COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 28 JUIN 2024
N° 2024/183
Rôle N° RG 21/08353 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHSM2
S.A.S. CLINIQUE [3]
C/
[L] [UA]
Copie exécutoire délivrée
le :
28 JUIN 2024
à :
Me Patricia FONTAINE avocat au barreau de MARSEILLE
Me Julie BOUCHAREU avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 10 Mai 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01675.
APPELANTE
S.A.S. CLINIQUE [3], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Patricia FONTAINE, avocat au barreau de MARSEILLE, Me Valérie BATIFOIS, avocat au barreau de PARIS
INTIME
Monsieur [L] [UA], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Julie BOUCHAREU, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère
Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juin 2024
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [L] [UA] a travaillé en qualité d'apprenti infirmier au sein de la clinique [3] du 1er décembre 2007 au 30 novembre 2009.
Par contrat de travail à durée indéterminée du 5 novembre 2009, Monsieur [UA] a été engagé par la clinique [3] en qualité d'infirmier à compter du ler décembre 2009 et affecté au service réanimation.
Au dernier état, la rémunération était de 1.946 euros de salaire fixe outre diverses primes notamment une prime réanimation d'un montant de 347 euros.
Par lettre du 14 mars 2019, Monsieur [UA] a été convoqué a un entretien préalable à une mesure de licenciement fixée le 25 mars suivant et mis à pied à titre conservatoire.
La lettre de convocation entretien préalable a été adressée par courrier et remise en main propre le 18 mars 2019.
Par lettre recommandée du ler avril 2019, Monsieur [UA] a été licencié pour faute grave.
Par requête du 12 juillet 2019, Monsieur [L] [UA] a saisi le conseil des prud'hommes de Marseille aux fins de contester son licenciement, paiement d'un rappel de salaire pendant la période de mise à pied et solliciter indemnisation de ses préjudices liés à la rupture de son contrat de travail.
Par décision du 10 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Marseille a jugé le licenciement de Monsieur [UA] sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué les sommes suivantes:
- 1.573,75 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied,
- 157,37 euros à titre de congés payés sur mise à pied,
- 8026,58 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 5.456,12 euros à titre de préavis,
- 545,61 euros à titre de congés payés sur préavis,
- 15.000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 4 juin 2021, la Clinique [3] a interjeté appel de cette décision.
La clinique [3] demande à la cour, suivant conclusions notifiées par voie électronique le 3 septembre 2021 de :
lNFIRMER la décision dont appel,
En conséquence,
Juger que le licenciement de Monsieur [UA] est fondé sur une faute grave,
Débouter Monsieur [UA] de toutes ses demandes,
Le condamner à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
Juger que le licenciement de Monsieur [UA] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
A titre infiniment subsidiaire,
Juger que Monsieur [UA] n'est pas fondé à solliciter une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse supérieure à trois mois salaire.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 octobre 2021, Monsieur [L] [UA] demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Marseille le 10 mai 2021 en ce qu'il a :
-dit et jugé que le licenciement ne repose sur aucune faute grave, ni cause réelle et sérieuse,
-condamné la Société Clinique [3] à lui verser les sommes suivantes :
- la somme brute de 1.573,75 euros à titre de rappel sur salaires durant la mise à pied conservatoire dont il a fait l'objet, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,
-la somme brute de 157,37 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,
-la somme nette de 8.026,58 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,
- la somme brute de 5.456,12 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,
- la somme brute de 545,61 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,
INFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Marseille le 10 mai 2021 en ce qu'il a :
-condamné la Clinique [3] à lui verser la somme de 15.000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
-débouté M. [UA] du surplus de ses demandes.
Statuant à nouveau,
CONDAMNER la Société Clinique [3] à lui verser les sommes suivantes :
-la somme de 30.000,00 euros à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
-la somme de 5.000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour abus de droit et circonstances vexatoires, avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
CONDAMNER la société Clinique [3] à lui remettre, sous astreinte de 150,00 euros par jour de retard à compter du 10 eme jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir, les bulletins de salaires relatifs aux condamnations ci-dessus à caractère salarial, ainsi qu'une attestation Pôle emploi, en tenant compte, un solde de tout compte et un certificat de travail (articles L. 131-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution),
ENJOINDRE en outre, sous astreinte identique, la société Clinique [3] d'avoir à régulariser sa situation auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations détaillées sur les bulletins de salaire qui lui ont été remis (articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution),
FAIRE application de l'article 1154 du Code civil et dire que les intérêts de retard seront capitalisés année par année et qu'ils produiront eux-mêmes des intérêts,
CONDAMNER encore la société Clinique [3] à lui payer la somme de 3.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONSTATER en tant que de besoin, que la moyenne mensuelle des derniers salaires, s'élève à la somme brute de 2.441,24 euros,
CONDAMNER la société Clinique [3] à supporter les entiers dépens d'instance et d'appel.
