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28/06/2024 | FRANCE | N°23/12280

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-2, 28 juin 2024, 23/12280


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2



ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2024



N° 2024/128













Rôle N° RG 23/12280 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL64U







S.A.S. MCO





C/



[J] [L]

















Copie exécutoire délivrée

le : 28 Juin 2024

à :



Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Alexandre ACQUAVIVA, avocat au barreau d'AIX-E

N-PROVENCE

(Vest 16)

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Septembre 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° R 23/00295.





APPELANTE



S.A.S. MCO, demeurant [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 28 JUIN 2024

N° 2024/128

Rôle N° RG 23/12280 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL64U

S.A.S. MCO

C/

[J] [L]

Copie exécutoire délivrée

le : 28 Juin 2024

à :

Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Alexandre ACQUAVIVA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vest 16)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Septembre 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° R 23/00295.

APPELANTE

S.A.S. MCO, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Pascale MAZEL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [J] [L], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Alexandre ACQUAVIVA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2024, délibéré prorogé au 28 Juin 2024

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2024

Signé par Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [J] [L] - né le 26 mars 1969 - a été embauché le 18 mai 2015 en qualité de gardien et régisseur dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet en date du 8 mai 2015 par la société par actions simplifiée MCO, société présidée par M. [Y] [U] et ayant pour activité principale l'organisation de congrès au sein de la [Adresse 3] située sur la [Adresse 1] à [Localité 2], où le salarié bénéficie également d'un logement.

Le salarié n'a fait l'objet d'aucun examen médical avant le 7 juillet 2023, date à laquelle il a été reçu par le médecin du travail qui a délivré un avis d'aptitude avec la proposition d'adaptation de son poste suivante :

« A partir du 07/07/2023

Pas de manutention lourde ou répétitive (charge

Manutention en binôme si besoin. »

Contestant cet avis en faisant valoir que les restrictions ainsi apportées ne permettaient pas à M. [L] d'exécuter pleinement et normalement son travail, la société MCO a saisi la formation des référés du conseil des prud'hommes de Marseille le 19 juillet 2023 afin d'obtenir la désignation d'un médecin expert chargé de faire une contre-expertise de l'état de santé du salarié.

Vu l'ordonnance en date du 21 septembre 2023 qui l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée à payer à M. [L] la somme de 700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Vu la déclaration d'appel de la société MCO en date du 2 octobre 2023,

Vu ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 22 mars 2024, par lesquelles elle demande à la cour d'infirmer la décision déférée et de :

- écarter des débats, les pièces adverses n° 6, 7, 8 et 9 et les conclusions qui y font référence,

- condamner M. [L] à lui payer la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée en violation de l'article 9 du code de procédure civile et de l'article 226-1 du code pénal, outre la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour vol de documents,

- désigner le médecin inspecteur territorialement compétent, ou à défaut d'un expert judiciaire spécialisé en médecine du travail, avec la mission suivante :

- examiner M. [L],

- procéder à toute mesure utile, avec l'adjonction, au besoin, du concours de tiers,

- dire si l'état de santé du salarié et les réserves émises sur l'avis d'aptitude du 7 juillet 2023 lui permettent d'exercer la fonction de régisseur,

- fixer le délai dans lequel le médecin inspecteur et/ou l'expert judiciaire spécialisé en médecine du travail devra procéder à sa mission et déposer son rapport,

- dire que les frais d'expertise seront mis provisoirement à sa propre charge dans l'attente de la décision sur le fond qui sera rendue,

- réserver les dépens,

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 mars 2024 pour M. [L] aux fins de :

- confirmation de l'ordonnance déférée ce qu'elle a débouté la société MCO de toutes ses demandes et en ce qu'elle l'a condamnée à payer à M. [L] la somme de 700 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejet de toutes les demandes de la société MCO,

- condamnation de cette dernière à lui payer en cause d'appel la somme de 2.500 € sur ce dernier fondement,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites susvisées.

A l'issue de l'audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue le 31 mai 2024 par mise à disposition au greffe. Elles ont été informées par le greffe du prorogé de ce délibéré au 28 juin 2024.

