COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative
ORDONNANCE
DU 02 JUILLET 2024
N° 2024/955
N° RG 24/00955 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNJ6Z
Copie conforme
délivrée le 02 Juillet 2024 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 01 Juillet 2024 à 10H35.
APPELANT
Monsieur [F] [O]
né le 15 Septembre 1989 à [Localité 8] (Algérie) (99)
de nationalité Algérienne
Comparant en personne
assisté de Maître Jazz CERALINE, avocat au barreau de Aix-en-Provence, commis d'office, et de Madame [H] [S], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;
INTIMÉ
Monsieur le Préfet des Bouches-du-Rhône
Avié et non représenté;
MINISTÈRE PUBLIC
Avisé et non représenté;
******
DÉBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 02 Juillet 2024 devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Cécilia AOUADI, Greffière.
ORDONNANCE
Réputée contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2024 à 14h16,
Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Mme Cécilia AOUADI, Greffière.
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 28 janvier 2023 par le préfet des Bouches-du-Rhône, notifié à M. [F] [O] le même jour ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 2 mai 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône notifiée à M. [F] [O] le même jour à 12h00;
Vu l'ordonnance du 1er juillet 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de M. [F] [O] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de 15 jours ;
Vu l'appel interjeté le 01 Juillet 2024 à 16h27 par M. [F] [O] ;
M. [F] [O] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare :
'J'habite [Adresse 4] dans le [Localité 5], cela fait 7 ans que j'y habite. Chez un ami, Monsieur [K] [X]. Le bail est à son nom. Ma mère est malade, elle est en ALGERIE, je veux y retourner mais je n'ai pas le laissez-passer. Et je suis tombé malade au CRA. Je suis parti au PORTUGAL et je suis revenu mais je n'ai aucun document. Je n'ai pas compris l'assignation à résidence. Je le jure, je ne dis que la vérité j'irai en ESPAGNE ou au PORTUGAL. Le consul d'Algérie m'a dit qu'il fallait avoir un passeport mais je n'en ai pas. J'ai pris l'initiative d'aller voir le consul. Je ne suis pas au courant des condamnations.'
Son avocate a été régulièrement entendue. Elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et la remise en liberté du retenu ou, à défaut, son assignation à résidence. A ces fins, elle fait valoir qu'aucune des conditions de l'article L742-5 du CESEDA n'est remplie, soulignant que l'administration ne démontre pas que des documents de voyage seront délivrés à bref délai et qu'aucun acte suceptible de constituer une menace à l'ordre public n'a été commis par l'appelant durant les quinze derniers jours de rétention.
Le préfet des Bouches-du-Rhône, bien que régulièrement convoqué, n'était ni présent ni représenté.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la recevabilité de l'appel
Aux termes des dispositions de l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), 'L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l'étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. Lorsque l'étranger n'assiste pas à l'audience, le délai court pour ce dernier à compter de la notification qui lui est faite. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.
Le ministère public peut interjeter appel de cette ordonnance selon les mêmes modalités lorsqu'il ne sollicite pas la suspension provisoire.'
Selon les dispositions de l'article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, 'A peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel qui l'enregistre avec mention de la date et de l'heure.'
L'ordonnance querellée a été rendue le 1er juillet 2024 à 10h35 et notifiée à M. [F] [O] à ces mêmes date et heure. Ce dernier a interjeté appel le même jour à 16h27 en adressant au greffe de la cour une déclaration d'appel motivée. Son recours sera donc déclaré recevable.
2) Sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L742-5 du CESEDA
Selon les dispositions de l'article L742-5 du CESEDA, 'A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.'
Selon les dispositions de l'article L741-3 du CESEDA, 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'
Le représentant de l'Etat justifie de diligences tendant à l'exécution de la mesure d'éloignement. Ainsi, a-t-il saisi par mail du 2 mai 2024 à 16h21, soit quatre heures après le placement en rétention, les autorités consulaires algériennes aux fins de délivrance d'un laissez-passer, étant relevé que le consulat d'Algérie de [Localité 9] avait formellement reconnu M. [O] comme ressortissant algérien le 27 mars 2024. Les 7 et 30 mai, l'administration a sollicité des routings de vol. Elle a ensuite relancé le consulat d'Algérie les 3 et 18 juin 2024 aux fins de délivrance de documents de voyage. Ces démarches constituent des diligences en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement.
En l'espèce, le préfet fonde sa demande de prolongation exceptionnelle de la rétention sur la menace à l'ordre public que représente l'appelant, rappelant ses condamnations des 31 mars 2023 et 10 août 2023 par le tribunal correctionnel de Marseille à deux peines de cinq mois d'emprisonnement pour des faits de vol et vol aggravé par deux circonstances.
Il importe de rappeler que les critères visés à l'article L742-5 du CESEDA ne sont pas cumulatifs. En l'état, les deux condamnations récentes de M. [O], susvisées, à des peines importantes pour des faits d'atteinte aux biens, établissent que ce dernier représente une menace réelle et actuelle à l'ordre public, ladite menace n'ayant pas à être apparue durant les quinze derniers jours de rétention s'agissant de l'examen d'une demande de troisième prolongation.
Le moyen sera donc rejeté.
3) Sur les demandes de mise en liberté et d'assignation à résidence
Selon les dispositions de l'article L743-13 alinéas 1 et 2 du CESEDA, 'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.
L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.
Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'
Aux termes des dispositions de l'article L741-3 du CESEDA, 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'
L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.
En l'espèce, M. [O] ne dispose pas d'un passeport original en cours de validité. Ce seul élément constitue un obstacle dirimant à l'octroi judiciaire d'une mesure d'assignation à résidence. En outre, s'il prétend disposer d'un logement dans le [Localité 5], il ne produit aucun document au soutien de ses dires.
Dès lors, faute de garanties de représentation, ses demandes de mise en liberté et d'assignation à résidence seront rejetées.
Aussi, l'ordonnance entreprise sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Déclarons recevable l'appel formé par M. [F] [O],
Rejetons les moyens soulevés,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 1er Juillet 2024,
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier Le président
Reçu et pris connaissance le :
Monsieur [F] [O]
né le 15 Septembre 1989 à [Localité 8] (Algérie) (99)
de nationalité Algérienne
assisté de , interprète en langue arabe.
Interprète
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-11, Rétentions Administratives
[Adresse 10]
Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]
Courriel : [Courriel 6]
Aix-en-Provence, le 02 Juillet 2024
À
- Monsieur le préfet des Bouches-du-Rhône
- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 7]
- Monsieur le procureur général
- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE
- Maître Jazz CERALINE
NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE
J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 02 Juillet 2024, suite à l'appel interjeté par :
Monsieur [F] [O]
né le 15 Septembre 1989 à [Localité 8] (Algérie) (99)
de nationalité Algérienne
Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.
Le greffier,
VOIE DE RECOURS
Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.