La procédure a été clôturée suivant ordonnance du 13 mai 2024.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur le licenciement pour faute grave
La clinique [3] critique le jugement du conseil de prud'hommes qui n'a pas retenu la faute grave et dit le licenciement de Monsieur [L] [UA] sans cause réelle et sérieuse. Elle fait valoir que les premiers juges ont minimisé les faits reprochés au salarié, par ailleurs établis par les éléments qu'elle produit, ainsi que minimisé leurs conséquences tant sur les collègues de l'intimé, que sur le service de réanimation de la clinique. Elle expose que Monsieur [L] [UA] a reconnu avoir aidé ses collègues, [E] [DT] et [M] [N], à enrouler dans un sac à linge et scotcher au sol, un autre salarié, Monsieur [E] [B], puis l'avoir photographié, la photo ayant été diffusée sur whatsapp avec la légende 'd'après vous qui est cette serpillière ''; que les trois salariés, dont deux n'ont pas contesté leur licenciement pour faute grave, ont laissé croire à Monsieur [E] [B] qu'ils allaient le jeter par la fenêtre du première étage; que les faits se sont déroulés le week end du 9 et 10 mars 2019 pendant ses heures de travail, au sein du service de réanimation et que la clinique ne peut tolérer ce comportement puéril et non professionnel monopolisant 4 personnes pendant le temps d'une garde, alors que les infirmiers et les aides soignants doivent pouvoir réagir à tout moment auprès des patients. Elle ajoute que ce 'jeu' inadmissible a été préjudiciable au fonctionnement même de l'équipe, les soignants intervenant lors de la relève (Mme [W], Mme [R]) ayant constaté l'état déplorable du service et qu'il a également eu des conséquences pour Monsieur [E] [B], qui a bien, dans un premier temps, été choqué, étant précisé qu'il avait confié à Mme [R], délégué du personnel, qu'il subissait un harcèlement de la part de ses coéquipiers [L] [E] et [M],même s'il a préféré dire à ses collègues a posteriori qu'il n'était pas à l'origine de la plainte.
La clinique [3] soutient encore qu'il est établi par les attestations qu'elle produit et reconnu par l'intimé lui même, qu'il a tenu des propos homophobes à l'endroit de Monsieur [C], manipulateur radio en le traitant de 'pédé' et qu'elle ne peut tolérer ce comportement discriminatoire envers un autre salarié.
Elle ajoute qu'il est également établi que l'intimé a tenu des propos obscènes à l'égard du personnel féminin, comme en attestent Mesdames [F], [G] et Monsieur [B] et qu'il n'a en outre, pas réagi, lorsqu'il a été témoin de propos et comportements déplacés et les a, au contraire encouragés; que ce comportement, qu'il reconnait en le minimisant, est de nature à caractériser un harcèlement sexuel et justifie également le licenciement pour faute.
Enfin, la clinique [3] reproche au conseil de prud'hommes de ne pas avoir retenu le grief de la mise à l'écart de Mme [G] et de l'attitude déplacée à caractère sexuel de Monsieur [UA] et ses collègues, envers cette dernière, alors qu'ils sont attestés par le témoignage de Mme [R] et de Monsieur [H], médecin responsable de la réanimation de la clinique, Mme [G] ayant déclaré à ce dernier qu'elle était démolie par un sentiment d'angoisse et d'impuissance et ne voulait plus revenir travailler à cause du harcèlement subi.
Monsieur [L] [UA] sollicite la confirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes ayant conclu au licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il soutient que l'employeur a décidé de le licencier alors qu'il présentait plus de 12 ans d'ancienneté, pour des faits qui en réalité, ne relèvent que d'une plaisanterie entre collègues de travail, s'apparentant à un 'bizutage'.
S'il reconnait avoir participé aux faits, il estime qu'il n'est pas établi qu'il aurait 'tenu' Monsieur [B] alors qu'il se débattait, ni qu'il aurait déclaré vouloir jeter Monsieur [B] par la fenêtre.
Il affirme que Monsieur [E] [B], principal intéressé, n'a pas été choqué par cette plaisanterie à laquelle il s'est livré 'bien volontairement' (cf SMS adressé à Monsieur [DT] et lui même après les faits); que son témoignage semble dicté par l'employeur car écrit à la troisième personne; que les premiers juges ont relevé à juste titre qu'il n'y avait jamais eu de mise en danger et que le salarié pouvait en toute liberté refuser de se prêter au jeu, lequel s'est déroulé, non pas dans les box où séjournent les patients, mais à l'office, lieu de détente pour essayer de 'mettre de côté la pression' du travail. L'intimé souligne que s'il y avait eu dénonciation de faits de harcèlement de la part de Monsieur [B], comme l'indique Mme [R], il est surprenant qu'aucune enquête n'ait été réalisée par le CHSCT. Il indique que les attestations versées aux débats par la clinique ont été rédigées pour les besoins de la procédure.