SUR CE :

Sur la recevabilité des pièces produites par le salarié intimé :

Dans ses conclusions n°3 en date du 22 mars 2024, la société MCO demande à la cour d'écarter un certain nombre de pièces parmi celles produites par M. [L] le 24 janvier 2024 au soutien de ses conclusions n° 2, en affirmant qu'il les a obtenues illégalement, s'agissant de photographies prises à l'insu des personnes photographiées (sa pièce 6) ou d'un rapport confidentiel destiné à l'assistance publique, le contrat de prestations de jardinage et celui de prestations de nettoyage qu'il a nécessairement volé à la société DM Event (ses pièces 12 et 13).

Cependant, d'une part la cour observe que l'employeur appelant ne motive pas sa demande de voir écarter également les pièces adverses numérotés 7, 8 et 9 pourtant visées dans le dispositif de ces écritures.

D'autre part et comme justement relevé le salarié intimé, l'employeur ne rapporte la preuve que les pièces dont il demande le retrait ont été obtenues illégalement, notamment par le biais d'un vol de documents.

S'agissant du rapport d'activité de la [Adresse 3] (pièce 9 du salarié), le caractère confidentiel de ce document n'est pas démontré. M. [L] expose pour sa part qu'il y est photographié en page 7 - ce qui est exact - et qu'il y a eu librement accès. Le rapport en cause le mentionne d'ailleurs comme faisant partie de l'équipe de DM Event qui est la société d'exploitation du site, laquelle est également dirigée par M. [Y] [U], ce qui justifie qu'il en ait été destinataire.

De surcroît, dans un arrêt d'assemblée plénière rendu le 22 décembre 2023 (n°20-20.648), confirmé en matière sociale par un arrêt du 17 janvier 2024 (n°22-17.474), la Cour de cassation admet dorénavant que « Dans un procès civil, l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ».

Or, en l'espèce, M. [L] expose avoir tenté de démontrer qu'il avait effectivement la possibilité d'être assisté par d'autres salariés (en prenant soin de masquer leurs visages) comme le suggère l'avis du médecin du travail, ou par d'autres prestataires, dans l'exécution des tâches qui lui étaient confiées,que cette production était indispensable à l'exercice du droit à la preuve et que les atteintes invoquées étaient strictement proportionnées au but poursuivi.

Enfin, la société MCO ne peut se prévaloir de préjudices subis par des tiers (la société DM Events ou M. [S] [N]) pour s'opposer aux productions de certaines pièces par le salarié intimé ou pour obtenir l'octroi de dommages et intérêts.

En conséquence, la cour rejettera ses prétentions.

Sur la demande de désignation d'un médecin inspecteur ou d'un expert judiciaire :

Conformément à l'article L.4624-7 du code du travail issu de l'article 8 de l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017, le salarié ou l'employeur peut saisir le conseil de prud'hommes selon la procédure accélérée au fond d'une contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L.4624-2, L.4624-3 et L.4624-4. Le médecin du travail, informé de la contestation par l'employeur, n'est pas partie au litige. Le conseil de prud'hommes peut confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence. Celui-ci, peut, le cas échéant, s'adjoindre le concours de tiers. A la demande de l'employeur, les éléments médicaux ayant fondé les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail peuvent être notifiés au médecin que l'employeur mandate à cet effet. Le salarié est informé de cette notification. La décision du conseil de prud'hommes se substitue aux avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés.

L'article R.4624-45 précise qu'en cas de contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications reposant sur des éléments de nature médicale émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L.4624-7, le conseil de prud'hommes statuant selon la procédure accélérée au fond est saisi dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail.

Le conseil de prud'hommes statue selon la procédure accélérée au fond dans les conditions prévues à l'article R. 1455-12.

Dans un avis publié en date du 17 mars 2021 (n°21-70.002), la chambre sociale de la Cour de cassation a indique que « la contestation dont peut être saisi le conseil de prud'hommes, en application de l'article L.4624 -7 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n 2017-1387 du 22 septembre 2017, doit porter sur l'avis du médecin du travail. Le conseil des prud'hommes peut, dans ce cadre, examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis.

Il substitue à cet avis sa propre décision, après avoir le cas échéant ordonné une mesure d'instruction.

