de la décision déférée ;

Dit que , dans le dispositif, il convient de remplacer les mots 'réputée contradictoire' par le mot 'contradictoire' ;

Déclare irrecevables comme étant nouvelles en appel :

- la demande en paiement de [W] [F] portant sur la somme de 61.213,44 euros ;

- la demande de [W] [F] en paiement de la somme de 70.000 euros par [P] [F] au titre de remboursement de son apport lors de l'acquisition du bien indivis ;

- la demande de [W] [F] de condamnation d'[P] [F] à verser la somme de 254 euros par mois correspondant à la part qui doit être mise à sa charge dans les mensualités du prêt immobilier ;

Réforme la décision de première instance en ce qu'elle a condamné [W] [F] à payer à [P] [F] la somme de 325 euros au titre d'indemnité d'occupation du bien indivis à compter du 16 juillet 2019 ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Rejette la demande en paiement d'une indemnité d'occupation par Madame [P] [F] à l'encontre de [W] [F] ;

Confirme le jugement pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Dit que le notaire commis aura pour mission de procéder à la détermination de la consistance et de la valeur de l'actif et du passif de l'indivision et d'établir les comptes de l'indivision ;

Condamne Madame [W] [F] aux dépens ;

Condamne Madame [W] [F] à verser à Madame [P] [F] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ;

Rejette la demande de [W] [F] au titre des frais irrépétibles de procédure ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente, et par Madame Fabienne NIETO, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 21/13877
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;21.13877 ?
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