Monsieur [UA] fait encore valoir que le fait de ne pas avoir adressé la parole à sa collègue Mme [G] durant une seule journée ne présente aucun caractère de gravité et n'a eu aucune incidence sur le fonctionnement du service; qu'il n'a ni été témoin ni encore moins encouragé la tenue de propos et de comportement à caractère sexuel de la part de ses collègues [E] [DT] et [M] [N] envers Mme [U] [G], chacun étant affecté à un box différent. Il se déclare choqué des accusations de cette dernière concernant les propos déplacés qu'il lui aurait tenus, cette dernière étant un an plus tôt, invitée à son mariage et la lettre de licenciement reprenant exactement les mêmes termes que celle de Monseur [DT] 'ce serait bien si tout le monde pouvait être comme [U], fine avec un beau cul et fraiche'. Il ajoute que l'attestation de Monsieur [H] n'est pas probante car il n'a pas été directement témoin des faits et ne le vise pas directement.
L'intimé expose encore que le fait d'avoir traité Monsieur [A] [C] de 'pédé' est repris exactement de la même manière dans sa lettre de licenciement, comme dans celle de Monsieur [DT], alors que Mme [G] n'a évoqué ce propos que pour ce dernier. Il soutient, en tout état de cause, que s'il est dépeint par certains salariés comme une personne irrespecteuse envers les femmes, il verse aux débats de nombreux témoignages le décrivant comme un infirmier compétent et investi, de sorte que la clinique lui a même octroyé une promotion en 2017 en qualité de cadre infirmier. Il fait valoir, en tout état de cause, que la sanction prise est disproportionnée.
***
L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est à dire pour un motif existant, exact, objectif et revêtant une certaine gravité rendant impossible, sans dommages pour l'entreprise, la continuation du contrat de travail et nécessaire le licenciement.
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant d'un contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le temps du préavis.
En application des dispositions des articles L 1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 alinéa 1 du code du travail, la reconnaissance de la faute grave entraîne la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement.
L'employeur doit rapporter la preuve de l'existence d'une telle faute et le doute profite au salarié.
Enfin, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :
- Le 10 mars 2019, vous avez enroulé Monsieur [E] [B], infirmier, dans un sac à linge, puis l'avez fait rouler sur le sol et scotché sur le sol de la Réa devant le PC. Monsieur [E] [B] était recouvert par des draps sur la totalité de son visage, une ouverture ayant été réservée pour lui permettre de respirer par la bouche.
Lors de l'entretien, vous avez confirmé avoir aidé vos collègues [E] [DT] et [M] [N], car Monsieur [E] [B] se débattait.
-Le 10 mars 2019, vous vous êtes également amusé à faire croire à Monsieur [E] [B] que vous alliez le jeter par la fenêtre de l'office, situé au premier étage.
Lors de l'entretien, vous avez précisé qu'il s'agissait de la fenêtre du box 8, en RDC, alors que Monsieur [B] confirme que c'est bien de la fenêtre de l'office qu'il s'agissait.
- Le 10 mars 2019, vous avez mis à l'écart Madame [U] [G], infirmière en CDD, en ne lui adressant pas la parole de la journée,
Par ailleurs, vous n'avez pas réagi lorsqu'elle subissait les paroles déplacées de Monsieur [DT] ou lorsque ce dernier ou Monsieur [N] ne lui apportait pas l'aide dont elle avait besoin.
Madame [U] [G], lors de sa relève, s'est plainte à Madame [S] [R], membre du CHSCT et aide - soignante en réanimation de votre attitude et de celle de Messieurs [DT] et [N].
Elle a en outre annulé toutes les vacations programmées et ne veut plus travailler dans notre établissement.
Au cours de l'entretien, vous avez reconnu ne pas lui avoir adressé la parole de toute la journée car elle vous avait fait une remarque sur la manière dont vous aviez traité un patient.
Par ailleurs, nous avons appris que vous teniez régulierement des propos à connotation sexuelle au personnel féminin pour amuser vos collegues et que vous teniez des propos homophobes à l'encontre de Monsieur [A] [C], manipulateur en électroradiologie en l'appelant le ' pédé'.
Lors de l'entretien, vous avez estimé ne pas tenir de propos déplacés à l'égard de vos collègues féminines et vous avez exprimé le fait que 'dans la bouche d'un marseillais, cette injure n'en n'était pas une', le terme de 'pédé' afin de la banaliser, tout en confirmant ce propos, qui serait motivé par le manque de compétences du manipulateur.
Vos explications ne nous ayant pas permis de modifier notre appréciation des faits, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave au regard des agissements ci-dessus énoncés, ceux-ci rendant impossible votre maintien dans l'entreprise.