Il ne peut déclarer inopposable à une partie l'avis rendu par le médecin du travail ».

Selon le commentaire de cet avis à la lettre de la chambre sociale (n° 9, mars avril 2021, p.8) :

La chambre sociale précise que dès lors qu'il est saisi d'une contestation portant sur l'avis du médecin du travail, le conseil de prud'hommes peut "examiner tous les éléments ayant conduit à cet avis" : à cet égard, la juridiction peut estimer que ces éléments sont insuffisants, notamment parce que le médecin du travail se serait abstenu de procéder à l'une ou plusieurs des investigations prévues par l'article R.4624-42 du code du travail : une telle irrégularité, si elle ne permet pas au conseil de prud'hommes de déclarer l'avis "inopposable", peut toutefois justifier que le conseil de prud'hommes, s'il l'estime nécessaire, ordonne une mesure d'instruction confiée au médecin-inspecteur du travail, comme l'article L.4624-7 du code du travail lui en laisse la possibilité.

Par conséquent, la chambre sociale, dans la réponse à la demande d'avis présentée par le conseil de prud'hommes de Cayenne, n'exclut pas tout examen de la procédure suivie par le médecin du travail ; mais elle considère que cette question s'insère dans l'appréciation, par le juge saisi d'une contestation sur l'avis lui-même, des éléments ayant conduit le médecin du travail à conclure à l'inaptitude du salarié : et c'est sur cette question de fond, l'aptitude du salarié à occuper son poste de travail, que le juge saisi de la contestation en application de l'article L.4624-7 du code du travail devra se prononcer, sa décision se substituant sur ce point à celle du médecin du travail.

Par ailleurs, la loi 'travail' du 8 août 2016 a introduit pour la première fois une définition de l'inaptitude et il résulte ainsi de l'article L.4624-4 du code du travail que le salarié est inapte lorsque le médecin du travail constate qu'« aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que l'état de santé du travailleur justifie un changement de poste » .

Dans tous les autres cas, comme le souligne le rapporteur dans l'affaire ayant donné lieu à l'avis du 17 mars 2021, le salarié est médicalement apte quand bien même son poste devrait être aménagé, adapté ou transformé ou son temps de travail aménagé.

Dans son souci de maintien du salarié dans l'emploi, le législateur a donc envisagé l'inaptitude comme la solution ultime, lorsque - après les possibilités aient été envisagées - la recherche des possibilités d'aménagement d'adaptation ou de transformation du poste antérieurement occupée s'est avérée vaine.

L'esprit des textes est en effet d'imposer un véritable dialogue, tant entre le médecin et l'employeur qu'entre le médecin et le salarié concerné afin de trouver une solution consensuelle de reclassement.

En l'espèce, le conseil des prud'hommes de Marseille statuant en la forme des référés sur la contestation de la société MCO a constaté que cette société listait un ensemble de tâches effectuées par M. [L] nécessitant le port de charges supérieures à 5 kg, sans toutefois justifier du poids que faisaient réellement ces charges et la répartition du temps que l'intéressé passait à l'exécution desdites tâches.

Au soutien de son appel, l'employeur réitère sa contestation de l'avis d'aptitude émis par le médecin du travail en faisant valoir que :

- la simple lecture du contrat de travail du salarié apporte la preuve que le port de charges constitue une des prestations les plus courantes qu'il doit réaliser en sa qualité de gardien et de régisseur, tâches qui ne sont pas limitatives et qui sont expressément indiquées dans son contrat de travail,

- le 6 septembre 2023, le médecin du travail avait sollicité un avis spécialisé et un bilan fonctionnel des capacités résiduelles du salarié souhaite également le confronter avec l'étude de poste réalisée par un ergonome le 19 juillet 2023, ce qui démontrait que le médecin du travail émettait des réserves sur l'aptitude physique de M. [L] à exercer son emploi de régisseur,

- les tâches qui lui incombent impliquant un port de charges sont nombreuses et répétées et sont réalisées sur de longues distances (effectuer toutes les réparations courantes, acheminer les poubelles aux containers se trouvant sur la [Adresse 1] à plus de 500 mètres de la [Adresse 3], transporter la caisse à outils, procéder au stockage du matériel et à son rangement),

- le salarié est le seul régisseur et ne dispose pas d'assistant,

- aucune des autres personnes employées n'est habilitée à effectuer du transport de matériel nécessaire à l'organisation des événements ou à aider M. [L] dans les travaux de jardinage, d'entretien ou de bricolage lui incombant.