En effet, nous ne pouvons tolérer que vous portiez atteinte à la dignité et a la sécurité de Monsieur [B], qui est encore très choqué à ce jour ou encore accepter les plaisanteries douteuses à connotation sexuelle à l'égard du personnel féminin du service réanimation ni la tenue de propos homophobes à l'égard de l'un de vos collègues de travail ou encore que Madame [G] décide de ne plus travailler dans le service réanimation à cause de vos brimades.En outre, ces agissements commis pendant le temps de travail, en service de réanimation, accueillant des patients vulnérables, sollicitant de la part des équipes de soins, toute l'attention nécessaire à la qualité de prise en charge, sont inadmissibles, et préjudiciables au fonctionnement même de l'équipe et du service.'
Il est ainsi reproché à Monsieur [UA] le 10 mars 2019:
-d'avoir aidé ses collègues ([E] [DT] et [M] [N]) à enrouler un autre collègue infirmier ([E] [B]) dans un sac de linge, la tête entièrement recouverte ne lui laissant qu'un intervalle pour respirer et l'avoir scotché sur le sol de la Réa et s'être amusé à lui faire croire qu'il allait le jeter par la fenêtre,
-de s'être abstenu d'adresser la parole à sa collègue [U] [G] infirmière en CDD et de ne pas être intervenu pour faire cesser les paroles déplacées proférées par ses deux collègues à l'attention de cette dernière,
-d'avoir tenu des propos à connotation sexuelle au personnel féminin pour amuser ses collègues et des propos homophobes à l'encontre de Monsieur [A] [C], manipulateur en électroradiologie en l'appelant le ' pédé'.
A l'appui de ses griefs, la clinique [3] produit :
-deux photographies couleurs :
-l'une montrant deux personnes en tenue de travail (blouses et chaussons) à l'intérieur d'une enceinte hospitalière, en train de maintenir et scotcher une troisième personne enroulée dans un sac à linge, avec le visage recouvert à l'exception d'une partie lui permettant de respirer
-l'autre montrant la même personne ligotée à terre, avec l'ajout du texte suivant 'd'après vous, qui est cette serpillère '';
-le compte-rendu d'entretien préalable de Monsieur [UA] rédigé par Monsieur [L] [T], délégué du personnel et conseiller du salarié, en présence de Mme [Z] [J], DRH et Mme [D] [O], cadre du service réanimation lequel relate :
'Les faits qui lui sont reprochés se déroulent les gardes du week-end du 9 et 10 mars 2019 de jour en réanimation.
1. Le premier élément est la participation à un 'jeu' à l'encontre de Monsieur [B] [E], ce dernier a été entouré d'un drap puis mis dans un sac de linge entouré de sparadrap industriel jusqu'à ce que seulement le visage en sorte puis roulé par terre. Monsieur [UA] explique ne pas être à l'origine de ces actes. Ils sont en grande partie réalisés par 2 aide-soignants du service après une taquinerie verbale sur le travail 'pour une fois que les aides-soignants travaillent et que les infirmiers sont assis'. Monsieur [UA] reconnaît avoir à un moment aider ses collègues et surtout laisser faire.'
Il ajoute 'le soir de la relève un des 2 aide-soignant évoquent la possibilité (selon les témons de la direction) de faire passer Mr [B] par la fenêtre du premier étage de la réanimation 'toujours pour rire'. Monsieur [UA] ni avoir cautionner et dit même avoir exprimé son désaccord par la phrase 'maintenant on arrête les co...'
2. Le second élément est d'avoir tenu des propos déplacés à caractère sexuel et fait des gestes obscènes à l'encontre de Mme [G] [U] IDE vacataire qui a depuis annulé toutes ses vacations sur l'établissement. M.[UA] nie tout propos ou gestes à l'encontre de Mme [G], infirmière qu'il a formée et avec qui il était ami. Il explique que à la suite d'un désaccord professionnel en début d'un week-end (Mme [G] est venue lui dire qu'elle ne trouvait pas adéquate sa prise en charge d'un patient extrèmement difficile sous la responsabilité de M [UA]), il n'a plus adressé la parole que pour des motifs de travail le reste du temps. Pour le reste, il a continué à discuter avec ses collègues et il reconnait avoir pu si on lui reproche des propos, avoir fait des blagues à connotation grossières et 'masculines' pour décompresser du travail difficile, mais en aucun cas à destination de Mme [G].
3.Le troisième point est la tenue de propos homophobes à l'encontre d'un manipulateur en radiologie hors de la présence de ce dernier. Monsieur [UA] nous explique avoir pu utiliser des termes qui peuvent être qualifiés d'homophobes mais se justifie en expliquant qu'en cette occasion ils ne l'étaient pas ils relevaient du langage 'marseillais' lorsque l'on exprime une irritation envers une autre personne. En effet, Monsieur [UA] nous explique que le manipulateur en radiologie avait encore une fois désorganisé le service par sa venue tardive un dimanche matin';
-un courrier intitulé 'observations de la direction sur le contenu du compte-rendu d'entretien rédigé par Monsieur [T]' signé par Mme [J], DRH qui observe que le conseiller avait initalement annoncé qu'il ne ferait pas de compte-rendu et qu'il l'a rédigé postérieurement à la demande de l'intimé. Mme [J] indique que :
-Monsieur [L] [UA] a indiqué avoir 'aidé' ses collègues à enrouler de draps Monsieur [E] [B] car celui-ci se débattait, dans la journée du 10 mars 2019,
-Au cours de cette journée, Monsieur [L] [UA] et ses collègues se sont amusés à faire croire à Monsieur [E] [B] qu'ils allaient le jeter de la fenêtre de l'office. Monsieur [UA] a indiqué qu'il s'agissait de la fenêtre du box 8. Plusieurs témoins dont Monsieur [B] ont confirmé qu'il s'agissait de celle de l'office au premier étage;
-le compte-rendu d'entretien préalable de Monsieur [M] [N] rédigé par Monsieur [L] [T], conseiller du salarié, qui confirme avoir été aidé par Monsieur [E] [DT] et Monsieur [L] [UA] pour enrouler Monsieur [B] dans un sac à linge et l'avoir scotché sur le sol de la réa devant le PC, Monsieur [E] [B] se débattant. Il indique également que les photos ont été prises par Monsieur [L] [UA] et partagé sur un groupe whatsapp de plusieurs salariés du service de réanimation;
-le compte-rendu d'entretien préalable de Monsieur [E] [DT] rédigé par Monsieur [L] [T], conseiller du salarié, qui confirme également que les photographies de la scène concernant Monsieur [B] ont été prises par Monsieur [L] [UA];
-le planning des journées de Monsieur [L] [UA] les 9 et 10 mars 2019 ainsi que son bulletin de paie du mois de mars 2019,
-l'attestation de Mme [SA] [F], collaboratrice de travail à la clinique [3] qui témoigne 'Tout le personnel subit des propos sexistes voir à caractère sexuel.J'ai entendu dire [L] aux infirmières ou aide soignante 'est ce que tu aimes la sodomie!' 'Montre moi tes seins' (...) Dimanche 9 mars, [L] et [E] ont attrapé [E] [B], le mettre dans un sac à linge, le roulé et le scotché sur le sol de la réa devant le PC. Vers 16h30 je les ai entendu comploter pour attraper [E] [B] et pour le passer pour la fenêtre...[L] et [E] ont dit que c'est pour rigoler.' Ils traitent ([L] et [E]) le manip radio de 'pédé'. J'avais entendu [P] [X], [ZR] [ED] et [U] [G] se plaindre de [E] et [L], de comportement à caractère sexuels répétés, gestes obscènes derrière elles pour faire rire leurs collègues masculins. J'ai reçu le message de [U] [G] ne supportant plus ces situations intimidantes et offensantes. Elle préfère ne plus venir travailler et perdre de l'argent plutôt que de subir ce climat d'humiliation.'
-une première attestation de Mme [S] [R] du 14 mars 2019, déléguée du personnel, qui relate:Monsieur [B] à plusieurs reprises m'a fait des confidences sur les brimades qu'il subit pendant ces heures de travail de la part de ses coéquipiers [L], [E] et [M]. [E] [B] me fait remarquée qu'ils voudraient sous forme de plaisanterie le faire sortir par la fenêtre, lorsque je suis arrivée dans la cuisine de la réa le 10 mars 2019.
D'autre part [U] [G] au moment de la relève au bord des larmes et complètement déprimée me demande si je fait toujours partie du CHSCT car elle voudrait savoir 'quand tout cela va cesser ''. 'Tout ça lui dis-je'' Elle répond 'oui, ces attitudes détestables de méchancetés', ils ne m'adressent même plus la parole et pour que mon aide soignant m'aide c'est très compliqué, les trois ensemble, [L], [E] et [M] c'est infernal et je sais pas si je viendrais mercredi et jeudi, c'est trop dur'. D'autre part, [E] [B] pense et me dit que [L] est le plus méchant et les autres des suiveurs.'
-une deuxième attestation de Mme [S] [R] le 17 janvier 2020 qui indique :
'avoir recu oralement et a plusieurs reprises des allégations de harcèlement moral et physique de la part de monsieur [B] [E] infirmier en poste à la réanimation.
A ses dires des actes de harcèlement étaient le fait des agissements de monsieur [UA] [L] également infirmier. Les agissements consistaient en des brimades orales et physiques de type bizutage. Les allégations de Monsieur [B] [E] m'ont été faite en présence de Madame [W] qui pourra par ailleurs en attester.
Monsieur [B] [E] a fait part de ses souffrances psychologiques en rapport avec les évènements indésirables qui m'ont amené en tant que membre du CHSCT d'en informer ma direction. Lors d'une explication avec monsieur [E] [B] sur le fait qu'il nous laisse un service déplorable les larmes aux yeux celui-ci me dire : ' tu ne sais pas ce que sait de travailler avec eux ' Une 'MEUTE' [L] est le méchant et le meneur !! Et j'ai peur que l'on dise que je fais parti de cette meute'Ces propos ont été tenus au moment de la relève le 9 mars 2019. Inquiète, je suis revenue le dimanche soir vers 18 heures, à ce moment [L] [UA] m'a montré une vidéo montrant sébastien dans un sac de linge Elis 'Regarde c'est sébastien [B]'.