La cour constate cependant que la société MCO ne lui demande pas de déclarer M. [L] inapte à son poste de travail mais - seulement - de désigner le médecin inspecteur territorialement compétent ou à défaut un expert judiciaire.

Or la contestation prévue à l'article L.4624-7 du code du travail doit tendre au prononcé par le conseil des prud'hommes statuant en la forme des référé d'une décision judiciaire d'aptitude ou d'inaptitude se substituant à l'avis du médecin du travail, le cas échéant après l'organisation d'une mesure d'instruction.

Cette procédure n'est donc pas une mesure d'instruction pré-contentieuse du type de celle prévue à l'article 145 du code de procédure civile.

La Cour de cassation a d'ailleurs jugé qu'il résulte des articles L.4624-7 et R.4624-42 du code du travail que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis en rappelant qu'il 'substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction'

(cf. Cass. Soc., 7 décembre 2022, pourvoi n° 21-17.927).

Et dans un arrêt ultérieur, elle a cassé un arrêt après avoir estimé qu'une cour d'appel avait méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les deux textes susvisés pour avoir annulé l'avis du médecin du travail qui avait déclaré une salariée inapte au poste de gommeuse (cela après avoir constaté que, compte tenu de la référence erronée au poste occupé portée par le médecin du travail sur son avis d'inaptitude et de l'absence d'élément pertinent dans la réponse qu'il apporte aux interrogations de la salariée en éludant toute référence à la nature de l'emploi occupé ayant fait l'objet de l'étude de poste, l'avis d'inaptitude litigieux est manifestement irrégulier) alors qu'il lui appartenait de substituer à cet avis sa propre décision après avoir le cas échéant ordonné une mesure d'instruction (cf. Cass. Soc., 25 octobre 2023, pourvoi n° 22-18.303).

Ainsi, en l'absence de demande de prononcé d'une décision d'inaptitude, les prétentions de la société MCO tendant au simple prononcé d'une mesure d'instruction confiée au médecin inspecteur ou à un expert judiciaire qui ne remplit d'ailleurs pas les conditions de l'article 145 du code de procédure civile, ne peuvent être accueillies.

Surabondamment, la cour constate que l'employeur ne justifie pas du fait qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé par M. [L] ne serait possible et il n'allègue même pas que ce salarié serait dépourvu de toutes capacités résiduelles. Au contraire, la société MCO se réfère à l'avis du médecin du travail datant du mois de septembre 2023 faisant état de ces capacités résiduelles.

Il est manifeste, au vu des explications des parties et des pièces versées aux débats qu'il s'agit uniquement pour l'employeur de proposer des aménagements destinés à éviter à M. [L] de porter des charges de plus de 5 kg, à défaut de penser à adapter son poste de travail, voire à penser transformation de poste.

La cour confirmera donc l'ordonnance qui a rejeté le recours de cette société.

Sur les autres demandes :

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, la société MCO supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à M. [L] une indemnité au titre des frais qu'il a exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe et dans les limites de sa saisine :

- Rejette les demandes de la société MCO tendant à voir écarter des débats les pièces adverses n° 6, 7, 8 et 9 et les conclusions qui y font référence et à obtenir le paiement de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée ainsi qu'au titre d'un vol de documents ;

- Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'il a rejeté la demande de désignation du médecin inspecteur territorialement compétent, à défaut d'un expert judiciaire spécialisé en médecine du travail, avec notamment pour mission de dire si l'état de santé de M.[J] [L] et les réserves émises sur l'avis d'aptitude du 7 juillet 2023 lui permettent d'exercer la fonction de régisseur, ainsi qu'en ses dispositions accessoires relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Y ajoutant,

- Condamne la société MCO à payer à M.[J] [L] la somme de 2.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- Condamne la société MCO aux dépens d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-2
Numéro d'arrêt : 23/12280
Date de la décision : 28/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-28;23.12280 ?
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