-l'attestation de Mme [Y] [W] qui témoigne 'avoir entendu M [B] sébastien tenir les propos 'Vous ne savez pas ce que sait de travailler avec les trois, c'est une véritable meute, j'ai peur de devenir comme eux' ([K] est le chef méchant), propos adressés à [S] [R] lors d'une discussion lors de la relève où il a été constaté par notre équipe de nuit un service déplorable'.
-l'attestation de Monsieur [E] [B], infirmier en réanimation, en date du 15 mars 2019 qui déclare: 'j'ai été témoin que [L] [UA], [E] [DT] et [M] [N] ont enroulé [E] [B] dans un sac de draps et l'ont attaché le 10 mars 2009 2019 pour s'amusé. Le même jour ils ont comploter pour le jeter par la fenêtre de l'office pour s'amuser.
[E] et [L] ont des propos obscènes envers les infirmières et les étudiantes infirmières et à connotation sexuelle ('tu aimes la sodomie', tu as un joli petit cul').
J'ai était témoin que les aides-soignants n'aidaient pas les infirmières et infirmiers dans leurs tâches. Je suis témoin que les jeux et propos obscènes amusaient [L] et [E]'.
-l'attestation de Madame [U] [G], infirmière, qui déclare notamment 'Lors d'un transfert de lit d'un patient en surpoids [L] [UA] a dit au patient qu'à cause de lui, il se faisait mal au dos; qu'il n'avait pas à manger autant pour être aussi gros et il a ajouté que se serait bien si tout le monde pouvait être comme [U] fine avec un bon cul et fraîche '.
-l'attestation en date du 16 décembre 2019 de Monsieur [I] [H], médecin réanimateur qui énonce ' En tant que responsable de la réanimation de la clinique [3] je signale ici un fait auquel j'ai été confronté. ll concerne trois membres permanents d'une même équipe de cette réanimation deux aides-soignants et un infirmier ([L] [UA]).
ll s'agit d'un harcèlement sur la personne de [U] [G] cette personne, infirmière, diplômée d'Etat, réalisait régulierement des remplacements dans la réanimation. Elle était considéree comme faisant partie du service. Elle a mis subitement fin à sa collaboration. Je l'ai contactée pour comprendre le pourquoi de son malaise. Elle m'a précisé être victime, depuis plusieurs semaines, d'un harcèlement récurrent systématiquement réalisé en l'absence de toute personne dirigeante.
L'entretien que j'ai eu m'a révélé une personne en pleurs, dévastée, démolie par un sentiment d'angoisse et d'impuissance.
Ce même sentiment a été évoqué par un autre infirmier qui ne désire plus donner de suite au vu de la lourdeur de l'ambiance nouvelle induite du fait de ce harcèlement et ses conséquences. J'ajoute qu'outre l'atteinte à la personne c'est le travail de l'ensemble d'une équipe soignante qui a été remise en cause '.
-sur les faits concernant Monsieur [E] [B]
Il résulte tant des photographies versées aux débats, que des compte-rendu d'entretien préalable de Messieurs [L] [UA], [E] [DT] et [M] [N], ainsi que des témoignages concordants de Monsieur [E] [B] et de Madame [SA] [F] que le week-end de garde des 9 et 10 mars 2019 Monsieur [E] [B], infirmier, a été enroulé par ses collègues, à titre de plaisanterie, dans un sac de linge et scotché avec un sparadrap, la tête recouverte ne laissant qu'un espace pour lui permettre de respirer, puis a été roulé par terre, ces collègues ayant ensuite comploté pour lui faire croire qu'ils allaient le jeter par la fenêtre de l'office pour s'amuser.
Si Monsieur [L] [UA] ne reconnait pas avoir tenu Monsieur [E] [B] lorsqu'il se débattait, ni avoir été à l'initiative de cette action, il reconnait y avoir participé, et avoir 'laissé faire', étant précisé que Monsieur [B] le désigne comme étant l'un des trois participants aux côtés de Messieurs [E] [DT] et [M] [N] et que ces derniers ont tous deux déclarés, lors de l'entretien préalable à leur licenciement respectifs, que Monsieur [UA] était l'auteur de la photographie prise et diffusé sur le groupe whatsapp interne au service avec la mention 'd'après vous, qui est cette serpillère ''.
De même, si l'intimé conteste avoir laissé croire à Monsieur [E] [B] qu'il allait le passer par la fenêtre, le principal intéressé le désigne, au même titre que ses deux collègues aide-soignants, ce qui est corroboré par le témoignage de Mme [SA] [F], présente sur les lieux qui indique 'Vers 16h30 je les ai entendu comploter pour attraper [E] [B] et pour le passer pour la fenêtre...[L] et [E] ont dit que c'est pour rigoler'.
Il ne peut être tiré argument à ce titre, pour contester le caractère probant du témoignage de Monsieur [B] et prétendre qu'il aurait été 'dicté' par l'employeur, de ce qu'il décrit les faits à la troisième personne, cet élément pouvant tout aussi bien signifier la volonté de ce dernier de se distancier par rapport à la violence des faits vécus.
Monsieur [UA] soutient qu'il s'agissait d'une plaisanterie qui s'est déroulée, non pas dans les box auxquels les soignants sont affectés, mais à l'office (tisanerie), lieu de détente et d'échange pour essayer de mettre de côté la pression du travail; que les faits n'ont eu aucun effet sur l'organisation du service de réanimation et que Monsieur [B] s'est prêté volontairement au jeu et n'a pas été traumatisé, tel qu'il ressort des SMS qu'il lui a ensuite adressé, ainsi qu'à Monsieur [E] [DT].
A ce titre, l'intimé verse notamment aux débats :
-l'extrait de conversation SMS entre Monsieur [E] [B] et Monsieur [DT] 'Alors je ne sais pas ce que tu a dit a [V] ou ce que vous vous êtes dit tout les trois mais j'ai remarquer que vous ne répondez plus a personne et a moi également alors j'ai ma conscience tranquille mais je vais quand même vous le dire si vous en doutez je n'es pas porter plainte contre vous ou fait quoi que ce soit.Même si tu ne me répond pas à ce message c'est pareil pour [K] et [M]. Je voulais juste que vous le sachiez'
-l'extrait de conversation SMS entre Monsieur [E] [B] et lui même ([L] [UA]) 'je comprends l'envis que tu as que justice soit faite mais je ne suis pas sur que d'aller en justice face à la clinique va t'apporter quelque chose. Mais bon c'est mon avis. On sait tout dit sache que moi je sais ce qui c'est réellement passé et que je ne suis pas traumatisée'
-plusieurs photographies de l'équipe des aide-soignants, médecin, infirmiers et manipulateur radio du service de réanimation de la clinique [3] (janvier et février 2019) apparaissant ensemble et souriants.
La cour observe que si Monsieur [E] [B] a pu, dans un second temps, écrire à ses anciens coéquipiers licenciés qu'il n'était pas à l'origine de la plainte et qu'il n'était pas 'traumatisé', cela n'empêche pas le fait qu'il a pu, dans un premier temps, être affecté par les faits litigieux. En effet, ceux ci s'incrivent dans un contexte de brimades orales et physiques qu'il a déclaré avoir subies de la part du trio composé de Messieurs [UA], [DT] et [M], rapportées à Mme [R], déléguée syndicale, comme elle l'indique dans son témoignage, corroboré par celui de Mme [W], Monsieur [UA] étant considéré par Monsieur [B] comme le meneur du groupe.
Il a été par ailleurs relevé par Madame [R] et Mme [W] prenant la relève de la garde du service réanimation, que le service a été laissé dans un état déplorable.
En outre, il convient d'observer que, même à supposer que Monsieur [B] se soit prêté au 'jeu' et ne se soit pas 'débattu' comme l'indique l'employeur, le fait d'enrouler une personne dans un drap ou un sac à linge, en le scotchant et en ne laissant qu'un trou pour la bouche, en le roulant au sol et en prenant une photographie de la scène, est manifestement humiliant pour cette personne et constitue une atteinte à sa dignité.
Ce type de 'jeu dangereux' occupants quatre salariés de garde (deux infirmiers et deux aide-soignants) pendant leur temps de travail, au sein d'un service de réanimation où ils sont amenés à pouvoir intervenir en urgence auprès de patients particulièrement vulnérables, est en lui même particulièrement inadapté et justifie une sanction de la part de l'employeur.
-sur les propos homophobes
Il est également reproché à Monsieur [UA] d'avoir utilisé le terme 'pédé' pour désigner Monsieur [A] [C], manipulateur en électroradiologie.
Ce grief est établi par le témoignage de Mme [F] qui précise 'ils traitent ([L] et [E]) le manip radio de 'pédé' et n'est pas contesté par l'intimé, qui en minimise la portée lors de son entretien préalable.
Le fait qu'il soit également prêté à Monsieur [E] [DT] les mêmes propos homophobes n'enlève rien à la démonstration de ce grief à caractère discriminatoire.
-sur la tenue de propos obscènes à l'égard du personnel féminin
Ce grief est attesté par le témoignage de Mme [F] qui indique notamment 'j'ai entendu [L] dire aux infirmieres et aide-soignantes :'est- ce que tu aimes la sodomie' 'montre moi tes seins'. J'avais entendu [P] [X], [ZR] [ED] et [U] [G] se plaindre de [E] et [L] de comportement à caractère caractère sexuels répétés, gestes obscènes derrière elles pour faire rire leurs collègues masculins, corroboré par celui de Monsieur [B] '[E] et [L] ont des propos obscènes envers les infirmieres et les étudiantes infirmières et à connotation sexuelle ( tu aimes la sodomie, tu as un jolie petit cul).Je suis témoin que ces jeux et propos obscènes amusaient [L] et [E].'
Monsieur [UA] ne conteste pas ces faits selon le compte rendu d'entretien préalable à son licenciement, mais en minimise la gravité évoquant des ' blagues à connotations grossières et masculines' pour décompresser d'un travail difficile et estime, dans ses conclusions, qu'elles relèvent de la 'vie normale d'un service hospitalier'.
-Sur les faits concernant Mme [G]
Si Mme [G] décrit dans son témoignage de nombreux faits de harcèlement sexuel commis sur sa personne par Monsieur [E] [DT] (propos sexués, gestes équivoques), elle évoque également un fait précis attribué à Monsieur [L] [UA] en ces termes 'Lors d'un transfert de lit d'un patient en surpoids, [L] [UA] a dit au patient qu'a cause de lui il se faisait mal au dos qu'il n'avait pas à manger autant être aussi gros et il a ajouté que se serait bien si tout le monde pouvait être comme [U] avec un bon cul et fraiche'.
Elle s'est également plainte auprès de Mme [R], lors de la relève du 10 mars 2019, que [E], [L] et [M] ne lui adressaient plus la parole, précisant 'les trois ensemble, c'est infernal'.
Mme [F] déclare avoir reçu un message de [U] [G] ne supportant plus ces situations offensantes et lui a déclaré préférer ne plus venir travailler et perdre de l'argent plutôt que de subir ce climat d'humiliation, ce qui a été confirmé par Mme [R] qui a retrouvé Mme [G], au moment de la relève, déprimée et en pleurs et par l'attestation de Monsieur [H] qui a également témoigné du harcèlement récurrent subi de la part des trois membres de l'équipe, deux aides soignants et un infirmier ([L] [UA]), par la salariée, dévastée et démolie, qui lui a déclaré ne plus venir travailler.
Il est ainsi établi que Monsieur [UA] a mis à l'écart Mme [G] durant une journée et lui a tenu des propos à caractère sexuel inadaptés.
Le salarié se défend en indiquant que la sanction était disproportionnée au regard de l'absence de gravité des faits qui lui sont reprochés et au vu de ses douze années de fonction dans la clinique et verse aux débats, plusieurs attestations d'anciens collègues témoignant de son bon comportement et de son investissement dans son travail.
La cour observe à ce titre que le comportement antérieur de Monsieur [UA] n'empêche pas le fait qu'il ait pu participer, lors du week-end du 9 et 10 mars 2019, sur son lieu de travail, alors qu'il avait en charge la surveillance de patients en réanimation particulièrement fragiles, à des faits qui, même qualifiés de 'plaisanteries', portaient atteinte à la dignité et à la sécurité d'un de ses collègues, et qu'il ait tenu des propos discriminatoires à l'encontre d'un collègue et déplacés à l'endroit de ses collègues féminines, dans un contexte de harcèlement commis avec l'aide de deux autres membres de son équipe, Messieurs [DT] et [M].
Alors qu'elle est tenue de veiller à la santé de ses salariés au termes des dispositions de l'article L4121-1 et L4121-2 du code du travail et notamment prévenir les risques de harcèlement moral et sexuel au travail, ainsi que de garantir la sécurité des patients vulnérables hospitalisés au service de réanimation, la clinique [3] a pu valablement considérer que les faits reprochés à M [UA] étaient d'une gravité telle qu'elle ne pouvait le maintenir à son poste, même durant la durée du préavis.
En conséquence, il y a lieu de dire que le licenciement pour faute grave de M [UA], de même que la mise à pied conservatoire de l'intimée, préalable au licenciement, sont justifiés.
La décision du conseil de prud'hommes sera infirmée et M [UA] sera débouté de ses demandes formées au titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, de sa demande formée à titre d'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents et de sa demande d'indemnité légale de licenciement, ainsi que de sa demande de dommages et intérêts sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire.
Le salarié sera également débouté de sa demande de régularisation des documents de fin de contrat.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
L'équité commande d'infirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles et de condamner Monsieur [L] [UA] à payer à la clinique [3] une indemnité de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles en première instance et en cause d'appel.
Le salarié qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud'homale,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur [L] [UA] et la mise à pied du salarié sont justifiés,
Déboute Monsieur [L] [UA] de sa demande de rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et les congés payés y afférents,
Déboute Monsieur [L] [UA] de ses demandes d'indemnité de licenciement, d'indemnités compensatrice de préavis et congés payés y afférents, ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
Condamne Monsieur [L] [UA] à payer à la clinique [3] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Monsieur [L] [UA] aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE